Les raisons d’y croire : malgré le reconfinement, un monde plus responsable est bien en train d’émerger

Un article de Novethic, par Ludovic Dupin, le 30/10/2020.

Le retour du confinement est un coup dur pour tous les Français et les Européens. Au printemps, nous avions cru à un « monde d’après » mais nos espoirs semblent douchés. Relevons la tête ! À la faveur des nombreux appels à changer de modèles, les lignes ont bougé ces derniers mois : la Chine s’engage sur le climat, l’agroalimentaire se fait plus économe, le Mercosur est rejeté… Il y a « des raisons d’y croire » ! Et pendant tout ce confinement, Novethic vous montrera toutes ces bonnes initiatives.

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Le Covid-19 et le confinement ne mettent pas à l’arrêt la transition mondiale. Au contraire, elle l’accélère. @Niserin

La neutralité carbone en Chine, au Japon, en Corée du Sud

Trois des plus grandes économies s’engagent sur le climat. La Chine, le Japon et la Corée du Sud viennent d’annoncer un objectif de neutralité carbone, en 2060 pour la première, en 2050 pour les deux autres. Ce n’est pas un petit engagement pour des pays dont l’économie repose massivement sur le charbon. Le mix électrique de la Chine repose par exemple à 62 % de charbon. L’effort de ces pays motivera aussi les États-Unis de rattraper leur retard pris sous l’ère Trump que ce soit dès 2020 ou plus tard. Du côté de l’Europe, la zone la plus avancée sur le climat, on accroît aussi ses ambitions malgré la brutalité de la crise sanitaire. Dans un discours sur l’État de l’Union en septembre, la Présidente Ursula von der Leyen a défendu un objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 55 % d’ici 2030 par rapport à 1990, contre 40 % actuellement.

Des pétroliers qui changent de paradigme

La crise pétrolière, engendrée par la crise sanitaire mondiale, a forcé les majors a changé leur fusil d’épaule. Avec une demande en baisse et des prix faibles, plus question d’investir dans des méga-projets à la rentabilité limité. Le PDG de Total Patrick Pouyanné a ainsi expliqué que la production de pétrole de l’entreprise allait stagner voire même décliner d’ici 2030. Une révolution copernicienne ! Il ajoute : « Nous sommes dans le Top 5 des producteurs de pétrole, nous voulons être dans le Top 5 des énergies renouvelables ». Ce changement de paradigme est aussi endossé par BP. Dans son rapport annuel sur le monde de l’énergie, le groupe assure que, dans un scénario optimiste, la demande de pétrole ne se relèvera jamais de la chute causée par la crise sanitaire.

La France rejette le Mercosur au nom de l’environnement

C’était un symbole du monde d’avant. Depuis 20 ans, l’Europe et le Mercosur, constitué de pays sud-américains, négocient un des plus vastes encore de libre-échange jamais conclu. Et ce dernier pourrait ne pas voir le jour pour des raisons environnementales. La France a annoncé début septembre s’opposer en l’état au projet car la « déforestation met en péril la biodiversité et dérègle le climat », a fait valoir Jean Castex. Un rapport a en effet évalué que la hausse de 2 à 3 % de la production de viande bovine qui résulterait d’une plus grande ouverture des marchés des deux continents devrait conduire à une accélération de la déforestation annuelle de 5 % par an. Ce traité pourrait faire basculer l’Amazonie dans ce que les scientifiques appellent le « point de non-retour »

Vélo : la révolution en roulant

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C’est une des conséquences inattendues du Covid-19. En avril, à la sortie du confinement, des centaines de citoyens ont décidé d’enfourcher leur vélo pour éviter la promiscuité imposée dans les transports en commun. En Île-de-France près de 150 km de pistes cyclables ont été créées en six mois pour faire face à ce nouvel engouement qui a également l’avantage de lutter contre la pollution de l’air. Selon le Club des villes cyclables, sur les 70 collectivités qui ont créé des « coronapistes »  près de 80 % comptent les pérenniser. Le deuxième confinement pourrait asseoir encore plus cette nouvelle pratique dans les nouvelles habitudes de déplacement.

Le second souffle de la lutte contre le gaspillage alimentaire

Plus de 200 géants de l’agroalimentaire se sont engagés fin septembre à réduire de moitié le gaspillage alimentaire d’ici 2030. Parmi eux, des mastodontes comme Unilever, Mondelez, McCain ou encore Kellogg. Chaque grand groupe doit également convaincre 20 de ses fournisseurs de s’engager dans cette démarche. Si aujourd’hui encore, près d’un tiers de la nourriture produite dans le monde est gaspillée, de nombreuses startups se sont engagées dans cette lutte ces dernières années. En France, « Too good to go » a ainsi réussi à ce qu’une cinquantaine d’entreprises de l’agroalimentaire révisent l’affichage des dates de péremption. Ces dernières, peu compréhensibles, sont responsables de 20 % du gaspillage alimentaire dans les ménages.

L’Europe oriente clairement les investissements verts

Financer ce qui est vert et s’écarter de ce qui est brun. Tel est l’objet de la taxonomie européenne révélée en décembre dernier. Un travail de titan pour orienter les investisseurs à travers une liste de secteurs favorables au climat et à l’environnement Une première au monde qui fait des émules au Canada, en Russie, en Chine… « L’idée que l’Europe doit être cohérente et se doter des outils nécessaires pour mettre en œuvre la transition progresse. La taxonomie va nous aider à changer les règles du jeu sur les marchés financiers pour une économie réellement alignée avec l’Accord de Paris », assure l’Eurodéputé Pascal Canfin, l’un des artisans de cet outil.

L’article de Novethic est ici.

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Confinement, le retour : quelques idées d’activités à faire en famille

Un article de FNE, le 29/10/2020.

Comment remettre un brin de nature dans votre quotidien tout en restant chez soi pour sauver des vies ? Jamais en manque d’idées, les associations du mouvement France Nature Environnement multiplient les propositions en cette nouvelle période de confinement. Petite sélection d’activités simples, ludiques et familiales proposées les éducateurs et éducatrices nature du mouvement ou repérées sur le web.

Aiguisez votre âme contemplative avec l’observation nature

Une fois de plus, la crise sanitaire du coronavirus nous oblige à nous mettre en pause. Face à cette étrange période, loin de nous l’envie de vous inciter à remplir absolument vos week-ends confinés ! Les hérissons de France Nature Environnement connaissent les plaisirs et vertus de la contemplation, de l’observation. Testez : vous aurez de belles découvertes à la clef.

Commencez par observer la nature depuis votre fenêtre et sur le trajet de vos courses alimentaires. La FRANE vous propose de la prendre en photo puis de partager avec le monde vos plus beaux clichés sur les réseaux sociaux avec le hashtag #LaNatureDepuisMaFenetre.

Sur le groupe Facebook « Les cours à la maison, c’est bien… allongé dans l’herbe, c’est bien aussi », créé par l’association Cistude Nature lors du premier confinement, curieux et passionnés continuent à partager leurs découvertes de façon ludique.

Reconnaître oiseaux du jardin

Pour lier le beau à l’instructif, tentez d’identifier les oiseaux. Munissez-vous de la plaquette d’identification des oiseaux communs concoctée en début d’année par le Groupe d’Études Ornithologiques des Côtes d’Armor et Bretagne Vivante. Vous les entendez sans les voir ? Essayez de reconnaître leur chant en suivant les leçons « chants d’oiseaux » de la chaîne Youtube La Minute Nature.

Même chose avec les insectes : observez ceux que vous trouverez dans votre jardin, ou ceux qui s’invitent chez vous – enfin «chez vous», tout est une question de point de vue..Apprenez à les identifier à l’aide de la clé de détermination du beau dispositif SPIPOLL mis en place par le Museum d’histoire naturelle et l’OPIE. Ne vous arrêtez pas là, donnez-lui un petit prénom et surtout signalez vos découvertes pour aider la recherche.

En plus de sauver des vies depuis votre salon, vous pouvez en effet contribuer à la recherche grâce aux sciences participatives. Le portail national OPEN répertorie tous les observatoires ouverts aux citoyen·ne·s : Spipoll pour les insectes pollinisateurs, Sauvages de ma rue pour les plantes sauvages, ou encore le site de Faune-France.

Réveillez l’artiste nature qui sommeille en vous

Si vous avez une forêt ou un espace vert proche de chez vous, pourquoi ne pas en profiter pour faire un herbier des feuilles d’automne et apprendre à les identifier. Pour cela, munissez-vous d’une feuille de papier, d’un crayon, de scotch et de ciseaux, et essayez de trouver le maximum de feuilles différentes. L’université de Jussieu propose une collection de vignettes pour vous aider à les identifier.

Sifflet, poisson, bateau flottant, abeille…. vous pouvez aussi fabriquer des jeux et petits personnages avec des éléments de la nature à l’aide de votre plus bel opinel et des inspirantes vidéos des Écologistes de l’Euzière publiées sur leur page Facebook et leur chaîne Youtube.

Pas de jardin ? Pourquoi ne pas rechercher des images de nature dans les magazines qui traînent à la maison et les découper pour créer un jardin imaginaire en collage ?

Votre enfant préfère la sculpture au dessin ? Proposez-lui de créer des animaux à partir de matériau de récupAbeille en bouchon, hibou en rouleau de papier toilette videpoules, poussins ou encore lapins à partir de boîte d’oeufs… votre moteur de recherche préféré vous offre une myriade de tutoriels pour faire entrer insectes et animaux en carton dans votre salon.

Si vous possédez un jardin, vous pouvez également tester le collage de fleurs, feuilles et petites branches pour fabriquer de biens jolis insectes.

Amusez-vous à développer vos connaissances

Et si vous preniez le temps de tester vos connaissances en famille avec des quiz ? Humanité et Biodiversité vous met au défi : Êtes-vous incollables sur la biodiversité chez vous ? .

Envie de sortir un petit jeu de plateau ? Faites une partie de Mémoire de la Terre, un jeu de type Memory mis au point par une bénévole de FNE Ile de France.

Plutôt fan d’énigmes et de nature dans un jeu d’équipe ? C’est le moment de vous lancer à plusieurs dans Enigma Botanica, le premier escape game sur la botanique, créé par Tela Botanica. Ce jeu d’énigmes d’1 heure environ vous permettra de découvrir la botanique de façon ludique.

Mettez-vous au bricolage pour accueillir de la biodiversité ou devenir jardinier de salon

Et si vous profitiez de passer le week-end chez vous pour construire des refuges afin d’accueillir la biodiversité chez vous ? Sauvage de Poitou et Picardie Nature proposent de fabriquer un refuge à osmies (abeilles solitaires ou abeilles maçonnes) très simple à fabriquer. Norb vous explique tout dans cette vidéo.

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Deux-Sèvres Nature Environnement donne toutes les clés sur sa page Facebook pour construire un nid à chauve-souris.

Et Indre Nature propose de créer un abri pour les hérissons grâce aux plans réalisés par la FCPN.

Autre idée bricolage possible en petit appartement : créer votre potager d’épluchures. Quelques restes de queues de légumes, des contenants de récupérations, de l’eau, du soleil et un peu de patience et vous être prêt·e à vous lancer. A vous la repousse de poireaux, carottes et autres radis. L’artiste plasticienne Martine Camillieri, grande adepte de la récupération et du recyclage, dévoile sur son compte Facebook quelques extraits de son prochain livre : autant de bons (et beaux!) conseils pour commencer votre micro culture.

(Re)découvrez la nature avec ces sélections de documentaires, films et vidéos

FNE Haute-Savoie s’est illustrée au printemps par la création de vidéos pour découvrir l’environnement malgré le confinement : ce travail remarquable est en lice pour les Grands Prix de la Finance Solidaire 2020, organisés par Le Monde et Finansol (annonce des résultats le 2 novembre !).

Eau & Rivières de Bretagne propose également de nombreuses vidéos passionnantes pour découvrir la biodiversité, les milieux aquatiques… Tout un programme !

N’hésitez pas non plus à piocher les bons films sélectionnés par Bretagne Vivante dans son TOP 20 des documentaires et films gratuits.

Faites le plein d’activités avec ces ressources en ligne généreusement ouvertes.

Ce petit aperçu ne vous a pas permis d’éponger votre soif d’activités nature à mener en intérieur ? Plusieurs structures ont généreusement mis plusieurs de leurs publications en accès libre  :

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Enfin, pour celles et ceux qui ont un compte Facebook, des idées d’activités sont partagées à foison dans les groupes Outils pour les parents nature et Outils pour l’animateur nature.

Avec toutes ces bonnes idées, on vous le promet, le temps va filer ! Prenez soin de vous et de vos proches

L’article de FNE est ici.

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Pourquoi tout le monde s’arrache « Bio C’Bon », malgré sa faillite

Un article de Novethic, par Marina Fabre, le 28/10/2020.

Biocoop, Carrefour, Auchan, la famille Zouari… la reprise de Bio C’Bon, placé en redressement judiciaire en septembre, suscite la convoitise. Malgré la faillite de l’enseigne, le marché du bio, en pleine croissance, fait rêver les distributeurs. Pour certains, il s’agit de contrer l’ascension de la grande distribution dans le domaine. Pour d’autres, de capter un public plus urbain. Celui qui gagnera la mise aura une avance considérable sur ses concurrents.

Le marché du bio a atteint 11,9 milliards d’euros. CC0

De prime abord, Bio C’Bon avait tout pour plaire. Créée en 2008, la chaîne spécialisée dans le bio pouvait fièrement afficher ses 120 magasins, détenus en propre, et très bien implantés en Ile-de-France. Forte de ce réseau, l’enseigne a réussi à se hisser à la troisième place du podium des distributeurs spécialisés, juste derrière Biocoop et Naturalia. Et pourtant, en septembre, la chaîne a été placée en redressement judiciaire, enregistrant un passif de plus de 200 millions d’euros.

Bio C’Bon a justifié ses difficultés par une période « pleine de défis » pointant « les mouvements sociaux qui ont significativement affecté les centres-villes » ou encore « l’accroissement de la concurrence de la grande distribution sur le marché de la consommation biologique ». Si ces difficultés sont réelles, c’est aussi le développement, jugé trop rapide, de Bio C’Bon qui est avancé. Naturalia, un temps intéressé pour reprendre l’enseigne a invoqué des « zones d’ombre » et une « expansion trop rapide et non maîtrisée ».

Pour Yves Marin, expert du secteur de la distribution au sein du cabinet de conseil Bartl, Bio C’Bon souffrait en tout cas d’une « proposition commerciale beaucoup moins affutée que celle du leader Biocoop ou de gens comme Naturalia, La Vie Claire ou Carrefour Bio. Il y a une sélection darwinienne qui fait que oui, on peut trébucher sur un marché en croissance. »

Un marché en pleine croissance

Pourtant, malgré les déboires de l’enseigne, les repreneurs se bousculent pour la reprendre. Car le marché du bio est en pleine ébullition. Il a atteint 11,9 milliards d’euros selon l’agence du bio, une hausse de 13,5 % sur un an. Celui qui arrivera à mettre la main sur Bio C’Bon pourrait s’assurer une longueur d’avance sur ses concurrents. Et chacun a une stratégie différente.

Pour Biocoop, enseigne historique de la bio, il s’agit de faire barrage à la grande distribution qui, en peu de temps, a réussi a capter la majeure partie du marché. C’est elle qui tire désormais la croissance. Biocoop s’est ainsi associé à Marcel&Fils, un autre spécialiste plutôt implanté dans le sud-est et vise 105 points de vente avec tout le personnel. Du côté de la grande distribution, Carrefour, qui détient So Bio, maintiendrait la marque Bio C’Bon. Il arrive avec de gros investissements et pourra s’appuyer sur l’expertise d’un ancien dirigeant du spécialiste La Vie Claire, Benoit Soury. Là aussi, une centaine de points de vente serait repris.

Un outsider se démarque parmi les offres de reprise : la famille Zouari, actionnaire de Picard. Son programme de rachat, qui vise 120 magasins et son personnel, a été développé par un fin connaisseur : l’ancien directeur général de Biocoop, Gilles Piquet-Pellorce. Surtout, le groupe a le soutien des centaines de particuliers qui ont investi leurs économies dans le capital de Bio C’Bion et qui se retrouvent aujourd’hui lésés par la faillite de la chaîne. La famille Zouari a promis à ces particuliers « la possibilité d’accéder au capital de la structure de reprise, sans investissement supplémentaire de leur part ». 

L’affaire est désormais entre les mains du tribunal de commerce qui devra rendre sa décision dans les semaines qui viennent. Le choix du repreneur sera d’une importance cruciale dans la course à la distribution du bio en France. Reste au repreneur de ne pas reproduire les erreurs qui ont fait tomber Bio C’Bon.

L’article de Novethic est ici.

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Le mois de septembre 2020 est le plus chaud jamais enregistré sur Terre

Un article de Novethic, par Concepcion Alvarez avec AFP, le 07/10/2020.

Janvier, mai, juin… et maintenant septembre. Ils ont été les mois les plus chauds jamais enregistrés dans le monde, faisant craindre que 2020 ne devienne l’année la plus chaude, battant le record de 2016. Partout, le réchauffement climatique a fait des ravages : fonte de l’Arctique, feux géants en Sibérie et en Californie, températures caniculaires en Europe. À ce rythme, le plafond de 1,5°C fixé par l’Accord de Paris devrait rapidement être dépassé.

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L’Amérique du Nord a notamment connu un mois de septembre particulièrement chaud, avec 49°C enregistrés au début du mois dans le comté de Los Angeles.

De record en record. Septembre 2020 a été le mois de septembre le plus chaud jamais enregistré dans le monde, selon le service européen Copernicus sur le changement climatique, qui évoque la possibilité que 2020 détrône 2016 comme année la plus chaude. « Au niveau mondial, septembre 2020 a été 0,05°C au-dessus de septembre 2019, jusqu’alors le plus chaud jamais enregistré », indique le service européen. Les températures ont été particulièrement élevées en Sibérie, poursuivant une vague de chaleur commencée au printemps qui a favorisé des incendies spectaculaires.

La chaleur a été également plus importante que la normale sur l’océan Arctique dans son ensemble, indique le service, qui rappelle que la banquise d’été en Arctique a fondu cette année jusqu’à la deuxième superficie la plus petite jamais enregistrée (après 2012). L’Amérique du Nord a aussi connu un mois de septembre particulièrement chaud, avec notamment 49°C enregistrés au début du mois dans le comté de Los Angeles, dans une Californie ravagée par les incendies. En Europe, les températures moyennes ont grimpé à un niveau jamais atteint, soit environ 0,2°C de plus que sur la même période de 2018, qui était le précédent record dans la région.

2020, année la plus chaude ? 

Dans son bilan climatique mensuel, Copernicus indique que la planète gagne en moyenne 0,2°C par décennie depuis la fin des années 1970. La période allant de octobre 2019 à septembre 2020 se situe à 1,28 °C au-dessus des températures de l’ère préindustrielle. Alors que les cinq dernières années ont été les plus chaudes jamais enregistrées, ce chiffre rapproche dangereusement la planète du plafond fixé par l’Accord de Paris à + 1,5°C… d’ici la fin du siècle.

2020 ne devrait donc pas inverser la tendance, avec déjà les mois de janvier, mai et juin les plus chauds jamais enregistrés. Malgré tout, des phénomènes climatiques comme le développement en cours d’un épisode La Niña, qui tend à faire baisser la température mondiale, « influeront sur la probabilité que 2020 devienne l’année la plus chaude ». « Il reste trois mois pendant lesquels tout peut arriver », a indiqué Freja Vamborg, scientifique de Copernicus.

L’article de Novethic est ici.

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La 5G, un gouffre énergétique programmé

Un article de Reporterre, par Guillaume Dupuis, le 24/10/2020.

Si le monde ultraconnecté promis par la 5G suscite un débat intense et si les doutes sur ses dangers sanitaires appellent des études approfondies, la réalité de son coût énergétique mérite, selon l’auteur de cette tribune, une analyse détaillée.

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En septembre 2019, le think-tank Idate DigiWorld, leader européen de l’économie numérique, publiait le Livre blanc de la 5G. Ce rapport, rédigé par des experts de grandes entreprises (Nokia, IBM, BNP Paribas…), en lien avec un groupe de parlementaires français, indique que la 5G « devrait améliorer grandement la consommation énergétique du réseau », sans plus de précision.

Un mois plus tard, la société Light Reading dévoilait les contraintes énergétiques auxquelles les opérateurs chinois étaient confrontés avec les 80.000 antennes déjà déployées : « Le coût énergétique nécessaire pour alimenter le réseau 5G est l’un des plus gros casse-têtes pour les opérateurs. » La facture électrique du réseau 5G triplant par rapport au réseau 4G, certaines municipalités ou provinces ont subventionné les installations. À Shenzhen, elles se sont engagées à prendre en charge 50 % de la consommation des opérateurs pendant trois ans.

Triplement de la consommation électrique

En août 2020, l’opérateur chinois Unicom annonçait mettre en veille certaines des ses bases 5G de 21 heures à 9 heures du matin, en raison du triplement de sa consommation électrique. Peu après, Nicolas Demassieux, senior vice président d’Orange Labs prétendait que ces mises en veille nocturnes étaient liées au fonctionnement normal des antennes 5G.

Les grands acteurs du numérique se sont donc attaqués à l’écueil énergétique. Le groupe Ericsson (l’un des cinq constructeurs mondiaux de technologie 5G) s’est attelé début 2020 à infléchir la courbe énergétique de la 5G tout en concédant que « la consommation d’énergie est vouée à augmenter dramatiquement si la 5G est déployée de la même manière que la 3G et la 4G ». À l’heure actuelle, dans une comparaison à usage constant, il est vrai que le transfert d’un octet consomme moins d’énergie avec le réseau 5G qu’avec la 4G. Toutefois, en France, la consommation de données 4G a été multipliée par quatre entre 2016 et 2019, et la consommation électrique d’une antenne est fortement corrélée aux flux de données qui y transitent. Donc, si la tendance se poursuit, le réseau 4G sera bientôt saturé et consommera beaucoup plus. D’où, selon certains, la nécessité d’implémenter la 5G qui autorisera encore plus de trafic grâce à son meilleur débit, peut-être 1.000 fois plus à l’horizon 2025 comme le rapporte Gauthier Roussilhe.

Les émissions de gaz à effet de serre du numérique augmentent de 8 % par an

Selon le Shift project, la consommation énergétique de l’industrie numérique affiche une augmentation annuelle de 9 %, la plus forte augmentation de tous les secteurs industriels. En poursuivant cette tendance, il suffit de huit ans pour que la consommation double. Les émissions de gaz à effet de serre du numérique suivent cette tendance et augmentent de 8 % par an. La fabrication des objets du numérique (des smartphones aux antennes) pèse pour près de la moitié de la consommation globale, le reste se répartissant entre l’alimentation des réseaux, le fonctionnement des DataCenters et l’utilisation des terminaux.

Avec le déploiement de la 5G et la révolution 4.0, toutes ces consommations vont exploser. En effet le Livre blanc de la 5G évoque une densité d’un million d’objets connectés par km² d’aire urbaine en 2025, soit 120 milliards sur le territoire français. Le groupe Ericsson avance l’hypothèse plus réaliste mais néanmoins vertigineuse de 22,3 milliards d’objets connectés sur la planète en 2024, selon Gauthier Roussilhe.

Une compensation très hypothétique

Pourquoi la 5G est-elle présentée comme une solution ? Le Livre blanc de la 5G évoquait une application vertueuse de la 5G, le grid-management, dans deux brefs paragraphes : il s’agit de l’optimisation des réseaux énergétiques en fonction de l’offre et de la demande. Mais cette innovation est-elle en mesure de compenser les accroissements de consommation ?

« Opposer écologie et numérique est un contre-sens, puisque c’est grâce à la 5G que nous pouvons déployer de nouveaux usages écologiques comme une meilleure collecte des déchets : on peut connecter des containers pour savoir quand ils sont vides et ainsi optimiser la logistique pour pouvoir aller les ramasser. Cette nouvelle technologie réduirait donc logiquement le temps de trajet de certains camions poubelles, ces derniers pouvant aller directement vers les bacs à ordures pleins. On a besoin du numérique pour accélérer la transition environnementale », explique Michaël Trabbia, directeur de l’innovation chez Orange dans une interview à Europe 1.

Ainsi, la 5G aiderait à gérer les déchets qu’elle produira en masse, tout comme elle permettrait de mieux diffuser les données qu’elle générera en masse. Ces quelques gains ne devraient pas compenser les faramineuses projections d’explosion consumériste dues à cette technologie.

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Garanties à l’export : le gouvernement annonce l’arrêt du soutien public pour les projets de pétrole et de gaz

Un article de Novethic, par Ludovic Dupin, le 14/10/2020.

À partir de 2025, la France n’apportera plus aucune garantie publique pour les projets pétroliers portés à l’étranger par des entreprises tricolores. Ce sera 2035 pour le gaz. Pour Bruno Le Maire, c’est une avancée majeure pour faire du pays la première grande économie décarbonée. En revanche, les ONG dénoncent des échéances bien trop lointaines.

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À partir de 2025, la France ne garantira plus les projets à l’export liés au pétrole. @TechnipFMC

La décision avait déjà été mise en place pour le charbon et la fracturation hydraulique. Ce seront désormais toutes les énergies fossiles qui seront concernées. Le ministre de l’Économie, Bruno le Maire, a annoncé la fin des garanties de financement des exportations pour les projets d’exploitation pétrolière dès 2025, et gazière en 2035. De plus, dès le 1er janvier 2021, tous ces soutiens prendront fin pour les « pétroles extra-lourds, schistes et sables bitumineux », ainsi qu’aux « centrales thermiques dégradant le mix électrique du pays récipiendaire« .

« C’est la première fois qu’un pays exportateur présente une stratégie pour ses exportations de lutte contre le réchauffement climatique », s’est félicité Bruno Le Maire lors d’une conférence de presse à l’Assemblée nationale le lundi 12 octobre. La France compte en effet de nombreuses entreprises qui exportent leur savoir-faire dans le secteur des énergies fossiles. Parmi elles, on compte les énergéticiens EDF et Engie, la major pétrolière Total et quelques entreprises parapétrolières majeures comme Technip FMC, CGG ou Vallourec.

Pour Bruno le Maire, cette mesure s’inscrit dans l’ambition du plan de relance de faire de la France « la première grande économie décarbonée européenne« . Mais elle n’est pas sans conséquence précise toutefois un rapport parlementaire à l’origine de cette initiative. Pour le pétrole, elle pourrait coûter « jusqu’à 1 800 emplois compte tenu de la demande croissante de plusieurs compagnies pétrolières du Golfe d’établir des lignes de crédit de plusieurs milliards d’euros avec des agences de crédit export européennes », selon le rapport.

Question d’emplois et de transition

Dans le contexte de la crise sanitaire et économique en cours, le secteur pétrolier souffre énormément de la chute des cours du baril. Des milliers d’emplois devraient déjà disparaitre dans les mois à venir, et bien plus à l’échelle de toute l’industrie tricolore. C’est pourquoi le gouvernement doit suivre une ligne de crête pour accélérer le verdissement du budget de l’État sans alourdir le contexte économique des entreprises. C’est pourquoi l’or noir bénéficie de ce délai de grâce.

Pour le gaz, « la situation sera réévaluée régulièrement«  d’ici à 2035 « pour fixer l’échéance la plus adaptée aux enjeux climatiques et industriels, en garantissant un délai d’au moins quatre ans entre la décision d’arrêt de l’éligibilité au soutien export et sa mise en œuvre effective« . « Cette dernière mesure aurait l’impact le plus important sur l’emploi, avec environ 3 000 emplois perdus« . Surtout, le gaz bénéficie de ce délai en raison de son statut « d’énergie de transition«  entre les fossiles les plus émetteurs et les énergies les plus décarbonnées.

Plus de 9 milliards d’euros de garanties

Depuis 2009, la France a octroyé 9,3 milliards d’euros de garanties publiques pour l’industrie du pétrole et du gaz, via son agence de crédit à l’exportation Bpifrance Assurance-Export. L’encours sous garantie des projets parapétroliers et paragaziers s’élevait au 31 mai 2020 à 2,7 milliards d’euros, selon le gouvernement, soit 4 % du total des garanties export. Concernant l’ensemble du dispositif de soutien à l’export, le rapport défend un « bonus climatique«  pour les projets durables portés par les entreprises françaises. L’attribution s’effectuerait selon la taxonomie européenne sur les investissements verts.

L’ONG Les Amis de la Terre a dénoncé dans un communiqué des mesures « anecdotiques » qui « ne forcent pas les industriels français actifs dans le secteur des hydrocarbures à changer de modèle économique ». Elle conteste également le nombre d’emplois menacés. Elle ajoute : « Le gaz n’est pas une énergie de transition comme le prétendent l’industrie fossile et le gouvernement. C’est justement parce que le secteur est en pleine expansion qu’il faut le freiner de toute urgence ».

L’article de Novethic est ici.

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L’Arctique a basculé dans une nouvelle ère climatique

Un article de Novethic, par Marina Fabre, le 10/10/2020.

En quelques décennies, l’Arctique a complètement été bouleversée par le changement climatique. Hausse des températures, fonte des glaces, saison des pluies plus intenses… Les évènements ont été si rapides, constants et intenses que des scientifiques américains du Centre national pour la recherche atmosphérique (NCAR), estiment, dans une nouvelle étude, que la normalité dans la région n’a plus de sens.

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La région a basculé dans un « nouveau climat arctique » pour lequel les anciennes données n’ont plus de sens. CC0

Des températures plus hautes, de la pluie au lieu de la neige, une accélération de la fonte des glaces… L’Arctique est une des régions les plus perturbées par le changement climatique. À tel point que dans une nouvelle étude publiée dans la revue Nature climate change, deux scientifiques estiment que la région a basculé dans un « nouveau climat arctique ».

« C’est une période de changement si rapide que les observations des conditions météorologiques passées ne montrent plus ce à quoi vous pouvez vous attendre l’année prochaine. L’Arctique entre déjà dans un climat complètement différent de celui d’il y a quelques décennies », a déclaré Laura Landrum, scientifique du National Center for Atmospheric Research (NCAR), autrice principale de l’étude. Pour parvenir à cette conclusion, les scientifiques ont passé au crible des grandes quantités de données d’observation des conditions climatiques de l’Arctique sur les dernières décennies.

Une nouvelle définition du climat arctique

« Les changements du climat arctique sont si profonds que l’étendue moyenne de la glace en septembre, lorsqu’elle atteint son minimum annuel, a chuté de 31 % depuis la première décennie de l’ère des satellites », soulignent les chercheurs. Ces derniers ont aussi observé une hausse des températures en hiver et une saison des pluies plus intense et longue. Ces changements ont ainsi entraîné une fonte des glaces rapide et constante apparue entre la fin du 20e siècle et le début du 21e. À ce rythme, d’ici 2100, plus aucune glace ne recouvrira l’Arctique entre trois et dix mois par an.

« L’Arctique est susceptible de connaître des extrêmes de glace de mer, de température et de précipitations qui sont bien en dehors de tout ce que nous avons connu auparavant », a déclaré Laura Landrum. « Nous devons changer notre définition de ce qu’est le climat arctique », a-t-elle prévenu.

L’article de Novethic est ici.

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Tempête Alex : un parc animalier en partie détruit dans les Alpes-Maritimes, plusieurs loups en liberté

Un article de Reporterre, le 06/10/2020.

La tempête Alex a causé énormément de dégâts dans le sud-est de la France, depuis le vendredi 2 octobre. Les pluies torrentielles et les crues ont emporté avec elles des maisons, des routes ou encore des ponts.

Loup-3

Loup du canada

Le parc animalier Alpha, situé dans la commune de Saint-Martin-Vésubie (Alpes-Maritimes) a en partie été détruit. Il abritait plusieurs meutes de loups sauvages : des loups du Canada, d’Alaska et d’Europe centrale. L’enclos des trois loups gris d’Europe centrale aurait été préservé des intempéries. D’après la direction régionale de l’Office français de la biodiversité (OFB), un loup au moins serait mort. Sept loups noirs du Canada sont en revanche recherchés.

« Les animaux ne sont pas un danger pour la population »

D’après l’OFB, les loups du parc ne connaissant que la captivité, ils devraient rester autour de la zone. Véronique Luddeni, une vétérinaire citée par Franceinfo qui s’occupe des loups dans le parc naturel national du Mercantour, assure que les animaux ne sont pas un danger pour la population. Elle émet toutefois quelques craintes pour les éventuels survivants dans la nature. « Le seul danger pour eux c’est de trouver les meutes sauvages qui sont juste au-dessus, et qu’il y ait des bagarres entre loups », a-t-elle précisé à nos confrères.

Une mission d’observation — menée par l’Office français de la biodiversité, des membres de la préfecture et des animaliers — est prévue ce mardi 6 octobre, pour faire le point sur l’état du parc Alpha et de ses pensionnaires.

L’article de Reporterre est ici.

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Le changement climatique pourrait faire autant de morts que toutes les maladies infectieuses

Un article de Novethic, par Concepcion Alvarez, le 03/10/2020.

Chaque année dans le monde, plus de cinq millions de personnes meurent d’une maladie infectieuse (hépatite, tuberculose, sida, malaria, grippe…). Selon une nouvelle étude américaine, le changement climatique, dans le pire des scénarios, pourrait être aussi meurtrier que l’ensemble de ces maladies. Les pays les plus pauvres seraient les premiers concernés et devraient subir de plein fouet maladies et chaleurs extrêmes.

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Le taux de mortalité lié au changement climatique atteindrait 73 décès pour 100 000 habitants d’ici la fin du siècle. @CC0

Le changement climatique se révèle tout aussi dangereux que les maladies infectieuses. Selon une nouvelle étude du National Bureau of Economic Research, relayée par le Guardian, il pourrait, dans le pire des scénarios, tuer autant que toutes les maladies infectieuses connues actuellement. En première ligne se trouvent les régions les plus pauvres, situées le plus souvent dans les régions les plus chaudes du monde.

Dans un scénario de réchauffement à +3°C simulé par les chercheurs, le taux de mortalité lié au changement climatique atteindrait 73 décès pour 100 000 habitants d’ici la fin du siècle. C’est autant que le taux de mortalité actuel des principales maladies infectieuses, parmi lesquelles la tuberculose, le sida, le paludisme, la dengue et la fièvre jaune. Dans certains pays comme le Ghana, le Bangladesh, le Pakistan ou le Soudan, 200 décès supplémentaires pour 100 000 habitants pourraient être imputés à la hausse des températures.

52 millions de personnes touchées par le changement climatique et le Covid

« De nombreuses personnes âgées meurent à cause des effets indirects de la chaleur », explique auprès du Guardian Amir Jina, économiste environnemental à l’Université de Chicago et co-auteur de l’étude publiée par. « Comme pour le Covid, les personnes les plus vulnérables sont celles souffrant de pathologies préexistantes ou sous-jacentes », ajoute-t-il. Le Covid-19 a déjà fait au moins un million de morts à travers la planète et se classe au 3e rang des maladies infectieuses les plus mortelles derrière les hépatites et la tuberculose, et devant le sida.

Malheureusement, les populations les plus fragiles se trouveront bien souvent confrontées aux deux problématiques. Selon une étude de la Fédération internationale des sociétés de la Croix rouge et du Croissant rouge, publiée le 23 septembre, au moins 51,6 millions de personnes ont été doublement touchées par des désastres liés au climat (sécheresse, inondations, tempêtes) et au Covid-19 cette année. Et 437 millions de personnes appartenant à des groupes vulnérables ont été exposées à une chaleur extrême, tout en étant confrontées aux effets directs du Covid-19 ou aux mesures de confinement.

L’article de Novethic est ici.

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Inondations dans les Alpes-Maritimes : le bilan s’alourdit

Un article de Reporterre, le 05/10/2020.

De violentes intempéries liées à la tempête Alex ont frappé depuis le 2 octobre les Alpes-Maritimes, déclenchant des crues record. Les vallées de la Tinée et de la Vésubie ont été particulièrement touchées, ainsi que la vallée de la Roya.

Sortie nord de Tende vers Viévola-03

Vallée de la Roya, entre Tende et Vievola.

Les dégâts sont considérables et le bilan humain est lourd. Lundi 5 octobre, de nouvelles victimes ont été découvertes. Les intempéries ont déjà fait sept morts confirmées par les autorités françaises et italiennes. En France, cinq victimes sont désormais recensées. Côté italien, deux morts sont à déplorer dans le Val d’Aoste et le Piémont, régions elles aussi touchées par ces pluies torrentielles.

Dans la vallée de la Roya — connue pour être un lieu de passage de personnes réfugiées — une course contre la montre s’est engagée : l’urgence est de dégager les accès pour assurer le ravitaillement des populations sinistrées et favoriser la recherche des disparus. Rétablir l’électricité est aussi l’une des priorités.

Lundi 5 octobre, le maire Les Républicains de Nice, Christian Estrosi, demandait sur LCI « qu’on nous mobilise d’urgence des forces du génie et le centre national des ponts » afin d’« aller encore plus vite pour faire des voies définitives d’accès ».

Cependant, M. Estrosi et d’autres élus locaux auraient-ils pu mieux anticiper cette catastrophe ? Avec le dérèglement climatique, les épisodes pluvieux risquent de devenir plus intenses. Or, selon l’Insee, les Alpes-Maritimes et le Vaucluse sont particulièrement exposés aux risques d’inondations. En cause, notamment, les choix d’urbanisation : 30 % des habitants de ces départements vivent en zone inondable. Comparativement, ils sont seulement 10 % dans les Bouches-du-Rhône ou les Hautes-Alpes.

Survenues en 2014 et 2015, les inondations dans le Var voisin s’expliquaient ainsi largement par la bétonisation incontrôlée des terres. À cette époque, les instances régionales reconnaissaient déjà que « l’imperméabilisation croissante des bassins versants [accentuait] le caractère torrentiel des écoulements. Ces effets sont aggravés par la constitution des sols, peu favorables à l’infiltration des eaux. Les cours d’eau, qui peuvent charrier nombre de matériaux solides, sont également fortement artificialisés ».

L’article de Reporterre est ici.

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Tempête Alex, Covid-19, changement climatique : les catastrophes s’accumulent sans véritable préparation

Un article de Novethic, par Anne-Catherine Husson-Traore, le 05/10/2020.

Les témoignages venus des vallées de la Vésubie ou de la Roya dans le Sud Est de la France sont tous les mêmes : déluge brutal, coupure généralisée, plus de routes, plus d’eau, plus d’électricité. En pleine crise du COVID 19, cette catastrophe illustre la nécessité d’adapter nos infrastructures et nos modes de prévention à un monde de phénomènes violents, répétitifs et complexes.

D6204 – Au sud de Breil-sur-Roya, près du Château de Piène

Pendant tout le week-end, les informations en continu ont déversé leur lot de témoignages des victimes des inondations violentes qui ont ravagé l’arrière-pays niçois. La sidération revenait en boucle ! Mais un tel événement est-il si inattendu ? Comme le rappelait la journaliste Juliette Nouel sur LinkedIn, l’indice mondial des risques climatiques publié par German Watch, place la France au 15éme rang des pays les plus à risque sur 183 pays.

Ces données permettent une nouvelle fois de s’interroger sur notre capacité collective à affronter des catastrophes qui se déroulent sur plusieurs fronts en même temps. L’adaptation aux catastrophes naturelles suppose de repenser les modes d’urbanisation. L’un des habitants d’une vallée sinistrée faisait remarquer que la route qui s’est effondrée datait de seulement 25 ans. Elle avait été dessinée pour effacer un virage qui avait sa raison d’être.

Un million de Français menacés

Les vallées encaissées victimes de la tempête Alex sont peu peuplées mais le bilan humain reste très lourd. En France, bon nombre d’habitations sont construites en zones inondables et une étude publiée fin 2019 estimait qu’un million de Français seraient menacés d’inondations fréquentes en 2050 à cause du changement climatique.

La Région Provence Alpes Côte d’Azur doit à la fois affronter ces inondations destructrices et la crise sanitaire de la COVID 19 qui y est très présente. L’insuffisance du nombre de lits d’urgence en cas de crise y est aussi plus préoccupante compte tenu de la présence élevée de retraités âgés dans cette région attractive pour ce type de populations. Le vieillissement de la population devrait d’ailleurs augmenter selon les projections de l’INSEE.

Le réveil sonne de plus en plus violemment, dans le Sud Est de la France comme sur le reste du territoire. Il serait temps de l’entendre et d’adopter un grand programme d’aménagement du territoire adapté à la nouvelle donne climatique, environnementale et sanitaire !

L’article de Novethic est ici.

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Le rapport de Anne-Laure Cattelot est sorti : les lobbies gagnent 1OO millions d’euros par an

Un article de SOS Forêt France, le 25/09/2020.

Le lobby industriel des planteurs d’arbres a bien travaillé : le rapport préconise de planter et de financer massivement ces plantations. L’augmentation des prélèvements prévue n’est pas remise en cause. Le risque est grand que la filière se rue sur cette manne financière pour industrialiser encore plus vite la forêt… au prétexte du changement climatique. D’autant que pendant l’été, la filière s’est dépêchée de négocier la relance d’aides à la plantation ( 200 millions d’euros) auprès du ministre de l’agriculture sans aucune contre partie. Le rapport présente cependant un certain nombre de points positifs.

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La création d’un fonds pour l’avenir des forêts

Ce fonds, doté de 100 millions par an, serait principalement destiné à planter (1) massivement, (70 millions d’arbres par an pendant 30 ans) au prétexte d’adapter la forêt au changement climatique sans attendre d’y voir clair sur les différentes stratégies possibles. Une telle campagne de plantation “préventive”, risque de ne pas laisser d’espace a des alternatives d’adaptation moins interventionnistes s’appuyant sur les dynamiques naturelles.

Point positif toutefois, le texte conditionne ces aides : Les opérations financées par le fonds devront donc impérativement respecter des critères d’éco-conditionnalité et ne peuvent s’envisager sans un débat, une coconstruction et un consensus obtenus dans le cadre d’approches territoriales, de type chartes forestières de territoire. C’est à cette échelle que l’adaptation aux caractéristiques des milieux naturels et au contexte sociétal est efficace, compte tenu de la diversité des situations territoriales dans notre pays. Les élus locaux ont vocation à porter ces démarches. Si l’intention semble louable et une réelle co-construction avec associations et citoyens indispensable (une de nos propositions), le débat au niveau niveau local est actuellement noyauté par la filière ; ceux d’entre nous qui ont négocié les chartes forestières et autres plans forêt bois n’ont pas observé de résultat sur le terrain en matière de sylviculture, nous avons certaines raisons de rester dubitatifs sur les modalités d’application. Les garanties d’une vraie place du citoyen dans les vraies commissions qui vont décider des mesures restent à définir. La bataille pour une vraie place des citoyens dans le débat ne fait que commencer !

La limitation des coupes rases

Une recommandation forte inspirée de nos propositions et de la proposition de loi de Mathilde Panot : la limitation des coupes rases à 2 ha  sauf sanitaires ou peuplements irrécupérables du point de vue économique et environnemental. A.-L. Cattelot préconise aussi une dérogation possible jusqu’à 10 ha dans certaines régions… Cette disposition présente un gros risque de contournement de la disposition. SOS forêt et la Convention citoyenne pour le climat préconisent une limitation à 0,5 ha et bien sûr sans dérogation hormis des causes sanitaires avérées. Même sous cette forme moins restrictive que notre préconisation, son application pourrait faire changer sensiblement les choses dans certains territoires si elle était retenue par le gouvernement.

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Anne-Laure Cattelot, députée LREM du Nord.

Une protection et une industrialisation renforcées

Un certain nombre de recommandations sur la biodiversité, l’augmentation importante d’aires protégées forestières, la prise en compte des trames vertes, des vieilles forêts semblent aller dans le bon sens. Cependant le parti pris semble être : une protection renforcée d’un coté et, en contre partie, la confirmation d’une évolution industrielle de la grande majorité des forêts. Les autres modes de gestions forestières comme une sylviculture proche de la nature et continue type “méthode Prosylva”, telle que préconisées par SOS forêt, RAF, Canopée… ne sont même pas évoquées comme une option.

“Adapter” la forêt au changement climatique

La stratégie d’anticiper, enrichir et adapter à l’aune de nos connaissances les peuplements vulnérables peut tout à fait sous entendre le remplacement des forêts d’essences indigènes par des plantations d’essences exotiques dites “adaptées” ou génétiquement modifiées et ce, avant qu’elles ne dépérissent. C’est une logique extraordinairement prétentieuse mais surtout très risquée pour les écosystèmes et la biodiversité. Alors que le rapport reconnait par ailleurs de nombreuses incertitudes scientifiques sur ce point, il semble trancher d’ores et déjà le sujet au bénéfice des tenants du grand remplacement anticipé de la forêt : pépiniéristes, planteurs, coopératives forestières, industriels.

Le renouvellement des peuplements par reboisements artificiels n’est pas la seule solution à mettre en œuvre pour répondre aux problèmes sanitaires qui se multiplient. Ce type de réponse ne devrait être mis en œuvre que lorsque les traitements irréguliers en couvert continu ou la libre évolution des peuplements se heurtent à des difficultés insolubles.

Le modèle industriel, “l’anticipation” du changement climatique et l’augmentation massive des prélèvements aggraveront aussi le changement climatique comme le démontre la synthèse Canopée/ Fern des études scientifiques sur le sujet.

La taxation des petites parcelles en libre évolution de fait

La proposition de taxation des petites parcelles non gérées, bien souvent des niches de biodiversités liées à une libre évolution de fait, va conduire à amplifier les coupes rases qui resterons autorisées sur ces parcelles ou à pousser les petits propriétaires à les vendre. À qui ? Aux grands propriétaires ? Aux groupes financiers ? À Veolia ? À Total ?

Création d’un service unifié et d’un ministère dédié

Le rapport propose de créer un ministère dédié rattaché à l’environnement et un service unifié. C’est un point positif bien que les modalités de mise en œuvre restent très floues.

En effet, la Tutelle du Ministère de l’Agriculture ne répond pas au critère de gestion sur le long terme qui s’applique aux espaces forestiers. Systématiquement, les préoccupations du monde agricole priment sur celles liées à la forêt. La réponse insuffisante suite à la crise sanitaire de l’été 2019 ayant entraîné des dépérissements en masse, en est un exemple flagrant.

Renforcer la recherche et réunifier l’ensemble  des services en charge de la forêt : oui mais dans quel cadre ? Avec quel statut ? Quel moyens humains et financiers, quel cadre d’emploi pour les personnels ? La solution avancée de la création d’une agence de la la Forêt (ANF) semble n’être qu’une réponse imparfaite à l’état actuel de délabrement des services en charge de la forêt par suite des politiques austéritaires qui ont laminé les effectifs tant au ministère de l’agriculture et ses services déconcentrés, qu’à l’ONF, à l’IFN ou encore dans les CRPF.

Il faudrait recréer une grande administration forestière au sein d’un véritable ministère de la forêt et des espaces naturels, prenant complètement en charge les problématiques de préventions et de lutte contre les risques découlant des dérèglements climatiques (inondations, glissements de terrain, incendies…). Tout cela sous l’égide d’un ministère agissant en lien avec les territoires, dotés de personnels fonctionnaires habilités à remplir les missions de police et d’intérêt général, et d’agents de l’État, planifiant les actions sur le long terme et pourvu de moyens financiers à la hauteur des enjeux.

Un début du débat citoyen ?

Le rapport pourrait toutefois avoir le mérite de mettre le sujet forestier en débat. À nous, associations et citoyens de parvenir à amplifier notre audience et alerter l’opinion sur l’enjeu fort actuel pour l’avenir de nos forêts.

L’article de SOS Forêts France est ici.

(1) Dans la plupart des cas, la plantation est l’aveu d’une erreur de gestion ou la suite logique d’une pratique délétère : la coupe rase. Les plantations en général et en monoculture en particulier sont beaucoup moins résilientes que les forêts mélangées en régénération naturelle, mais les erreurs des années 70 ne découragent pas les tenants de la mise au pas de la nature. Les alternatives efficaces, plus résilientes, plus protectrices de la biodiversité, des sols, de l’eau, et qui ont démontré leur rentabilité économique à long terme et leur capacité à stocker plus de carbone sont passées par perte et profits. Les plantations qui devraient être exceptionnelles sont en passe de devenir la norme. Il faut dire que dans l’esprit du public, la plantation reste un geste positif et les multiples startups pseudo écologistes qui génèrent du business avec la plantation d’arbres n’aident pas à éclairer le citoyen sur la pertinence de cette pratique. À nous tous de la faire.

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Malgré les polémiques, la Convention citoyenne pour le climat n’est pas encore morte

Un article de Novethic, par Concepcion Alvarez, le 01/10/2020.

Le chef de l’État avait promis d’appliquer toutes les propositions de la Convention citoyenne pour le climat hormis trois jokers. Mais depuis plusieurs semaines, de nombreuses mesures présentées par la délégation de citoyens reçoivent les foudres des ministres. Les écologistes dénoncent un « détricotage » alors que l’Exécutif tente d’éteindre l’incendie et assure que rien n’est encore arbitré.

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Emmanuel Macron à la Convention citoyenne pour le climat, le 10 janvier. Photo Yoan Valat. AFP

Face aux nombreuses polémiques autour des propositions de la Convention citoyenne pour le climat (CCC), le Premier ministre Jean Castex a joué la carte de l’apaisement mercredi 30 septembre, lors d’une rencontre avec une partie de ses membres. Il leur avait réservé la primeur de plusieurs annonces ajoutées sous forme d’amendements au Projet de loi de finances (PLF) 2021 : révision de l’indemnité kilométrique pour les voitures polluantes, hausse du forfait mobilité durable, baisse des taxes sur les assurances pour les voitures électriques, aide au financement de l’achat de poids-lourds propres…

Il faut dire que le gouvernement est sous le feu des critiques, accusé d’abandonner « semaine après semaine » les mesures fortes de la Convention. Le matin même, une tribune dénonçant le « temps du détricotage » était publiée par Matthieu Orphelin, député EDS, et Eric Piolle, le maire EELV de Grenoble. La sortie d’Emmanuel Macron sur la 5G et les Amish a été la goutte d’eau pour les écologistes. D’autant que, tour à tour, les ministres du gouvernement, Bercy en tête, ont critiqué la hausse de l’écotaxe sur les vols aériens, le malus automobile intégrant le poids, la baisse de la TVA sur les billets de train ou encore la régulation de la publicité sur les produits très polluants. La publication du budget 2021, en début de semaine, n’a pas rassuré, les ONG dénonçant « des trahisons à l’encontre des 150 ».

Huit thématiques sensibles

Pourtant, rien n’est arbitré, fait valoir l’entourage de Matignon et du Ministère de la Transition écologique. Un projet de loi, reprenant 40 % des mesures de la CCC, doit être présenté en Conseil des ministres d’ici la fin de l’année. Il doit être débattu au printemps 2021 tandis que 20 % des propositions seront transcrites dans le PLF 2021 actuellement en discussion. Près de 10 %, de nature réglementaire, seront mises en œuvre par décrets et arrêtés, et plus de 5 % relèvent de négociations européennes ou internationales.

Reste 25 % de propositions relevant « d’autres modalités » (campagnes de communication, consignes aux préfets, stratégies nationales ou plans d’actions …) et plusieurs sujets qui fâchent. Publicité, transport aérien, automobile, rénovation écologique, transport de marchandises, plastique, artificialisation et agriculture : chacune de ces thématiques sensibles a fait l’objet d’une réunion de concertation courant septembre avec l’ensemble des parties prenantes (acteurs économiques, syndicats, organisations patronales, ONG, experts et citoyens de la convention). Au total, 200 personnes y ont participé. Mais le climat était particulièrement tendu.

Un climat tendu

Matthias, un des 150 citoyens de la CCC a participé à la réunion sur l’aérien. « Pendant trois heures, on s’est vu répéter que nos mesures étaient insensées et destinées à tuer le secteur. L’étude d’impact du ministère était biaisée en insistant davantage sur les pertes économiques que les gains environnementaux. Seules 3 ONG avaient été invitées face à 75 acteurs clairement opposés à nos mesures », raconte le trentenaire déçu.

Le Premier ministre assure, lui, avancer. « Une trentaine de propositions ont déjà trouvé des suites favorables, notre ambition est intacte, mais je ne nie en rien les difficultés qui s’ouvrent à nous », a-t-il précisé. Et de rappeler que la question du malus au poids est actuellement en concertation, de même qu’une écocontribution sur les billets d’avion, tandis que la taxation sur les engrais azotés doit faire l’objet d’une annonce en octobre lors d’une séquence dédiée à l’agroécologie.

L’article de Novethic est ici.

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Des éléphants meurent de faim dans le parc de la Lopé au Gabon à cause du changement climatique

Un article du Nouveau Gabon, par SG, le 28/09/2020.

Selon une étude menée par des scientifiques gabonais et des experts de l’université de Stirling, des éléphants meurent de faim dans le parc national de la Lopé au Gabon à cause du changement climatique. « Il est alarmant de constater que le changement climatique entraîne la famine chez les éléphants de forêt et les oblige peut-être à quitter les forêts pour s’approcher des villages à la recherche de nourriture, ce qui les amène à ravager les plantations », déplore le ministre des Eaux et des forêts Lee White.

TOPSHOTS

Photo Amaury Hauchard – AFP

Cette étude révèle en effet que la baisse significative du nombre de fruits par arbre fruitier dans le parc national de la Lopé au Gabon coïncide avec le déclin de l’état de forme physique des éléphants de forêt frugivores. L’étude met en évidence la baisse de la production fruitière de l’ordre de 81 % entre 1986 et 2018, ainsi qu’un affaiblissement depuis 2008, de l’ordre de 11 %, de l’état de forme physique des éléphants de forêt frugivores.

«Cela signifie qu’en moyenne, les éléphants et les autres animaux trouvaient des fruits mûrs sur un arbre sur dix dans les années 1980, mais qu’aujourd’hui ils doivent en chercher sur plus de 50 pour en trouver », précisent les experts. La baisse des productions fruitières est causée par les changements climatiques marqués par la hausse des températures.

Publiée le 25 septembre 2020, cette recherche a été menée sur 37 ans grâce à un partenariat avec l’Union européenne. Elle porte sur l’impact du changement climatique dans les forêts tropicales humides d’Afrique centrale et la menace qui pèse sur les populations d’éléphants dans la région.

L’article du Nouveau Gabon est ici.

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Biodiversité : « Le déclin se poursuit » et la France ne fait (presque) rien

Un article de Reporterre, par Lorène Lavocat, le 23/09/2020.

« Le déclin de la biodiversité se poursuit », alerte un rapport du Conseil économique, social et environnemental, à paraître ce 23 septembre. Ses auteurs taclent le gouvernement qui n’a «pas pris ses responsabilités» face à l’«urgence». D’autant que les outils législatifs pour protéger le vivant existent mais ne sont pas appliqués.

Le vivant s’effondre, et nous regardons ailleurs. Un nouveau rapport, à paraître ce mercredi 23 septembre, vient, à son tour, tirer la sonnette d’alarme. Il émane du Conseil économique, social et environnemental (Cese) et dresse un bilan plus que mitigé de l’action environnementale française. « Le dérèglement climatique est entré dans le viseur des responsables politiques, mais la biodiversité est restée sur le bord du chemin », constate, amer, Allain Bougrain-Dubourg, l’un des deux auteurs de l’avis du Cese.

Ce n’est pourtant pas faute d’alertes scientifiques : la sixième extinction de masse est aujourd’hui fort bien documentée. D’après le « Giec de la biodiversité », « environ un million d’espèces animales et végétales sont aujourd’hui menacées d’extinction notamment au cours des prochaines décennies, ce qui n’a jamais eu lieu auparavant dans l’histoire de l’humanité ». En France, la population des oiseaux, bon indicateur de l’ensemble de la biodiversité, a chuté en dix ans de 40 % pour les chardonnerets et d’un tiers pour les oiseaux vivant dans des milieux agricoles. Et selon le dernier rapport de l’Observatoire national de la biodiversité, seulement 20 % des écosystèmes remarquables sont dans un état de conservation favorable.

Ce n’est pas faute non plus d’outils législatifs : la loi « pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages », adoptée en août 2016 après deux ans et demi de débats parlementaires, « affichait des objectifs ambitieux et des apports utiles », indique le rapport du Cese. Le texte instaurait notamment un objectif de « zéro perte nette de biodiversité », mettait en place l’obligation d’« éviter, réduire, compenser » les atteintes à l’environnement, et cherchait à clarifier la gouvernance de ces politiques par la création de l’Agence française pour la biodiversité.

Sur les 479 milliards de dollars perdus chaque année à cause de la destruction des écosystèmes, 15 milliards sont dus aux pollinisateurs.

Sauf que… Quatre ans après la promulgation de cette loi « historique » – le précédent grand texte pour la nature remontait à 1976 – le Conseil économique social et environnemental « constate que non seulement la « reconquête » n’est pas amorcée, mais qu’au contraire, le déclin se poursuit ». « La loi n’a pas démérité, mais on ne s’est pas emparé de cet outil, on ne sait même pas le faire marcher, dénonce M. Bougrain-Dubourg. Il n’y a ni les moyens suffisants pour l’appliquer, ni la volonté politique pour porter le changement de paradigme nécessaire. Le gouvernement n’a pas pris ses responsabilités. » Que s’est-il donc passé ? Comme d’autres politiques environnementales – la sortie des pesticides ou la rénovation énergétique – la loi biodiversité semble avoir fait les frais d’un mal bien français en matière d’écologie : la difficulté de passer de la parole aux actes.

Moins de 0,4 % du budget de l’État est consacré à la biodiversité

Il y a d’abord un problème de gros sous. « Les moyens humains et financiers consacrés par les pouvoirs publics à la protection de la biodiversité demeurent relativement limités », observent les auteurs du rapport. Au total, 1,265 milliard d’euros est consacré à la biodiversité, soit moins de 0,4 % du budget de l’État. Sans oublier que de nombreuses aides publiques sont à l’inverse néfastes pour l’environnement. Ce manque de moyens est préoccupant pour le jeune Office français de la biodiversité (OFB), nouveau « bras armé » de la politique environnementale. « Les moyens et les effectifs alloués à l’OFB ne lui permettront pas de mener à bien l’ensemble de ses missions », préviennent les auteurs, qui pointent notamment le dénuement des agences régionales de la biodiversité (ARB), censées mettre en œuvre localement les objectifs écologiques nationaux. Seules sept des dix-huit régions françaises disposent d’une ARB, étoffée chacune d’à peine une quinzaine de salariés.

Il y a ensuite un échec dans l’application même de la loi. Au nom du « zéro perte nette de biodiversité », le texte de 2016 obligeait normalement tout projet d’infrastructure à « éviter, réduire et compenser » – c’est ce qu’on nomme la séquence ERC – les atteintes qu’il porterait à l’environnement (destruction d’habitats, d’espèces…). L’idée est relativement simple : les promoteurs de routes ou de centres commerciaux doivent au maximum éviter les dommages environnementaux, sinon réduire leurs impacts, et en dernier ressort compenser les destructions, « en tenant compte des espèces, des habitats naturels et des fonctions écologiques affectées ». Dans les faits, « les impacts apparaissent souvent sous-estimés » par les porteurs de projet et « les mesures d’évitement demeurent très rares ».

Quant à la compensation, « les mesures ne portent souvent que sur une fraction de la biodiversité touchée et sur des parcelles trop réduites pour être efficaces ». Au total, selon une étude parue en 2019 dans la revue Biological conservation, 2.400 hectares artificialisés ont donné lieu à 577 hectares de compensation, dont 80 % sur des espaces déjà naturels et seulement 3 % sur des espaces dégradés. Conclusion, pour les rapporteurs : « La séquence ERC est trop souvent détournée en un droit à artificialiser, écrivent-ils. Trop fréquemment, ce sont les associations qui veillent au respect du droit, par la contestation en justice des arrêtés d’autorisation, alors que c’est la responsabilité directe de l’État, chargé d’autoriser le projet, de fixer les obligations d’évitement de réduction ou de compensation au bon niveau. »

Chaque année, entre 40.000 hectares et 60.000 hectares disparaissent sous le béton

Autre raté, pointé par le rapport : la lutte contre l’artificialisation des sols. « La France se singularise en Europe occidentale par un rythme élevé de consommation d’espaces non artificialisés », notent-ils. Chaque année, entre 40.000 hectares et 60.000 hectares (de quatre à six fois Paris) disparaissent sous le béton. Pour le Cese, « les espaces naturels, agricoles et forestiers apparaissent souvent comme une variable d’ajustement de l’extension urbaine et non comme des espaces à protéger et valoriser ». En cause, notamment, des outils réglementaires qui « tendent souvent à amplifier » le phénomène. Les différents documents de planification de l’urbanisme – Sraddet régionaux, Scot ou PLU« ne comportent aucune disposition chiffrée et contraignante en matière d’artificialisation ». Résultat, les velléités d’attractivité économique et de compétitivité entre territoires prennent le dessus, au détriment de l’environnement. Les dispositifs fiscaux ne poussent pas non plus à la sobriété foncière : « La fiscalité applicable au foncier non bâti incite les propriétaires à vendre [leurs parcelles] comme terrains à bâtir au lieu de les maintenir naturels ou agricoles avec de nombreuses fonctions écologiques ».

Des tiaré, à Tahiti. Les Outre-mer hébergent 80 % de la biodiversité française.

Absence de volonté politique, manque de moyens et de connaissances, mauvaise cohérence entre les outils réglementaires et fiscaux… Il n’en faut pas plus pour qu’une loi ambitieuse ne devienne une coquille vide. « Un texte de cette ampleur nécessite du temps pour sa mise en place, résume Pascal Férey, l’autre auteur de l’avis. Mais quand on a le feu dans la boutique et qu’on ne sort pas les extincteurs les plus appropriés, il devient impossible d’éteindre les flammes. Et le gouvernement n’a pas fait de choix stratégiques, il n’a pas rendu d’arbitrages permettant de prioriser, de prendre les mesures les plus urgentes. » Le constat est particulièrement criant dans les Outre-mer qui hébergent 80 % de la biodiversité française. La loi de 2016 prévoyait de protéger 55.000 hectares de mangrove d’ici à 2020, de protéger 75 % des récifs coralliens d’ici à 2021 et de mettre en place un réseau d’aires protégées. Rien de tout ceci n’a eu lieu : pour les mangroves comme pour les récifs, les objectifs n’ont pu être atteints « faute d’effectifs de police de l’environnement ». Quant aux aires protégées, « l’expérimentation n’a pas été initiée et semble avoir disparu de l’ordre du jour ».

Alors que faire ? « Il faut du courage et de la détermination politique pour que vive la vie, dit Allain Bougrain-Dubourg. On n’a pas besoin d’une nouvelle loi, celle de 2016 est très bien, mais il faut de la volonté pour la faire appliquer réellement. » Les deux rapporteurs se sont tout de même essayés à émettre des préconisations : renforcer le contrôle du respect de la séquence ERC, définir un paquet réglementaire et fiscal contre l’artificialisation des sols – en poussant pour l’adoption de documents d’urbanisme plus contraignants et en supprimant les mesures fiscales qui incitent à la bétonisation. Barbara Pompili, ministre de la Transition écologique, qui à l’époque avait porté la loi de « reconquête de la biodiversité » saura-t-elle rehausser l’ambition de la France ? « Elle a la compétence et la recherche d’éthique à l’égard du vivant, elle a tout compris de la difficulté et de la nécessité d’agir, croit M. Bougrain-Dubourg. Mais tout se joue à l’Élysée et à Bercy, qui n’ont eux pas du tout pris la mesure de l’urgence. »

L’article de Reporterre est ici.

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Face au changement climatique, la Californie interdit la vente de voitures diesel et essence dès 2035

Un article de Novethic, par Ludovic Dupin, le 27/09/2020.

L’un des grands leviers de la transition énergétique passe par la suppression des véhicules utilisant des moteurs à explosion. Le secteur des transports, très émetteurs de CO2, participe au changement climatique. C’est pourquoi la Californie a décidé d’interdire la vente des voitures essence et diesel dès 2035.

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La Californie, soumise à de terribles incendies, veut accélérer la transition énergétique des voitures. @ ssuaphoto

Pour de nombreux pays, la fin de la vente des véhicules thermiques s’inscrit pleinement dans les objectifs de diminution des émissions de CO2 et de neutralité carbone. En Europe, la France ou l’Irlande, ont fixé cette échéance à 2040. Mais en Californie, la décision a été prise d’aller plus vite. À compter de 2035, plus aucune voiture neuve vendue dans cet État ne pourra être équipée d’un moteur diesel ou à essence.

Seuls les véhicules roulant à l’électricité, à l’hydrogène et certains véhicules hybrides pourront être commercialisés sur le sol californien. La décision a été prise par le gouverneur démocrate de Californie, Gavin Newsom, pour lutter contre le changement climatique et la pollution de l’air. « C’est la mesure la plus efficace que notre État puisse prendre pour combattre le changement climatique », a-t-il expliqué dans un communiqué. Le secteur des transports, extrêmement développé en Californie, est responsable de plus de la moitié des rejets de carbone de l’État.

En première ligne face au changement climatique

« Durant de trop longues décennies, nous avons laissé les voitures polluer l’air que nos enfants et nos familles respirent. Les Californiens ne devraient pas avoir à se soucier si leurs voitures donnent de l’asthme aux enfants. Nos voitures ne devraient pas aggraver les feux de forêts (…) Les voitures ne devraient pas faire fondre les glaciers ou augmenter le niveau des océans pour menacer nos plages et nos côtes adorées », a insisté le gouverneur.

La décision intervient alors que la Californie part littéralement en fumée et que l’impact des fumées dégagées se fait ressentir jusqu’en Europe. Selon le consensus scientifique, l’ampleur exceptionnelle de ces feux de forêt est en partie liée au changement climatique, qui aggrave une sécheresse chronique et provoque des conditions météorologiques extrêmes.

Un autre pays pourrait devancer l’État américain. En effet, le Premier ministre Boris Johnson devrait prochainement annonçait une anticipation de 10 ans de cette échéance en 2030, affichant la même ambition que le Danemark. L’Écosse avait déjà envisagé ce rendez-vous pour 2032. Quant à la Norvège, l’interdiction des véhicules thermiques est espérée dès 2025.

L’article de Novethic est ici.

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Le hold-up des planteurs d’arbres sur le plan de relance

Un article de Reporterre, par Sylvain Angerand, le 17/09/2020.

Sylvain Angerand est coordinateur des campagnes de l’association Canopée

Dans le cadre du plan de relance, le gouvernement alloue 200 millions d’euros à un plan de soutien à la filière forêt-bois pour soutenir le renouvellement des forêts dans leur adaptation aux changements climatiques. Louable, mais, comme l’explique l’auteur de cette tribune, en fléchant 150 millions vers des plantations, ce plan capitule face au lobby des planteurs d’arbres et rate un virage politique nécessaire face à l’urgence.

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Nos forêts souffrent, c’est un constat unanime et partagé dans de plus en plus de régions françaises. Les sécheresses prononcées des dernières années ont entraîné des dépérissements importants, notamment dans l’est de la France. Plus inquiétant, ces dépérissements frappent aussi bien les forêts semi-naturelles que les monocultures. Il n’est pas question de nier ces faits. Mais l’ampleur du phénomène reste toutefois difficile à apprécier et il est essentiel de se garder de toute généralisation excessive et hâtive : les dernières données de l’Inventaire forestier national indiquent qu’environ 2% des arbres présenteraient une détérioration notable de leur houppier (un chiffre qui n’intègre pas encore les données de 2019).

De plus, toutes les situations ne sont pas comparables : certains peuplements souffrent mais ont des capacités de résilience, certaines essences meurent et d’autres résistent mieux. Les dépérissements observés par exemple dans les hêtraies et sapinières du Jura sont le signe d’un climat qui change plus rapidement que les capacités d’adaptation naturelle des essences. Dans ces peuplements, les dépérissements peuvent révéler une gestion passée réduisant la résilience, par exemple en modifiant significativement la composition en essences.

Dans d’autres cas, notamment les plantations monospécifiques d’épicéas autour de Verdun ou dans l’ouest de la France, c’est l’ensemble du peuplement qui s’effondre. Le réchauffement climatique joue ici davantage un rôle de révélateur d’une situation de déséquilibre : l’épicéa étant un arbre de montagne, le planter en plaine — et de surcroît en monoculture, comme cela a été fait après la guerre — le condamnait d’avance. Ces plantations sont le résultat d’une politique massive de boisement et reboisement soutenue par les pouvoirs publics à travers le Fonds forestier national, supprimé le 1er janvier 2000. Depuis cette date, certains acteurs de la filière forêt-bois ne cessent de réclamer son retour et la manne financière qui l’accompagne. Le plan présenté par le ministre de l’Agriculture exauce leur souhait avec ce qu’il présente lui-même comme le plus gros effort de reboisement depuis des décennies.

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Dans cette parcelle privée à Sewen dans les Vosges, les sapins et les épicéas dépérissent massivement..

La question se pose donc aujourd’hui, de savoir si nous ne reproduirons pas les erreurs du passé. Pour cela, il est indispensable de clarifier les conditions d’accès à ces aides.

Dans une forêt bien gérée, il n’est pas besoin de planter des arbres

La première des conditions à poser est de sortir du postulat que le reboisement est la seule option pour adapter les forêts au changement climatique. L’imaginaire collectif, entretenu par le marketing des start-up spécialisées dans la plantation d’arbres, associe le fait de planter un arbre à une bonne gestion des forêts. En réalité, dans une forêt bien gérée et en bonne santé, il n’est pas besoin de planter des arbres car la forêt se régénère naturellement par les semis des grands arbres. Face à la rapidité des changements climatiques, il peut être intéressant de venir appuyer cette dynamique naturelle avec des éclaircies bien dosées, un travail du sol superficiel et localisé, des plantations d’enrichissement par trouées ou sous le couvert, ou encore des îlots d’expérimentation, comme le fait par exemple l’Office national des forêts (ONF).

Mais dans tous les cas, la prudence doit être de mise pour éviter de déséquilibrer l’écosystème, de perdre la forêt en place et avec elle sa biodiversité et son stock de carbone. La coupe rase suivie d’un reboisement sur l’ensemble de la forêt doit rester une option de dernier recours quand aucune autre n’est possible. Elle doit être réservée aux cas de dépérissement sévère, définis par des critères clairs.

Enfin, l’option de laisser la forêt en libre évolution, y compris après un fort dépérissement, doit être reconnue comme un choix de gestion aussi responsable que le reboisement et soutenu par les pouvoirs publics. En Allemagne, des surfaces importantes d’épicéas décimés par le scolyte ont été laissées en libre-évolution : elles se sont renouvelées sans intervention de l’Homme, reconstituant des écosystèmes sans doute beaucoup plus résilients que des plantations artificielles.

Un plan qui ouvre la voie à des financements massifs de coupes rases

La deuxième condition est de s’assurer que ces aides au reboisement seront bien fléchées vers les forêts objectivement dépérissantes. Cela pourrait paraître une évidence, mais les termes utilisés par le gouvernement pour cadrer ce plan de relance (« convertir des taillis ou taillis-sous-futaie pauvres en futaie régulière ou irrégulière », « régénérer des parcelles forestières en impasse sylvicole ou ruinées ») ouvrent grand la voie à des financements massifs pour multiplier les coupes rases et la transformation en monocultures de forêts en parfaite santé. Dans notre rapport sur la gestion des forêts françaises face aux enjeux du changement climatique, nous proposons de distinguer plus clairement la notion d’impasse sanitaire de celle d’impasse sylvicole, un terme fourre-tout mis en avant par le lobby des planteurs d’arbres et qui n’a bien souvent que peu à voir avec l’état sanitaire du peuplement. L’enjeu concerne notamment les taillis, ou les mélanges futaie/taillis, qui représentent environ 40% des forêts françaises. Ces taillis, même quand ils abritent des réserves de bois de qualité, sont réputés avoir une faible valeur économique et sont trop souvent entièrement rasés pour être remplacés par des plantations, le plus souvent des résineux comme le douglas ou le pin maritime, plus recherchés par l’industrie. Mais ces forêts ne sont pas pour autant dépérissantes : diversifiées, bénéficiant d’un microclimat et parfois établies sur des sols forestiers anciens, elles sont, dans bien des situations, plus résilientes face aux sécheresses et canicules estivales qu’une jeune plantation en plein soleil établie après une coupe rase.

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Au loin, une coupe rase dans le Morvan.

Des itinéraires techniques comme le balivage qui permettent de sélectionner des arbres d’avenir sans détruire l’intégralité du couvert forestier existent et sont éprouvés. Aujourd’hui, ce type d’itinéraire n’est que rarement préconisé par les coopératives forestières qui margent bien davantage en vendant des travaux de coupes, de travail du sol et de plantation : plutôt que de rééquilibrer la donne et de soutenir ce type de pratiques, le plan de relance arrose d’argent public les partisans d’une gestion plus intensive de la forêt. Un hold-up d’autant plus regrettable que ces coupes rases font l’objet d’une vive contestation sociale, soutenue par les élus locaux dans le Morvan, et font tache d’huile dans d’autres territoires comme en Dordogne où les paysages commencent à se modifier en profondeur.

À l’initiative de la députée Mathilde Panot, une quinzaine de députés ont déposé une proposition de loi pour mieux encadrer les coupes rases et les limiter aux seules situations d’impasse sanitaire. Une proposition également mise en avant par la Convention citoyenne pour le climat mais que le nouveau ministre de l’Agriculture a écarté d’un revers de la main lors de son audition à l’Assemblée nationale.

Exiger que l’on varie les espèces sur les nouvelles plantations

La troisième condition est la diversification. Les études scientifiques convergent clairement sur ce point : une forêt mélangée est plus résiliente et résiste donc mieux aux aléas climatiques et à ses conséquences. Pourtant, aujourd’hui en France, la moitié de la forêt française est constituée de peuplements monospécifiques (soit 7,3 millions d’hectares) et 84% des nouvelles plantations sont constituées d’une seule essence. Mais la science indique également que la résilience des espèces est d’autant plus forte que celles-ci sont implantées depuis longtemps sur le territoire concerné. Lorsqu’un reboisement de l’ensemble d’une parcelle est indispensable, au moins deux conditions devraient être exigées : (1) que toute nouvelle plantation soit composée d’au moins trois espèces différentes à raison d’au moins 20% chacune ; (2) que la plantation comporte au moins 20% de plants des espèces arborescentes naturelles du lieu.

Enfin, et c’est peut-être la condition la plus importante, il est urgent de réinventer le contrat sociétal autour des forêts. La forêt doit devenir l’objet d’un débat public et les décisions doivent cesser d’être prises au sein d’un cercle d’initiés où même les associations environnementales, les syndicats ou les acteurs de la filière forêt-bois promouvant d’autres visions de leur filière sont au mieux poliment écoutés et le plus souvent exclus. L’annonce de ce plan est en malheureusement un nouvel exemple révélateur : négocié pendant l’été par le lobby des planteurs d’arbres et le ministère de l’Agriculture sans aucune consultation des associations, il vient court-circuiter un débat qui peinait à s’amorcer.

Depuis mars 2020, une feuille de route sur l’adaptation des forêts au changement climatique est attendue mais sa publication a été ralentie par Fransylva, la fédération censée rassembler tous les propriétaires forestiers privés, qui craint l’ouverture d’une brèche dans le droit des propriétaires à décider de leur gestion, ainsi que par les coopératives forestières qui craignent la remise en cause de leur modèle économique basé sur l’approvisionnement en bois des industriels et la vente de travaux forestiers.

Face à l’urgence climatique, la forêt a besoin d’investissements publics forts pour soutenir une sylviculture adaptative et permettant de restaurer la biodiversité des forêts françaises, pour relocaliser et valoriser la transformation des bois feuillus ou encore pour renforcer le budget de l’ONF et ses missions de service public. Plusieurs fois décalé, le rapport de la députée Anne-Laure Cattelot, qui devait ouvrir ce débat vient finalement d’être publié aujourd’hui : ce rapport appelle à la création d’un nouveau contrat social autour des forêts et à des conditionnalités fortes pour des aides au reboisement, notamment avec un encadrement des coupes rases. La question est désormais de savoir quel sera le poids de ces recommandations face au rouleau compresseur du lobby des planteurs d’arbres, qui n’a jamais autant été soutenu par un ministre de l’Agriculture. La balle est désormais dans le camp des députés pour tenter de rectifier le tir.

L’article de Reporterre est ici.

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Nos arbres meurent, victimes du changement climatique, et n’assurent plus aussi bien leur rôle de puits de carbone

Un article de Novethic, par Concepcion Alvarez, le 22/09/2020.

Incendies, sécheresse, mortalité précoce : le changement climatique a déjà des impacts catastrophiques sur les arbres. Ceux-ci sont pourtant essentiels pour assurer l’équilibre climatique puisqu’ils sont d’importants puits de carbone. Si leur capacité de stockage est mise en danger, nos efforts pour réduire les émissions de gaz à effet de serre devront être d’autant plus importants.

En forêt de Montmorency (Val d’Oise), les châtaigniers supportent mal le changement climatique. Sur 1500 hectares, près de 500 dépérissent, en raison d’hivers trop doux, de pluies trop abondantes sur de courtes durées et de la sécheresse.
@ONF

En Australie, en Amazonie, en Arctique, ou dans l’Ouest américain, ce sont les mêmes images de feux dévastateurs. Moins visibles, ce sont aussi des milliards de tonnes de gaz à effet de serre qui se trouvent relâchées dans l’atmosphère. En 2019, les émissions ont atteint 7,8 milliards de tonnes, soit un cinquième des émissions liées à la combustion des énergies fossiles. Les chercheurs prévoient qu’au cours des prochaines années, la fréquence des incendies pourrait augmenter considérablement en raison du réchauffement climatique, avec 27 % de plus de feux de forêt dans le monde en 2050 qu’en 2000.

En France, les effets conjugués des canicules et des sécheresses à répétition ont également porté un coup dur aux forêts ces dernières années. Le manque d’eau a fait disparaître des centaines d’arbres centenaires, notamment dans le Grand Est et en Bourgogne Franche-Comté. En dix ans, la moitié des peuplements étudiés ont vu leurs précipitations estivales diminuer de plus de 25 %. En réaction, les arbres « arrêtent de transpirer » et ferment leurs stomates. Ils absorbent alors beaucoup moins de CO2 et jouent donc moins intensément leur rôle de puits de carbone. Autre effet collatéral, ils sont plus vulnérables face aux crises sanitaires – celles-ci étant accrues par les hivers doux – et doivent parfois être abattus.

L’écosystème peut redevenir source de carbone

Selon l’Office national des forêts (ONF), depuis 2019, 220 000 hectares de forêts publiques françaises (soit environ 20 fois la superficie de Paris) subissent un taux de mortalité inédit en raison de l’accélération du changement climatique. Et dans les 50 prochaines années, 60 % des territoires occupés aujourd’hui par les grandes essences forestières sortiront des limites climatiques acceptables. « Ce qui est menacé, c’est le stockage du carbone. L’écosystème peut redevenir source de carbone alors qu’il était puits de carbone », alerte Sylvain Delzon, biologiste écologue à l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae) à Bordeaux.

Outre les incendies et la sécheresse, les arbres sont aussi directement impactés par la hausse du CO2 dans l’atmosphère. Celle-ci stimule la vitesse de croissance des arbres mais ces derniers sont plus vulnérables et meurent plus rapidement, dévoile une récente étude publiée dans la revue Nature Communications. Et cela est valable quelle que soit l’espèce étudiée ou la région où elle pousse. « Les taux d’absorption du carbone par les forêts sont susceptibles de diminuer car les arbres à croissance lente et persistante sont remplacés par des arbres à croissance rapide mais plus vulnérables », avance Steve Voelker, co-auteur de l’étude.

Mélanger des essences méridionales avec les essences locales

Les arbres sont essentiels à l’équilibre climatique. En France, le secteur de la forêt constitue la majeure partie du puits de carbone et permet de compenser une partie des émissions des autres secteurs. La Stratégie nationale bas-carbone (SNBC) envisage une hausse de 87 % du puits du secteur forestier jusqu’en 2050 par rapport à un scénario tendanciel. Mais ces prévisions risquent d’être mises à mal.

Pour protéger la forêt, un rapport, remis au gouvernement le 17 septembre, préconise de planter un arbre par habitant pendant 30 ans et de créer un fonds pour l’avenir de la forêt, doté de 300 millions d’euros par an sur 30 ans. Dans son plan de relance, Matignon est presque à la hauteur avec une enveloppe de 200 millions d’euros pour la forêt, dont 150 millions pour le reboisement d’environ 50 millions d’arbres permettant de capter 150 000 tonnes de CO2 supplémentaires chaque année.

L’ONF travaille quant à lui à créer des « forêts mosaïques » basées sur un mélange des essences (avec des arbres méridionaux mieux adaptés au climat actuel et des arbres issus de la régénération naturelle avec les essences déjà en place) et une diversification des modes d’intervention (plantation, régénération naturelle, libre évolution). La course contre la montre a démarré. 

L’article de Novethic est ici.

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Les deux tiers des fruits non bios contiennent des résidus de pesticides

Un article de Reporterre, le 16/09/2020.

En 2017, les deux tiers — 66,70 % — des fruits non bios contenaient des résidus de pesticides quantifiés, et 45 % des légumes non bios contenaient des résidus de pesticides quantifiés.

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Photo : Pxhere

Ces chiffres, dévoilés mercredi 16 septembre par l’ONG Générations futures, sont plus importants que ceux communiqués par les pouvoirs publics. Dans ces plans de surveillance, la Direction générale de la répression des fraudes (DGCCRF) annonçait des résidus de pesticides dans 63 % des fruits et 43 % des légumes. Et pour cause, la DGCCFR mélangeait dans ces calculs les produits bios et non bios.

« Les pourcentages des fruits et légumes non bios contenant des résidus de pesticides ne sont donc pas connus et encore moins communiqués », s’est indigné l’association, qui « proteste contre cette situation et demande qu’à l’avenir une présentation par mode de culture soit effectuée en plus de la présentation globale des résultats ».

L’article de Reporterre est ici.

Source : Générations futures.

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Planète en danger : la nouvelle alerte des Nations Unies pour sauver la biodiversité

Un article de Novethic, par Concepcion Alvarez, le 16/09/2020.

Quelques jours après le WWF, c’est au tour des Nations Unies de tirer la sonnette d’alarme sur l’état de la biodiversité dans le monde. Dans sa cinquième édition des Perspectives mondiales de la diversité biologique, la Convention cadre sur la diversité biologique (CBD) constate qu’aucun des objectifs pris au niveau international il y a dix ans n’a été atteint et alerte sur le tournant que nous sommes en train de vivre. Mais il n’est pas trop tard…

Rhinopithèque doré

Le rhinopithèque doré du Yunnan (singe au nez retroussé) est une espèce de singe vivant exclusivement en Chine et menacée d’extinction. Il est considéré comme trésor national, au même titre que le panda géant. @ Joel Sartore / National Geographic / Photo Ark

« L’humanité se trouve à la croisée des chemins en ce qui concerne l’héritage que nous souhaitons laisser aux générations futures », a déclaré Elizabeth Maruma Mrema, la secrétaire exécutive de la CBD (Convention cadre des Nations Unies sur la diversité biologique). « Le rythme de la perte de biodiversité est sans précédent dans l’histoire de l’humanité et les pressions sur le monde naturel s’intensifient. Les systèmes vivants de la Terre dans leur ensemble sont en danger. Les décisions et les mesures que nous prenons maintenant auront de profondes conséquences, bonnes ou mauvaises pour toutes les espèces, y compris la nôtre », a-t-elle ajouté.

La CBD vient de publier, ce mardi 15 septembre, la cinquième édition des Perspectives mondiales de la diversité biologique, qui dresse l’état de la nature à l’échelle mondiale. Ce rapport doit servir à poser les bases d’un nouveau cadre mondial pour la biodiversité post-2020 et la définition de nouveaux objectifs, lors de la prochaine COP15 Biodiversité, reportée en raison du Covid-19 et prévue pour le mois de mai 2021, à Kunming, en Chine.

Un bilan catastrophique des objectifs d’Aichi

Le document présente également le bilan des objectifs d’Aïchi pour la période 2010-2020, adoptés par la communauté internationale pour stopper l’érosion de la biodiversité. « Aucun d’entre eux ne sera entièrement réalisé, ce qui menace à son tour la réalisation des objectifs de développement durable et entrave les efforts pour lutter contre les effets des changements climatiques », souligne le texte. Dans le détail, seulement sept des 60 critères de réussite des 20 objectifs ont été atteints et 38 montrent des progrès.

Par exemple, les éléments de l’objectif 11 concernant les proportions de terres et de mers protégées ont été atteints, mais les éléments liés à la qualité des zones protégées ne l’ont pas été. De même, pour l’objectif 19, les connaissances sur la biodiversité se sont améliorées mais elles n’ont pas été largement partagées ou mises en œuvre. En ce qui concerne la cible 20, l’aide publique au développement a été multiplié par deux mais les ressources n’ont pas augmenté de façon homogène.

Des raisons d’y croire encore

Cependant, tout n’est pas noir dans cet état des lieux. Les transitions nécessaires pour aller de l’avant ont été initiés et pratiquement tous les pays prennent des mesures pour protéger la biodiversité. Les taux de déforestation ont par exemple baissé d’un tiers comparé à la décennie précédente, l’éradication des espèces exotiques envahissantes dans les îles augmente, la sensibilisation à la biodiversité semble se renforcer, près de 100 pays ont intégré les valeurs de la biodiversité dans les systèmes de comptabilité nationaux et les récentes mesures de conservation ont réduit le nombre d’extinctions.

Ce qui fait dire à la CBD qu’il n’est pas encore trop tard pour ralentir, arrêter, puis inverser les actuelles tendances alarmantes de la perte de biodiversité. Le rapport indique en outre les transitions à mener pour un changement de cap : intensifier encore les efforts de conservation et de restauration de la biodiversité, lutter contre le changement climatique, transformer la manière dont nous produisons et consommons et prendre des mesures contre la pollution, les espèces exotiques envahissantes et la surexploitation.

« Une partie de la relance doit s’attaquer au double défi mondial du changement climatique et de la perte de biodiversité de manière plus coordonnée, en comprenant à la fois que le changement climatique menace de saper tous les efforts de conservation de la biodiversité et que la nature elle-même offre certaines des solutions les plus efficaces pour éviter les pires impacts d’une planète qui se réchauffe » a déclaré Antonio Guterres, le secrétaire général des Nations-Unies.

L’article de Novethic est ici.

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Les incendies américains sont si puissants que leur fumée atteint la France

Un article de Novethic, par Marina Fabre, le 17/09/2020.

Les monstres de feu qui dévastent l’ouest américain ne faiblissent pas et leur puissance est telle que la fumée qu’ils dégagent ont atteint l’Europe en traversant l’Atlantique. Telles sont les résultats observés par le réseau de surveillance satellitaire Copernicus. Le ciel du Nord de la France a même été voilé par ces émanations.

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En Californie, plusieurs villes sont enveloppées d’une épaisse couche de fumée que les incendies dégagent. @DavidMcnew/GETTY IMAGES NORTH AMERICA / Getty Images via AFP

Alors que les incendies ont ravagé plus de deux millions d’hectares en Californie, dans l’Oregon et dans l’État de Washington, les feux menaçaient hier encore l’observatoire historique du mont Wilson de Los Angeles. Grâce aux observations satellites, le service de surveillance de l’atmosphère de Copernicus (Cams) a constaté que la fumée particulièrement épaisse de ces feux, avait traversé tous les États-Unis, en passant par New York, pour atteindre l’Europe du Nord.

La fumée a déjà atteint l’Hexagone la semaine dernière. Le samedi 12 septembre en effet, des spécialistes météo ont constaté que la fumée des incendies de l’ouest américain avait obscurci le ciel du nord de la France. Guillaume Séchet, météorologiste sur BFMTV a même expliqué sur Twitter que le ciel parisien était troublé par ces incendies. Un nouvel épisode est attendu pour ce week-end.

Si la qualité de l’air en Europe ne devrait pas être dégradée par ces fumées, aux États-Unis en revanche, l’impact est considérable. Les feux émettent beaucoup de fumée, et ceux de la Californie et de l’Oregon ont déjà relâché dans l’atmosphère « bien plus de carbone en 2020 qu’aucune autre année depuis le début des mesures du CAMS en 2003 »: 21,7 mégatonnes en Californie et 7,3 mégatonnes dans l’Oregon. « Le fait que ces incendies émettent tellement de pollution dans l’atmosphère que nous pouvons encore voir de la fumée épaisse 8 000 km plus loin reflète à quel point ils sont dévastateurs, en termes d’ampleur et de durée », a expliqué Mark Parrington, scientifique du Cams.

Une accélération des incendies

L’indice de qualité de l’air est si mauvais que le gouverneur de Californie, Gavin Newsom, a déclaré que respirer une journée dans les lieux touchés par les incendies revenait à fumer 400 cigarettes. Dans les grandes villes comme Seattle, San Francisco ou encore Los Angeles, la qualité de l’air est classée comme « malsaine » et à certains endroits comme « dangereuse ». Et les fumées, au-delà de la dégradation de la qualité de l’air, plongent certaines villes dans la pénombre.

C’est le cas de San Francisco dont le ciel, le 10 septembre, est totalement devenu orange, renvoyant des images apocalyptiques. Si l’ancien président Barack Obama a de suite expliqué que cette situation était liée au changement climatique, se rangeant derrière le consensus scientifique, l’actuel hôte de la Maison Blanche, Donald Trump, a créé la polémique en refusant cette thèse. Il a accusé les gouverneurs des États touchés par les incendies d’avoir mal débroussaillé les forêts.

Selon le service européen Copernicus sur le changement climatique, ces incendies, qui surviennent après une vague de chaleur record et des vents forts et secs, sont des « dizaines de fois » plus intense que la moyenne des quinze dernières années. Les autorités californiennes ont même calculé que 17 des 20 plus grands incendies de forêt dans l’État ont eu lieu depuis 2000. « Depuis les années 1970, la Californie a connu une multiplication par cinq de la superficie brûlée annuelle et une multiplication par huit de l’étendue des feux de forêt en été », rapporte à Cbsnews le Dr John Abatzoglou, climatologue à l’université de Californie à Merced.

L’article de Novethic est ici.

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Pollution : le transport maritime entraîne plus de 60 000 décès par an

Un article de La Relève et La Peste, par Augustin Langlade, le 27 janvier 2020.

Selon une étude de l’université de Rostock en Allemagne, le transport maritime serait la cause de 60 000 décès prématurés chaque année. Ce type de pollution coûterait ainsi aux pays européens environ 58 milliards d’euros de frais de santé, résultat indirect mais flagrant d’une politique ultra-libérale menée depuis des décennies par tous les gouvernements, qui non-contents de faire des cadeaux fiscaux aux armateurs, paient ensuite les conséquences de leur pollution.

Les paquebots de croisière sont sûrement les pires facteurs de pollution des côtes et des villes portuaires. Alors que leurs navires fonctionnent pour la plupart au fioul lourd, un combustible extrêmement toxique, les compagnies de croisières maritimes jouissent de privilèges intolérables à l’heure où le moindre automobiliste paie des taxes écologiques.

La plus grande pollution d’Europe

Imaginez une ville luxueuse voguant sur les eaux et s’amarrant nonchalamment au quai d’une grande ville portuaire comme Marseille, Venise ou Barcelone. Des milliers de touristes se déversent de ce titan de 60 000 tonnes et rejoignent les centaines de bus qui les attendent sur plusieurs kilomètres, prêts à les emmener dans le centre historique, où ils s’attablent en toute hâte, dévorent quelques spécialités locales, prennent une rafale de photos avant de repartir aussi vite à leur ville utopique, qui vogue alors vers d’autres continents.

Cette ville-là est un gigantesque paquebot de croisière, fleuron de l’industrie navale, éclairé, chauffé, climatisé par ses réservoirs immenses de fioul lourd. On y danse, on y rit, on y mange et on y rêve pendant une semaine idyllique, qui vous requinque pour l’année à venir, en échange de quelques milliers d’euros. Imaginez maintenant que ces navires de croisière, qui sont plus de deux cents à écumer chaque année les ports européens, avec pour seule utilité le tourisme de masse et le divertissement, se trouvent être également les plus gros pollueurs de notre continent. Contrairement aux autres moyens de transport, ces paquebots de luxe ne servent à rien. Et pourtant, ils polluent vingt fois plus que les 260 millions de voitures qui composent le parc européen.

Le fioul que ces navires consomment est un sous-produit du pétrole, une sorte de carburant peu raffiné, de basse qualité, ne pouvant plus être utilisé dans nos automobiles, tant il émet de particules fines, d’oxyde d’azote et de dioxyde de soufre, les polluants les plus toxiques pour la santé humaine et les plus dangereux pour les océans. C’est ce que montre noir sur blanc une étude réalisée par l’ONG Transport & Environment et publiée le 5 juin 2019. Intitulé « Une entreprise pour les polluer tous » (et dans les ténèbres les lier), ce rapport sans concession révèle que les navires du premier opérateur mondial de croisières de luxe, Carnival Corporation, émettent dix fois plus d’oxydes de soufre le long de notre continent que l’ensemble du parc automobile européen. Le second opérateur mondial quant à lui, Royal Carribean, en émet quatre fois plus.

Permis de polluer

Comme nous le disions, au moins 200 paquebots sillonnent tous les ans les côtes européennes, à commencer par celles de l’Espagne, de l’Italie, de la Grèce et de la France, les pays les plus exposés. En 2017, cette armada de la mort a déversé quelque 60 000 tonnes de dioxyde de soufre rien que sur le continent européen et ce chiffre, qui n’est qu’une estimation, ne tient pas compte des autres gaz polluants et des entorses à la limitation. En ce qui concerne les oxydes d’azote et les particules fines, les taux sont plus spécifiques : on apprend par exemple qu’au Danemark, les émissions de ce type que rejettent les villes flottantes dépassent largement celles de toutes les automobiles du pays…

En moyenne, les combustibles des paquebots de croisière dégagent de 1 500 à 3 000 fois plus de dioxyde de soufre que ceux des voitures et n’ont même pas de filtres à particules. Alors que la tolérance pour les engins roulant au diesel s’arrête à 0,001 % de dioxyde de soufre, les navires de croisière jouissent d’un seuil maintenu à 1,5 %, ce qui expose les populations portuaires (a minima) à une pollution extraordinairement élevée, sans parler de celle qui sévit sur les mers et les océans.

Un paquebot consomme 2 000 litres de fioul lourd par heure en pleine mer et 700 litres par heure lorsqu’il est à quai. Pour promener ses six mille vacanciers en mal d’exotisme et de luxe, il recrache donc l’équivalent toxique d’un bon petit million de voitures. Quand ils stationnent sur les côtes ou à quai, ces navires continuent de pomper du fioul plutôt que d’acheter de l’électricité, qui finalement leur coûterait plus cher, sachant que le carburant qu’ils consomment est très peu taxé. En résumé, ils semblent jouir d’une certaine bénédiction de la part des autorités, même si l’air et la mer sont pour eux deux gigantesques poubelles duty free.

Le transport routier, mais aussi les usagers simples de voitures lorsqu’ils achètent du carburant, paient des taxes renforcées chaque année par la pression écologique, tandis que le transport maritime, pour sa part, n’en paie presque aucune, du moins pas sur les combustibles. Ajoutons à cela qu’en matière maritime, tous les contournements sont permis et que la plupart des navires de croisière chargent du fioul d’une qualité bien inférieure à ce que stipule la règlementation, comme le prouve l’affaire de l’Azura, un paquebot dont le capitaine a été condamné en 2018 à une amende de 100 000 euros pour avoir enfreint les normes antipollution. Espérons que cette amende fasse office de précédent.

60 000 morts chaque année

Selon une étude de l’université de Rostock en Allemagne, publiée en 2015, le transport maritime serait la cause de 60 000 décès prématurés chaque année. Ce type de pollution coûterait ainsi aux pays européens environ 58 milliards d’euros de frais de santé, résultat indirect mais flagrant d’une politique ultra-libérale menée depuis des décennies par tous les gouvernements, qui non-contents de faire des cadeaux fiscaux aux armateurs, paient ensuite les conséquences de leur pollution.

Depuis cinq ans et la sixième annexe de la convention Marpol, la Manche, la mer du Nord et la mer Baltique sont mieux protégées contre ces émissions toxiques, les taux de soufre dégagés par les navires étant limités à 0,1 %. Mais ce n’est le cas ni pour la façade Atlantique, ni pour la Méditerranée, qui subissent encore tous les effets délétères du vieux monde et un immobilisme accablant de l’État français. À ce titre, Marseille est sûrement la ville française la plus exposée. En faisant payer aux conducteurs des taxes écologiques et en fermant les yeux sur les paquebots extrêmement polluants, il est donc clair que nos gouvernements successifs ont orchestré la danse des privilèges.

En se vantant d’avoir signé ce mois-ci un contrat de construction de plusieurs paquebots devant carburer au « gaz naturel », jugé plus propre, et en favorisant par ailleurs la pollution systématique des côtes et des villes portuaires, ainsi que de l’océan, les dirigeants actuels prouvent une fois de plus leur irresponsabilité et leur hypocrisie, qui deviendront certainement légendaires pour les générations futures, si elles existent.

L’article de La Relève et La Peste est ici.

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En cinquante ans, les animaux sauvages ont décliné de 68 % en raison des activités humaines

Un article de Novethic, par Concepcion Alvarez, le 10/09/2020.

C’est le plus fort déclin jamais constaté en cinquante ans. Depuis 1970, le rapport Planète vivante du WWF, publié tous les deux ans pour suivre l’état de nos écosystèmes, a calculé que 68 % des populations de vertébrés sauvages (poissons, mammifères, oiseaux, amphibiens et reptiles) ont disparu. En cause, les activités humaines au premier rang desquels l’agriculture, fortement consommatrice de terres.

Moineau domestique

Le moineau domestique a connu une baisse de 60 % de sa population depuis 1980 en France.

L’anguille européenne, le moineau domestique, la tortue luth en Guyane et au Costa Rica, le gorille des plaines orientales de la République démocratique du Congo, les perroquets gris du Gabon, ou encore l’esturgeon chinois. Toutes ces espèces ont quasiment disparu ou sont en danger critique d’extinction, en raison de la surpêche, de la pollution, du braconnage, de la destruction des milieux et du changement climatique. Au total, selon le nouveau rapport Planète vivante du WWF, publié ce 10 septembre, 68 % des populations de vertébrés sauvages ont disparu en seulement cinquante ans.

« Le constat de notre rapport Planète vivante est révoltant et le manque d’action pour inverser la courbe de ce déclin inacceptable. Les chiffres sont conformes à nos prévisions les plus pessimistes de 2016. Il doit d’autant plus nous inquiéter que nous sommes en pleine pandémie de Covid-19 dont les racines sont liées à nos modes de production et de consommation et à la perte de biodiversité « , s’est alarmé Véronique Andrieux, directrice générale du WWF France. Et les chiffres sont encore plus inquiétants pour les milieux d’eau douce – zones humides, lacs ou rivières – avec un déclin moyen de 84 %. Les sous-régions tropicales des Amériques sont également les plus touchées avec un déclin de 94 %, le plus important jamais observé depuis 1970.

Les activités humaines, principale cause de destruction de la biodiversité

Ce déclin de la nature est étroitement lié aux activités humaines avec pour première cause directe de perte de biodiversité, la destruction des habitats pour l’agriculture industrielle. Elle est ainsi responsable de 80 % de la déforestation. Au total, 75 % des terres émergées ont été dégradées et un tiers d’entre elles sont aujourd’hui dédiées à l’agriculture. Cette dégradation concerne aussi les océans puisque seuls 13 % sont exemptés d’activités humaines et les zones humides ont perdu 85 % de leurs superficies.

Le dérèglement climatique est également en cause. Aujourd’hui classé parmi les cinq menaces majeures, il pourrait devenir la première cause de disparition des espèces si rien n’est fait, entraînant la disparition d’au moins 20 % des vertébrés sauvages à horizon 2100. En 2016, le Melomys de Bramble Cay, un petit rongeur présent jusqu’alors en Australie, avait fait la une des journaux étant la première extinction connue de mammifère directement liée au changement climatique.

Inverser la courbe   

« La destruction des écosystèmes à des fins agricoles demeure la principale cause du déclin de la biodiversité. Les solutions passent par la diminution de moitié de la consommation de viande, la lutte contre le gaspillage alimentaire et la transition agroécologique. Nous exhortons les décideurs à prendre leurs responsabilités pour aboutir à un accord ambitieux pour la nature et l’homme lors de la COP15 et mettre la France et l’Union européenne sur la voie d’une PAC (Politique agricole commune, NDR) plus verte, d’une relance réellement au service de la biodiversité et de la lutte contre la déforestation importée », plaide Arnaud Gauffier, directeur des Programmes au WWF France. 

L’ONG défend également un renforcement des efforts de conservation et l’extension du réseau mondial d’aires protégées. L’ébauche du texte qui sera négocié lors la COP15 Biodiversité, organisé en Chine en mai prochain, propose de protéger au moins 30 % de la planète d’ici 2030 et au moins 10 % sous stricte protection, ces pourcentages étant à négocier. Le WWF recommande en outre un engagement sur l’arrêt des extinctions d’espèces du fait de l’homme et la réduction de moitié de l’empreinte écologique de l’humanité.

L’article de Novethic est ici.

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Suspension de l’autorisation de la chasse de la tourterelle des bois

  Un article du Conseil d’État, le 11/09/2020.

Le juge des référés du Conseil d’État suspend aujourd’hui l’autorisation de la chasse de la tourterelle des bois pour la saison 2020-2021. Il note en effet que l’espèce a diminué de près de 80% en 15 ans, que les experts recommandent l’interdiction de la chasse de cet oiseau sauvage et que le Gouvernement n’a pas apporté d’élément permettant de justifier son autorisation.

Tourterelle des bois

La Ligue pour la protection des oiseaux et l’association One Voice ont demandé au juge des référés du Conseil d’État de suspendre l’arrêté du 27 août 2020 qui autorise la chasse de la tourterelle des bois et fixe à 17 460 spécimens le quota maximal de prélèvements.

Le juge des référés du Conseil d’État a tout d’abord relevé que le nombre de tourterelles en Europe a diminué de près de 80% entre 1980 et 2015, tout particulièrement sur la voie de migration occidentale dont fait partie la France.

Il a ensuite rappelé que, pour faire face à un tel déclin, les États signataires de l’accord sur la conservation des oiseaux d’eau migrateurs d’Afrique-Eurasie (« AEWA »), dont fait partie la France, ont élaboré en 2018 un « plan d’action international pour la conservation de la tourterelle des bois ». En vertu de ce plan, la France s’est engagée à élaborer un « cadre solide de modélisation de la gestion adaptative » pour la chasse de cette espèce.

Le juge des référés du Conseil d’État a observé que le comité d’experts sur la gestion adaptative (CEGA), qui réunit notamment des représentants de la fédération nationale des chasseurs et de l’office français de la biodiversité, a recommandé d’interdire la chasse de cette espèce afin d’enrayer son déclin. Il a par ailleurs relevé que cette espèce ne faisait à l’heure actuelle l’objet d’aucune mesure de conservation spécifique, l’administration ayant notamment différé, compte tenu de l’état d’urgence sanitaire, l’adoption du plan national de gestion de la tourterelle du premier semestre de l’année 2020 à celui de l’année 2021.

Enfin, il a observé que le quota de prélèvements fixés par l’arrêté, en très légère diminution par rapport à l’année précédente, avait été uniquement déterminé au regard du constat d’une baisse tendancielle de la population européenne sur les décennies passées. Or, selon le juge des référés, un tel constat aurait dû conduire le gouvernement à interdire la chasse à la tourterelle des bois, et non à réduire proportionnellement le quota maximal de prélèvements.

Pour toutes ces raisons, le juge des référés a prononcé la suspension de l’arrêté du 27 août 2020.

L’article du Conseil d’État est ici.

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Chasseurs contre protecteurs de la nature : le débat de l’été fait long feu

Un article de Novethic, par Concepcion Alvarez, le 02/09/2020.

Jamais nous n’aurons autant entendu parler de chasse. L’été a été ponctué de rencontres, de tribunes, de menaces de manifestations et de bad buzz sur les réseaux sociaux. Finalement, l’Élysée est resté au milieu du guet en interdisant d’une main la chasse à la glu, mais en autorisant de l’autre la chasse de 18 000 tourterelles, espèce menacée d’extinction. Pour les défenseurs de l’environnement, la pratique ne peut plus se justifier face à l’urgence de la protection de la biodiversité.

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Les chasseurs, qui se décrivent comme les premiers protecteurs de la nature, peinent de plus en plus à convaincre l’opinion publique. @CC0

Un sujet aura particulièrement marqué notre été : celui de la chasse. La nouvelle campagne de recrutement des chasseurs, avec des vidéos au ton parfois douteux, a fait le buzz sur les réseaux. De même que la préface polémique du livre de Willy Schraen, Président de la Fédération nationale de chasse, par l’actuel ministre de la Justice, Éric Dupond-Moretti, qui y dénonce les « ayatollahs de l’écologie ». Le point d’orgue a eu lieu la semaine dernière avec la décision très attendue de suspendre pour un an la chasse à la glu, alors que la France est le dernier pays au sein de l’Union européenne à la pratiquer.

« Les chasseurs ne peuvent pas comprendre que cette pratique soit sacrifiée au nom d’un affichage politique ‘vert’, sans fondement réel pour qui se préoccupe réellement de biodiversité au sein des territoires, comme nous le faisons au quotidien ! » a réagi Willy Schraen dans un communiqué (1). Mais c’est justement sur le terrain de la biodiversité que la chasse, troisième loisir français derrière le foot et la pêche avec environ un million d’adeptes, constitue de plus en plus un sujet de crispation face aux questions de biodiversité et de bien-être animal.

« Un carnage »

Au total, 90 espèces sont chassables en France dont 64 espèces d’oiseaux, « contre 20 à 30 en moyenne dans le reste de l’Europe » précise Allain Bougrain-Dubourg. Parmi elles, « une vingtaine figurent dans la liste rouge de l’UICN (Union internationale pour la conservation de la nature) et sont à l’agonie, telles que les tourterelles des bois, les barges à queue noire, les grands tétras ou encore les courlis cendrés », alerte le président de la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO). À chaque saison, l’association multiplie les recours devant le Conseil d’État ou la Cour européenne de justice.

« La chasse de loisirs ne peut pas être compatible avec la protection de la biodiversité », assure Pierre Rigaux, expert naturaliste. « C’est objectivement un carnage car les chasseurs n’ont pas de formation au tir et le comptage des animaux tués est loin d’être systématique, à tel point qu’on ne peut l’estimer qu’au travers d’enquêtes ponctuelles réalisées certaines années par l’OFB (Office français de la biodiversité) », ajoute-t-il. Selon ses calculs, sur les 20 millions d’animaux qui seraient tués chaque année, les trois-quarts seraient sauvages, le quart restant provenant d’élevages de gibiers. Mais si on y ajoute les animaux blessés ou non retrouvés, le chiffre doublerait au moins.

Manque d’études sur les impacts de la chasse

« Les chasseurs ne représentent certes qu’un facteur parmi beaucoup d’autres expliquant le déclin de la biodiversité, mais c’est l’un des seuls leviers qu’on peut activer », estime Frédéric Jiguet, ornithologue et biologiste de la conservation. En tant que membre du comité d’experts sur la gestion adaptative des espèces (Céga) et du Conseil national de la chasse et la faune sauvage (CNCFS), il dénonce à la fois le poids démesuré des représentants de la chasse dans ces instances consultatives, la faiblesse des moyens mis en œuvre pour faire respecter les arrêtés et le manque d’études scientifiques sur les impacts de la chasse.

« Pour la tourterelle des bois, nous avions conseillé de porter le quota à zéro pour avoir une chance sur deux de stabiliser les populations, mais c’est le seuil de 18 000 (animaux tuables) qui a finalement été retenu », déplore le scientifique. « Outre les espèces menacées, on peut aussi s’interroger sur la pertinence de chasser les espèces dites nuisibles. Pour les sangliers, on pourrait par exemple arrêter de les agrainer (appâter les animaux avec du grain, ndr), ce qui favorise leur multiplication. Pour les renards, deux études montrent qu’en les chassant, on ne fait pas baisser leur nombre et pire encore, on les disperse davantage sur le territoire. De même pour les blaireaux, la vaccination apparaît plus efficace. Souvent, des alternatives existent mais elles ne sont pas évaluées. » 

S’ils peinent à convaincre l’opinion publique, à en croire les récents sondages, les chasseurs semblent en revanche avoir l’oreille du Président et plus généralement des politiques et des élus. À leur crédit, ils font désormais figurer des actions de protection de la nature telles que la plantation des haies ou l’entretien de mares pour lesquelles ils se voient verser des subventions publiques, parfois au détriment des associations environnementales. De quoi attiser encore un peu les tensions entre ces deux mondes plus que jamais à l’affût.

L’article de Novethic est ici.

(1) Sollicitée à de nombreuses reprises, la Fédération nationale de la chasse n’a pas donné suite à nos demandes d’entretien.

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Dans le Nord, le combat de villageois contre le géant belge de la frite surgelée continue

Un article de Reporterre, par Didier Harpagès, le 28/08/2020.

  • Dunkerque (Nord), correspondance

Clarebout Potatoes, l’un des plus grands producteurs mondiaux de frites surgelées, projette d’installer une usine dans les environs de Dunkerque. Un projet similaire avait été abandonné en Belgique sous la pression des opposants, mais l’État français vient d’autoriser cette installation, au grand dam des riverains.

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Lorsque l’on navigue sur le site internet de la société Clarebout Potatoes et que l’on dispose de quelques convictions en matière de protection de l’environnement, on peut être agréablement surpris de lire ces propos pour le moins encourageants :

« Clarebout est une entreprise fermement décidée à collaborer à la mise en œuvre d’un monde durable. […] Nous entendons bâtir des relations durables avec les riverains et la communauté locale. À travers l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement, nous demandons à chacun de se comporter de façon éthique et de faire preuve de respect pour l’homme et l’environnement. »

Créée en 1988, Clarebout Potatoes, entreprise familiale belge spécialisée dans la production de produits surgelés, dont la matière première est la pomme de terre, est devenue un des leaders mondiaux de ce secteur. Elle réalise principalement des frites de différentes formes mais aussi des pommes Duchesse, ou encore des pommes noisette et même de la purée. Actuellement, deux unités de production sont implantées en Belgique, à Neuve-Eglise (250 tonnes par jour) et Warneton (1.140 tonnes par jour avec possibilité d’augmenter la production à 3.000 tonnes). Une grande partie des produits Clarebout (80 %) est destinée au marché européen.

Aides à l’investissement, dispense partielle d’impôts fonciers, de taxes d’aménagement et de la fiscalité sur les bénéfices pendant cinq ans. 

En janvier 2019, ses dirigeants sont venus à Frameries, toujours en Belgique, exposer leur projet d’usine à frites de 2.300 tonnes par jour et dont le chiffre d’affaires annuel devait atteindre 650 millions d’euros. Les apparentes convictions écologiques affichées par l’entreprise belge n’ont pas dupé la population de Frameries qui, grâce à une mobilisation citoyenne et le soutien des élus, est parvenue à bloquer le projet, invoquant les nombreuses nuisances provoquées par cette production industrielle, les pénibles conditions de travail ainsi que la précarité des emplois.

Clarebout Potatoes s’est alors tourné vers la région dunkerquoise puisque les administrateurs du Grand port maritime de Dunkerque (GPMD) lui ont offert la possibilité de construire une unité de production sur la zone grande industrie (ZGI), non nécessairement liée à l’activité maritime. Il se trouve qu’en 1974, le Port autonome de Dunkerque (devenu en 2008 le GPMD) expropria 1.600 hectares sur les communes de Gravelines, Loon-Plage, Craywick, Bourbourg et Saint-Georges-sur-l’Aa afin de procéder à son extension en vue de concurrencer le port d’Anvers. Aujourd’hui, 20 hectares situés en grande partie sur le territoire de Saint-Georges-sur-l’Aa (330 habitants) et dans une mesure moindre sur celui de Bourbourg (7.000 habitants), ont été attribués par le GPMD à Clarebout pour y bâtir son unité de production. Celle-ci a fait l’objet d’une demande de permis de construire le 11 juillet 2019. Le nouveau projet (1.400 tonnes par jour, dont 1.150 tonnes de frites surgelées) présente certes quelques avantages pour l’entreprise belge. La ZGI étant située sur une zone d’aide à la finalité régionale (AFR), Clarebout bénéficiera d’aides à l’investissement et sera dispensée partiellement d’impôts fonciers, de taxes d’aménagement et de la fiscalité sur les bénéfices pendant cinq ans.

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Le site d’implantation de l’usine.

Elle pourra aussi bénéficier des infrastructures du port de Dunkerque pour l’exportation de ses produits finis, ainsi que du savoir-faire local, puisque la Flandre intérieure française est une région de production de pommes de terre. À ce titre, des producteurs de la région, ceux que certains appellent « les patatiers », ont de bonnes raisons de se réjouir de l’implantation de Clarebout puisque ce groupe a déclaré que la matière première proviendra d’un territoire local situé dans un rayon de soixante kilomètres autour de l’usine.

Des nuisances multiples 

Marguerite [1], dunkerquoise et étudiante en agroécologie, s’est intéressée au dossier Clarebout. Elle dénonce ce projet qui, selon elle, contredit la politique agricole et alimentaire définie par la Communauté urbaine de Dunkerque (CUD), sur le territoire de laquelle se situe le GPMD :

«En mars 2018, dit-elle, la CUD a défini quatre orientations. Il s’agissait d’accompagner les pratiques agricoles durables, de développer les circuits courts de proximité et biologiques pour créer de l’emploi local, de remettre ce que l’on mange là où l’on vit et d’encourager les pratiques alimentaires favorables à la santé. Ce projet d’usine à frites congelées va à l’encontre des objectifs affichés. De plus, il s’agit de favoriser la création d’emplois, 320 nous dit-on, sans se poser la moindre question sur le contenu de ces emplois, sur leur rémunération ni sur les conditions de travail imposées! D’autre part, le volume de la production de cette usine serait de 1.400 tonnes de pommes de terre transformées chaque jour [511.000 tonnes par an], soit 15% de la production annuelle des Hauts-de-France [2] : monstrueux!»

Marguerite est en contact régulier avec le collectif Non à la friture sur Saint-Georges-sur-l’Aa, dont la plupart des membres actifs vivent dans ce village. Certains d’entre eux ont rencontré les maires, des habitants de Warneton F [3] et Deulémont ainsi que des représentants d’associations présentes de part et d’autre de la frontière. Toutes ces personnes sont hostiles au fonctionnement de l’usine Clarebout de Warneton B. Yves [1], très entreprenant au sein du collectif, reprend les critiques des riverains belges :

« Comme le site de production de Warneton B fonctionne 24h/ 24, les congélateurs et la salle des machines émettent un bruit permanent qui devient très vite insupportable. Il y a aussi une nuisance olfactive en raison d’une odeur persistante de friture à laquelle s’ajoute celle de l’œuf pourri émanant de la station d’épuration proche. De plus, des pluies grasses tombent sur le voisinage, dans les jardins, sur le linge ou les parebrises des voitures. Cette usine fait l’objet d’une centaine de plaintes chaque mois. C’est pour ces raisons que nous ne voulons pas que Clarebout s’installe à Saint-Georges-sur-l’Aa. Ajoutons encore que de nombreux camions assureraient le transport de la matière première et des produits finis. C’est probablement plus de 500 navettes quotidiennes que les petites routes de campagne devraient supporter sans oublier les risques liés à la circulation de ces gros véhicules. »

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La manifestation du 17 juin contre l’implantation de l’usine.

Le collectif redoute également que cette unité de production, située à 650 mètres du village et à 130 mètres de l’habitation la plus proche, s’étende à l’avenir au-delà du périmètre actuellement défini car le marché de la frite est en pleine expansion.

« La monoculture de patates, dont les besoins en eau et en produits phytosanitaires sont très importants, va s’intensifier »

Le projet de Saint-Georges-sur-l’Aa menace aussi la consommation d’eau. Deux millions de m3 et jusqu’à 5 millions, lorsque l’extension sera effective, seront prélevés dans le canal de Bourbourg, soit 20 % de ce que les industriels présents sur place utilisent déjà. Cette eau est indispensable à l’usine de frites afin de laver, dans un premier temps, les pommes de terre. Cette eau de lavage, polluée par les nombreux intrants chimiques utilisés lors de la croissance des tubercules, se déversera dans le port de Dunkerque grâce à une canalisation de plusieurs kilomètres, puis elle rejoindra la mer du Nord.

Le président de la CUD, Patrice Vergriete, cherche à rassurer les craintes, expliquant dans La Voix du Nord, début juillet :

« Il faut se développer en réduisant les nuisances. Ou alors on prend le parti de la décroissance… Il est exact que la gestion de l’eau industrielle pourrait devenir problématique si on ne faisait rien, mais nous travaillons le sujet pour préparer l’avenir. Aujourd’hui, c’est un mensonge de dire que nous manquons d’eau et que le projet Clarebout pourrait ruiner la ressource. »

L’implantation de l’usine Clarebout va, de toute évidence, favoriser la monoculture de la pomme de terre au détriment de la culture de la betterave sucrière et ainsi faire le bonheur des riches agriculteurs, solides financièrement et aptes à stocker leurs productions. « La monoculture de patates, dont les besoins en eau et en produits phytosanitaires sont très importants, va s’intensifier aux dépens de nouvelles installations soucieuses de diversification, et propres à garantir la résilience alimentaire », précise Marguerite. « Que dire de l’effet sur l’air de l’antigerminatif chlorprophame, ou son remplaçant après sa très prochaine interdiction ? » s’inquiète Yves.

Aux yeux de Marguerite, la frite surgelée sortie des chaînes de production de l’usine Clarebout va non seulement considérablement fragiliser la consommation de frites fraîches locales mais va également s’imposer à l’échelle mondiale pour devenir une des nouvelles normes alimentaires. « La frite surgelée “made in Dunkerque” est un projet qui s’oppose à la souveraineté alimentaire des populations, ici ou ailleurs. »

L’appel contre la réintoxication du monde

Le collectif Non à la friture a répondu, le 17 juin dernier, à l’appel contre la réintoxication du monde et s’est associé à la manifestation organisée ce jour-là à Saint-Georges-sur-l’Aa par différentes associations, dont la Confédération paysanne et Attac Flandre. Pour l’occasion, le village a été rebaptisé Saint-Georges-sur-le-Gras, de même que certaines rues (rue des Mauvaises odeurs, rue de l’Ammoniac…).

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Manifestation du 17 juin.

Après bien des péripéties, une enquête publique, ouverte le 5 mars a été close le 3 juillet. Elle a reçu plus d’un millier de contributions, dont 80% expriment un avis défavorable. Une pétition d’opposants a recueilli près de 2.500 signatures, preuve s’il en est de l’inquiétude des habitants. Le commissaire-enquêteur a remis son rapport quelques jours plus tard, le 20 juillet. Il est écrit :

« En conclusion générale sur l’ensemble du dossier de projet soumis à enquête publique, nous constatons les points positifs suivants :

  • que le dossier du projet est constitué conformément à la loi ;
  • que les dispositions définies par le Code semblent respectées dans leur forme et dans leur fond. »

Le préfet a rendu un avis favorable le 26 août, autorisant l’exploitation du site. Le préfet avait pourtant été destinataire, le 16 juillet, d’un courrier rédigé par des habitants de Saint-Georges-sur-l’Aa dans lequel une analyse minutieuse et argumentée du dossier était réalisée. Sur les conseils d’une avocate lilloise spécialisée dans ce type d’affaires, les riverains s’apprêtent à déposer un recours administratif contre cet avis.

L’artile de Reporterre est ici.

[1] Un pseudonyme.

[2] 3,41 millions de tonnes en 2015, selon la chambre d’agriculture de la région.

[3] Deux communes, une en Belgique, une en France, portent le même nom : Warneton F, la commune française située dans le département du Nord et la commune belge de Comines-Warneton (Warneton B) présente dans la région wallonne, au sein de la province du Hainaut. Elles sont séparées par la frontière franco-belge. Clarebout exploite une usine de frites à Warneton B.

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Derrière la voiture électrique, l’empire des Gafam

Un article de Reporterre, par Célia Izoard, le 03/09/2020.

Cet article est le troisième et dernier volet de notre enquête consacrée à la voiture électrique.


Pour vanter son supposé caractère écolo, les promoteurs de la voiture électrique s’appuient sur des performances inexistantes. Surtout, ils la placent au cœur d’un système de mobilité centré sur la voiture autonome, donc l’intelligence artificielle.

On l’a vu, les véhicules électriques sont loin d’être un substitut magique permettant de limiter la catastrophe environnementale. Leur fabrication émet environ deux fois plus de gaz à effet de serre que leurs équivalents thermiques et génère beaucoup plus de pollutions toxiques du fait de la quantité bien supérieure de métaux qu’ils contiennent. Et comme leurs batteries ne durent qu’une dizaine d’années, qu’on les utilise ou non, il s’avère compliqué d’amortir toutes ces pollutions. Il faut que les véhicules aient de petites batteries, et donc ne servent qu’à des déplacements locaux. Que leur usage soit intensif, sans quoi la batterie perd de sa puissance avant même d’avoir servi à polluer moins — donc, que les véhicules soient partagés, au lieu de passer 95 % de leur durée de vie en stationnement. Il faut que la recharge de ces batteries s’effectue en mode lent, et ne crée pas de pics de consommation d’électricité ; que les métaux de ces batteries soient recyclés ou, au minimum, que les batteries soient massivement réutilisées pour stocker de l’électricité solaire ou éolienne.

Le projet de faire des véhicules électriques le socle d’une mobilité plus écologique repose donc moins sur le tableau d’ensemble actuel que sur une série d’hypothèses suspendues à des progrès futurs. Exemple cocasse : l’entreprise Tesla, dans son dernier « rapport d’impact », c’est-à-dire le document censé renseigner les dommages environnementaux de ses véhicules, n’hésite pas à argumenter en s’appuyant sur des performances à venir : « Quelles seraient les émissions de CO2 par mile [1.609 m] d’une Tesla Model 3 si elle était utilisée en autopartage sur un total d’un million de miles et rechargée uniquement à partir d’énergie solaire ? »

Le véhicule électrique n’est qu’une facette d’une « révolution » imminente

Pour Jean-Louis Bergey, expert en économie circulaire à l’Agence de la transition écologique (anciennement Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, Ademe), faire un tel pari semble de toute façon nécessaire : «La technologie des véhicules électriques n’est pas encore aboutie, mais ce n’est qu’en les diffusant dans la société qu’ils vont s’améliorer, explique-t-il. Car ce n’est qu’en massifiant les procédés industriels qu’on peut valoriser et financer la recherche, qui, à son tour, va permettre d’obtenir de meilleurs véhicules.» Bref, fabriquons des voitures électriques en masse en tablant sur le fait qu’elles s’amélioreront demain. Mais n’est-ce pas ce genre de raisonnements, fondés sur la confiance dans le développement technologique, qui nous ont amenés dans l’impasse écologique actuelle ? Il y a cinquante ans, au moment du lancement du parc nucléaire, ne semblait-il pas tout aussi évident que les avancées de la science permettraient de neutraliser ses déchets encombrants ? À l’heure du basculement climatique et de l’effondrement des écosystèmes, peut-on se le permettre ? Et plus pratiquement, comment le fait de renouveler prématurément un parc automobile en état de marche pour le remplacer par des véhicules qui risquent d’être obsolètes dans quelques années pourrait-il limiter les dommages environnementaux ?

Mais pour les professionnels du secteur de l’automobile et des nouvelles technologies, le véhicule électrique ne peut être considéré isolément, il n’est qu’une facette d’une « révolution » imminente, résumée par un acronyme à la mode : ACES (autonomous, connected, electric and sharedshared, partagé). « Il ne fait plus de doute que le véhicule connecté, zéro émission [électrique] et 100 % autonome sera une réalité dans un horizon proche », affirme ainsi le regroupement d’entreprises (Uber, Engie, Blablacar…) qui a soumis au gouvernement ses propositions pour « réinventer la mobilité à l’horizon 2030 » [1]. Car, du fait de leur motorisation et de leurs batteries, les véhicules électriques favorisent la transition vers des véhicules sans conducteur, pilotés par des capteurs et des algorithmes, dont ils sont l’une des briques technologiques.

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Un prototype de voiture sans chauffeur d’Uber à San Francisco, en novembre 2016.

Ainsi, demain, imaginent leurs promoteurs, grâce à l’avènement des véhicules autonomes, les plateformes comme Uber pourront faire baisser le prix des courses en supprimant le coût du chauffeur, ce qui incitera tout un chacun à ne plus posséder de voiture personnelle. Il suffira d’en appeler une depuis son smartphone. On pourra également envoyer son véhicule autonome chercher ses voisins pour partir travailler en covoiturage grâce à une appli dédiée. Grâce à la généralisation de la 4G et de la 5G, les feux rouges, les panneaux et les routes communiqueront avec les voitures, qui pourront aussi s’échanger des informations, ce qui fluidifiera le trafic et rendra la conduite plus économe en énergie. Après cette révolution des véhicules connectés et autonomes favorisant l’autopartage, les problèmes inhérents aux véhicules électriques seront résolus par la main invisible de l’intelligence artificielle et des réseaux. Le chaos de la motorisation individuelle fera place à un ballet silencieux et ordonné.

« Tout le monde est d’accord sur le fait que les véhicules autonomes seront très voraces en électricité » 

Mais si tel est l’horizon qui se dessine en arrière-plan du passage à la voiture électrique, quelles conséquences écologiques pourraient résulter du fait de placer la mobilité sous le grand ordonnancement du big data et des réseaux ? Par exemple, quelle quantité d’émissions de CO2 serait générée par l’énergie nécessaire pour faire circuler toutes ces données, si tous les véhicules étaient connectés en 4G ou 5G, et échangeaient constamment des informations entre eux et avec l’infrastructure routière ? L’équipe du Shift Project a montré que la part du numérique dans les émissions de CO2 était déjà en 2018 de 3,7 %, soit plus que le transport aérien (2, 5 %). La consommation d’énergie induite par les data centers, les terminaux et les réseaux a augmenté de 9 % par an depuis 2015. Et le Shift Project rappelle qu’un data center moyen (d’une superficie de 1.000 m² et d’une puissance d’1 MGW) consomme autant d’énergie qu’une ville de 10.000 habitants [2]. Or la « smart mobility » s’apprête à faire exploser le volume du trafic sur les réseaux et dans les data centers. Comment cela n’effacerait-il pas les gains issus de la rationalisation des mobilités obtenue par la connectivité ?

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Un centre de stockage des données (« data center ») en région parisienne.

De plus, le véhicule autonome est à peu près l’inverse de la sobriété. Pour passer d’un « simple » véhicule actuel à un véhicule autonome capable de se conduire et de se garer tout seul, il faut une quantité non négligeable d’équipements supplémentaires : caméras, lidars, radars et des centaines d’autres capteurs permettant de remplacer la perception et la conduite humaines. En plus des conséquences écologiques de la production très intensive en métaux et en produits chimiques de cette électronique de pointe, il faudra alimenter ces voitures en électricité. « Tout le monde est d’accord sur le fait que les véhicules autonomes seront très voraces en électricité, écrit Lance Eliot, expert étasunien en intelligence artificielle et directeur du Cybernetic AI Self-Driving Car Institute. Pour décrire leur consommation, certains la comparent à un nombre approximatif d’ordinateurs portables. Imaginez qu’il y ait à l’intérieur de votre véhicule autonome 50 ou 100 ordinateurs fonctionnant à pleine puissance. Cela vous donne une idée de la quantité d’électricité nécessaire pour alimenter les seuls systèmes d’intelligence artificielle et de conduite autonome dans un véhicule de ce type. »

De ce fait, même si l’efficacité des batteries de voitures électriques s’améliorait prodigieusement, même si l’on parvenait à rendre leur production moins polluante, il en faudrait de plus grosses et de plus puissantes pour alimenter les véhicules électriques « autonomes ». « C’est ce qui s’est passé avec les smartphones, poursuit Lance Eliot. Les premiers smartphones avaient de petites batteries peu performantes. On a amélioré leur efficacité. Mais dans le même temps, les fonctions des téléphones ont été démultipliées, si bien qu’ils consomment maintenant beaucoup plus d’électricité.[3]»

Un monde plus sobre ou un univers de surmobilité et de surconsommation ?

Autre problème : on a constaté que les véhicules électriques, silencieux et confortables, peuvent inciter à multiplier les déplacements en voiture au détriment de la marche ou des transports collectifs. Plusieurs études ont montré que les véhicules autonomes risquent de provoquer des effets rebonds bien plus spectaculaires. Ce que souligne le gouvernement dans sa synthèse sur les voitures autonomes, dont la dernière loi d’Orientation des mobilités a pourtant acté le déploiement : « L’amélioration du confort de conduite devrait améliorer significativement l’attractivité du mode automobile (individuel), en soi et par rapport aux transports collectifs. [Elle] pourrait générer une augmentation de la congestion pour les trajets domicile/travail et un renforcement de l’étalement urbain.[4]»

On peut donc se demander si une « mobilité du futur associant véhicules électriques, services de mobilité et véhicules autonomes » correspond réellement au « cercle vertueux », décrit avec optimisme par l’Ademe [5]. Des modes de transport fondés sur la fusion entre la voiture, le smartphone et le robot ont-ils la moindre chance de nous amener dans un monde plus sobre — ou vont-ils achever de nous propulser dans un univers de surmobilité et de surconsommation ? Est-il possible de lutter contre le réchauffement climatique en subventionnant l’industrie automobile et les start-up du numérique ? Non ? Alors il est encore temps de prélever quelques milliards du plan de soutien à l’automobile pour, par exemple, développer la recherche sur les mobilités low tech, subventionner les réparateurs de vélos et réhabiliter les vieilles lignes de train, dont l’infrastructure est déjà en place et amortie depuis des décennies.

L’article de Reporterre est ici.

[1] Mobility Nation : réinventer la mobilité urbaine et périurbaine à l’horizon 2030, livre blanc à l’initiative du Boston Consulting Group, 2017.

[2] -Shift Project, Pour une sobriété numérique, 2018.

[5] « Les potentiels du véhicule électrique », Les avis de l’Ademe, avril 2016.

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La voiture électrique cause une énorme pollution minière

Un article de Reporterre, par Célia Izoard, le 02/09/2020.

Cet article est le deuxième d’une enquête en trois volets consacrée à la voiture électrique.


Grosse émettrice de gaz à effet de serre, la construction des voitures électriques consomme aussi une très grande quantité de métaux. Lithium, aluminium, cuivre, cobalt… le boom annoncé de la production de «véhicules propres» réjouit le secteur minier, l’un des plus pollueurs au monde, et promet un enfer aux populations des régions riches de ces matières premières.

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« Comment justifier de détruire des territoires comme le bassin des Salinas Grandes et la lagune de Guayatayoc, occupés par quelque 7.000 habitants, 33 communautés autochtones et ethniques, et tout un mode de vie fondé sur la coresponsabilité et la démocratie directe, comment donc justifier cette destruction au nom de la lutte contre la pollution de l’air dans des villes, une contamination à laquelle ces communautés n’ont pris aucune part ? » Interrogé sur l’exploitation du lithium, telle est la question que nous renvoie Roger Moreau, ancien militant du Larzac, installé depuis quelques décennies dans la province de Jujuy, dans le nord de l’Argentine, à l’épicentre de la ruée sur le lithium provoquée par le déploiement programmé des véhicules électriques.

Ici, les communautés qollas vivent sobrement de l’élevage de lamas et de brebis, d’extraction artisanale de sel, d’artisanat et du tourisme. Sur ces hauts-plateaux des Andes, à plus de 3.000 mètres d’altitude, l’entreprise canadienne LCS s’apprête à exploiter près de 180.000 hectares de lagunes et de salars, ces lacs de sels asséchés dont on extrait le lithium contenu dans les batteries d’ordinateur, de téléphone et de voitures électriques. Une batterie de Renault Zoe peut contenir 8 kg de lithium, une Tesla 15 kg (contre 300 g pour un vélo électrique).

«Tous les moyens sont bons pour maintenir le mode de vie des États-Unis et de l’Europe, qui, s’ils étaient généralisés, nécessiteraient trois à cinq planètes»

Bien qu’elles n’aient pas toutes de titre formel de propriété, les communautés locales sont en théories souveraines sur ces terres ancestrales collectives, et se prévalent des droits des peuples autochtones reconnus par l’Organisation internationale du travail (OIT) et par les Nations unies imposant le « consentement libre » des habitants avant tout projet. En 2019, après une série de pétitions, quelque trois cents personnes ont procédé à l’expulsion d’une équipe de forage venue commencer les travaux d’exploration. Les blocages routiers se sont succédé pour informer la population. « Au lieu de remettre en question un mode de développement responsable de nombreuses crises contemporaines et de désastres annoncés qui augmentent à vue d’œil », déclare l’Assemblée des communautés autochtones du peuple qolla de Salinas dans son prospectus sur le lithium, « tous les moyens sont bons pour maintenir le mode de vie des États-Unis et de l’Europe, qui, s’ils étaient généralisés, nécessiteraient trois à cinq planètes. L’extraction de lithium dans les salars est une catastrophe écologique, et non un simple désagrément qu’on pourrait compenser par des dons aux communautés ».

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Chemetall Foote Lithium Operation, dans la Clayton Valley, à l’est de Silver Peak (Nevada), est l’unique mine de lithium des États-Unis d’Amérique.

Dans ces régions parmi les plus arides au monde, les mines de lithium évaporent à grande allure les rares ressources en eau. Sur le site d’Atacama, au Chili, les miniers prélèvent près de 200 millions de litres par jour. Le pompage de la saumure du sous-sol riche en lithium crée un vide qui fait migrer vers les profondeurs l’eau douce disponible. « Cette double perte d’eau abaisse le niveau de la nappe phréatique, assèche le sol et la végétation au détriment des animaux, des cultures et des gens », expliquent les Qollas. À quoi s’ajoutent les traitements au chlore et la dispersion dans les eaux des déchets de pompage mêlés à des solvants, qui détruisent des micro-organismes dont on ne sait pas grand-chose, sinon qu’ils sont les organismes vivants les plus anciens de la planète [1]. Or toutes les mines actuellement en production annoncent un doublement ou un triplement de leurs activités pour se positionner sur le marché du lithium, dont la demande pourrait croître de 18 % par an d’ici à 2025 [2].

Transférer aux métaux la demande de puissance qui reposait, depuis le début de l’industrialisation, sur les énergies fossiles

Le cas du lithium est emblématique du principe de la transition écologique, telle que le décrit la Banque mondiale dans un rapport de 2017 [3]. Pour nous assurer un avenir « bas carbone », il n’est manifestement pas question de revoir à la baisse le mode de vie des pays riches : tout l’enjeu va consister à transférer aux métaux la demande de puissance qui reposait, depuis le début de l’industrialisation, sur les énergies fossiles (charbon et pétrole). Compte tenu des technologies déployées — photovoltaïque, éoliennes, numérique et réseaux, véhicules électriques —, certains métaux sont particulièrement cruciaux : cuivre, argent, aluminium, nickel, terres rares… Et tout le paradoxe de la voiture électrique, deux fois plus polluante à produire que la voiture thermique, est contenu dans cette synthèse : « Les technologies qui pourraient permettre le passage à une énergie propre s’avèrent en réalité PLUS intensives en matériaux dans leur composition que les systèmes actuels fondés sur les énergies fossiles. (…) Pour le dire simplement, un avenir fondé sur les technologies vertes exige beaucoup de matières premières qui, si elles ne sont pas correctement gérées, pourraient empêcher les pays producteurs d’atteindre leurs objectifs en matière de climat et de développement durable. » En d’autres termes, les technologies vertes ne sont pas vertes, en grande partie parce qu’elles reposent sur l’industrie minière, réputée la plus polluante au monde [4].

Par exemple, pour compenser le poids des batteries des véhicules électriques, qui, s’il n’était pas contrebalancé, les rendrait trop énergivores, les constructeurs ont augmenté la part d’aluminium dans les carrosseries, jantes, boîtes de vitesse. Mais alors qu’une voiture particulière, dans l’Union européenne, contient déjà aujourd’hui en moyenne 179 kg d’aluminium, l’Audi e-tron, un SUV électrique, en enferme 804 kg ! Or la production d’aluminium consomme trois fois plus d’énergie que celle de l’acier, et que cette production est très émettrice de gaz à effet de serre (CO2 et perfluorocarbonés) [5]

Et pas seulement. Aurore Stéphant, ingénieur géologue minier pour l’association Systext, qui vient de lancer un programme de recherche sur les conséquences environnementales des « métaux de la transition », explique : « Pour obtenir de l’aluminium, la première étape est de mettre la bauxite en solution avec de la soude. On chauffe ensuite le précipité à 1.200 °C. Ce traitement est à l’origine de gigantesques digues de résidus : ces barrages, qui retiennent les déchets miniers liquides au creux des vallées, stockent donc l’équivalent des bidons de soude qu’on utilise pour déboucher les toilettes, mais à des concentrations encore supérieures. C’est ce qu’on appelle les “boues rouges”. Comme les autres digues de résidus miniers, elles cèdent régulièrement, avec des conséquences inimaginables. » En octobre 2010, sur le site de production d’aluminium d’Ajka, près de Kolontar, un barrage a rompu, provoquant la plus grave catastrophe de l’histoire de la Hongrie : un raz-de-marée de plus d’un million de mètres cubes de résidus a déferlé sur sept villages, un millier d’hectares de sols et 10 millions de m³ d’eau ont été contaminés, dix personnes sont mortes et près de 300 ont été grièvement brûlées à la soude. Au cours des dix dernières années, dans le monde, pas moins de quatre accidents de ce type se sont produits dans des mines de bauxite [6].

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Image satellite du trajet de la coulée de boue du 4 octobre 2010 après la rupture de la digue de l’usine d’aluminium d’Ajka, en Hongrie.

200.000 creuseurs, dont des enfants privés de scolarité « payés un à deux dollars par jour » 

Pour électrifier les véhicules, il faut aussi du cuivre. Il y en a quatre fois plus dans une voiture électrique (environ 90 kg) que dans une voiture à essence, sans compter l’infrastructure de recharge — une prise pouvant alimenter 120 véhicules en contient près de 100 kg [7]. Le problème du cuivre, c’est qu’on le trouve naturellement associé à de nombreux métaux, dont une bonne partie sont très toxiques, comme l’arsenic, le plomb ou le cadmium. Exploiter du cuivre implique donc de disperser ces autres métaux dans la nature sous forme de vapeurs, d’émissions de particules ou par le ruissellement des résidus. À ce problème s’ajoute le fait que les teneurs en cuivre, c’est-à-dire la quantité présente dans la roche, ont énormément baissé du fait de la surexploitation des gisements : rien qu’entre 1990 et 2008, elles ont été divisées par deux. Il faut donc extraire et traiter chimiquement des volumes toujours plus importants de roche pour l’extraire. Ainsi, les mines de cuivre accumulent des volumes toujours plus gigantesques de déchets, ce qui augmente d’autant les pollutions et le risque de rupture de digues chargées de boues toxiques, etc. Pour avoir une idée de l’ampleur de la production existante et des problèmes qu’elle pose déjà, il faut penser qu’on produit aujourd’hui, avant le boom des véhicules électriques, trois cents fois plus de cuivre que dans les années 1960 [8].

Outre le lithium, les batteries contiennent des cathodes de cobalt, dont plus de la moitié provient du Congo-Kinshasa, où il est exploité conjointement avec le cuivre. Depuis plusieurs années, le fameux « métal bleu » a été placé sous le feu des projecteurs par les ONG : une partie du minerai est extrait par quelque 200.000 creuseurs, dont des enfants privés de scolarité « payés un à deux dollars par jour », et revendu à des firmes chinoises qui assurent la majorité de l’affinage [9]. Fin 2019, à la suite de la mort de quatorze enfants, l’International Rights Advocates, à Washington, déposait une plainte visant plusieurs entreprises dont Apple, Alphabet (Google) et Tesla. Face à cette situation connue depuis plus d’une dizaine d’années, mais aussi à la suite du relèvement de la taxe sur l’extraction par le gouvernement congolais (passée de 3,5 à 10 %), les constructeurs tentent de diminuer la quantité de cobalt dans les batteries.

Pour en utiliser moins, Renault a ainsi choisi une technologie NMC (lithium-nickel-manganèse-cobalt) contenant moins de cobalt, mais très dépendante du lithium, du nickel et du manganèse. Mais, là encore, le problème est moins résolu que déplacé. Les approvisionnements sont sécurisés par le fait que le nickel provient de Nouvelle-Calédonie, colonie française et le manganèse du Gabon, ancienne colonie française, où il est exploité par Eramet depuis les années 1960. En revanche, l’extraction du manganèse a provoqué dans la région du Haut-Ogooué, dans l’est du Gabon, une situation sanitaire catastrophique. Dans un mémoire en gestion durable des mines réalisé pour l’Institut international d’ingénierie de l’eau et de l’environnement, Grâce Mélina Mengue Edoh Afiyo nous la décrit : « Depuis le début de l’exploitation à Moanda en 1962, tous les déchets miniers de l’exploitation du manganèse ont été rejetés dans la rivière Moulili par le fait du ruissellement des eaux de pluie. Ces déchets représentent une quantité absolument colossale, des millions de tonnes accumulées année après année dans cette rivière. (…) L’envasement de la Moulili a engendré la disparition totale de toute vie aquatique dans ce milieu. En effet, les poissons qui selon les populations y étaient abondants ont laissé place à une vaste étendue d’eau boueuse et nauséabonde [10]. » Les eaux de surface seraient polluées à l’acide sulfurique, au cyanure, au mercure et à l’arsenic, mais une partie de la population n’a d’autre choix que de continuer à les utiliser pour le trempage du manioc. Si Eramet a commencé à contenir ses résidus miniers dans des digues à partir de 2006, les boues toxiques continuent à ruisseler lors des fortes pluies et s’infiltrent dans les sols, faute de membranes au fond de certains bassins. Du fait de la déforestation, « il faut aujourd’hui faire plus de dix kilomètres pour aller chasser », constate l’auteure, et les quantités d’eau pompées « arrivent même à assécher des puits et des sources ». Qu’en sera-t-il après le boom des véhicules électriques ?

« Pour l’instant, le recyclage en boucle fermée des batteries lithium-ion en Europe n’existe pas » 

Faut-il s’inquiéter des effets de cette demande croissante en métaux, qui, selon la Banque mondiale pourrait augmenter de 1.000 % pour les batteries électriques [11] ? Aucunement, assure le ministère de la Transition écologique sur un petit schéma destiné à inciter le grand public à acheter une voiture électrique, car « 80 % des batteries sont recyclables ». Les mots sont importants, et cette formulation ne doit rien au hasard : recyclables ne signifie pas recyclées. La directive européenne de 2006, en cours de révision, impose le recyclage de 50 % de la masse de la batterie. « Nous allons jusqu’à 70 % », assure Alain Le Gougenc, porte-parole du groupe PSA. Mais, sur une batterie de 300 à 600 kg contenant une bonne quantité d’acier et de plastique, les métaux les plus polluants sont-ils recyclés ? En tout cas, pas le lithium, trop peu cher à l’achat : « Les compagnies minières ont une politique de surproduction qui fait baisser le coût des matières premières, explique Alma Dufour, des Amis de la Terre. L’État pourrait imposer le recyclage du lithium, pourquoi ne le fait-il pas ? » « Pour l’instant, le recyclage en boucle fermée des batteries lithium-ion en Europe n’existe pas, constate Olga Kergaravat, ingénieure spécialiste des batteries à l’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie). D’autant plus que, du fait du contexte concurrentiel très tendu entre fabricants, elles sont toutes différentes. Ce serait déjà plus imaginable si elles étaient standardisées… »

Faute de modèle économique pour le recyclage des métaux, qui nécessite en outre des techniques intensives et polluantes comme l’hydrométallurgie et la pyrométallurgie, la Société nouvelle d’affinage des métaux (Snam), en Aveyron, s’oriente vers le réemploi des batteries pour stocker de l’énergie, par exemple pour lisser les apports intermittents des énergies renouvelables. À ce jour, le projet n’est que timidement engagé, et pourtant, depuis des années, les analyses quantifiant les effets globaux des véhicules électriques sont d’autant plus optimistes qu’elles comptabilisent ces économies d’énergie dans leurs bilans. « Les VE (véhicules électriques) et leurs bornes de recharge peuvent par exemple être un maillon dans l’introduction des énergies renouvelables, le stockage stationnaire de l’énergie ou permettre des expérimentations avec des bâtiments à énergie positive, voire à l’échelle de quartiers », anticipe l’Ademe [12]. La perspective de ce « cercle vertueux » entre smart grids, compteurs communiquants et électromobilité a grandement contribué à la réputation de viabilité écologique des voitures électriques, de même que la promesse d’une « mobilité du futur » dans laquelle elles entreraient en synergie avec les plateformes d’autopartage en ligne et les véhicules autonomes. Le véhicule électrique et ses promesses sont en réalité fondées sur un programme plus général de numérisation des réseaux et des transports, qui seraient optimisés, comme par une « main invisible », par l’intelligence artificielle et le big data. C’est un projet de société qui se dessine. Et il est polluant.

L’article de Reporterre est ici.

[1] Impacto socio-ambiental de la extraccion de litio en las cuencas de las salares altoandinos del Cono Sur, Observatorio de Conflictos Mineros de América Latina, Ocmal, , août 2018, p. 28 et 45.

[2] « En France, on n’a pas que des idées, on a aussi du lithium », L’Usine nouvelle 20/02/2019.

[3] « The Growing Role of Metals and Minerals in a Low-Carbon Future », Banque mondiale et Extractives Global Programmatic Support, 2017, p. 58. Les majuscules sont dans le texte original.

[4] Revue Z no 12, « Trésors et Conquêtes », 2018.

[5] L. Castaignède, Airvore ou la face obscure des transports, p. 194 ; Rapport de l’AEE, p. 16.

[6] « Chronology of major dam failures », Wise Uranium Project.

[7] OFI Asset Management, février 2018.

[8] La production de cuivre en 2015 était trois cents fois plus élevée que la production moyenne sur la période 1956-1965 (Bureau des ressources géologiques et minières, BRGM).

[9] « La face honteuse du “métal bleu” », Akram Belkaïd, Le Monde diplomatique, juillet 2020.

[10] « Impacts de l’exploitation minière sur l’environnement et les collectivités locales dans la province du Haut-Ogooué : cas de la Comilog à Moanda (Gabon). » Mémoire de fin d’études pour l’obtention du master spécialisé, option : gestion durable des mines, 2010-2011.

[11] Ibid., p. 58.

[12] «Les potentiels du véhicule électrique», Les avis de l’Ademe, avril 2016, p. 10.

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Non, la voiture électrique n’est pas écologique

Un article de Reporterre, par Célia Izoard, le 01/09/2020.

Cet article est le premier d’une enquête en trois volets que nous consacrons à la voiture électrique.


Promue sans la moindre réserve par la classe dirigeante, l’auto électrique serait le véhicule « propre ». Or, comme le montre Reporterre dans une grande enquête, de la production des batteries à leur durée de vie, en passant par le renouvellement du parc , le poids des véhicules et leur usage, le caractère écolo de l’auto électrique n’a absolument rien d’évident. Premier volet : qu’en est-il des émissions de gaz à effet de serre?

C’est simple. Pour arrêter de polluer, il suffit de changer de voiture. Voici en substance le message que le gouvernement nous a adressé en mai dernier lors du lancement du plan de soutien aux « véhicules propres » assorti d’une enveloppe de huit milliards d’euros. Objectif : soutenir l’industrie automobile du pays et « inciter tous les Français, même les plus modestes, à se doter d’un véhicule propre, moins polluant et moins émetteur de gaz à effet de serre », avec des aides à l’achat d’un véhicule électrique avoisinant les 10.000 euros.

Les véhicules électriques émettent-ils réellement moins de CO2 que les voitures thermiques ? Depuis plus de dix ans, des équipes de recherche du monde entier en débattent à coups d’analyses de cycle de vie, ces études qui quantifient les conséquences sur l’environnement d’un objet depuis l’extraction des métaux nécessaires à sa fabrication, jusqu’à sa mise au rebut. Entre 2010 et 2019, au moins 85 études de ce type ont été réalisées sur les véhicules électriques par des instituts de recherche divers [1] !

Un point fait consensus : produire un véhicule électrique demande beaucoup plus d’énergie, et émet deux fois plus de gaz à effet de serre que de produire un véhicule thermique, du fait de la production de sa batterie et de sa motorisation [2]. Le travail de ces analyses de cycle de vie consiste donc à quantifier ces émissions « grises » et à calculer à partir de combien de kilomètres parcourus cette production polluante rend le véhicule électrique avantageux par rapport à son homologue essence ou diesel. Un des paramètres cruciaux de la question est évidemment l’origine de l’énergie qui a servi à produire le véhicule, et ensuite celle de l’électricité qui le fait rouler : nucléaire, charbon, diesel, énergies renouvelables ? Un autre paramètre est la taille de la batterie, qui peut varier de 700 kg dans une Audi e-Tron à 305 kg dans une Renault Zoe. Tout dépend aussi de la durée de vie de la batterie, car s’il faut la remplacer, les émissions liées à sa production peuvent être doublées pour un même véhicule, avec un bilan CO2 totalement plombé. Chez PSA et Renault, les batteries sont garanties 8 ans pour 160.000 km parcourus (sachant qu’elles perdent aussi leur puissance si on ne s’en sert pas). Quant à Tesla, l’entreprise explique dans son « Rapport de conséquences environnementales » que ses batteries pourront un jour parcourir « un million de miles » [3], ce qui sera un argument de poids… quand ce sera vrai.

Une compensation pour un usage plus long que la durée de vie de la batterie 

Les experts du cabinet de conseil écolo Carbon 4 défendent le véhicule électrique, considérant qu’une électrique de petite taille est moins émettrice de CO2 à partir de 30.000 ou 40.000 kilomètres parcourus — ayant dès lors « compensé » sa fabrication. Ils s’appuient notamment sur l’Institut de recherche environnementale suédois (IVL). Une étude de celui-ci, en 2017, menait à la conclusion qu’il fallait parcourir 250.000 km pour compenser les émissions liées à la fabrication d’une batterie de véhicule… soit plus que la durée de vie de la batterie [4]. Désespérant ! En 2019, l’IVL a sorti un nouveau rapport nettement plus favorable. Mais, précisent ses auteurs, si les résultats se sont brusquement améliorés, c’est parce que leur étude récente se fonde sur « une production de batteries n’utilisant aucune électricité d’origine fossile, ce qui n’est pas encore la norme, mais pourrait le devenir dans un futur proche » [5]. Une hypothèse optimiste, puisque, en attendant la concrétisation de l’« l’Airbus des batteries » lancé au niveau européen, l’immense majorité d’entre elles sont produites en Asie dans des usines tournant au charbon, charbon qui reste la principale source de l’électricité actuellement consommée dans le monde (38%). Par ailleurs, l’étude suédoise mentionne bien qu’elle ne s’intéresse qu’à la production de la batterie, et non aux émissions induites par son recyclage.

Parmi les autres travaux, une récente étude allemande analyse le cycle de vie d’une Caddy Volkswagen électrifiée en laboratoire, et le compare méthodiquement aux émissions induites par le même modèle à essence [6]. Conclusion : la Volkswagen électrique émet moins d’équivalent CO2 qu’une thermique, mais pas si sa batterie est produite en Chine (avec du charbon). Si elle est produite en Europe, elle ne rivalise avec la voiture à essence qu’à partir de 137.000 à 207.000 km — en espérant qu’elle dure jusque-là sans qu’il faille renouveler la batterie ! Les résultats sont plus encourageants si elle est principalement produite et alimentée avec de l’électricité d’origine renouvelable ; et plus encore si l’on prend en compte les économies d’énergie réalisées en réutilisant ensuite la batterie après sa fin de « vie automobile » (elle n’a perdu que 70 % de sa capacité) pour stocker de l’électricité en stationnaire, par exemple au bas d’un immeuble. En revanche, sa production est nettement plus polluante : intoxication et eutrophisation des réserves d’eau douce, artificialisation et perte de biodiversité, toxicité pour les humains, pollution radioactive, occupation des terres agricoles… Ces chercheurs constatent que « l’omission des conséquences liées à la production de l’électronique est quasi-systématique » dans la plupart des études publiées à ce jour et que très peu d’entre elles prennent en compte les autres formes de pollution, en dehors des émissions de gaz à effet de serre.

 Générer d’autres pollutions, ailleurs

Un rapport de 2018 de l’Agence européenne pour l’environnement dresse le même constat : les émissions de NOx, SO2 et particules de la production des véhicules électriques sont 1,5 à 2 fois supérieures à celles des véhicules thermiques. Les conséquences en matière de pollution des sols et des eaux sont doublées, voire triplées [7], principalement par l’extraction et l’affinage des métaux et la production électronique. Un constat d’autant plus préoccupant que ces bilans n’offrent guère que des estimations, en partie fondées sur les chiffres avancés par les industriels — les compagnies minières, par exemple, pas vraiment réputées pour leur transparence. « Comment ces analyses de cycle de vie arrivent-elles à quantifier les pollutions minières ? s’étonne Aurore Stéphant, de Systext, association née au sein de la fédération Ingénieurs sans frontières qui regroupe des spécialistes des conséquences de l’activité minière. Sur de nombreux sites aux quatre coins du monde, nous constatons que les dommages environnementaux ne sont même pas quantifiés — les études d’impact n’existent pas —, et que les populations locales se battent sans succès pour que la pollution des sols et des cours d’eau soit prise en compte. Personne n’est aujourd’hui en mesure de calculer le bilan carbone des filières des soixante-dix matières premières minérales contenues dans une voiture. »

Tout se passe donc comme si le pacte implicite de la voiture électrique était le suivant : pour espérer une réduction des émissions de CO2, qui repose elle-même sur une série d’hypothèses fragiles — petites voitures, allongement de la durée de vie des batteries, généralisation des énergies renouvelables —, ainsi qu’une réduction de la pollution et du bruit dans les villes, il faut générer d’autres pollutions, ailleurs. Pour Alma Dufour, des Amis de la Terre, cela pose un sérieux problème de justice sociale : « La question de l’accès à l’eau dans les régions du monde qui subissent de plein fouet le changement climatique est aussi importante que les émissions de CO2. »

 « On part avec un handicap à cause de l’impact de production. Donc, il faut compenser par un usage intelligent »

Le « véhicule propre » vanté par le plan gouvernemental est donc nettement un abus de langage (sauf à renvoyer à l’idée de propriété, au sens de « mon propre véhicule »). Quant aux émissions de CO2, la capacité des véhicules électriques à les réduire n’a rien d’évident, et s’avère même contre-productif dès lors que la voiture électrique est envisagée comme un simple substitut de la voiture thermique. « On part avec un handicap à cause de l’impact de production, explique Maxime Pasquier, de l’Ademe (Agence de la maîtrise de l’énergie). Donc, il faut compenser par un usage intelligent. » Un usage intensif, d’abord : il faut qu’un véhicule électrique parcoure beaucoup de kilomètres pour compenser sa production, c’est le cas des utilitaires en ville. Un usage ciblé : le véhicule électrique n’est économe que s’il emporte une petite batterie, donc les gros modèles permettant de partir en vacances, avec 500 km d’autonomie, ne sont pas viables écologiquement. « Par rapport à l’idée que la voiture électrique va nous sauver, dit Maxime Pasquier, l’Ademe rappelle que ça reste un véhicule. Pour limiter la pollution et le changement climatique, le premier levier est la sobriété : limiter les déplacements, raccourcir les chaines logistiques. Ensuite : utiliser les transports en commun, faire du vélo, partager les véhicules. Et seulement en dernier ressort, agir sur l’efficacité technique des véhicules. » Un constat partagé par Stéphane Amant, chez Carbon 4 : « Les tanks électriques qui pèsent deux tonnes n’ont rien à voir avec l’écologie. La mobilité électrique ne peut pas remplacer la mobilité thermique avec les mêmes usages. On ne pourra pas y arriver sans sobriété. »

Bon. Imaginons que vous n’ayez pas encore lu Reporterre et qu’illuminé(e) par le discours d’Emmanuel Macron à l’usine Valeo, vous décidiez de vous renseigner sur les aides gouvernementales à la mobilité propre. Vous vous rendez sur le site du ministère de la Transition écologique. Sur la page Prime à la conversion, bonus écologique : toutes les aides en faveur de la mobilité propre, dans la colonne de gauche, vous découvrez l’onglet « Et si vous rouliez en électrique ? ». Là, vous apprenez que le véhicule électrique n’est rien moins qu’« un outil au service de l’environnement ». Parfait ! Et en plus, vous n’aurez rien à changer, car « une voiture électrique convient probablement à vos besoins ». Il suffit de renseigner sur un moteur de recherche vos habitudes quotidiennes et vos goûts pour vous voir conseiller une panoplie de voitures rutilantes : des modèles SUV de toutes marques, des Tesla Model S de 2,2 tonnes emportant 540 kg de batterie. Ô mais… vous n’êtes plus sur le site gouvernemental, mais sur la page « jerouleenelectrique.com », animée par l’Avere (Association nationale pour le développement de la mobilité électrique). Sauf qu’il est difficile de le savoir au premier abord : c’est le ministère de la Transition écologique qui vous y envoie, et son logo, de taille respectable, s’affiche encore en haut à droite. On est pourtant passé directement de la « mobilité propre » aux intérêts économiques des empires automobiles français. Sans… transition, pourrait-on dire, puisque l’internaute est tout simplement invité à acheter le modèle électrique « qui lui convient », sans réflexion sur ses usages et avec un bilan écologique potentiellement catastrophique.

La page « jerouleenelectrique.com ».

Du point de vue de l’écologie, le passage à l’électromobilité est un pari pour le moins fragile 

La voiture électrique soulève encore d’autres questions. On peut se demander quelles sont les conséquences écologiques du renouvellement accéléré du parc automobile induit par les « primes à la conversion ». Si les voitures à essence partent prématurément à la casse avant que leur production n’ait réellement été amortie, à quel point le passage à l’électrique est-il justifié ? Peu d’études le renseignent. Et si ces mêmes voitures thermiques quittent le marché français pour atterrir, par exemple, dans les pays du Maghreb, ne risque-t-on pas, au lieu de bénéficier de leur substitution, d’additionner au niveau mondial les coûts écologiques de l’électrique et du thermique ? Un afflux vers les pays pauvres de véhicules polluants d’occasion peu chers, associé à la baisse du baril de pétrole, ne risque-t-il pas d’inciter à la consommation de voitures personnelles dans des régions où elles ne sont pas encore systématiques ? Dans les pays riches, au niveau des usages, le déploiement de véhicules électriques commence déjà à se traduire par un effet rebond — c’est-à-dire un effet involontaire de surconsommation induit par l’efficacité accrue de l’objet. L’Agence européenne pour l’environnement constate, en Suède et en Norvège, que les possesseurs de véhicules électriques ont tendance à remplacer certains de leurs trajets à pied ou en transport en commun par leur nouvelle acquisition. Pourquoi ? Parce que « le coût de fonctionnement d’un véhicule électrique est largement inférieur à celui d’un véhicule thermique » ; parce qu’étant donné le prix d’achat supérieur des électriques, « leurs possesseurs peuvent être tentés de davantage les utiliser pour amortir cet investissement » ; et enfin, en raison des « incitations des collectivités locales à la voiture électrique » (parking gratuit, exemptions de péages, etc.) [8].

Du point de vue de l’écologie, le passage à l’électromobilité s’apparente donc à un pari pour le moins fragile. En France, ce n’est rien moins qu’un pari à 8 milliards d’euros de fonds publics qui nécessite d’espérer que les usagers n’achèteront ni berline ni SUV, utiliseront les transports en commun pour partir en vacances, feront du covoiturage, ne rechargeront pas leurs véhicules en mode rapide parce qu’ils sont pressés (ce qui fait décroître la longévité de la batterie), ni tous en même temps aux heures de pointe (auquel cas, ils sont alimentés par des centrales électriques diesel), ne remplaceront pas leurs trajets en vélo par une balade en Zoe — et de prier pour qu’on arrive à gérer les fuites et les déchets qui sortent des centrales nucléaires, ou qu’on les démonte rapidement. Et, bien entendu, de prier pour que les batteries et les métaux que contiennent les autos électriques soient bel et bien recyclés, sans quoi les ravages des activités minières sont voués à s’intensifier — et les véhicules électriques serviront autant à délocaliser les pollutions qu’à déplacer les personnes.

L’article de Reporterre est ici.

[1]«Sensitivity Analysis in the Life-Cycle Assessment of Electric vs. Combustion Engine Cars under Approximate Real-World Conditions», Eckard Helmers, Johannes Dietz and Martin Weiss, Sustainability, février 2020, p. 2.

[3] Tesla Impact Report 2019.

[4]«The Life Cycle Energy Consumption and Greenhouse Gas Emissions from Lithium-Ion Batteries»,IVL, 2017.

[5] « Lithium-Ion Vehicle Battery Production », IVL, 2019, p. 5.

[6]«Sensitivity Analysis in the Life-Cycle Assessment of Electric vs. Combustion Engine Cars under Approximate Real-World Conditions», Eckard Helmers, Johannes Dietz and Martin Weiss, Sustainability, février 2020.

[7] Voir notamment les diagrammes pages 26, 58 et 60 du rapport de l’Agence européenne pour l’environnement.

[8]«Electric vehicles from life cycle and circular economy perspectives», rapport de l’AEE, 2018, p. 43.

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L’État autorise à nouveau la chasse des tourterelles des bois, espèce pourtant mondialement menacée

Un article de la Ligue de Protection des Oiseaux, le 28/08/2020.

A 5 mois d’accueillir le Congrès mondial de l’Union Internationale de Conservation de la Nature à Marseille, la France autorise la chasse de près de 18000 tourterelles des bois, espèce menacée d’extinction et classée sur les listes rouges de l’UICN. La LPO a décidé de réagir devant le Conseil d’État.

Tourterelle des bois-2

Tourterelle des bois.

Le 27 août 2020, l’arrêté relatif à la chasse de la tourterelle des bois en France métropolitaine pendant la saison 2020-2021 a été publié au Journal Officiel. Il fixe un quota de prélèvement maximal de 17460 oiseaux.

Peu importe les courriers de grandes ONG de protection de la nature du Royaume Uni, d’Allemagne, des Pays Bas… demandant à la France de ne plus tirer sur cette espèce migratrice devenue très rare dans leur pays.

Peu importe que la Commission Européenne ait demandé en 2018 aux États membres de suspendre la chasse de cet oiseau. Peu importe l’ouverture d’une procédure d’infraction contre la France sur ce même sujet en juillet 2020.

Peu importe que le Comité des experts de la gestion adaptative ait conclu en mai 2019 et réitéré en juin  2020 sur la nécessité de stopper la chasse de cette espèce. Il a suffi au Ministère normalement chargé de préserver la faune sauvage, d’exiger dudit comité qu’il refasse ses calculs pour arriver à un quota positif. Le chiffre de 17460 prélèvements fut ainsi sorti des modèles populationnels de la plateforme technique du CEGA en précisant que la probabilité de stabiliser les populations équivaut alors à une chance sur deux, et qu’elle dépend de la bonne disposition des autres pays à réduire également leurs prélèvements !

Peu importe que l’arrêté pour la saison 2019-2020 ait été attaqué par la LPO et soit toujours en attente de jugement.

Peu importe que les chasseurs n’aient déclaré « que » 4000 tourterelles tuées pour la saison 2019-2020, preuve s’il était besoin que les tableaux de chasse ne sont pas transparents ni exhaustifs. La dernière estimation sérieuse, conduite par l’ONCFS, portait sur la saison 2013-2014 et concluait à un prélèvement de l’ordre de 90.000 oiseaux. 

Peu importe que sur les quelques 20.000 contributions sur le Site de la consultation publique du Ministère cet été, plus de 77% soient défavorables à cet arrêté. Et que le Ministère ait présenté les choses de manière subjective en faisant croire que les experts avaient préconisé deux scenarii, avant de corriger le texte une semaine seulement avant la fin de la consultation. 

Peu importe le courrier du Comité français de l’UICN du 20 août alertant le Président de la République sur l’état de conservation défavorable de la Tourterelle des bois. Et lui rappelant ses engagements de retirer des espèces chassables celles en mauvais état de conservation.

Comme les années précédentes, le Ministère de la chasse prend l’arrêté contestable à la veille de son application afin de permettre, même en cas de recours de la LPO à la procédure d’urgence (référé-suspension), la chasse pendant 10 à 15 jours, avant toute décision du Conseil d‘État.

La LPO a attaqué l’arrêté litigieux dès le jour de sa publication, demandant d’urgence sa suspension immédiate à la haute juridiction administrative.

Pour Allain Bougrain Dubourg, Président de la LPO :

« Hier nous apprenions la fin heureuse du piégeage à la glu, obtenue sous la menace d’une poursuite de la France par la Commission Européenne devant la Cour de Justice de l’Union Européenne. L’infraction ouverte contre la France et le fait que ce soit le seul et dernier pays à laisser faire de telle pratiques aurait dû suffire. Mais non, il fallait sûrement faire un nouveau cadeau aux chasseurs ! Chaque année, près de 30 000 tourterelles des bois étaient abattues illégalement en pleine période de reproduction dans le Médoc. Nous nous sommes battus durant 20 ans pour mettre un terme à ce massacre. Il est insupportable de continuer à abattre une espèce à l’agonie. »

L’article de la LPO est ici

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Le Puy-Sainte-Réparade : les Jardins de paradis aspergés de glyphosate

Un article de La Provence, par Carine Palmi, le 07/08/2020.

Il y a un peu moins d’un mois, le couple Arlaud voyait son exploitation bio souillée par des produits chimiques. Les résultats des analyses montrent que du glyphosate a été versé.


Il faudra certainement attendre près de 2 ans avant de replanter quoi que ce soit sous ces serres.
Photo A.Bi.

Tristan et Oriane Arlaud sont du genre optimiste. « C’est notre manière d’être, assure cette dernière, on préfère regarder devant plutôt que dans le rétroviseur ». Ça tombe bien, parce que la situation à laquelle ils font face aurait de quoi en décourager plus d’un…

Début juillet, l’un des champs de Tristan (le couple a deux exploitations qui forment Les Jardins de paradis : Oriane s’occupe de tout ce qui est précoce ou tardif sous serre et Tristan ne fait que du plein champ) réchappe in extremis de l’inondation. Le lendemain, il découvre aussi qu’une partie de son exploitation a été saccagée pour finir, après quelques jours supplémentaires, par réaliser que tomates, aubergines, courgettes, etc. ont brûlé, visiblement aspergés par un produit chimique. Depuis, les résultats de l’analyse du risque phytosanitaire sont tombés : « une forte dose de glyphosate a été balancée dans les serres ».

Faire avancer l’enquête

Économiquement parlant, l’herbicide à la molécule active qu’on trouve dans le tristement célèbre Roundup grève ainsi deux tiers de la superficie en serre. La première mauvaise nouvelle qui en découle, c’est le déclassement en bio des parcelles contaminées pendant minimum un an, « même si dans un cas normal, il faut compter deux ans de gel », précise Oriane. Soit deux années sans pouvoir planter quoi que ce soit. La seconde ? Certains produits ont été vendus à leurs clients. « La chance qu’on a eue, soulève toutefois la jeune femme, c’est que cette semaine-là on faisait une grosse opération de tomates anciennes et on avait fait la récolte le lundi… La destruction des cultures a eu lieu dans la soirée du lundi au mardi ». Malheureusement, les Arlaud ne s’en sont pas rendu compte tout de suite puisque les premiers signes de dépérissement ne sont apparus que le vendredi. Si une fois avertis, les clients ont forcément pris conscience du risque d’avoir absorbé des pesticides, leur première pensée était pour les agriculteurs : « Ils ont été écœurés, en colère aussi ». Car depuis 13 ans, le projet a eu le temps de bien s’implanter avec environ 200 familles en soutien. « On construit ce projet de démocratie alimentaire avec nos adhérents, résume la maman de deux petites filles, donc ils se sentent impliqués ».

Sous les serres débâchées, car lacérées, les tomates, poivrons, aubergines ou encore courgettes ont brûlé sur pied. Photo A.Bi.

Alors voilà, même si Tristan et Oriane affrontent tout ça la tête haute, l’inquiétude est de plus en plus grande. Et pour cause, on est passé de faits qui peuvent être qualifiés de dégradations volontaires à mise en danger de la vie d’autrui. Ils ont donc à nouveau porté plainte – le couple subit des dégradations qui sont montées crescendo depuis 2016 ! – contre X même si leur avocat, Me Quentin Motemps, a pu identifier quelques personnes. « Pour l’heure, toutes ces plaintes n’ont pas été prises au sérieux, assure l’avocat, et ont été classées sans suite par le procureur ». Avec cette évolution d’atteinte aux biens à atteinte à la personne, l’homme de loi entend surtout faire avancer les choses. Et d’étayer son propos : « Tristan a ingéré ce produit et a été gravement intoxiqué donc c’est d’une tout autre nature. Sans oublier que des dizaines de familles consomment ces produits-là, donc la mise en danger de la vie d’autrui est bien concrète ! » Une plainte qui a donc deux vocations : relancer l’enquête et – « au sens des dispositions de l’article 85 du Code de procédure pénale – permettre, si aucune poursuite n’était engagée dans un délai de trois mois, de déposer une plainte avec constitution de partie civile entre les mains du doyen des juges d’instruction près le tribunal judiciaire d’Aix ». Déménager ? Les Arlaud y ont songé. « Forcément. » Mais leur investissement se compte en milliers d’heures de travail et une ferme ne se déplace pas comme ça. En attendant « un sursaut de la justice », ils maintiennent le cap. Notamment grâce au soutien de la population.

L’article de La Provence est ici.

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Les microparticules issues du trafic routier polluent autant les océans que celles charriées par les rivières

Un article de Novethic, le 15/08/2020

C’est un phénomène qui n’avait pas encore été étudié : l’impact de la pollution aux microparticules, issues du trafic routier, sur les océans. À en croire les estimations d’un premier travail de recherche sur le sujet, publié le 14 juillet, il serait aussi important, voire plus important, que celui des microparticules déversées dans les mers par les rivières.

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Photo d’illustration.

Les microparticules issues du trafic routier ont le même impact sur les océans que les microparticules charriées par les rivières. C’est ce que révèle une étude publiée mi-juillet dans la revue Nature Communications. Celle-ci tente pour la première fois d’estimer la quantité de plastique issu du trafic routier, à cause du frottement des pneus sur la route et de l’utilisation des freins, qui se retrouve dans l’océan.

Selon les chercheurs, un tiers de ces particules dérivées de l’industrie pétrolière, soit environ 50 000 tonnes – avec une fourchette d’incertitude entre 40 000 et 100 000 tonnes – finissent chaque année dans l’océan. C’est presque autant que les 65 000 tonnes de microplastiques déversés dans la mer par les rivières. Même s’ils notent un manque de données de terrain pouvant valider leurs modélisations.

Fin de course en Arctique

« Ce transport atmosphérique – une source sous-estimée, voire pas du tout envisagée – a le même impact sur la pollution des océans par les microplastiques que ce qui est charrié par les rivières », affirme à l’AFP Nikolaos Evangeliou, de l’Institut norvégien pour la recherche sur l’air. Les émissions de microplastiques issues du trafic routier viennent principalement d’Amérique du Nord, d’Europe et d’Asie du Sud-Est.

Selon l’étude, une part importante de cette pollution, transportée par les airs, est susceptible de terminer sa course en Arctique, où les particules colorées qui absorbent plus de rayons du soleil que la neige blanche, pourraient avoir un impact sur la fonte des glaces.

L’article de Novethic est ici.

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Qualifier les écologistes et les défenseurs des animaux d’illuminés ou d’intégristes relève de la manipulation malhonnête

Un article de La Libre.be, le 21/08/2020.

Une opinion de David Bertrand, professeur de psychologie à la Haute École Vinci de Bruxelles.

© BELGA, Unsplash, AFP

« Illuminés », « intégristes », faisant preuve d’un « dogmatisme aveugle » et défendant des idées « absurdes » et « intolérantes », tels sont les mots choisis par Eric Dupond-Moretti pour qualifier les écologistes et les défenseurs des animaux dans sa préface du nouveau livre de Willy Schraen, président de la fédération française des chasseurs. L’avocat star, aux propos aussi tranchants que polémiques, nouveau ministre français de la Justice et lui-même chasseur, monte au créneau pour défendre son président contre ce qu’il nomme les « ayatollah de l’écologie ». Il n’en fallait pas plus pour déclencher les hostilités. Cherchant à nuancer ses propos sur Twitter par la suite, M. Dupond-Moretti explique que ceux-ci ne visaient pas tous les écologistes, mais uniquement les plus extrêmes. Il semble pourtant bien assimiler le mouvement écologiste et la cause animale à des mouvements religieux à tendance sectaire qui seraient fondés sur une foi aveugle, des croyances et des dogmes. Or, ce sont bien des mouvements citoyens et politiques qui se basent sur des données scientifiques solides et des valeurs éthiques fortes.

Techniques de manipulation

Cette rhétorique, souvent utilisée comme stratégie par certains avocats comme par de nombreux politiciens, s’apparente à des techniques de manipulation bien connues en psychologie. Elle consiste à caricaturer une personne, une idée ou un mouvement pour mieux le décrédibiliser par la suite. Utiliser un vocabulaire simpliste pour répondre à un argumentaire complexe. Attaquer l’autre lorsque l’on se sent menacé. Exagérer l’ampleur d’une pratique, la chasse, alors qu’elle n’est soutenue que par à peine un cinquième de la population. Se faire passer pour une victime alors même que certains chasseurs n’hésitent pas à utiliser la force et la menace pour intimider leurs adversaires. Rappelons au passage que des dizaines de militants écologistes sont tués dans le monde chaque année. Leur seul tort : s’en prendre aux entreprises qui polluent les sols, contaminent l’air, déforestent de manière intensive et menacent la biodiversité, ou encore dénoncer ceux qui chassent ou braconnent de manière cruelle et illégale.

Pour Willy Schraen, les défenseurs de la cause animale ne seraient rien de moins que des « terroristes ». Un comble lorsqu’on sait que les chasseurs tuent des millions d’animaux sauvages par an, dispersant au passage des milliers de tonnes de plomb dans la nature. A titre d’exemple, rien qu’en France, les renards seraient entre 500 000 et un million à être tués chaque année, en utilisant souvent des méthodes cruelles comme le piégeage et le déterrage. Ils sont considérés comme nuisibles alors que les renards savent réguler leur population eux-mêmes, qu’ils jouent un rôle important au niveau écologique et qu’ils ne présentent aucune menace particulière pour l’homme. C’est un comble d’utiliser une rhétorique violente pour attaquer un mouvement à l’origine pacifiste. Même si des dérapages existent chez certains écologistes et défenseurs des animaux, historiquement, ce sont avant tout des mouvements non-violents qui défendent aussi bien les droits de l’environnement et des animaux que les droits humains. Frisant la mauvaise foi, M. Dupond-Moretti se demande même s’il est possible d’avoir un débat nuancé sur le sujet, faisant là encore passer les écologistes et les défenseurs des animaux pour des radicaux avec qui on ne peut pas discuter. Il oublie au passage que ce sont les premiers à vouloir débattre démocratiquement, et lorsqu’ils proposent des solutions « radicales », c’est avant tout en réponse à une destruction de l’environnement et une souffrance animale qui prennent une dimension extrême.

S’il souhaite d’abord défendre « une certaine chasse », comme il le dit lui-même, pourquoi ne dénonce-t-il pas les chasseurs qui menacent et violentent certains militants écologistes, à l’instar de Pierre Rigaux, régulièrement intimidé et qui a découvert récemment un cadavre de renard ensanglanté devant chez lui ? Pourquoi ne dénonce-t-il pas ces chasseurs qui déterrent une famille de blaireaux ou de renards avec une pince et qui forcent ensuite des jeunes enfants à les tuer avec une pelle ? Pourquoi ne dénonce-t-il pas ces chasseurs qui maltraitent et affament leurs chiens ? Pourquoi ne pas dénoncer ces élevages intensifs de faisans et de perdrix relâchés en période chasse dans une nature qu’ils ne connaissent pas, et qui sont tués quasi à bout portant parce qu’ils n’ont pas peur de l’homme ? En quoi piéger des oiseaux en mettant de la glu sur une branche est-elle une pratique noble et défendable ? Quelle fierté y a-t-il à poursuivre un cerf jusqu’à l’épuisement et le faire déchiqueter par des chiens, lui planter un couteau dans le cœur, le tirer à bout portant dans un jardin ou le noyer dans une rivière alors qu’il cherche juste à s’échapper pour survivre ?

Malhonnêteté intellectuelle

Traiter de terroristes ceux qui défendent la vie des animaux alors que d’autres les tuent est malhonnête intellectuellement. Je ne prétends pas qu’on doive interdire toute forme de chasse et dans certains cas précis elle peut avoir son utilité, mais elle devrait être plus limitée et contrôlée, et certaines pratiques d’un autre âge, comme la chasse à courre ou le déterrage, devraient être interdites. Pour rappel, dans les sociétés occidentales modernes, on chasse principalement pour se divertir, pas pour survivre. Et l’argument de régulation des populations avancé par les chasseurs est souvent un prétexte servant à justifier ces dérives. L’autre argumentation utilisée par les chasseurs pour se défendre est la préservation d’une tradition, la passion, le plaisir et la liberté de chasser voire de consommer l’animal que l’on souhaite. Selon cette logique, par principe les traditions seraient toujours bonnes et ne devraient jamais être remises en question. On voit à quel point ce raisonnement pose problème.

Lorsqu’on l’interroge sur la chasse à la glu, Willy Schraen répond que nous devrions laisser les gens faire ce qu’ils veulent car cela les rend heureux et qu’ils ne dérangent personne. Sa réponse démontre qu’il semble incapable de comprendre que la majorité des citoyens soient indignés par le fait qu’on puisse piéger des petits oiseaux sauvages avec de la glu et les laisser mourir à petit feu alors qu’ils tentent désespérément de s’échapper de la branche sur laquelle ils sont collés, tout cela par tradition, plaisir et passion. Tout cela alors que de nombreuses espèces d’oiseaux sont en déclin en Europe et que la France a été condamnée par l’Union Européenne pour pratique illégale de la chasse pour cette même raison. Il est également étonnant que M. Schraen ou M. Dupond-Moretti préfèrent traiter les écologistes d’extrémistes que de reconnaître que le fait de demander à un enfant de trois ans de tuer des renardeaux à la pelle pour l’« initier » à la chasse peut être assimilé à de la maltraitance infantile et peut être à l’origine d’un traumatisme psychologique. Surtout lorsqu’on sait l’affection que la majorité des enfants éprouve spontanément envers les animaux.

Le mouvement est en marche

Un référendum pour les animaux à été lancé en France au début du mois d’août et il a déjà recueilli plus de 500 000 signatures. Il est soutenu par près de 130 parlementaires. Cela montre que la population se soucie du sort des animaux et qu’un vrai mouvement est en marche. Six propositions ont été faites : l’interdiction de l’élevage en cage, l’interdiction de l’élevage de fourrures, la fin de l’élevage intensif, l’interdiction des spectacles avec animaux sauvages, la fin de l’expérimentation animale et l’interdiction des chasses traditionnelles. Compte tenu de ce que l’on sait aujourd’hui sur l’intelligence et des émotions des animaux, ainsi que sur leur capacité à ressentir de la douleur et à souffrir, et même si ces propositions doivent encore être débattues, elles semblent justes, nuancées, raisonnables et adaptées à notre époque. Très éloignées en tous cas de cet extrémisme dénoncé par les chasseurs. Il est temps que notre société se réveille sur ces questions, que ce soit en France, en Belgique ou ailleurs. Et ce n’est pas en traitant les défenseurs des animaux de terroristes et les écologistes d’ayatollah que nous pourrons progresser sérieusement sur le sujet.

L’article de La Libre.be est ici.

Le référendum pour les animaux est ici.

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Aux ayatollahs de la chasse, par Aymeric Caron

Une tribune de Libération, par Aymeric Caron, le 17/08/2020.

Le patron de la Fédération nationale des chasseurs, Willy Schraen sort un livre dans lequel il dit toute sa détestation de ceux qui remettent en cause sa passion, écologistes en premier lieu. Un positionnement qui bénéficie «d’inacceptables» relais politiques, selon l’écrivain Aymeric Caron.

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Photo d’illustration.

Tribune. Le chef des chasseurs français, Willy Schraen, sort un livre pour défendre sa passion et ses droits. A cette occasion, il vient de livrer à un hebdomadaire dominical une longue interview semblable à la déchirante plainte d’un animal agonisant. Car la chasse, c’est vrai, a du plomb dans l’aile. Et le faux chiffre de 5 millions d’adeptes, mis en avant dans l’article, ne trompe personne puisque les licenciés dépassent aujourd’hui à peine le million.

Dans l’entretien, Schraen dénonce d’abord le Référendum d’initiative partagée (RIP) en faveur du bien-être animal, initié par trois entrepreneurs français. Parmi les six mesures mises en avant figure en effet l’interdiction de la chasse à courre, du déterrage, et des chasses dites traditionnelles. Schraen est ulcéré que 129 parlementaires aient signé ce RIP. «Ils devraient se retirer de la politique», peste-t-il, évoquant un «déni de démocratie», avant de se demander aussitôt : «Si on doit diriger le pays à coups de référendums, à quoi sert la classe politique ?»

Avec ces derniers mots, Willy Schraen se tire une balle dans le pied (un stupide accident de chasse, sans doute). En effet, il nie la validité de la démarche référendaire au nom de la prédominance du rôle de l’élu. Or, en même temps, il dénie aux élus la possibilité d’exprimer leur opinion. En fait, on a compris : Schraen déteste tous ceux, politiques ou pas, qui remettent en cause son loisir obsolète, et la démocratie qu’il appelle à la rescousse est le dernier de ses soucis.

Bordel écologique

Alors forcément, Willy Schraen ne porte pas Barbara Pompili dans son cœur. Pensez donc : la nouvelle ministre de la Transition écologique a eu l’outrecuidance de lui annoncer la fin du cruel piégeage à la glu. «Jusqu’à preuve du contraire, c’est une pratique légale», se scandalise Schraen, qui semble tout ignorer du droit communautaire. En effet, comme le rappelle la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO), le piégeage à la glu est illégal depuis l’adoption de la directive oiseaux par l’Union européenne (directive 2009/147) et sa transposition en droit français. La France a été récemment rappelée à l’ordre, et elle a jusqu’à début octobre pour faire cesser la chose. Barbara Pompili n’a donc rien décidé, elle exécute.

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A ce sujet, explique Schraen, quelle erreur que d’avoir confié le portefeuille de l’écologie à une écologiste ! Selon lui, «il ne faut pas donner l’écologie aux écologistes ; à chaque fois c’est le bordel». Bien curieuse accusation. Certes, les chasseurs tuent chaque année dans notre pays plusieurs dizaines de millions d’animaux et déversent en Europe plus de 20 000 tonnes de plomb dans la nature, polluant ainsi les écosystèmes et occasionnant la mort d’un à deux millions d’oiseaux supplémentaires, selon les chiffres de l’Agence européenne des produits chimiques (Echa). Cela ne les empêche pas de s’autoproclamer «premiers écologistes de France». Donc, d’après la logique de Willy Schraen, si on confiait l’écologie aux chasseurs, ce serait «le bordel» ? Le bordel, il semble surtout se trouver dans la tête de Monsieur Schraen. D’ailleurs dans la même interview, celui-ci se réjouit du fait que l’écologie «va s’essouffler», puis revendique sa «vraie vision écologique». Alors, écolos ou pas, les chasseurs ? Sans doute que ça dépend. Car il y a les bons écolos, et les mauvais écolos…

Citadins déconnectés contre représentants ruraux ?

Willy Schraen, ne reculant devant aucune malhonnêteté intellectuelle, tente ensuite, à plusieurs reprises, de faire des chasseurs les représentants officiels du monde rural. Certes, les chasseurs ne chassent pas en ville en principe. Mais Schraen semble n’avoir pas remarqué que de très nombreux opposants à la chasse habitent eux-mêmes la campagne, ou la fréquentent très régulièrement. Pierre Rigaux, éminent militant anti-chasse, est installé au milieu de la nature. C’est là qu’il reçoit régulièrement les menaces des chasseurs, soit lorsqu’il les croise sur les chemins, soit directement chez lui. Il y a quelques mois, l’un d’entre eux a déposé le cadavre ensanglanté d’un renard sur sa voiture. Le naturaliste Marc Giraud, vice-président de l’Association pour la protection des animaux sauvages (Aspas) et autre célèbre adversaire de la chasse, vit lui aussi loin de la ville et connaît la ruralité mieux que personne. Moi-même j’ai grandi à la campagne, comme tant de citoyens qui ont la chasse en horreur et qui ne supportent plus que leurs forêts et leurs champs soient pris en otage par une minorité menaçante.

Non, les chasseurs ne sont pas les représentants de la ruralité, et leurs opposants ne sont pas des citadins déconnectés. Et les amoureux de la nature, de la campagne, des animaux et des arbres, refusent que les chasseurs prétendent les représenter.

Soutiens politiques 

Mensonges, déformations, incohérences, rejet des processus démocratiques : tout cela n’aurait pas beaucoup d’importance si le porte-parole de la chasse en France ne bénéficiait pas d’une position médiatique et politique privilégiée difficilement compréhensible. Willy Schraen le rappelle lui-même : il appelle le président Macron directement quand il a besoin, il est chouchouté par le Premier ministre Jean Castex et par le président du Sénat, le chasseur Gérard Larcher. Et il bénéficie aujourd’hui d’un autre soutien au gouvernement : celui du ministre de la justice Eric Dupond-Moretti. Ce dernier aime la corrida, mais il est aussi un adepte de la chasse au faucon. L’avocat-acteur a donc accepté de signer la préface du livre de Schraen. Et il y confirme sa détestation des défenseurs des animaux, traités par sa plume de «fous», d’«illuminés», d’«intégristes», d’«extrémistes», d’«ayatollahs», tandis que leurs idées sont «intolérantes» et «absurdes». Une litanie d’insultes sans esprit qui surprend, tant elle révèle l’absence d’arguments du rhéteur médiatique, réduit ici au moins élégant des stratagèmes : la tentative primaire de décrédibilisation de l’adversaire.

Tourterelle des bois.

Mais surtout, ces mots violents adressés aux militants du vivant sont indignes de la part d’un ministre, qui plus est pour celui d’entre eux qui est en charge de la chose juste. Ces propos sont d’autant plus inacceptables que l’écrasante majorité des Français en a, pour dire les choses clairement, marre de la chasse et des chasseurs. Tous les derniers sondages le confirment, notamment une étude Ipsos de 2018 qui montrait que seuls 19% des Français soutiennent encore la chasse, pratique jugée par l’écrasante majorité des citoyens «dangereuse pour eux», «cruelle pour les animaux» et «d’un autre âge». Interdire la chasse à courre ou le piégeage à la glu n’est donc qu’un impératif démocratique auquel il est inacceptable que des membres du gouvernement s’opposent. Et ce n’est qu’une première étape. Un jour, comme le propose le parti REV (Révolution Écologique pour le Vivant), c’est la chasse elle-même qui sera bannie. C’est un ayatollah du respect de la vie qui vous le prédit.

Aymeric Caron, journaliste, écrivain, fondateur de Révolution écologique pour le vivant (REV)

La tribune de Libération est ici.

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Nord : des centaines d’invendus Carrefour déposés en pleine forêt

Un article du Parisien, par , le 20/08/2020.

Tapenades, champignons, sandwichs … trois sites de dépôts sauvages ont été découverts en forêt de Mormal, près de Maubeuge.

Une partie des invendus retrouvés dans la forêt – Photo : association Mormal Forêt Agir

Un promeneur a fait une triste découverte mardi 17 août, dans la forêt de Mormal (Nord). Des centaines de produits invendus – de l’enseigne Carrefour pour la plupart – ont été déposés dans trois secteurs du bois, indique France bleu, soit l’équivalent de deux camionnettes d’aliments.

Alertée, l’association Mormal Forêt Agir a déposé une plainte à la gendarmerie de la commune de Landrecies mercredi 18 août. « Il y a suffisamment de code de traçabilité pour espérer qu’une enquête permette de remonter à la source », a précisé Benoit Tomsen, le président de l’association dans un communiqué. « À l’heure où chacun fait des efforts pour préserver ce qu’il reste de biodiversité, voilà de quoi s’interroger sur le sens civique et sur le peu d’éducation des auteurs », a-t-il ajouté.

Le ministre de l’Agriculture, Julien Denormandie a lui aussi réagi sur Twitter :

Enquête interne

L’association a contacté Carrefour via les réseaux sociaux qui s’est empressé de répondre, « dans le quart d’heure ». L’enseigne trouve la découverte « totalement inacceptable » et allant « à l’encontre de (ses) engagement et de (ses) pratiques ». Après avoir récupéré l’ensemble des codes-barres et autres indications sur les articles, Carrefour a ouvert une enquête interne pour tracer les marchandises et retrouver les auteurs.

Mais l’entreprise n’exclut aucune piste, selon le Figaro. « Un membre indélicat d’une association liée au programme de dons de l’enseigne aurait également pu se débarrasser d’une cargaison devenue encombrante », explique le quotidien. En effet depuis 2016 et la loi anti-gaspillage, les distributeurs n’ont pas le droit de se débarrasser d’invendus encore consommables. Ils doivent proposer une convention de don à des associations pour la reprise de ces invendus.

L’article du Parisien est ici.

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Face à la sécheresse en France, la guerre de l’eau a commencé

Un article du JDD, par Marie Quenet, le 02/08/2020.

Face aux sécheresses à répétition en France, les projets de retenues d’eau se multiplient… ainsi que les conflits.

A Saint-Pierre-de-Caubel, dans le Lot-et-Garonne, le lac de Caussade est issu d’une retenue d’eau illégale. (AFP)

La vague de chaleur a beau refluer, quelques orages éclater, les plantes ont soif. « Ce mois de juillet sera le plus sec depuis 1959 », estime-t‑on à Météo-France. Les nappes phréatiques, rechargées cet hiver, sont certes dans une meilleure situation que l’été dernier, mais la sécheresse gagne du terrain. Soixante-huit départements avaient déjà pris vendredi des mesures de restriction d’eau. Une situation qui va s’aggraver au fil des ans. Selon les experts, le dérèglement climatique devrait en effet entraîner une augmentation de la fréquence, de la durée et de l’intensité des épisodes de sécheresse d’ici à 2050. Cela se traduira par une diminution des débits des rivières de 10 à 40% à l’horizon 2046-2065. « La gestion de l’eau focalisera les conflits dans notre pays d’ici à la fin du siècle », prédit la députée ex LREM, aujourd’hui EDS, ­Frédérique Tuffnell, rapporteure d’une récente mission parlementaire sur le sujet.

Car l’or bleu suscite des convoitises. Pour l’heure, l’industrie en utilise 6%, le secteur de l’énergie 22%, l’eau potable représente 24% de la consommation et l’agriculture 48% (mais 79% en période estivale!). Le problème, c’est qu’à l’exception des usages définis comme prioritaires dans le Code de l’environnement – santé, salubrité, sécurité civile, eau potable et respect des équilibres naturels – le reste n’est pas hiérarchisé.

Les contentieux se sont multipliés

Déjà des tensions éclatent. Certains ont du mal à comprendre pourquoi ils n’ont pas le droit d’arroser leur jardin ou de remplir leur piscine quand les agriculteurs continuent parfois à irriguer le maïs. Ces derniers se défendent. « Pour nourrir la population, il nous faut de l’eau, rappelle Éric Frétillère, le président d’Irrigants de France. La majorité des fruits, légumes et céréales poussent l’été, en période sèche. » Les exploitants plaident pour la création de retenues afin de stocker l’eau en hiver, quand elle est abondante, pour en avoir l’été. Le nouveau ministre de l’Agriculture, Julien Denormandie, a promis, vendredi sur Europe 1, de simplifier les procédures pour en construire.

Pas sûr que cela suffise. « Ce sont des solutions simplistes, coûteuses, destructrices de la biodiversité, qui privatisent l’eau et aggravent la sécheresse des milieux naturels en aval », dénonce ­Arnaud ­Schwartz, le président de l’association France nature environnement (FNE), qui n’hésite pas à attaquer en justice. Ces dernières années, les contentieux se sont multipliés : 21 sur les 34 projets de retenues dans le bassin Loire-Bretagne, 41 sur 60 en Adour-Garonne.

La bataille de l’eau a déjà commencé. Dans les Deux-Sèvres, un projet visant à créer 19 retenues a été revu à la baisse. Dans les Vosges, une plainte a été déposée contre Nestlé Waters, la multinationale qui exploite l’eau de ­Vittel. Dans le Lot-et-Garonne, deux dirigeants de la chambre d’agriculture viennent d’être condamnés à de la prison ferme pour la construction illégale d’une retenue, le lac de Caussade. Sans oublier le barrage de Sivens, dans le Tarn. En 2014, ­Rémi ­Fraisse, un jeune opposant au projet, a perdu la vie lors des affrontements avec les forces de l’ordre.

Les agriculteurs changent leurs pratiques

Pointés du doigt, les agriculteurs cherchent pourtant à s’adapter. « Nous utilisons 30% d’eau en moins qu’il y a vingt ans », assure Luc Servant, le vice-président de l’assemblée permanente des chambres d’agriculture. Goutte‑à-goutte, vannes électroniques pour contrôler le débit, sondes mesurant la tension hydrique du sol, algorithme pour modéliser la réserve d’eau utile… Les nouvelles technologies permettent de réduire le gaspillage. Et le prochain rapport d’orientation de la FNSEA, le syndicat majoritaire, intitulé « Faire du défi climatique une opportunité pour l’agriculture », invitera aussi, en plus de la création de retenues d’eau, à adopter de nouvelles pratiques.

Face aux sécheresses répétées, certains appellent à aller plus loin. « Les agriculteurs doivent changer de paradigme », exhorte la FNE. « Nous devons passer à un modèle beaucoup plus résilient, trouver des solutions fondées sur la nature », renchérit la députée ­Frédérique ­Tuffnell. Comment? En utilisant des variétés moins gourmandes en eau comme le sorgho ; en semant plus tôt pour que les plantes se développent avant la saison sèche.

La piste de l’agroécologie

Cela passe aussi par l’agroécologie. Replanter des haies pour retenir l’eau. Des arbres pour avoir de l’ombre. Couvrir toute l’année le sol de végétaux pour retenir l’humidité. Éviter le labour et les pesticides pour maintenir la vie souterraine, la matière organique, qui favorise elle aussi la rétention d’eau. Et préserver les zones humides. Afin d’inciter les agriculteurs à s’engager dans cette voie, le rapport parlementaire publié en juin propose de créer un fonds de 1 milliard d’euros pour financer les « paiements pour services environnementaux » (déjà expérimentés) sur la période 2021-2025.

Pour désamorcer les conflits, il faut aussi privilégier le dialogue, par exemple en favorisant des projets de territoire pour la gestion de l’eau. Dans les Deux-Sèvres, de nouvelles discussions sur les retenues d’eau ont abouti à un « protocole d’accord pour une agriculture durable ». Le préfet vient de signer l’autorisation de construction. De quoi faire taire les querelles? À voir.

L’article du Journal du Dimanche est ici.

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Dans le Nord, «la terre est comme du béton»

Un article de Libération, par Sheerazad Chekaik-Chaila, le 02/08/2020.

Cet été, le département connaît un épisode de sécheresse exceptionnel. Sur place, agriculteurs et maraîchers constatent un changement global du climat.

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Arrosage d’un champ de pommes de terre à Sailly-lez-Cambrai (Nord), le 16 juin. Photo Pascal Rossignol. Reuters

«La sécheresse, c’est ça !» D’une main, Olivier écrase un bloc de terre qui file en poussière dans un coup de vent : «On se croirait à Bray-Dunes [une plage du Nord, ndlr], et encore, on a arrosé…» Ce maraîcher, 50 ans, fait pousser soixante variétés de fruits et légumes sur sa petite exploitation, les Jardins de Liselotte, à Catillon-sur-Sambre (Nord), 8 000 m² situés entre Cambrai et la frontière belge. Les sécheresses s’y succèdent depuis quatre ans, comme dans tout le nord de la France, et inquiètent le milieu agricole.

Ancien jardinier, Olivier travaille depuis trois ans comme maraîcher bio, avec sa compagne, Yaëlle, ancienne professeure d’histoire-géographie. Elle : «On a arrêté de manifester. Maintenant, on fait face aux aléas climatiques tous les jours. On est au front.»

«4 × 4»

Depuis fin mai, le département du Nord est en vigilance sécheresse avec des restrictions d’usage de l’eau dans les zones les plus à sec. L’absence de pluie depuis la mi-mars, le climat doux et le retour des activités économiques ont engendré des pics dans la consommation, note la préfecture. «L’absence quasi totale de pluies durant le mois de mai a considérablement accentué la dégradation de l’état des cours d’eau», indique le service de l’État, qui appelle industriels, agriculteurs et particuliers à économiser la ressource. Les pluies des dernières semaines ne suffisent pas à améliorer la situation.

Cela implique pour les premiers de réduire de 10 % leur consommation. Les agriculteurs, eux, doivent en utiliser le strict nécessaire, quand les particuliers sont invités à limiter l’arrosage des pelouses, le remplissage des piscines et à laver les voitures dans des stations dédiées. «C’est un phénomène sur la durée. Il y a vingt ans qu’on aurait dû interdire de laver son 4 × 4 avec 200 litres d’eau et arrêter d’utiliser de l’eau potable pour tirer des chasses d’eau, gronde Olivier. Il faudrait peut-être qu’on augmente le prix de l’eau, qu’on la paye à sa juste valeur !»

Selon la préfecture, la situation dans certains bassins est encore plus préoccupante que l’année précédente. Pourtant, la sécheresse de 2019 était déjà exceptionnelle par sa durée et son intensité. «Pour la première fois depuis 1976, le puits était vide», se souvient Olivier. Il pointe une mare : «Elle est représentative du niveau de la nappe et on voit qu’elle s’assèche année après année…»

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Photo d’illustration.

Son mode de production est minoritaire dans une région où les terres servent surtout aux grandes cultures, notamment céréalières, visibles sur plusieurs hectares de champs. Pour autant, plusieurs agriculteurs conventionnels qui fournissent l’industrie agroalimentaire constatent aussi les effets du dérèglement climatique. «Depuis une dizaine d’années, on n’a plus d’hiver avec du grand froid. Les phénomènes météo sont plus marqués et plus violents qu’avant, note l’un d’eux, installé dans les Flandres. On passe d’un extrême à l’autre : du très sec au très pluvieux.» Des épisodes pluvieux qui favorisent les crues plutôt que le rechargement des nappes phréatiques.

Le temps change. Des balles rondes de paille habillent déjà les champs dorés de la région. «L’an dernier, on a fini la moisson fin juillet. Là, on est le 25 juillet et c’est déjà terminé. On a encore une semaine d’avance. On a d’excellents rendements dans les céréales, mais la terre est comme du béton», montre Philippe, 46 ans, agriculteur depuis 1997. Des sillons traversent le sol à plusieurs endroits. «D’habitude, je sème du ray-grass après la moisson, une herbe qui me sert pour alimenter les bêtes. Cette année, je ne vais pas la planter, ça ne poussera pas.» Dans ses pâtures, l’herbe aussi a séché, privant ses vaches de nourriture fraîche.

«Paillage»

Par endroits, des pâtures de la région ont été converties pour cultiver du maïs, plus rentable que l’élevage pour certains agriculteurs. Problème : il réclame beaucoup d’eau, pouvant accentuer les phénomènes de sécheresse. «La grande culture aura les mêmes problèmes que nous dans dix ans», alerte Olivier. Déjà, certains producteurs arrosent leurs patates pour les aider à grossir. Inimaginable dix ans plus tôt.

Comment préserver l’eau ? L’installation de système d’irrigation coûte cher, peu d’agriculteurs s’équipent. «Ça nous pénalise de ne pas en avoir», dit Olivier. «On ne plante pas dans le désert, soupire Yaëlle devant du fenouil déjà récolté. Il faut éviter que l’eau s’évapore et s’en aille, alors on met du paillage et des bâches pour retenir l’humidité.» Sous les serres, ils ont installé un système de goutte-à-goutte, plus économe, pour arroser leurs plants de tomates. Le couple puise aussi dans la diversité des variétés de légumes, notamment anciennes, plus aptes à s’adapter aux nouvelles conditions climatiques. «Tous les légumes ont besoin d’eau, insiste Olivier. Sans eau, on est morts !»

L’article de Libération est ici.

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Barbara Pompili veut interdire la chasse à la glu, la Fédération des chasseurs monte au créneau

Un article de L’OBS, le 29/07/2020.

Le président de la Fédération des chasseurs a affirmé sur France Info être prêt à engager des procédures judiciaires contre ce projet de loi.

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Une grive piégée à la glu. © Chantelat/SIPA

C’est un débat déjà ancien, et Barbara Pompili veut s’y atteler. D’après une information de France Info ce mercredi 29 juillet, la ministre de la Transition écologique a annoncé au président de la Fédération des chasseurs lors d’une réunion mi-juillet vouloir interdire la chasse à la glu, une technique de chasse consistant à piéger les oiseaux avec de la colle.

L’objectif de la ministre : qu’il n’y ait plus aucune pratique de ce type pour la saison de chasse 2020-2021, qui débute au mois d’octobre. Le député LREM Loïc Dombreval, connu pour ses positions en faveur de la cause animale, se réjouit de cette décision, qui pourrait tempérer l’image d’une majorité jusqu’ici indifférente à ce combat : la loi Egalim de 2018 qui devait lutter contre certaines pratiques maltraitantes dans l’élevage avait en effet été vidée de la plupart de ses ambitions.

« A la fin du mandat [en 2022], les Français pourront comptabiliser les avancées pour les animaux, comme le décret de Barbara Pompili », espère-t-il auprès de l’Obs. Je crois qu’ils verront que nous n’avons pas à rougir de ce que nous avons fait, même si notre pays reste très en retard sur de nombreux points.

Interviewé par France Info, le président de la Fédération des chasseurs, Willy Schraen, a affirmé être en « complet désaccord » avec l’idée de la ministre et a annoncé qu’il était prêt à engager des procédures juridiques pour que l’interdiction ne soit pas appliquée. Il dit également que les chasseurs préparent une « action forte d’ampleur nationale » pour manifester leur mécontentement.

« Piégeage cruel »

Une nouvelle favorablement accueillie du côté de la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO). Également sur France Info, son directeur général, Yves Verilhac, a salué la décision de la ministre : « La France était le dernier pays européen qui autorisait ce piégeage cruel et non sélectif avec de la colle, sous forme de dérogation ».

C’est en effet l’occasion pour la France de se rattraper après avoir été épinglée en juillet dernier par la Commission européenne pour ne pas avoir respecté la «directive oiseaux», qui prône la protection d’espèces menacée.

Le directeur général de la LPO espère cependant que la Fédération des chasseurs ne parviendra pas à faire reculer le gouvernement sur cette mesure, alors que se profile le Congrès mondial de la nature, organisé à Marseille en janvier 2021 : «Désormais, il faut espérer que le lobby des chasseurs ne gagne pas. Mais à la veille d’accueillir le congrès mondial de la nature de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature, la France ne pouvait pas se permettre d’être le vilain petit canard qui laisse piéger et torturer les oiseaux».

L’article de L’OBS est ici.

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Malgré ses annonces, l’État pourrait laisser Amazon construire des entrepôts à gogo

Un article de Reporterre, par Gaspard d’Allens, le 31/07/2020.

Dix jours après l’annonce d’un éventuel moratoire, l’idée semble, déjà, enterrée : aucun gel temporaire n’a été décidé alors que la multinationale prévoit de doubler le nombre de sites en France d’ici 2021. Au sein du gouvernement, la cacophonie règne et les prises de position sont timides face à ce « modèle destructeur pour l’emploi et l’écologie ».

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Au sein du gouvernement, le laps de temps entre une annonce et son désaveu semble de plus en plus rapide. Les discours verdoyants s’enchaînent mais peinent à se traduire en acte. Le 17 juillet, Barbara Pompili proposait de bloquer temporairement la construction d’entrepôts de e-commerce et donnait « une lueur d’espoir » à tous les militants engagés aux quatre coins de la France contre l’expansion d’Amazon.

Au micro de RTL, la nouvelle ministre de la Transition écologique assurait que « c’est maintenant que les décisions doivent être prises. Les informations sur les destructions d’emplois reposent sur des calculs tout à fait fiables. Il y a des mobilisations de plus en plus importantes dans les territoires contre ces projets. C’est le moment de mettre un coup d’arrêt », expliquait-elle, avec fermeté.

Avant d’être ministre, elle avait également signé, en tant que députée, une tribune à charge contre le géant de la vente en ligne : « Ses projets sont contraires à la lutte contre le changement climatique et à l’ambition de relocaliser l’économie, affirmait le texte publié dans Libération. À l’heure de l’urgence écologique, ces nouvelles implantations vont dans le sens inverse de l’histoire ».

Le 18 juin, dans le Monde cette fois-ci, l’ancienne présidente de la Commission du développement durable à l’Assemblée nationale récidivait : « Si on favorise l’implantation de gros entrepôts de e-commerce comme ceux d’Amazon, il ne faut pas pleurer sur les problèmes des petits commerces », déclarait-elle.

Mais depuis, de l’eau semble avoir coulé sous les ponts. Dix jours seulement après l’annonce d’un éventuel moratoire, l’idée paraît même enterrée. Sous pression, la nouvelle ministre a dû faire volte-face. Reporterre revient sur cette séquence qui illustre le poids relatif de Barbara Pompili au sein de l’exécutif et les blocages au plus haut sommet de l’État.

« Le président de la République est allergique au mot moratoire »

Comme nous le racontions déjà dans une précédente enquête, Emmanuel Macron et le secrétaire général de la présidence, Alexis Kohler, sont de fervents défenseurs du e-commerce. Le chef de l’État a encore reçu récemment Jeff Bezos (le PDG d’Amazon) à l’Élysée. Dès son arrivée au pouvoir, en 2017, il avait inauguré l’un des plus grands sites d’Amazon à Boves en Picardie. Son gouvernement avait aussi assoupli les normes pour autoriser la création de méga-entrepôts avec des capacités de stockage allant jusqu’à trois millions de m3.

L’amour d’Emmanuel Macron pour ces étendues de tôles ondulées est loin d’être récent. Lorsqu’il était ministre de l’Économie en 2015, sous le quinquennat Hollande, il avait initié « une stratégie nationale pour la logistique » afin de « faire de la plateforme France une référence mondiale ».

« Il y a une forme de copinage. Emmanuel Macron ne veut pas contredire Amazon. Il pense que la vente en ligne est l’avenir du commerce », analyse Alma Dufour de l’association les Amis de la Terre. D’autant plus que « le président de la République est allergique au mot moratoire et à l’encadrement de l’économie », précise-t-elle.

Au cours d’une entrevue avec l’association, Bruno le Maire, le ministre de l’Économie, s’est aussi montré frileux quant à l’idée d’un moratoire. Il a expliqué avoir peur des répercussions diplomatiques. « Le gouvernement ne veut pas se mettre à dos les marchés financiers ainsi que les États-Unis et la Chine qui verraient d’un mauvais œil le frein à l’expansion de leurs premières capitalisations boursières », souligne Alma Dufour.

La cacophonie règne et les racines de l’inertie sont profondes. Il y a deux mois, l’ancienne secrétaire d’État à l’Économie, Agnès Pannier Runacher, désormais passée à l’Industrie, se déclarait officiellement contre un moratoire dans l’émission Bourdin Direct sur RMC :  » Moi je suis favorable à l’emploi, je ne suis pas dans le gimmick ou l’idéologie. Si vous interdisez un entrepôt en France, il peut aller en Belgique, en Allemagne ou en Italie. « 

Face à cette levée de boucliers, lundi 27 juillet, Barbara Pompili a dû avaler sa première couleuvre à l’issue du Conseil de défense écologique. Si elle a confirmé le lancement d’un moratoire sur les zones commerciales en périphérie des villes, comme le demandait la Convention citoyenne pour le climat, elle n’a pas inclus les entrepôts de vente en ligne. Aucun gel temporaire n’a été, pour l’instant, fixé alors qu’une dizaine de projets portés par Amazon sont en voie d’autorisation et que la multinationale prévoit de doubler le nombre de sites en France d’ici 2021.

Le monstre du e-commerce avance comme « une machine de guerre »

Partout, son implantation s’accélère. Le centre de Belfort vient de recevoir son permis de construire et attend sa future autorisation. Il risque de raser une zone humide de treize hectares. Celui d’Ensisheim en Alsace, qui ferait plus 190.000 m2, a terminé son enquête publique avec un avis favorable du commissaire enquêteur. Il pourrait, lui aussi, démarrer prochainement comme les nouveaux entrepôts de Metz et de Lyon. À Fournès, près de Nimes, c’est un bâtiment de six étages qui menace de faire de l’ombre au Pont du Gard et de bétonner, au passage, plusieurs hectares de terres agricoles.

Selon les calculs de l’association les Amis de la Terre, la multinationale pourrait artificialiser d’ici 2021, 1,4 millions de m2 à travers la France. Elle pourrait aussi faire exploser l’empreinte carbone de la France avec l’importation de plus d’1,3 milliard de produits supplémentaires par an, la plupart provenant de Chine.

Depuis le confinement, l’entreprise s’est rendue indispensable. Son chiffre d’affaire a bondi de 83 % en avril dernier. Elle est le grand gagnant de la crise au mépris de la santé de ses salariés, soumis à des rythmes intenses et une promiscuité dangereuse. Plusieurs ont d’ailleurs été malades du Covid-19. Et même si la multinationale a été condamnée par la justice et obligée de fermer temporairement ses sites, son expansion n’a pas faibli.

Son patron, Jeff Bezos, a enregistré une hausse historique de sa fortune estimée aujourd’hui à plus 180 milliards de dollars. Une somme supérieure au PIB du Maroc et à la richesse combinée de près de la moitié de l’humanité. En une seule journée, lundi 20 juillet, il a vu son patrimoine augmenter de treize milliards de dollars. Jeff Bezos pourrait devenir d’ici 2026 le premier « trillionaire » de l’histoire.

Le monstre du e-commerce avance comme une « machine de guerre », grignotant les parts de marché et menaçant des dizaines de milliers d’emplois en France. D’après l’ancien secrétaire d’État au Numérique, Mounir Mahjoubi, auteur de l’enquête « Amazon : vers l’infini et Pôle Emploi ! » : « Pour un emploi créé chez Amazon en France, 2,2 sont potentiellement perdus dans nos commerces de proximité. » 26.000 emplois risquent d’être supprimés à court terme.

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« Emmanuel Macron ne veut pas contredire Amazon. Il pense que la vente en ligne est l’avenir du commerce. »

Mais les réponses du gouvernement restent timides. Lundi 27 juillet, Barbara Pompili a simplement indiqué vouloir créer une mission parlementaire afin de « passer en revue l’ensemble des dispositifs notamment fiscaux qui encouragent l’étalement urbain ». Un volet sera consacré au e-commerce, a-t-elle promis. Mais d’ici le rendu de la mission, aucune suspension ne semble, en réalité, être envisagée.

« C’est une mesure dilatoire », fulmine Arnaud Schwartz président de France Nature Environnement. Il faudrait arrêter « dès à présent et définitivement » la construction de ces entrepôts dont « l’impact est déjà connu », dit-il.

« Le gouvernement va tuer les petits commerces »

Le choix du gouvernement se fait aussi au mépris des demandes de la Convention citoyenne pour le climat. Ses membres avaient répété qu’ils souhaitaient intégrer les hangars de e-commerce dans leur moratoire. Le 16 juillet, dans la matinale de France Inter, William Aucant, un des 150 citoyens tirés au sort, l’avait encore réaffirmé et s’était inquiété de la tournure que prenaient les événements.

La situation actuelle risque de renforcer « la concurrence déloyale entre les commerces physiques et la vente en ligne », alerte Francis Palombi, président de la Confédération des commerçants de France, qui rappelle qu’il existe déjà deux poids deux mesures : « Les entrepôts de e-commerce ne sont pas soumis à la même législation ni aux mêmes règlements. Ils se dispensent d’une partie de la TVA et ne payent pas la taxe sur les surfaces commerciales. C’est incompréhensible », dit-il.

Au cours de l’examen du troisième projet de loi de finances rectificative, la députée des Deux-Sèvres, Delphine Batho, a tenté de mettre fin aux privilèges des entrepôts de vente en ligne. En vain. Ses amendements ont tous été rejetés. « En restant laxiste, le gouvernement va tuer les petits commerces », se désole Francis Palombi.

Alma Dufour, des Amis de la Terre, elle, ne décolère pas :  » Quand on dit qu’il faut fermer les centrales nucléaires, le gouvernement nous fait tout le temps du chantage à l’emploi et nous traite d’irresponsables. Mais là tout d’un coup, pour Amazon, il s’en fiche. Il laisse s’installer un modèle destructeur pour l’emploi et l’écologie. C’est criminel. « 

L’article de Reporterre est ici.

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Hydrogène : la grenouille française qui veut se faire aussi grosse que le bœuf allemand

Un article de Novethic, par Ludovic Dupin, le 24/07/2020.

Alors que l’hydrogène a été maintes fois cité par Emmanuel Macron comme un des facteurs d’une relance verte, le plan hydrogène allemand, avec 9 milliards d’euros, est 90 fois plus important que le plan hydrogène français. Difficile dans ces conditions d’imaginer que la France puisse peser sur ce marché d’avenir. Le pays doit absolument mettre en place des budgets à la hauteur de ses ambitions.

Comparaison n’est pas raison. Mais parfois celle-ci est quand même utile… En 2018, la France lançait un grand plan hydrogène pour favoriser la transition énergétique. À raison ! Quand il est produit à partir d’énergies renouvelables, l’hydrogène est un formidable levier pour verdir le gaz naturel en le mêlant au méthane et ainsi envisager des motorisations propres pour les voitures, les camions…. Et même pour les cargos ou les avions.

Mais c’est une technologie complexe qui demande une bonne dose de recherche et développement. C’est ce que la France avait en tête en voulant devenir l’un des leaders européens de l’hydrogène. Elle a mis en place un plan à 100 millions d’euros, annoncé alors par l’ancien ministre de l’environnement Nicolas Hulot et réaffirmé en janvier 2020 par sa successeuse Élisabeth Borne.

Aujourd’hui, ce plan semble bien anecdotique. Dans son immense plan de relance, l’Allemagne a aussi décidé de mettre un volet hydrogène conséquent pour son avenir énergétique. Le budget est de neuf milliards d’euros, soit 90 fois plus que le programme français. Sept milliards de développements propres et deux milliards de grands partenariats internationaux.

L’histoire se répète

Il ne s’agit pas de faire du France bashing, mais, autant dire que le plan tricolore est éclipsé malgré l’implication de nos grands centres de recherches et industriels. L’Association française pour l’hydrogène et les piles à combustible enjoint d’ailleurs l’État à engager 10,3 milliards d’euros d’ici 2030 pour développer l’hydrogène renouvelable. La France pourrait ainsi, selon l’association, devenir un « leader » dans ce secteur.

Si le ministre de l’Économie Bruno Le Maire a annoncé qu’une partie de l’enveloppe européenne de 40 milliards d’euros sera dédié au plan hydrogène, sans mentionner le montant, l’histoire tend à se répéter En 2017, Emmanuel Macron s’emparait du sujet de l’intelligence artificielle en s’appuyant sur l’excellence mathématique du pays, afin de devenir la référence mondiale en la matière. Le plan français était conséquent : 665 millions d’euros… là où l’Allemagne investit 5 fois plus, les États-Unis (hors secteur privé) 20 fois plus et la Chine 25 fois plus.

Les grands plans annoncés à l’occasion du sauvetage de plusieurs entreprises sont à regarder à l’aune de ces expériences. L’auto, Renault en particulier, récupère huit milliards d’euros pour faire de la France le leader de la voiture électrique en Europe. Quant au secteur aéronautique, c’est 15 milliards qui sont mobilisés en faveur de l’avion zéro carbone. Ces sommes sont déjà bien plus à la mesure des enjeux, en engageant la R&D, mais aussi l’émergence de phases préindustrielles. Car avoir des idées ne suffit pas… à un moment il faudra des usines.

L’article de Novethic est ici.

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De plus en plus de cours d’eau s’assèchent en France

Un article de Reporterre, le 29/07/2020.

Chaque été, le niveau des petits cours d’eau baisse, parfois jusqu’à leur assèchement complet. Pour mieux comprendre et anticiper ce phénomène, un Observatoire national des étiages (Onde) a été mis en place en 2012. L’Office français de la biodiversité (OFB) a mis en ligne, mi-juillet, un bilan des huit dernières années.

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Et ce bilan n’est pas rose : le nombre de cours d’eau en assec ou non visibles (car le débit d’eau est trop faible) est en hausse entre 2012 et 2019.

« Les années les plus impactées dans l’ensemble sont par ordre croissant : 2012, 2017 et 2019. Le taux d’observation des rivières en écoulement non visible ou en assec a été le plus élevé en 2019, avec un maximum dans le bassin Rhin-Meuse (28,9 %), soit plus d’une observation sur quatre. »

Durant les années les plus sèches (2012, 2017, 2019) le pourtour méditerranéen, les pays de la Loire, le Centre et la Bourgogne comptent la plus grande part de cours d’eau en assec. D’autres secteurs peuvent néanmoins être touchés, tels que le Morbihan en 2013, le quart nord-est en 2015, l’ouest du pays en 2016, ou encore la moitié nord en 2018.

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Entre 2012 et 2019, le nombre de cours d’eau en assec a augmenté. © Datawiz/OFB

Au cours de l’été, de nombreux petits cours d’eau de France métropolitaine voient leur débit baisser : un débit exceptionnellement faible est nommé étiage. La hauteur d’eau diminue, la température de l’eau augmente, sa qualité se dégrade et la vie qu’elle abrite est modifiée. L’écoulement du cours d’eau peut même être interrompu. Les étiages, d’origine naturelle, sont souvent amplifiés par les activités humaines, telles que l’irrigation ou l’alimentation en eau potable.

Plus un cours d’eau est en étiage intense et long, moins il est en mesure de remplir les fonctions d’épuration naturelle de l’eau, de recharge des nappes phréatiques et d’approvisionnement en eau douce. L’assèchement d’un cours d’eau peut entraîner la mort des espèces aquatiques peu mobiles, par exemple les alevins de poissons ou certains batraciens, mais aussi une disparition d’espèces autochtones au profit d’espèces envahissantes plus résistantes.

L’article de Reporterre est ici.

  • Source et images : OFB.
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L’artificialisation des sols repart à la hausse, malgré les annonces d’Emmanuel Macron

Un article de Novethic, par Marina Fabre, le 24/07/2020.

Pour la deuxième année consécutive, l’artificialisation des sols a augmenté en France. Un enjeu qui prend une place de plus en plus importante dans le débat public alors qu’Emmanuel Macron s’est déclaré favorable à un moratoire sur les aménagements des zones commerciales périurbaines, très consommatrices d’espaces. Reste que le report de la loi foncière représente un mauvais signal concernant la bétonisation des terres agricoles.

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En 2018, la France s’est fixé un objectif de zéro artificialisation nette dans son plan biodiversité. Remus Kotsell

Mauvaise nouvelle pour la biodiversité. Selon le Cerema, le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement, l’artificialisation des sols est repartie à la hausse en 2018 alors que la France s’est fixé un objectif de zéro artificialisation nette dans son plan biodiversité. Ainsi, entre 2017 et 2018, ce sont 23 907 hectares qui ont été artificialisés sur l’ensemble du territoire français. « Ces nouvelles données confirment la tendance d’augmentation du rythme de l’artificialisation observée depuis 2016 », note le Cerema.

Pour inverser cette tendance, la Convention citoyenne pour le climat propose notamment d’interdire toute artificialisation des terres tant que des réhabilitations ou friches commerciales, artisanales ou industrielles sont possibles, ou encore de stopper les aménagements de zones commerciales périurbaines « très consommatrices d’espace ». Des propositions que le chef de l’État s’est engagé, dans la quasi-totalité, à faire appliquer.

Moratoire sur les nouvelles zones commerciales

« Arrêter la bétonisation, c’est un projet pour rendre notre pays plus humain, au fond plus beau », a fait valoir Emmanuel Macron, qui s’est déclaré favorable au principe d’un moratoire sur les nouvelles zones commerciales implantées à la périphérie des villes. Même le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, a estimé que l’extension des villes et des grandes zones commerciales « au mépris des terres agricoles » était « un modèle dépassé ». Reste que les associations s’inquiétaient que ce moratoire ne soit pas étendu aux entrepôts de e-commerce, comme Amazon, contre lesquels une vraie résistance s’organise.

« Le moratoire doit intégrer les entrepôts de e-commerce qui aggravent l’artificialisation des sols, font exploser les produits importés et l’empreinte carbone de la France, et détruisent des dizaines de milliers d’emplois dans la grande distribution et les commerces de proximité », prévenait début juillet l’ONG Les Amis de la Terre. Finalement, c’est la ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, qui a tranché, se déclarant en faveur d’un moratoire de « quelques mois » sur l’implantation de nouveaux entrepôts le temps qu’une mission parlementaire soit menée.

Le mauvais signal du report de la loi foncière

Mais si l’exécutif a multiplié les annonces contre l’artificialisation des sols en renonçant notamment au projet de méga-complexe Europacity, qui devait voir le jour aux portes de Paris en 2027, le report de la loi foncière annoncé par l’ancien ministre de l’Agriculture Didier Guillaume le 11 juin est un mauvais signal. Cette loi, destinée à favoriser l’installation des jeunes agriculteurs, à développer l’agro-écologie et à lutter contre l’artificialisation des terres agricoles, doit être réformée depuis des années.

Fin juin, dix ONG et organismes professionnels agricoles comme Greenpeace, la Confédération paysanne et la Fédération nationale d’agriculture biologique (Fnab), ont appelé le gouvernement à inscrire ce texte à l’agenda législatif de 2021. Emmanuel Macron s’était lui-même ému lors du Salon de l’Agriculture de 2019 que la France ait « perdu un quart de sa surface agricole sur les 50 dernières années ». Un enjeu d’autant plus important que le chef de l’État, lors de la crise du Covid-19, a plusieurs fois affiché sa volonté de voir l’Hexagone, qui importe près d’un fruit et légume sur deux consommés en France, retrouver sa souveraineté alimentaire.

L’article de Novethic est ici.

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L’accroissement du bétail est un facteur pandémique mondial, selon une étude

Un article de Reporterre, le 22/07/2020.

« La croissance mondiale d’élevage de bétail menace la biodiversité et augmente les risques sanitaires pour les humains et les animaux domestiques. » Ces liens sont au cœur d’une étude de Serge Morand, chercheur au Cirad (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement) en Thaïlande, détaché du Centre national de la recherche scientifique (CNRS), qui a été publiée le 22 juillet dans la revue Biological Conversation.

Au niveau mondial, les recherches montrent une augmentation de l’émergence de maladies infectieuses et d’épidémies, une perte accélérée de la biodiversité et une augmentation importante de la production d’animaux domestiques. Mais quel est le lien entre ces différentes manifestations ? Cette question résurgente à la suite de la crise du Covid-19 trouve une première vague de réponses grâce à cette nouvelle étude en écologie des parasites.

Pour ce faire, Serge Morand a croisé plusieurs bases de données sur les santés humaine et animale, l’augmentation du bétail et la perte de biodiversité. Une première analyse montre que le nombre d’épidémies répertoriées chez les humains dans chaque pays (16.994 épidémies pour 254 maladies infectieuses entre 1960 et 2019) augmente en corrélation avec la perte locale de biodiversité. Autrement dit, l’émergence d’épidémies illustrerait les derniers soubresauts d’une biodiversité en extinction.

La relation entre le nombre d’espèces en danger et celui des épidémies augmente jusqu’à atteindre un pic avant de diminuer. Cependant, le risque épidémique ne diminue pas avec la disparition des espèces, il est au contraire relayé par l’augmentation du nombre de têtes de bétail. En effet, l’accroissement du bétail sur l’ensemble de la planète affecte directement la faune sauvage et le nombre d’épidémies chez l’humain et l’animal domestique.

L’article de Reporterre est ici

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Référendum pour les animaux : vent de panique chez les veneurs face à une possible abolition de la chasse à courre ?

Un article de la Fondation 30 Millions d’amis, le 21/07/2020.

Alors que le référendum d’initiative partagée (RIP) pour les animaux – soutenu par la Fondation 30 Millions d’Amis – réunit déjà plus de 364 000 soutiens et 110 parlementaires, la Société de Vénerie a adressé un courrier à 900 sénateurs et députés ainsi qu’un manifeste pour tenter de préserver la cruelle pratique de la chasse à courre. Signe que le vent tourne en faveur du bien-être animal ?

Face au succès de l’initiative du Référendum pour les animaux, les veneurs multiplient les courriers pour défendre la pratique cruelle de la chasse à courre./©Adobe Stock-sebastien rabany

Un vent de panique soufflerait-il dans les rangs des défenseurs de la chasse à courre et de la vénerie sous terre !? Face au succès du référendum d’initiative partagée (RIP) pour les animaux (soutenu par 44 associations et ONG de protection animale, dont la Fondation 30 Millions d’Amis) les veneurs tentent d’organiser la contre-attaque. Dans un courrier lunaire intitulé « Référendum pour les animaux : la dictature antispéciste triomphera-t-elle ? », envoyé aux parlementaires français, la Société de Vénerie souhaite faire pression sur les élus de la Nation pour empêcher toute abolition de cette pratique cruelle.

Les veneurs avancent « 10 raisons de ne pas interdire la chasse à courre », des pépites qui ne manquent pas de mauvaise foi : « La souffrance n’a pas la même signification dans l’univers des animaux sauvages que dans la société des hommes », « la vénerie contribue de plusieurs manières au bien-être des animaux » ou encore « faire disparaître la chasse à courre reviendrait, quoi qu’on en dise et quoi qu’on pense, à détruire une parcelle de l’âme de la France ». Ubuesque !

Reconnaissance dans le code Civil de l’animal comme « être vivant doué de sensibilité », un texte fondateur

Cet affolement des veneurs semble démontrer le potentiel de succès du référendum d’initiative partagée pour les animaux qui a déjà obtenu le soutien de 110 parlementaires et plus de 364 000 personnes. L’objectif est de demander aux députés et sénateurs de déposer une proposition de loi référendaire sur la cause animale. Pour cela, le texte doit être signé par 185 parlementaires et soutenu par 10% des électeurs avant un possible référendum. Six propositions, parmi lesquelles l’interdiction de la chasse à courre et des chasses traditionnelles, figurent au menu de ce projet inédit.

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La Fondation 30 Millions d’Amis a ouvert la voie à une meilleure prise en compte du bien-être animal en obtenant en 2015 – par la loi – que le code Civil, pilier du droit français, reconnaisse enfin l’animal en tant qu’« être vivant doué de sensibilité » et non plus comme un « bien meuble ». Un point de départ ambitieux qui a créé en France les conditions favorables à de futures avancées législatives améliorant la condition des animaux.

Alors que les Français sont 76% à se prononcer contre la chasse à courre (Baromètre Fondation 30 Millions d’Amis/IFOP – 2020), il est désormais plus que temps que les politiques soient en phase avec les attentes sociétales. D’où certaines réactions fébriles des plus réfractaires !

L’article de la Fondation 30 Millions d’amis est ici.

Le référendum pour les animaux est ici.

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Empêchons la chasse de 17 460 tourterelles des bois : participez à la consultation

Un article de la FNE, le 28/07/2020.

17 460. Dans un nouvel arrêté, le ministère de la transition écologique et solidaire porte à 17 460 le nombre de tourterelles des bois pouvant légalement être chassées durant la saison 2020-2021. Injustifiable alors même que l’espèce, en fort déclin, est menacée de disparition. Jusqu’au 12 août, mobilisez-vous contre cet arrêté : avec l’appui de France Nature Environnement, participez en quelques clics à la consultation publique ouverte par le gouvernement.

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Tourterelle des bois

Tourterelle des bois : cette espèce est menacée d’extinction, ne la chassons plus.

Le suivi de la population des tourterelles des bois est alarmant. En à peine 40 ans, 80 % de ses effectifs ont disparu en Europe. La menace d’extinction de l’espèce est planétaire. L’UICN classe d’ailleurs l’oiseau sur sa tristement célèbre Liste Rouge mondiale des espèces menacées de disparition. La voie de migration occidentale des tourterelles des bois, dont fait partie la France, est malheureusement très périlleuse pour l’oiseau : sur nos terres, son déclin y est particulièrement prononcé.

Il faut dire que malgré la situation, la France autorise toujours la chasse de la tourterelle des bois. Le mouvement France Nature Environnement est loin d’être le seul acteur à s’en inquiéter. Un comité d’experts scientifiques consulté par le ministère de la transition écologique a ainsi conclu à la nécessité de stopper la chasse de cette espèce, au moins provisoirement, pour tenter d’enrayer le déclin des effectifs.

Le 2 juillet dernier, la Commission Européenne a quant à elle adressé un avis motivé à la France. Celui-ci demande à l’État de prendre des mesures urgentes pour cesser la chasse des espèces en mauvais état de conservation, dont la tourterelle des bois.

Malgré ces alertes tant scientifiques, associatives qu’institutionnelles, l’arrêté ministériel proposé par le gouvernement à la consultation du public autorise les chasseurs à tuer 17 460 tourterelles durant la saison 2020-2021. À vous d’exprimer votre opposition : participez à la consultation jusqu’au 12 août.

Comment exprimer votre opposition à cet arrêté ?

Rendez-vous avant le 12 août 2020 sur la page web de la consultation pour avoir plus d’informations. Pour donner votre avis, postez votre commentaire en donnant un avis défavorable à ce projet. Vous pouvez reprendre tout ou partie des arguments mentionnés ci-dessus mais il est important de personnaliser votre réponse, sans faire un simple copier-coller, afin que votre voix soit bien comptabilisée lors de la synthèse de cette consultation.

Je participe

Donnez de l’ampleur à la mobilisation : partagez cet article

Plus nous serons nombreux à nous exprimer contre cet arrêté, plus nous aurons de chance d’être entendus. N’hésitez pas à mobiliser votre entourage : bouche à oreille, e-mail, partage sur les réseaux sociaux… il faut s’exprimer avant le 12 août.

L’article de la FNE est ici.

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« Les forêts sont un bien commun, on ne peut pas les laisser aux industriels »

Un entretien de Reporterre avec Mathilde Panot, le 23/07/2020.

La députée insoumise Mathilde Panot a présenté le 22 juillet une proposition de loi encadrant plus sévèrement les coupes rases pour ne pas « laisser aux mains des industriels un bien commun essentiel à notre survie ».

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(Illustration) LP/Olivier Arandel

Reporterre — Comment en êtes-vous venue à vous intéresser aux forêts ?

Mathilde Panot — Rappelons que dans le programme de la France insoumise il y a un livret thématique sur les forêts. Puis, à la suite du livre de votre collègue Gaspard d’Allens, Main basse sur nos forêts et du film de François-Xavier Drouet Le temps des forêts, on a lancé une commission d’enquête citoyenne sur les forêts en septembre 2019. Elle regroupe des députés et sénateurs de différents bords, le collectif SOS forêt avec un certain nombre d’associations environnementales, des citoyens engagés et l’intersyndicale de l’Office national des forêts. On a fait plusieurs déplacements dans le Morvan, sur le plateau de Millevaches, dans la forêt d’Orléans et une quarantaine d’auditions de chercheurs, forestiers, coopératives citoyennes.

Quel est le but de cette commission d’enquête citoyenne — qui n’est donc pas une commission d’enquête « officielle » ?

L’idée est qu’aujourd’hui la forêt française est à la croisée des chemins, comme l’a été l’agriculture dans les années 1950-1960. C’est-à-dire que, dans les années à venir, il va falloir choisir entre le modèle industriel d’exploitation des forêts ou un modèle pérenne de sylviculture douce, qui respecte la multifonctionnalité des forêts. Et ce choix doit être un choix démocratique. Il est hors de question que l’on laisse faire le marché et qu’il n’y ait pas de débat démocratique sur cette question. Sinon, on est devant une catastrophe majeure pour notre pays.

Au bout, l’enjeu de cette commission d’enquête citoyenne est de faire une proposition de loi cadre sur la forêt pour montrer qu’il y a une alternative à l’industrialisation. Et puis, la députée La République en marche Anne-Laure Cattelot a été chargée par le gouvernement de faire un rapport sur la question des politiques forestières. Donc il s’agit de faire pression sur cet exécutif qui veut démanteler le service public forestier et laisse les forêts se faire happer par des sociétés transnationales privées.

Pourquoi la problématique des forêts vous parle-t-elle politiquement ? Quelles idées vous permet-elle de défendre ?

La forêt est à la croisée d’énormément d’enjeux. L’enjeu climatique (les forêts sont des puits de carbone), la biodiversité, les grands projets inutiles aussi — je pense au projet de Montagne d’or bis en Guyane. On peut pointer du doigt Bolsonaro sur l’Amazonie mais la France n’est pas plus exemplaire et permet une déforestation terrible. Il y a, aussi, un enjeu démocratique, ainsi qu’un enjeu social très fort : on dénombre déjà une cinquantaine de suicides à l’ONF, une baisse des effectifs constante depuis plusieurs années et on apprend qu’en septembre va passer la loi Asap qui va détricoter encore le service public forestier.

Donc, la forêt est à la croisée de l’urgence climatique, sociale et démocratique. Économique aussi d’ailleurs ! L’aberration est qu’on a favorisé les grosses scieries, provoquant la disparition catastrophique des petites, et que quand on coupe du bois en France, il est envoyé ensuite en Chine, pour revenir chez nous sous forme de parquets ou de meubles.

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Au loin, une coupe rase dans le Morvan.

Pourquoi commencer par cette proposition d’encadrement des coupes rases ?

La coupe rase est le symbole de l’industrialisation de la forêt. L’industrialisation est fondée sur un triptyque : coupe rase, puis plantation, et monoculture. À la fin, vous pouvez appeler forêt un champ d’arbres. Mais un champ d’arbres n’est pas une forêt ! En France, on a 136 essences différentes d’arbres. Dès que vous encadrez strictement les coupes rases, vous mettez un frein à l’industrialisation de manière très forte. La France est très en retard sur cette question. En Suisse, l’interdiction stricte des coupes rases date de 1876. En Allemagne et en Autriche, elle est aussi encadrée depuis longtemps.

Dans le Morvan, 50 % des forêts de feuillus, diversifiées, ont été remplacées par des forêts de résineux en monoculture. Regardez sur des photos satellite le Morvan à l’automne : vous avez les différentes couleurs — rouge, jaune — et puis vous avez des taches vertes foncées, qui sont une monoculture. Parfois, cela prend une colline entière. Il faut imaginer que comme les arbres ont tous le même âge, du jour au lendemain cette colline va se faire raser entièrement. Les habitants y sont très sensibilisés, ils vivent cela de manière très forte.

Mais, ailleurs, le grand public a l’impression que la forêt française ne va pas si mal que cela. On dit que la surface de la forêt augmente, mais on ne parle pas du vrai sujet qui est la malforestation en France. Donc, je veux que ce débat soit porté politiquement, et pas que par des experts. Il faut qu’une décision collective soit prise, sinon on laisse aux mains des industriels un bien commun essentiel à notre survie.

Vous êtes dans l’opposition, avez-vous une chance que cette proposition de loi aboutisse ?

On a un point d’appui important, c’est que la Convention citoyenne pour le climat a mis dans ses propositions l’encadrement des coupes rases. Emmanuel Macron a dit « on prend tout », donc très bien : prouvez-le. Il y a aussi une forte mobilisation citoyenne. En plus de cela, Anne-Laure Cattelot devrait rendre son rapport au gouvernement bientôt et elle s’est mobilisée sur la question des coupes rases à propos de la forêt de Mormal (Nord), près de chez elle.

Et puis, la proposition de loi n’est pas signée que par la France insoumise. Il y a plusieurs personnes du groupe Écologie Démocratie Solidarité qui la signent — Annie Chapelier, Jennifer de Temmerman, Albane Gaillot, Sébastien Nadot — ainsi qu’Elsa Faucillon, du groupe communiste, Valérie Petit, du groupe Agir ensemble et Frédérique Dumas, du groupe Liberté et Territoires.

Tout cela permet d’avoir des points d’appui, car on connaît ce gouvernement : il ne bouge que par rapport de forces.

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La forêt est à la croisée de l’urgence climatique, sociale et démocratique.

Reporterre a eu connaissance d’un document interne de Fransylva, la Fédération des syndicats de forestiers privés. Il propose aux présidents de syndicats de forestiers une « stratégie commune » contre les actions anti-coupes rases. Les partisans de l’industrialisation se sentent-ils menacés ?

C’est une preuve de leur panique. Quand j’avais été dans le Limousin, j’avais aussi auditionné les acteurs industriels. Ils ont réagi comme s’ils craignaient des mesures alors que c’est assez clair que je suis de l’opposition. Les industriels voient qu’il y a un mouvement assez puissant dans la société pour refuser les coupes rases. Je reçois des courriers, après des visites de terrain et en réaction à notre travail, qui montrent qu’ils sont extrêmement attentifs à ce qui se passe et qu’ils sont très inquiets qu’on leur enlève la méthode qui leur permet d’industrialiser.

  • Propos recueillis par Marie Astier

L’article de Reporterre est ici.

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Gare du Nord, entrepôts Amazon, Terminal 4 à Roissy… cinq projets en sursis pour des raisons environnementales

Un article de Novethic, par Concepcion Alvarez, le 21/07/2020.

Après dix années d’une guerre sans relâche, entre zadistes et recours judiciaires, le groupe Pierre et Vacances renonce à la construction d’un Center Parcs à Roybon, en Isère. Ces dernières années, de nombreux projets ont ainsi été abandonnés pour des raisons environnementales dans l’Hexagone à l’instar de l’aéroport Notre-Dame-des-Landes. Novethic passe à la loupe cinq chantiers actuellement en sursis de la rénovation, de la Gare du Nord aux « fermes-usines » en passant par les entrepôts d’Amazon.

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Des centaines de projets sont aujorud’hui contestés aux quatre coins de l’Hexagone pour des raisons environnementales. @ADP, Stationord, Amazon, La Bergerie Surf Camp, CC0

1) Le nouveau terminal 4 de l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle

L’Autorité environnementale (AE) a rendu, début juillet, un avis critique sur le projet d’extension de l’aéroport de Roissy. Ce futur terminal 4 pourrait accueillir 40 millions de passagers supplémentaires par an, soit la capacité actuelle de l’aéroport d’Orly, ajoutée à celle de Roissy. Mais pour l’AE, il y a trop de zones d’ombres. « Les incidences du projet sur la qualité de l’air et sur le bruit, et donc la santé des résidents et riverains de la plateforme aéroportuaire sont incomplètement évaluées », critique l’AE, qui s’inquiète également de la gestion du traitement des eaux. Bruno Le Maire, ministre de l’Economie, appelle lui-même à réexaminer les extensions d’aéroport « au regard des nouvelles exigences environnementales et de la réalité du trafic aérien ». Les associations, quant à elles, demandent un nouveau report de l’enquête publique.

2) La rénovation commerciale de la Gare du Nord

Alors que le préfet d’Ile-de-France a donné son feu vert au permis de construire du volet commercial de la transformation de la Gare du Nord, la Mairie de Paris a annoncé qu’elle engagerait des recours. « Le gouvernement vient de s’inventer un Notre-Dame-des-Landes en plein Paris. Je lui souhaite beaucoup de courage sur le plan politique et juridique » a tweeté le premier adjoint Emmanuel Grégoire. Du côté des associations, on dénonce un « paquebot commercial » de 200 boutiques, centré « sur le consumérisme ». En tout, 88 000 m² supplémentaires de commerces, bureaux mais aussi salle de spectacle et salle de sport doivent voir le jour.

3) Les fermes-usines, principalement dans le Grand-Ouest

Il ne reste plus que quelques heures aux habitants de Plougonvelin, dans le Finistère, pour participer à la consultation publique concernant l’extension d’un élevage porcin dans le village. L’association « Nous voulons des coquelicots » dénonce ce projet, qui porterait le nombre de porcs dans l’élevage à 4 275 sur l’année, contre 2 778 aujourd’hui. Elle craint notamment un accroissement de la pollution dans une région déjà ravagée par les algues vertes. Cet exemple est loin d’être une exception et des contestations s’organisent contre chaque projet de ferme-usine, principalement dans le Grand-Ouest. Selon un récent rapport de Greenpeace (1), 1 % seulement des exploitations françaises produisent les deux tiers des porcs, poulets et œufs de l’Hexagone.

4) Les entrepôts d’e-commerce, Amazon en tête

« Non à l’Amazonisation de l’Alsace » scandaient la semaine dernière plusieurs centaines de manifestants contre l’installation d’un troisième entrepôt Amazon dans l’Est. Le géant américain compte une vingtaine de sites de stockage en France et envisage de doubler ses capacités d’ici 2021. Mais ce n’est pas sans soulever la colère des riverains. Dans le Gard, près de Nîmes, un bras de fer est engagé depuis plusieurs mois pour préserver l’un des sites touristiques les plus anciens et visités de France. À Colombier-Saugnieu, près de l’aéroport Lyon Saint-Exupéry, les travaux du futur entrepôt sont carrément à l’arrêt en raison de plusieurs recours. La nouvelle ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, envisage un moratoire de six mois sur les entrepôts de e-commerce le temps qu’une étude d’impact soit menée.

5) Le surf park de la discorde près de Nantes

« Une vague parfaite à toute heure de la journée », c’est la promesse de La Bergerie Surf Camp qui prévoit d’aménager un bassin à Saint-Père-en-Retz, près de Nantes, à seulement dix kilomètres de l’océan. De quoi susciter la colère des associations environnementales qui dénoncent un « projet absurde » déployé sur « huit hectares de terres agricoles » et « très gourmand en eau’. « Le but était simplement de démocratiser la pratique du surf », réplique Stéphane Bouchonneau, l’un des créateurs du complexe. Pour l’heure, la demande de permis de construire n’a pas encore déposée mais elle risque bien de subir le même sort qu’Europacity, notamment dénoncé pour sa piste de ski artificielle.

L’article de Novethic est ici.

(1) Voir le rapport de Greenpeace sur l’essor des fermes-usines en France, publiée en juin 2020

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Nord : l’option « chasse » d’un lycée agricole fait polémique

Un article du journal Le Point, le 21/06/2020.

Une pétition demandant la fin de cette option « cynégétique et faune sauvage » a recueilli plus de 80 000 signatures, relate « La Voix du Nord ».

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Tout est parti d’un témoignage anonyme diffusé sur Facebook par le naturaliste Pierre Rigaux. Dans cette vidéo, un jeune homme raconte comment il a été choqué après avoir participé à une battue dans le cadre d’une option qu’il suivait au lycée. Publié sur Facebook, ce témoignage (dans lequel le nom de l’établissement en question n’est pas cité) a suscité des milliers de réactions. Parmi elles, celle de Gabrielle Paillot, relate La Voix du Nord. Cette militante pour les droits des animaux a décidé de réagir en lançant dans la foulée une pétition sur « mesopinions.com » pour demander la fin de l’option « chasse » en question, baptisée « cynégétique et faune sauvage » et proposée dans les lycées agricoles de Bapaume (Nord) et Limoux (Aude) notamment.

« À l’heure où des milliers de personnes s’opposent à la chasse à courre, à la chasse en enclos et à toute forme de destruction de la faune sauvage, il est inconcevable que l’on puisse voir une telle option dans certains instituts agricoles. De plus, on ne compte plus les incidents de chasse sur les promeneurs. La France, notre beau pays doit être un exemple de bien-être, de respect de la nature et des animaux », peut-on lire sur le texte adossé à cette pétition, qui a recueilli plus de 80 000 signatures au 21 juin.

« L’objectif, ce n’est pas le tir »

En réaction, Willy Schraen, président de la Fédération des chasseurs du Pas-de-Calais, a également décidé de lancer une pétition, il y a quelques jours, pour demander le maintien de l’option « cynégétique et faune sauvage » au lycée Saint-Éloi-de-Bapaume. « Cette option, qui n’a évidemment rien à voir avec la pratique de la chasse, permet aux futurs agriculteurs de mieux se familiariser avec la faune sauvage de leur future exploitation. On y tente de mieux concilier la production agricole et la faune sauvage, en favorisant la relation entre économie et pratiques agricoles respectueuses de la faune », selon cette pétition, qui a recueilli un peu plus de 9 000 signatures alors qu’elle a été relayée sur les réseaux sociaux par plusieurs pages dédiées à la chasse.

Ce discours fait écho à celui tenu par un enseignant de l’établissement scolaire en question dans L’Avenir de l’Artois. « L’objectif, ce n’est pas le tir. C’est de connaître les espèces, aménager le territoire pour enrichir la biodiversité. » Les lycéens de Bapaume ne manient pas les armes quand ils suivent cette option, au contraire de ceux de Limoux, comme France 3 l’expliquait dans un reportage en 2017. Le site de l’établissement de Limoux précise que les élèves doivent aussi constituer et rédiger « un dossier sur une espèce de la faune sauvage locale avec discussion autour d’une problématique ». Mais les enseignements suivis conditionneraient les élèves à devenir chasseurs, assurent les opposants à cette option.

Directement cité dans la pétition de Gabrielle Paillot, Jean-Michel Blanquer, le ministre de l’Éducation, n’a pas commenté officiellement cette polémique. Selon La Voix du Nord, le lycée Saint-Éloi-de-Bapaume n’aurait pas l’intention de retirer cette option à la rentrée malgré les critiques. Mais en plus de la Fédération de chasse du Pas-de-Calais, des intervenants opposés à la chasse, comme ceux de la Ligue pour la protection des oiseaux, devraient être invités durant la formation des lycéens afin d’équilibrer le débat.

L’article du Point est ici.

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La Commission Européenne impose à la France de stopper l’hécatombe de cétacés

Un article de La Relève et La Peste, par Sarah Roubato, le 07/07/2020.

Après les oiseaux, les cétacés ! Face à la mise en danger des dauphins et marsouins dans les eaux françaises, la Commission Européenne exige de la France qu’elle prenne les mesures nécessaires pour cesser l’hécatombe qui a lieu chaque hiver. La France a maintenant trois mois pour remédier aux lacunes constatées, sous menace d’être saisie par la Cour de justice de l’Union européenne et se voir imposer de lourdes sanctions financières.

Le Golfe de Gascogne, le tombeau des cétacés

Chaque année, le nombre de mammifères marins qui meurent par capture accidentelle augmente. Depuis le début de l’année 2020, on estime que plus de 10 000 dauphins sont morts dans le seul golfe de Gascogne. Scientifiques et associations mènent un combat sans relâche pour que ce désastre cesse.

Ce combat est toujours soumis aux politiques gouvernementales. Si les pays de l’UE sont normalement tenus d’assurer la protection des cétacés, tous sont défaillants. Grenelle de l’environnement, Accords de Paris, ces grandes rencontres de représentants de différents gouvernements servent plus à marquer l’importance d’un sujet, à servir une communication politique, et à faire converger des études, qu’à imposer aux États des mesures restrictives.

Mais la semaine dernière, la Commission Européenne a ouvert trois procédures d’infraction à l’encontre de la France, l’Espagne et la Suède. Cette décision fait suite à la pression mise par 26 ONG qui demandaient en juillet 2019 à la Commission Européenne de poursuivre en justice certains États ; et à celle du Conseil international pour l’exploration de la mer (CIEM) de plus de 1500 scientifiques européens avait émis un avis historique conseillant de fermer des zones de pêches du 15 janvier au 15 mars, de s’équiper tout au long de l’année de systèmes d’effarouchement acoustique (les pingers) et de faire respecter l’obligation des pêcheurs à déclarer les captures et à accepter que des observateurs les accompagnent en mer.

La Commission Européenne constate que les trois pays « n’ont pas pris les mesures suffisantes pour surveiller les prises accessoires dans leurs eaux et par leurs navires ni utiliser les moyens de la PCP et de la directive Habitats pour protéger ces espèces » et pour limiter la perturbation des espèces marines dans les zones de conservation. L’absence de contrôles et d’inspections est enfin montrée du doigt.

« C’est une excellente nouvelle car ça veut dire que l’instruction menée par la Cour européenne conclut que la situation est inadmissible. Pour nous c’est très important car la Commission Européenne ne va pas juger les intentions, mais les résultats obtenus ! et c’est exactement ce qu’on voulait : finis les effets d’annonce, enfin du concret. Et ces mesures doivent concerner tout le monde : chalutiers et artisans ! Nous soutenons la plupart des artisans pêcheurs mais certains d’entre eux doivent aussi se défaire de mauvaises habitudes, et adopter de bonnes pratiques. On perd déjà 10 000 dauphins par an… C’est intenable pour la pérennité des cétacés. » explique Dominique Chevillon, naturaliste, Président de Ré Nature Environnement et Vice-Président de la LPO, pour La Relève et La Peste.

Suite à ce rappel à l’ordre de la Commission Européenne, l’État français a trois mois pour présenter une liste de mesures répondant de façon efficace à cette mise en demeure. Si les mesures ne sont pas à la hauteur des enjeux, la Cour de justice de l’Union européenne se saisira de l’affaire pour mettre le pays face à ses responsabilités.

Delphinus delphis avec les marques de la pêche ( nageoire caudale et nageoire dorsale coupée ) – Crédit : RNE

Des sanctions motivées par la crise en cours

La Commission Européenne poursuit une stratégie de protection de la biodiversité, impliquant des mesures contraignantes pour les États. Dans une communication datant de mai dernier intitulée « Ramener la nature dans nos vies », la Commission déclarait qu’il ne fallait pas retomber dans « nos vieilles habitudes destructrices » après le confinement. Et de poursuivre :

« Pour garantir la bonne santé et la résilience de nos sociétés, il est indispensable de donner à la nature la place dont elle a besoin. La récente pandémie de COVID-19 n’a fait que souligner combien il est urgent de protéger et de restaurer la nature. Cette pandémie nous fait prendre conscience des liens qui existent entre notre santé et celle des écosystèmes. Elle démontre la nécessité de mettre en place des chaînes d’approvisionnement et d’adopter des modes de consommation durables qui ne dépassent pas les limites de notre planète. Et elle illustre le fait que le risque d’apparition et de propagation de maladies infectieuses augmente à mesure que la nature est détruite. »

Elle renversait le credo habituel, faisant de la restauration de la nature non seulement une condition pour notre santé, mais aussi pour la relance économique : « L’investissement dans la protection et la restauration de la nature seront également essentiels pour la relance économique de l’Europe au sortir de la crise liée à la COVID-19. Il est indispensable pour le redémarrage de l’économie d’éviter de retomber et de nous enfermer dans nos anciennes habitudes néfastes. »

Cette action juridique fait ainsi partie d’une série de directives rappelant les États membres à l’ordre concernant la protection de la biodiversité. Ainsi, dans une étape judiciaire plus avancée, la Commission Européenne a adressé un avis motivé à la France la semaine dernière, afin qu’elle prenne des mesures contre certaines pratiques de chasse et de capture d’oiseaux. Ici encore, c’est une plainte déposée par une association, la Ligue de Protection des Oiseaux, qui a permis cette mesure coercitive.

« Dans les efforts de sauvegarde des cétacés, on a beaucoup souffert d’un déséquilibre entre la Direction des Pêches Maritimes et de l’Aquaculture (DPMA), quasiment toujours soutenue par le gouvernement, et la Direction de l’Eau et de la Biodiversité, trop souvent ignorée. L’Etat doit veiller à ce que tous les aspects du métier et de la conservation soient dans un équilibre qui permettent d’appliquer les réglementations, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. » explique Dominique Chevillon, naturaliste, Président de Ré Nature Environnement et Vice-Président de la LPO, pour La Relève et La Peste. Est-ce à dire que les États auront toujours besoin du gendarme européen pour prendre leurs responsabilités en terme de protection de la biodiversité ? Quand c’est en même temps l’UE qui, par ses normes agricoles hérités de la sortie de la Seconde Guerre Mondiale, a détruit l’agriculture locale.

Si l’Union Européenne était prête à devenir un espace garantissant la protection du vivant dans tous ses pays membres, elle acquerrait peut-être là une nouvelle légitimité. Car les dernières élections européennes l’ont bien montré : de plus en plus de citoyens attendent d’une instance supra-nationale qu’elle soit un organe de protection du vivant, de lutte contre le réchauffement climatique et les futures crises sanitaires, plutôt qu’un outil de plus du néolibéralisme.

L’article de La Relève et La Peste est ici.

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Les Pays-Bas mettent fin à l’élevage de vison après des cas de Covid-19 chez les animaux

Un article de Novethic, par Marina Fabre, le 05/07/2020.

Alors que plusieurs visons d’élevage néerlandais ont été contaminés par le Covid-19, transmettant probablement le virus à deux employés, les Pays-Bas ont décidé de mettre fin à l’industrie de fourrure de vison. Le pays, quatrième producteur au monde, devait y mettre un terme en 2024 mais le Covid-19 a précipité leur fermeture.

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Fin avril, face à la propagation du virus, entre 500 000 et 600 000 visons ont été abattus. CC0

Les Pays-Bas accélèrent la cadence. Le quatrième producteur de fourrure de vison au monde avait décidé de tourner la page de cette industrie en 2024, mais face à la propagation du Covid-19 dans les fermes à vison, les députés néerlandais ont voté pour la fermeture immédiate des élevages. « C’est une avancée énorme : le massacre d’animaux pour leur fourrure aux Pays-Bas touche enfin à sa fin », a déclaré la présidente du parti animaliste, Esther Ouwehand. « En plus d’être moralement répréhensible, l’élevage de visons est maintenant tout simplement intenable car il constitue une menace pour la santé publique. Arrêter l’élevage de visons maintenant et pas en 2024 sauvera des millions de visons d’une vie misérable », a-t-elle ajouté.

Le pays compte plus de 128 fermes d’élevage de visons et a produit environ 4,5 millions de peaux en 2018, selon l’association Humane Society International. Les députés n’ont pas encore détaillé la date de fermeture, ni les indemnisations des éleveurs. Mais les associations estiment que d’ici la fin de l’année, tous les élevages auront fermé. Une « décision historique » saluée par l’association de défense des animaux Peta.

« Une contamination des visions aux hommes est possible »

Fin avril, des cas de Covid-19 ont été identifiés pour la première fois dans deux élevages de visons. Face à la propagation, des centaines de milliers de visons ont alors été abattus, entre 500 000 et 600 000. Une décision notamment motivée par la contraction du Covid-19 par deux employés d’élevage contaminés. « À l’origine, on pense que le virus était différent dans le réservoir animal. Là, on parle du même virus, passant dans plusieurs sens, de l’homme au vison puis du vison à l’homme sans savoir comment précisément », explique Sophie Le Poder, professeure de virologie à l’École nationale vétérinaire d’Alfort, dans le journal le Monde.

Les recherches sont en cours, mais plusieurs scientifiques attestent qu’une contamination des visons aux hommes est possible. « Dans un élevage, il y a beaucoup d’animaux réunis en lieu clos dans un même endroit. Dans ces circonstances exceptionnelles le virus circule. À force d’exposition, la transmission a pu se produire »,  explique à France 3 le professeur Jean-Luc Guèrin, responsable du laboratoire en virologie à l’École nationale vétérinaire de Toulouse

Pour rappel, entre Zika, Ebola, la grippe aviaire, etc., 65 % des maladies infectieuses émergentes sont des zoonoses, c’est-à-dire des agents pathogènes transmis des animaux à l’homme. Le secteur de l’élevage et de la viande est d’ailleurs appelé à se responsabiliser sur la question.

L’article de Novethic est ici.

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La LPO attaquée en justice par les chasseurs

  Un article de la LPO, le 06/07/2020.

La Fédération nationale des chasseurs a porté plainte pour diffamation suite au détournement par la LPO de ses affiches « premiers écologistes de France ? »

Il y a 2 ans, les chasseurs s’étaient autoproclamés « Premiers écologistes de France » à travers une campagne publicitaire de leur fédération nationale. La LPO s’était empressée de compléter leurs affiches afin de contredire cette affirmation, à laquelle l’autorité de régulation de la publicité avait d’ailleurs fait ajouter un point d’interrogation.

Nous expliquions ainsi que chaque année les chasseurs français chassent 20 espèces d’oiseaux menacées, cherchent à tuer illégalement des oiseaux migrateurs en février, relâchent 20 millions de faisans et autres gibiers d’élevage pour les abattre et torturent des oiseaux sous prétexte de tradition. Rien que du factuel.

Les chasseurs nous ont attaqué en diffamation, entraînant la mise en examen de notre Directeur Général. L’audience de fixation de la date du procès s’est tenue fin juin. Le procès aura lieu le 17 décembre 2021 devant la 17ème chambre correctionnelle de Paris. La LPO est sereine et fait confiance à la justice qui dans ce dossier reconnaîtra notre liberté d’expression sur un sujet d’intérêt général.

En parlant de plainte… 

En avril 2019, la LPO avait déposé une plainte contre l’État Français auprès de la Commission Européenne, visant des infractions relatives à la chasse. Le 2 juillet 2020, la Commission a donné 3 mois à la France pour se mettre en conformité avec le droit européen et faire cesser les pratiques de chasse illégale comme le piégeage « traditionnel » non sélectif des oiseaux, le tir des oies cendrées pendant leur migration ou la chasse d’espèces menacées.

L’article de la Ligue de Protection des Oiseaux est ici.

Couloirs de Richelieu-Drouot, le 31 août 2018. La campagne d’affichage de la Fédération des chasseurs est apparue il y a quelques jours dans le métro parisien. LP/G.P.

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57 % de l’empreinte carbone de la France provient de ses importations

Un article de Novethic, par Concepcion Alvarez, le 07/07/2020.

La crise du Coronavirus a montré les défaillances de chaînes d’approvisionnement hyper-mondialisées. Depuis, Emmanuel Macron n’a eu de cesse d’appeler à la relocalisation pour réduire la dépendance de la France. Outre l’intérêt pour la souveraineté nationale, l’impact serait également positif sur le climat. Le commerce international représente un quart des émissions mondiales et 57 % de l’empreinte carbone de la France.

Le commerce international représente un quart des émissions mondiales de CO2.
@CC0

L’équilibre s’est peu à peu inversé. Alors que les émissions importées étaient encore minoritaires au milieu des années 90, comparées aux émissions nationales, elles représentent désormais 57 % de l’empreinte carbone de la France, selon les données les plus récentes publiées en début d’année par le Ministère de la Transition écologique et solidaire (1).

En volume, la demande intérieure a progressé de 50 % depuis 1995 et une part croissante de celle-ci est désormais satisfaite par les importations (pétrole, automobile, textile, électronique, informatique, pharmacie…). Les émissions associées aux importations ont ainsi doublé sur la période, alors que les émissions intérieures ont baissé de 21 % dans le même temps, grâce notamment à la diminution de l’intensité carbone de l’énergie en France.

À l’inverse, les émissions de CO2 importées pèsent particulièrement lourd dans la facture climatique puisqu’elles proviennent de pays où le mix énergétique est fortement carboné. On estime ainsi que si la Chine employait des technologies de production dont l’efficacité égalait la moyenne mondiale, les émissions dans ses exportations seraient presque deux fois moins importantes. Or, la Chine est à l’origine de plus de la moitié de la hausse des émissions de CO2 entre 2005 et 2015 liées aux échanges commerciaux.

Les États-Unis, plus gros importateurs de CO2

Selon une étude de la Banque de France (2), publiée au printemps dernier, la Chine présentait en 2015 une balance commerciale excédentaire carbone de 1,1 milliard de tonnes de CO2, ce qui traduit la part significative du CO2 émis par le pays pour répondre à la demande étrangère. Parmi les autres pays exportateurs de CO2, on trouve aussi la Russie, l’Inde et l’Afrique du Sud. À l’autre bout de la chaîne, les États-Unis sont quant à eux les plus gros importateurs de CO2, avec un déficit commercial de près de 700 millions de tonnes, bien loin devant le Royaume-Uni, le Japon ou la France.

« Les grands pays avancés apparaissent comme de grands centres consommateurs nets de CO2. Ils consomment plus de CO2 qu’ils n’en produisent et dégagent par conséquent un déficit commercial en CO2. Leur empreinte globale est ainsi supérieure à leurs émissions effectives. Inversement, les pays émergents ou producteurs de matières premières apparaissent comme des exportateurs nets, avec une empreinte inférieure à leurs émissions effectives », concluent les auteurs du rapport.

Au total, le commerce international représente un quart des émissions mondiales de CO2. Pour réduire cette empreinte, de nombreux experts appellent à inclure des clauses de suspension dans les accords commerciaux en cas de non-respect des engagements climatiques internationaux. La mise en place d’une taxe carbone aux frontières, telle qu’envisagée par la Commission européenne, constitue un autre levier pour inciter les États à réduire l’intensité énergétique de leurs appareils productifs. Enfin, du côté des consommateurs, l’instauration d’un CO2score pourrait également permettre de mieux orienter leurs achats vers des produits locaux généralement moins impactants pour la planète.

(1) Voir l’étude sur l’empreinte carbone des Français du MTES

(2) Voir l’étude de la Banque de France sur les émissions de CO2 dans le commerce international

L’article de Novethic est ici.

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Le projet de Center Parcs à Roybon est abandonné, grâce aux luttes

Un article de Reporterre, le 09/07/2020.

Le groupe Pierre et Vacances a annoncé mercredi 8 juillet l’abandon de son projet de domaine Center Parcs à Roybon (Isère). Le projet, d’un montant de 390 millions d’euros, prévoyait la construction dans la forêt de Chambaran de mille cottages, de commerces et de restaurants autour d’un espace aquatique, sous la forme d’une bulle transparente maintenue à 29 degrés avec piscines, toboggans et jacuzzis.

« Depuis plus de dix ans, des procédures judiciaires contestant les autorisations administratives ont fait obstacle à la réalisation du projet. L’autorisation de défrichement, indispensable à sa réalisation, étant devenue caduque, et l’accès du site étant bloqué par des « zadistes » occupant illégalement le terrain depuis 2014, Center Parcs a décidé de se retirer de ce projet », a déclaré le groupe.

Le projet avait subi un important revers juridique en mai 2019.

« Ce n’est pas de gaîté de cœur » que le groupe jette l’éponge, a commenté Gérard Brémond, président et fondateur de Pierre et Vacances, qui compte à ce jour 25 Center Parcs en Europe, constitués de cottages immergés dans des domaines forestiers.

« Mais on était dans une impasse, c’était devenu inextricable entre l’occupation du site, les changements de réglementations, les autorisations pour les permis de construire, pour le défrichement, la loi sur l’eau, la préservation des espèces, et les lenteurs de la justice dans les différents stades, la cour d’appel, le tribunal administratif, le conseil d’État. Tout cela se superposait, c’était interminable », a-t-il dit.

Les recours déposés par les opposants au projet —principalement des associations de défense de la nature et de protection du milieu aquatique— se sont succédé depuis 2010, dans une alternance de revers et de victoires pour Center Parcs. Depuis 2014, le terrain est également devenu une « zone à défendre » (Zad), occupée par des militants.

Dans l’Hexagone, Center Parcs compte ouvrir le domaine des Landes de Gascogne (Lot-et-Garonne) au printemps 2022. Trois autres projets restent combattus localement et en justice : l’extension du domaine existant de Bois-Francs (Eure), le projet de Poligny (Jura) qui fait l’objet de recours judiciaires contre le plan local d’urbanisme, et le projet du Rousset (Saône-et-Loire).

- Source : AFP par Le Dauphiné Libéré

L’article de Reporterre est ici.

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La Commission Européenne demande à la France de mettre fin à la chasse illégale

Un article de LPO, le 02/07/2020.

La France dispose désormais de 3 mois pour se mettre en conformité avec le droit européen ou risquer une saisine de la Cour de Justice de l’Union Européenne.

Dans une série de décisions juridiques relatives à des poursuites engagées contre ses États membres publiée le 2 juillet, la Commission Européenne vient d’adresser un avis motivé à la France afin qu’elle prenne des mesures contre certaines pratiques de chasse et de capture d’oiseaux. Cette décision fait suite à une plainte contre la France déposée par la LPO le 2 avril 2019 concernant plusieurs infractions au droit européen: l’autorisation de pratiques cynégétiques traditionnelles selon des méthodes de capture non sélectives, tel le piégeage à la glu ; le prolongement de la chasse aux oies sauvages au mois de février pendant leur période de migration printanière ; l’autorisation de chasser des espèces en mauvais état de conservation, comme la Tourterelle des bois.

Ces pratiques sont en effet illégales et interdites par la directive européenne 2009/147, dite « directive oiseaux », qui vise à protéger toutes les espèces d’oiseaux naturellement présentes à l’état sauvage dans l’Union européenne. La Commission Européenne déplore notamment que parmi les 64 espèces pouvant aujourd’hui être chassées en France, seules 20 présentent un bon état de conservation.

Cet avis motivé de la Commission Européenne fait suite à une première lettre de mise en demeure envoyée à la France en juillet 2019, sans qu’aucune mesure ne soit prise pour se mettre en conformité avec le droit européen. Le gouvernement français dispose à présent d’un délai de trois mois pour répondre aux préoccupations de la Commission. À défaut, celle-ci pourrait décider de saisir la Cour de justice de l’UE.

Provocation française

Le 26 juin dernier, 11 projets d’arrêtés ministériels fixant les quotas de chasses traditionnelles dans plusieurs départements français ont été publiés par le Ministère de la Transition écologique et solidaire. Strictement identiques à ceux de l’année précédente, ils prévoient d’autoriser à nouveau pour la campagne de chasse 2020-2021 la capture de 156 030 oiseaux sauvages dans les conditions que dénonce la Commission Européenne.

La LPO demande le retrait immédiat de ces 11 projets d’arrêtés qui constituent une provocation envers la justice européenne et font encourir de lourdes sanctions financières à la France. Dans les trois mois qui suivent, la France devra également s’engager à ne pas prolonger la chasse aux oies sauvages au-delà du 31 janvier et interdire de chasser 20 espèces d’oiseaux inscrites sur la liste rouge européenne des espèces menacées de l’Union internationale de conservation de la nature (UICN), dont le prochain congrès mondial aura lieu à Marseille en Janvier 2021.

Pour Allain Bougrain Dubourg : « Emmanuel Macron avait promis de suspendre la chasse aux oiseaux les plus gravement menacés. Non seulement il n’a pas tenu ses engagements, mais il s’est acharné à faire couler le sang lors de pratiques iJnqualifiables qui conduisent à la souffrance et l’agonie de la biodiversité. Après avoir tenté tous les recours et devant le mépris de l’exécutif, la LPO s’est retournée vers l’Europe qui, aujourd’hui, tire nos consciences vers le haut. »

L’article de la Ligue de Protection des Oiseaux est ici.

Publié dans Chasse - Braconnage, Justice - Législation | Commentaires fermés sur La Commission Européenne demande à la France de mettre fin à la chasse illégale

L’exploitation des forêts s’accroît de manière abrupte en Europe

Un article de Reporterre, le 02/07/2020.

C’est une étude qui fait frémir. Alors que les forêts constituent un important puits de carbone, indispensable pour lutter contre le réchauffement climatique, les États membres de l’Union européenne (UE) auraient augmenté de manière « abrupte » leur récolte de bois depuis 2016 pour nourrir la hausse de la demande et les nouvelles centrales électriques.

Publiée mercredi 1er juillet dans la revue Nature et écrite par le centre de recherche de la Commission européenne, cette étude s’appuie sur des données satellitaires d’une résolution à échelle fine. Elle montre que les aires boisées exploitées se sont largement étendues : leur superficie a augmenté de 49 % par an en moyenne en 2016-2018 par rapport à 2011-2015, ce qui représente une perte annuelle de biomasse de bois de 69 % pour les forêts de l’UE.

Cette intensification des coupes n’est pas liée à l’arrivée d’arbres à maturité mais bien à un boom des marchés, précise l’étude. Ce phénomène est particulièrement visible dans les pays du nord comme la Suède et la Finlande. Les deux pays concentrent à eux deux la moitié de l’augmentation totale. Mais la France, l’Espagne, la Pologne, le Portugal sont aussi touchés. La taille moyenne des parcelles coupées a grandi de 44 % dans 21 des États membres. Les forêts de feuillus sont violemment touchées.

Les auteurs de l’étude rappellent que les forêts européennes ont absorbé ces 25 dernières années, environ 10 % des émissions de gaz à effet de serre de l’Union européenne. Mais au rythme actuel, elles ne seront bientôt plus en mesure d’atténuer le changement climatique, alertent-ils.

L’article de Reporterre est ici.

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Convention climat : «Il y aurait eu moyen de progresser sur une taxe carbone socialement juste»

Un article de Libération, par Coralie Schaub, le 24/06/2020.

Ancien président de l’Autorité environnementale, Michel Badré salue les travaux de la Convention citoyenne sur le climat. Mais regrette que certains sujets n’aient pas été abordés, comme la taxe carbone ou le nucléaire.

Emmanuel Macron à la Convention citoyenne pour le climat, le 10 janvier. Photo Yoan Valat. AFP

Ancien haut fonctionnaire, Michel Badré a présidé l’Autorité environnementale, instance du ministère de l’Ecologie contrôlant l’évaluation environnementale des grands projets d’infrastructure en France. Membre de l’association Humanité et biodiversité, il la représente au Conseil économique, social et environnemental (Cese), qui organisait la Convention pour le climat.

La Convention citoyenne pour le climat était-elle une première ?

Il y a déjà eu des expériences de démocratie citoyenne dans d’autres pays et en France, mais celle-ci est originale. D’abord en raison du nombre de citoyens réunis. L’effectif des conventions déjà organisées en France était plus réduit : 25 ou 30 personnes et pas 150. Ce qui change beaucoup de choses. Vous ne mettez pas 150 personnes dans une salle en leur demandant de produire toutes seules un avis, spontanément, sur des sujets complexes. Ce qui veut dire que le pilotage est essentiel. Et celui-ci n’est jamais neutre. Nul ne peut dire que ce genre de processus échapperait complètement à tous les jeux de pression divers, contrairement aux débats parlementaires habituels. Il y a forcément des jeux d’influence : les 150 personnes ont auditionné des experts et un expert n’est jamais neutre, ce qui est normal.

Ensuite, en raison de la question posée. On a souvent fait référence à des expériences internationales, notamment en Irlande et en Islande, où il y a eu des assemblées citoyennes avec des effectifs importants. Mais c’était sur des questions sociétales, plutôt que techniques ou économiques.

Ceci dit, faire participer 150 personnes représentant tous les âges, les catégories socio-professionnelles, la parité hommes-femmes, était une excellente idée. Si la société n’est pas impliquée sur les enjeux de climat et de biodiversité, qui sont fondamentaux et concernent tout le monde, on continuera à faire du surplace. Et l’expérience qui vient de se tenir est remarquable en ce que les citoyens se sont approprié ces sujets complexes.

Qu’avez-vous pensé de l’organisation elle-même et de la méthode de vote ?

A première vue, du bien. On peut discuter de la méthode consistant à voter les propositions par blocs. Il aurait pu être envisagé de procéder à un vote mesure par mesure, comme nous l’avons déjà fait au Cese, par exemple pour le vote de la contribution citoyenne sur le thème «fractures et transitions». Il est significatif de voir que la plupart des blocs de propositions ont été votés avec un score stalinien, et certaines, plus rares, à 60 ou 70%. Ce sont ces dernières, qui portaient sur les questions de fond, les plus délicates, qu’il faut regarder de près.

Sur le fond, que pensez-vous des propositions ? Assez ambitieuses ou pas ?

J’essaye souvent de lire et analyser des documents volumineux, comme ce rapport de propositions de la Convention citoyenne, en cherchant ce qui y figure et aussi ce qui n’y figure pas. Des propositions intéressantes figurent dans le rapport final, par exemple sur la rénovation thermique des bâtiments ou les transports en commun. Ces idées étaient souvent déjà sur la table, mais le fait que les citoyens se les approprient est important. Cela doit permettre aux pouvoirs publics d’engager désormais les moyens – qui se chiffrent en milliards d’euros – à la hauteur des enjeux.

Reste que certaines choses ne figurent pas dans le rapport, ou partiellement. A commencer par la question de la fiscalité. Il y a deux sujets qui fâchent dans ce domaine : l’écotaxe poids lourds, qui a mobilisé les bonnets rouges, et la taxe carbone, qui a mobilisé les gilets jaunes. Les deux ne sont abordés dans le rapport final que d’une façon très prudente. Or il y a quand même un moment où le sujet doit être mis sur la table.

Sur l’écotaxe, la proposition d’une vignette pour les poids lourds ne résout que très partiellement le problème, puisque la vignette est un droit d’usage non limité en kilomètres. Celui qui a pris la vignette a au contraire intérêt à rouler le plus possible et donc consommer le plus possible pour amortir celle-ci. Contrairement à l’écotaxe, qui est une taxe au kilomètre permettant de limiter la consommation.

Même chose pour les transports aériens. Là aussi, la Convention fait une proposition très prudente sur la modulation du prix des billets d’avion. On sait bien que la crise frappe durement le secteur des transports et que des décisions brutales peuvent poser problème. Il n’empêche que ces questions de transport routier de marchandises et de transport aérien sur des distances relativement courtes devront être posées. Enfin, s’agissant de la taxe carbone, les citoyens ont proposé de poursuivre le moratoire sur sa hausse, qui est déjà appliqué. C’est une proposition on ne peut plus prudente.

Pourquoi cette opposition à l’écotaxe et à la taxe carbone ? Un défaut de pédagogie ?

C’est un peu plus qu’un défaut de pédagogie. Je me méfie de moi-même et des experts qui affirment, lorsque le public ne les comprend pas : «On n’a pas été assez pédagogique vis-à-vis d’un public pas assez intelligent, donc on va lui réexpliquer.» Le public n’est pas idiot, et quand il est contre un sujet c’est en général qu’il a une bonne raison.

Si on regarde la taxe carbone telle qu’elle est préconisée par les économistes, ils disent tous sans exception qu’elle peut être un bon outil incitatif pour que les gens émettent moins de CO2 par leurs actions directes ou indirectes, mais à une condition impérative : qu’il y ait compensation des inégalités sociales. Or, la taxe carbone telle qu’elle a été mise en place en France ne comportait pas ces mesures de compensation sociale, donc son rejet n’est pas étonnant. Si le pilotage de la Convention avait conduit les citoyens à se demander quels sont les moyens de compensation à mettre en place pour que la taxe carbone soit acceptable, socialement juste, il y aurait peut-être eu moyen de progresser.

Autre question qui n’a pas été posée : le nucléaire…

Le rapport final traite de la production, du stockage et de la distribution d’énergie. Le mot nucléaire n’y figure pourtant jamais. C’est dommage car il intéresse la question posée à la Convention citoyenne. C’est maintenant, dans un avenir très proche, qu’il va falloir décider si on investit beaucoup pour prolonger la durée de vie des réacteurs actuels, ou pour en construire de nouveaux, ou si on choisit plutôt d’investir plus dans les énergies renouvelables et la réduction de la consommation d’énergie. Les questions des déchets nucléaires, des coûts et de la sûreté ne sont pas non plus complètement réglées, c’est le moins qu’on puisse dire. Je ne pense pas que qui que ce soit ait cherché à tout prix à éviter que ces questions ne soient posées à la Convention citoyenne. Mais je trouve dommage que cela n’ait pas été le cas.

Que pensez-vous de l’idée de soumettre certaines questions à référendum ?

Je faisais partie de la commission de médiation sur le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, il y a deux ans. J’avais alors regardé d’assez près la consultation locale qui avait été organisée en 2016 et qui avait à peu près tous les défauts. Y compris de conduire à un résultat qui n’a pas été mis en œuvre, ce qui a provoqué une amertume profonde et très compréhensible chez beaucoup de gens. Aujourd’hui, les 150 citoyens proposent de soumettre à référendum un projet de révision de la Constitution et un projet de reconnaissance du crime d’écocide. Les 150 ont eu raison de retenir ces deux questions plus générales, plutôt que de proposer un référendum sur une série de points très précis, comme la taxation du kérosène pour les avions. Plus un sujet est précis, plus il est complexe d’en décider par référendum.

Convention puis référendum : n’est-on pas en train de perdre du temps ?

Je ne pense pas du tout que la Convention ait fait perdre du temps. Le fait que 150 citoyens représentatifs de la société française s’expriment et disent «oui, tout cela est important, il faut faire d’urgence des choses sur le logement, la mobilité ou l’alimentation pour agir sur le climat», ce n’est pas du tout du temps perdu, cela a une grande valeur. Organiser un référendum sur l’article 1er de la Constitution, cela peut être intéressant aussi si cela permet de donner plus de poids à la Charte de l’environnement. Mais un référendum, c’est aussi un risque d’instrumentalisation à d’autres fins, et les 150 l’ont bien perçu.

L’article de Libération est ici.

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Glyphosate : soupçons de conflits d’intérêts au sein de l’Anses

Un article de GoodPlanet, le 18/06/2020.

Dans une enquête publiée mardi 16 juin, Le Monde révèle les conditions, sujettes à caution, d’attribution d’un appel d’offre pour une étude sur le glyphosate par l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail).

Photo d’illustration. Jean-François Monier/AFP

L’agence est chargée de délivrer les autorisations de mise sur le marché des pesticides et aussi de surveiller leur impact sanitaire ou environnemental. Or, un collectif de scientifiques alerte le journal en mettant en cause la procédure de sélection de laboratoires chargées de réaliser des études sur le glyphosate. Ils s’interrogent ainsi sur l’indépendance et la déontologie dont a fait preuve l’Anses.

L’Anses avait lancé un appel d’offre pour mener une étude sur le potentiel cancérogène du glyphosate. Un consortium de sept laboratoires a donc été retenus par l’agence, fin avril. Sa composition est cependant dénoncée par la députée Delphine Batho, qui a interpellé le gouvernement sur le sujet, ainsi que par un collectif de lanceurs d’alerte dans un rapport remis au Monde.

En effet, le consortium sélectionné est coordonné par l’IPL (Institut Pasteur de Lille), dirigé par Fabrice Nesslany. Or, cette même personne est à la tête du groupe d’expertise collective d’urgence (GECU) de l’Anses. C’est ce groupe qui a participé à la rédaction du cahier des charges l’appel d’offre selon Mme Batho, citée par le Monde.

Selon le collectif, « conflits d’intérêts et favoritisme ‘minent la réponse scientifique attendue par les autorités’ ». Le rapport du collectif lanceur d’alerte révèle de plus que deux autres laboratoires sélectionnés présentaient aussi des chercheurs qui avaient pris part à l’élaboration de l’appel d’offre. Les lanceurs d’alertes remettent aussi en cause le choix du GECU pour établir le cahier des charges.

En 2016, M. Nessany avait par ailleurs pris part à la rédaction d’un rapport d’expertise ayant conduit l’Anses à émettre un avis plutôt favorable au glyphosate, a soulevé Delphine Batho, créant selon elle un « risque d’un manquement à l’impartialité ».

Glyphosate et fongicides SDHI, mêmes enjeux ?

Ces révélations iraient donc à l’encontre de la déontologie de l’Anses. « Cela peut faire naître le soupçon que le cahier des charges a été constitué de manière à favoriser sa propre candidature », selon Marie-Angèle Hermitte, directrice de recherche au CNRS et membre du Comité de déontologie et de prévention des conflits d’intérêts de l’Anses (CDPCI), s’exprimant à titre personnel dans Le Monde.

Un doute renforcé par les exigences sur les tests contenus dans le cahier des charges pour lesquels l’IPL est le seul laboratoire en France homologué. Or, le CDPCI de l’Anses ne peut être saisi actuellement car inactif en raison de nombreuses démissions. Le collectif lanceur d’alerte souligne d’autres lacunes dans l’appel d’offre et le cahier des charges, comme notamment le fait que seul le principe actif soit étudié et non les produits commercialisés.

Suite à ces révélations, le Mouvement des Coquelicots a considéré que ces informations pouvaient renforcer leurs craintes concernant les autorisations d’épandages de SDHI délivrées par l’Anses, une « nouvelle famille de pesticides toxiques » au sujet desquels « l’agence favorise systématiquement les intérêts industriels au détriment de la santé publique ». Alors qu’au moment de ces révélations, leurs questions à l’Anses étaient demeurées sans réponses, le Mouvement des Coquelicots a demandé à être reçu à l’Anses, ce mercredi.

L’article de GoodPlanet Mag’ est ici.

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[Bonne Nouvelle] La population de loups continue à progresser en France

Un article de Novethic, le 21/06/2020.

La population de loups gris en France est estimée à 580 loups adultes, contre 530 un an plus tôt. Une très bonne dynamique pour cette population de canidés qu’il faut toutefois légèrement nuancer alors que le rythme de croissance ralentit un peu et que la mortalité augmente. De leur côté, les fédérations d’agriculteurs dénoncent de trop nombreuses attaques.

« L’estimation des effectifs (de loups en France) est à 580 au sortir de l’hiver », a indiqué l’Office français de la biodiversité (OFB) à l’AFP. Mais « la dynamique de progression de la population ralentit » avec « un taux de survie qui baisse », les raisons devant encore être étudiées. Il y a un an, la population adulte avait progressé de 100 individus, passant le cap des 500.

Le plan loup adopté en 2018 prévoyait que ce seuil ne serait atteint qu’en 2023. Il correspond à l’aptitude d’une population à moyen terme (100 ans) « à résister au risque d’extinction ». « Il n’y a toujours pas de meutes constituées en dehors des Alpes et du Jura », même si le loup peut être présent de façon permanente dans d’autres régions et que des individus solitaires ont pu être observés jusqu’au Centre ou en Normandie, selon l’OFB.

Ces carnivores, éradiqués par l’homme dans les années 1930 et revenus naturellement par l’Italie dans les années 1990, se concentrent dans les Alpes, le Sud-Est et l’Est. La présence de plus en plus importante du prédateur est combattue par les éleveurs qui dénoncent les attaques contre leurs troupeaux. Dans un communiqué commun, huit fédérations agricoles et d’éleveurs, dont la FNSEA, critiquent des « attaques à répétition (…) les retards de paiements observés pour le financement des moyens de protection et les indemnisations des dommages ».

Demande d’accroissement des prélèvements

En 2019, 3742 attaques ont eu lieu contre 12451 animaux, en majorité des ovins, selon les chiffres officiels. Plus de 7,4 millions d’ovins sont présents en France, avec plus de 21000 éleveurs ovins professionnels, selon la Fédération nationale ovine (FNO). L’État finance des dispositifs de protection dans les zones de prédation (parcs électrifiés, chiens, gardiennage par des bergers).

Bien que le loup gris soit une espèce protégée en France et en Europe, un quota est fixé chaque année autorisant à en tuer. Ce quota est actuellement de 17 à 19 % de la population estimée. En 2019, une centaine de loups ont été prélevés. La FNSEA, les Jeunes agriculteurs ou encore la FNO demandent « le droit de n’avoir aucun plafond de prélèvement » ou encore « le droit d’avoir zéro attaque sur son troupeau ».

L’article de Novethic est ici.

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La coupe rase, une aberration écologique qui menace nos forêts

Un article de Reporterre, par Gaspard d’Allens, le 15/06/2020.

Résultats d’une gestion industrielle des forêts, les coupes rases se développent en France. Forêts uniformisées, biodiversité en berne, érosion des sols et hausse des températures… Reporterre fait le point sur les conséquences de cette pratique.

Des forêts moissonnées comme des champs de blé. Des machines qui arrachent, coupent et débitent un arbre en moins d’une minute. Des hectares entiers dévastés, la surface scalpée de toute végétation, creusée par des ornières béantes à même l’humus. Ces scènes ne se déroulent pas à l’autre bout du monde mais au cœur des massifs français, dans le Morvan, dans le Limousin, dans les Landes. En cause ? La sylviculture industrielle et la pratique, si singulière, des coupes rases qui s’est développée ces derniers temps.

« Les forêts françaises sont aujourd’hui à la croisée des chemins, comme le modèle agricole dans les années 1950 », alerte l’association Canopée. La menace d’une industrialisation plane et devient sur certains territoires de plus en plus palpable. Des forêts de feuillus diversifiées sont transformées en monocultures résineuses. L’âge d’exploitation des arbres est sans cesse abaissé. En France, 79 % des arbres ont moins de cent ans. Plus de la moitié des forêts du Morvan ont été remplacées par des plantations de douglas ou d’épicéas.

Au centre de ce système productiviste, la coupe rase cristallise toutes les tensions. Début juin, des associations écologistes, dont Canopée et SOS forêts, ont lancé une série d’actions et de manifestations pour dénoncer cette pratique. Des parlementaires, à l’initiative de la députée France insoumise Mathilde Panot vont aussi déposer dans les prochains jours une proposition de loi pour interdire les coupes rases supérieures à 0,5 hectare. Le bras de fer est engagé. Reporterre revient sur les éléments clés de la bataille.

Une coupe rase, qu’est-ce que c’est ?

Pour les habitants du Morvan ou du Limousin, la définition saute aux yeux. Le bruit des machines et le fracas des arbres qu’on tronçonne se déroulent devant chez eux. D’après l’Inventaire forestier national (IFN), une coupe rase « désigne en gestion forestière l’abattage de l’ensemble des arbres d’une parcelle ». Elle est utilisée soit pour remplacer une essence par une autre, souvent des feuillus par des résineux, soit pour couper l’ensemble d’une parcelle cultivée en futaie régulière : un modèle de gestion sylvicole où les arbres ont le même âge, la même hauteur et peuvent donc être abattus en même temps.

Coupe rase en Gironde, à Lugos.

Les coupes rases ont pris de l’ampleur après la Seconde Guerre mondiale, d’abord aux États-Unis où les militaires ont reconverti leurs matériels — tanks et autres engins à chenilles — en outils agricoles et forestiers. Elles se sont ensuite propagées en Europe à mesure que la mécanisation des travaux forestiers s’intensifiait. Avec l’arrivée des abatteuses en France — ces monstres d’acier mi-tractopelle mi moissonneuse-batteuse — les coupes rases sont devenues la norme en futaie régulière. Les abatteuses remplacent entre huit et dix bûcherons, pèsent au moins vingt tonnes et empilent plus de 250m3 de bois par jour.

Pour l’association Canopée, « la coupe rase est indissociable d’un modèle industriel de la forêt ». Elle termine le cycle de la plantation artificielle et est d’autant plus rentable et efficace que la forêt est uniformisée. Ce système est portée par les grosses coopératives forestières qui proposent aux propriétaires une gestion clé en main. Elles détiennent sur l’ensemble de la filière un quasi monopole puisqu’elles produisent à la fois les plants, conduisent et conseillent les travaux et commercialisent le bois. La coopérative Alliance forêts bois, par exemple, vend un tiers des plants forestiers en France grâce à sa filiale Forelite. Elle a donc tout intérêt à préconiser des coupes rases… pour mieux vendre ensuite des travaux de plantation.

Peu de données existent pour évaluer en France l’étendue des coupes rases. La dernière étude remonte à 1999. Elle estimait à l’époque le nombre de coupes à 48.900 chaque année, couvrant une surface totale d’environ 104.300 hectares. Soit 0,8 % de la surface forestière nationale. Les chiffres actualisés manquent. Les plantations représenteraient aujourd’hui environ 16 % de la forêt française. Une proportion qui peut sembler assez faible à l’échelle nationale mais qui cache des disparités locales. Sur le plateau de Millevaches ou les Landes, par exemple, la majorité des forêts sont plantées et soumises aux coupes rases.

Des forêts de feuillus diversifiées sont transformées en monocultures résineuses.

La demande accrue en bois énergie, depuis le Grenelle de l’environnement en 2007, contribue aussi à la multiplication de cette pratique. Les forêts sont de plus en plus considérées comme la solution miracle pour remplacer notre dépendance aux énergies fossiles et des arbres entiers sont transformés en granulés alors qu’ils pourraient être utilisés pour d’autres usages. Dans le projet de Stratégie nationale bas carbone, le gouvernement prévoit d’augmenter les coupes de 70 % d’ici 2050 — passant de 48 mégamètres cubes de bois récolté en 2015 à 65 en 2030 et 83 en 2050.

Quelles conséquences sur l’environnement et la biodiversité ?

Les coupes rases n’ont pas seulement un impact paysager ou esthétique, loin de là. En rasant du jour au lendemain l’ensemble d’une parcelle forestière, elles stoppent net le cycle de la vie et dégradent durablement les écosystèmes. Les espèces d’oiseaux associées aux gros bois perdent leurs habitats, comme les pics ou les sittelles, de même que les insectes xylophages ou encore les chiroptères. C’est tout un cortège d’animaux, de petits mammifères, de champignons et de plantes connexes qui s’en trouve bouleversé. La microfaune est broyée. Le monde fongique aussi.

« Après une coupe rase, la température peut augmenter de plus de dix degrés au sol, indique le naturaliste Alain-Claude Rameau, auteur du livre Nos forêts en danger (Atlande, 2017). Les champignons mycorhiziens — indispensables à l’alimentation des arbres — ne supportent pas le dessèchement ni l’exposition à de trop fortes températures. Ils sont éliminés, décrit-il. Une coupe rase peut aussi créer des frontières et être impossible à traverser pour des insectes comme le pique prune ou le grand capricorne. »

Plusieurs études montrent un déclin de la faune et la flore dans les milieux forestiers. 40 % des espèces de coléoptères saproxyliques (dépendant du bois mort) sont menacées. D’autres insectes le sont également comme la cétoine dorée, la lucane cerf-volant ou la rosalie alpine. Même des oiseaux sont concernés : la pie grièche grise, le torcol fourmilier ou le gobe mouche. L’homogénéisation des forêts explique en partie cette chute de la biodiversité. 30 % des insectes forestiers dépendent des arbres morts, 40 % des oiseaux des bois ont besoin d’arbres sénescents : ce sont des écosystèmes qui n’existent pas dans des plantations gérées en coupes rases.

L’utilisation de matériels lourds — abatteuses et débardeurs — malmène aussi les sols, elle les tasse et les rend durs comme une cuirasse de béton. Elle appauvrit la vie organique. L’arrachage des souches enlève également une source précieuse d’humus et de minéraux. « Il faut cent ans pour fabriquer un centimètre de sol forestier et dix minutes pour le détruire », résume Vincent Magnet, adhérent de l’association Nature sur un plateau dans le Limousin.

Mis à nu par une coupe rase, le sol s’érode. Ici, une coupe dans le Morvan.

Mis à nu, le sol s’érode. Avec la pluie, sur les parcelles en pente, la terre descend dans les fonds de vallons, polluant les rivières et ensablant les frayères. L’association Eaux et rivières du Limousin a porté plainte à plusieurs reprises contre la filière bois. Les procès sont toujours en cours.

Quels impacts sur le climat ?

Le changement climatique sert d’alibi pour accroître les coupes rases. Les sécheresses et les attaques de pathogènes se multiplient notamment dans l’est de la France où la mortalité des arbres et les dépérissements sont très importants. « La filière en profite pour raser des peuplements jugés pas assez productifs en les remplaçant par des plantations », regrette l’association SOS forêt.

Pour accélérer le rythme des coupes, les industriels affirment, en effet, que les forêts vieillissantes seraient mal adaptées aux changements climatiques et que les jeunes plantations stockeraient plus de carbone. Ces deux arguments ne sont pourtant pas avérés scientifiquement.

De récents travaux, dans la revue Nature notamment, ont montré que les forêts âgées de plusieurs siècles, voire de millénaires, continuaient d’absorber du carbone. Le stockage ne se fait pas seulement dans la biomasse aérienne mais dans les sols forestiers. « Plus ces sols sont riches avec une forte activité biologique, plus il y a de carbone accumulé », précise le professeur au Museum national d’histoire naturelle, Jean-François Ponge.

Les espèces d’oiseaux associées aux gros bois perdent leurs habitats, comme les sittelles.

En mettant subitement à nu une forêt et en retournant la terre, une coupe rase peut être particulièrement néfaste. La matière organique se décompose et la coupe libère le carbone qui était stocké dans le sol. Nicolas Martin, chercheur à l’Inra (Institut national de recherche agronomique), a calculé qu’il faut environ 40 ans pour que la forêt compense les émissions qu’elle a produite suite à la coupe. « À court-terme, ce n’est donc pas neutre. Augmenter les coupes est incompatible avec les objectifs de la COP21 et l’urgence de la crise », dit-il.

Une étude parue en 2016 dans la revue Science remet aussi en cause le mode de gestion des forêts et leur capacité à tempérer le changement climatique. Les scientifiques y révèlent que « sur plus de deux siècles si les forêts étaient restées majoritairement feuillues et non gérées, elles auraient stocké 10 % de carbone en plus ». Remplacer des feuillus par des conifères, comme c’est le cas dans le Morvan, n’est pas forcément une bonne idée d’un point de vue climatique. Un article publié en 2018 dans la revue Nature montrait que les résineux, plus sombres, captaient plus de chaleur et alimentaient le réchauffement.

En rasant la végétation, la coupe rase accroît aussi les températures. Tout récemment, le 25 mai dernier, le CNRS a encouragé à maintenir en permanence un couvert forestier dense. « On augmente ainsi l’effet tampon de la canopée forestière qui agit comme une couverture isolante atténuant les températures maximales journalières, écrivent les scientifiques. Sur le long terme, une augmentation de cet effet tampon permet d’infléchir la courbe du réchauffement climatique tel que ressentie dans le sous-bois et ainsi de laisser le temps aux communautés végétales inféodées à ces milieux de s’adapter à ce changement. »

Existe-t-il des alternatives ?

Les coupes rases ne sont en rien une fatalité. De nombreux pays ont décidé de les réglementer voire de les interdire. Depuis 1902, la Suisse a banni les coupes rases de son pays. Dans une loi de 1991, elle précise que « les coupes rases et toutes les formes d’exploitation dont les effets pervers peuvent être assimilés à ceux des coupes rases sont inadmissibles ». En 1948, la Slovénie a suivi son exemple et rendu obligatoire « une sylviculture proche de la nature ». Depuis 1975, l’Autriche soumet les coupes de plus de 0,5 hectare à une autorisation spéciale et interdit celles de plus de deux hectares. Plusieurs Länder d’Allemagne ont aussi imposé de fortes restrictions aux coupes rases.

En Lettonie, leur taille est régulée en fonction du type de sol. Sur sol sec, elle ne doit pas dépasser cinq hectares. Sur sol humide, la coupe se fait par bandes n’excédant pas cinquante mètres de largeur pour les sols tourbeux, et cent mètres pour les sols minéraux. Toutes ces politiques se veulent des réponses locales aux dégradations des écosystèmes forestiers.

Coupe rase dans la forêt domaniale de Fourmies en septembre 2016.

À l’inverse, en France, la réglementation est assez permissive. Par exemple, l’article L124-6 du code forestier fixe une obligation de reconstitution du peuplement au plus tard cinq ans après une coupe rase plutôt que de définir une surface maximale à partir de laquelle les conséquences négatives des coupes rases seraient interdites.« Autrement dit, dans le code forestier actuel, la forêt n’est pas définie comme un écosystème vivant mais plutôt comme un capital dont on souhaite assurer la capacité à fructifier », analyse l’association Canopée.

Pourtant des alternatives existent. Depuis les années 1980, le collectif Pro silva qui compte près de 300 propriétaires en France prône la futaie irrégulière – une forêt diversifiée avec un mélange d’essence que l’on récolte pied par pied. Partout en France, des collectifs citoyens rachètent aussi des monocultures résineuses pour les gérer différemment en introduisant peu à peu des feuillus et en bannissant les coupes rases. Et ces modèles n’ont rien d’une utopie, ils fonctionnent dès à présent.

L’article de Reporterre est ici.

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L’Europe a échoué à enrayer le déclin de la biodiversité

Un article de Reporterre, le 09/06/2020.

Comment enrayer la sixième extinction de masse ? En Europe, la biodiversité connaît un déclin ininterrompu depuis plusieurs années, notamment pour les espèces présentes sur des terres agricoles. Depuis 1990, les effectifs des populations d’oiseaux des champs et de papillons des prairies – de bons indicateurs de l’évolution de la biodiversité – ont diminué de plus de 30 %.

Papillon

En 2011, la Commission a adopté une stratégie visant à enrayer la perte de biodiversité à l’horizon 2020, en mobilisant notamment la Politique agricole commune (PAC). La Cour des comptes européenne a cherché à tirer un bilan de cette stratégie : pour ce faire, ses auditeurs se sont rendus en Allemagne, en Irlande, à Chypre, en Pologne et en Roumanie.

Leur conclusion, publiée le 5 juin, est sans appel : « La politique agricole commune n’est pas parvenue à inverser la tendance à la baisse que connaît la biodiversité depuis des décennies, et l’agriculture intensive reste l’une des principales causes de la perte de biodiversité. »

« Jusqu’ici la PAC n’a pas suffi à contrer le déclin de la biodiversité des terres agricoles, lequel représente une grave menace pour l’agriculture et l’environnement », a déclaré Viorel Ștefan, membre de la Cour des comptes européenne responsable du rapport, intitulé Biodiversité des terres agricoles : la contribution de la PAC na pas permis d´enrayer le déclin.

D’une part la stratégie de l’Union européenne en faveur de la biodiversité souffre de graves lacunes : manque d’objectifs clairs et mesurables, mauvaise coordination des politiques. D’autre part, la majeure partie des fonds de la PAC (les paiements directs aux exploitations agricoles) a un impact limité sur la biodiversité.

Les rapporteurs de la Cour des compte recommandent donc à la Commission « de mieux coordonner la stratégie en faveur de la biodiversité à l’horizon 2030, d’accroître la contribution des paiements directs et du développement rural à la biodiversité des terres agricoles, d’assurer un suivi plus précis des dépenses budgétaires et d’élaborer des indicateurs fiables pour évaluer l’incidence de la PAC ».

L’article de Reporterre est ici.

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Un décret gouvernemental cherche à contourner la Directive Oiseaux

Un article de la LPO-PACA, le 09/06/2020.

Alors que la France fait l’objet d’une procédure judiciaire pour non respect de la Directive européenne de protection des oiseaux, ce décret introduit de sournoises subtilités juridiques afin de pouvoir y déroger en faveur des chasseurs.

 

Voici la réalité de l’hypocrisie au plus haut niveau de l’État, en matière de protection de la biodiversité, dès lors qu’il s’agit de favoriser les abus de la chasse en France. 

Extrait du Décret n° 2020-612 du 19 mai 2020 du Ministère de la transition écologique et solidaire précisant les modalités de mise en œuvre des dérogations prévues aux articles L. 424-2 et L. 424-4 du code de l’environnement pour la chasse de certains oiseaux de passage :

Art. 2. – Après l’article R. 424-15 du code de l’environnement, il est inséré un article R. 424-15-1 ainsi rédigé: « Art. R. 424-15-1. – Pour l’application des dispositions du troisième alinéa des articles L. 424-2 et L. 424-4, l’utilisation de modes et moyens de chasse consacrés par les usages traditionnels est autorisée dès lors qu’elle correspond à une exploitation judicieuse de certains oiseaux.»

Vous n’y comprenez rien ou pas grand chose ?

Rassurez-vous c’est normal ! C’était l’objectif de celui qui « tenait la plume » pour le Ministère en principe en charge de l’écologie, à savoir le Président de la Fédération nationale des chasseurs (FNC) Willy Schraen ; il s’en était d’ailleurs vanté sur Facebook : « La rédaction proposée répond à la demande de la FNC (…) Ce décret va permettre de mieux fonder les décisions que le ministre sera amené à prendre pour la prolongation dérogatoire de la chasse des oies et les quotas des chasses traditionnelles. »

Sous son apparence anodine et technocratique, ce décret publié au Journal Officiel le 23 mai est en fait une énième tentative des lobbies cynégétiques de faire prolonger la chasse aux oies migratrices en février, annulée à treize reprises par le Conseil d’État suite à des recours de la LPO, et de pérenniser les chasses traditionnelles, dont le piégeage à la glu, qualifiées dans ce texte d’« exploitation judicieuse de certains oiseaux ».

Déni de démocratie

La consultation publique obligatoire préalable au décret, à laquelle la LPO avait appelé ses sympathisants à participer en novembre dernier, a recueilli 13752 avis recevables dont 57% étaient défavorables au projet, pourtant maintenu en l’état. Ce nouveau déni de démocratie participative fait écho au rapport rendu en décembre dernier par la Commission Nationale du Débat Public (CNDP) qui relevait les dysfonctionnements de ces consultations, notamment l’absence de prise en compte de leur résultat. 

Alors que, suite à une plainte de la LPO, la France a fait l’objet de l’ouverture d’une infraction de la part de la Commission européenne pour avoir contrevenu à la Directive Oiseaux en autorisant la chasse aux oiseaux migrateurs en février et pour être le dernier pays à autoriser le piégeage des oiseaux avec de la glu, voici donc la réponse du gouvernement. Ce dernier fait en outre prendre des risques inconsidérés de recours devant la Cour de Justice de l’Union Européenne, avec des pénalités potentielles de plusieurs millions d’euros pour satisfaire à nouveau les lobbies de la chasse. Ce mépris à l’égard de la biodiversité et du droit environnemental se dessine à la veille d’accueillir, en janvier 2021 à Marseille, le Congrès mondial de l’Union international de conservation de la nature. 

Il va devenir de plus en plus difficile pour la France, dernier pays européen à chasser un oiseau en danger comme le Courlis cendré et à piéger les oiseaux avec de la colle, de donner des leçons de préservation de la nature au reste du monde.

L’article de la LPO est ici.

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Bas-Lieu : des haies sont arrachées, des chemins de randonnée disparaissent

Un article de La Voix du Nord, par Pierre Descamps, le 18/06/2020.

Les chemins des Gripets et de la Cense à Cailloux, empruntés par ceux qui souhaitent rallier Avesnes-sur-Helpe à la Taquennerie ou au-delà à Sars-Poteries ou Felleries, sont devenus impraticables.

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Le chemin des Gripets, recouvert de terre.

Qu’est-il arrivé aux chemins des Gripets et de la Cense à Cailloux ? Le premier a été recouvert de terre et se trouve donc rayé de la carte. À sa place, un immense champ de blé et de maïs qui s’étend de la Départementale 104 au chemin de Notre-Dame-du-Bois et jouxte le ruisseau de Bas-Lieu, affluent de l’Helpe Majeure. Le second est complètement obstrué, encombré sur plusieurs centaines de mètres par une quantité impressionnante de souches et de branchages issue de l’arrachage de haies. Ces chemins sont toujours présents sur les cartes IGN [1] (Bas-Lieu) mais ont disparu ou sont rendus impraticables sur le terrain.

Les usagers de la Départementale 104 ne manqueront pas de remarquer cette décharge sauvage de débris végétaux, là où la route présente un angle droit ; elle se trouve régulièrement inondée d’eau et de boue. Les haies, quand elles étaient encore là, s’opposaient au ruissellement de l’eau. Elles constituaient de plus un réservoir de biodiversité et participaient au maillage bocager, identité paysagère du territoire.

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Souches et branchages issue de l’arrachage de haies à Bas-Lieu.

La disparition des chemins de randonnée, l’arrachage des haies, le retournement de prairies posent de nombreuses questions autour de quelques thèmes : paysages, inondations, tourisme, pesticides et qualité de l’eau, agriculture intensive ou agro-écologie, respect de la propriété, du droit de passage, conformité des transformations avec la législation en vigueur et la responsabilité des élus et aussi les priorités définies par le Parc de L’Avesnois [2].

L’article de La Voix du Nord est ici.

[1] https://www.geoportail.gouv.fr/donnees/cartes-ign-classiques

[2] http://www.parc-naturel-avesnois.fr/wp-content/uploads/2013/02/Le-bocage…

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1 346 tonnes de pesticides illégaux saisies en Europe, une enquête en cours en France

Un article de Ouest France avec AFP, le 03/06/2020.

Europol a annoncé ce mercredi 3 juin 2020 que les polices européennes ont saisi plus d’un millier de tonnes de pesticides illégaux à travers l’Europe. Selon l’agence, les faux pesticides peuvent endommager gravement les cultures agricoles.

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Photo d’illustration.

Les polices européennes ont saisi plus d’un millier de tonnes de pesticides illégaux à travers l’Europe, un nombre record suffisant pour pulvériser l’ensemble des terres agricoles en Allemagne, a annoncé ce mercredi 3 juin Europol. Cette large opération menée entre janvier et avril a conduit à la saisie de 1 346 tonnes de ces pesticides, a déclaré l’agence européenne de police dans un communiqué.

Cette quantité pourrait suffire à pulvériser plus que toutes les terres agricoles en Allemagne, qui représentent près de la moitié du pays, et près de 75 % des terres agricoles en France, a indiqué Europol, dont le siège se trouve à La Haye (Pays-Bas).

Des composants dangereux pour la santé

De nombreux composants de ces pesticides provenaient d’Asie, en particulier de la Chine et du Japon, mais aussi du Mexique et des États-Unis, a expliqué Rien van Diesen, un expert d’Europol.

Selon l’agence, les faux pesticides peuvent endommager gravement les cultures agricoles, polluer l’environnement et nuire à la santé. Beaucoup sont également hautement inflammables, a souligné Rien Van Diesen.

Suivant les saisies, des enquêtes sont toujours en cours en Belgique, en France, en Allemagne, en Pologne, en Slovénie et en Suisse, a précisé Europol.

L’article de Ouest France est ici.

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En Chine et en France, les élevages industriels de porcs sont une source de pandémies

Un article de Reporterre, par Jocelyne Porcher, le 06/06/2020.

Qu’est-ce qui, depuis les années 1980, explique la multiplication des virus et les abattages à grande échelle d’animaux ? Le développement de l’élevage industriel porcin en Chine, accompagné par la France, répond l’auteure de cette tribune. Qui en appelle à d’autres modes d’élevage, respectueux des animaux.

Cochon

Photo d’illustration.

Jocelyne Porcher est directrice de recherches à l’Inra de Montpellier. Elle travaille sur la relation de travail entre les éleveurs et leurs animaux. Avant, elle a été elle-même éleveuse et technicienne agricole.


La crise sanitaire mondiale que nous traversons actuellement fait des milliers de morts, dont une grande part, sans aucun doute, aurait pu être évitée par des politiques de santé humaines plutôt que gestionnaires. Elle atteint notre humanité, mais elle touche également de manière insidieuse une part de notre intégrité : nos relations aux animaux. Alors que nombre de nos concitoyens se réjouissent de la présence de leurs compagnons animaux dans le contexte actuel de rupture des contacts entre humains, reconnaissent leur importance dans leurs vies, leurs vies concrètes, matérielles, mais aussi psychiques, d’autres, avec plus d’opportunisme que de décence, insistent sur le fait que la cause première de cette pandémie serait à rechercher dans notre proximité avec les animaux, à travers l’élevage et la domestication. Haro sur le baudet, sur le pangolin, sur la chauve-souris et, plus récemment, sur le chien. Car, si pour les uns, le criminel est l’animal sauvage, pour les autres, c’est l’animal domestique, et, au-delà, l’animal humain, générique, celui dont Gaïa aspirerait à se débarrasser enfin.

Nous l’avons lu depuis le début de l’épidémie, l’origine du virus serait à rechercher chez les animaux. Il aurait été transmis aux humains à cause de pratiques hautement répréhensibles comme consommer de la viande ou vendre du poisson sur les marchés. Plus globalement, nos relations aux animaux provoqueraient ces zoonoses et cela depuis le Néolithique. Avant cette malheureuse rencontre entre les humains et les animaux, avant cette « monstrueuse cohabitation », au temps béni des chasseurs cueilleurs, voire au temps béni (surtout l’hiver) des cueilleurs tout court, la planète était un éden. Les communautés humaines ne connaissaient ni la guerre ni la faim, ces calamités étant venues avec l’agriculture, paraît-il.

Comment ces fables des origines peuvent-elles avoir un tel écho aujourd’hui alors que les animaux domestiques occupent une place si importante dans nos vies, dans nos vies concrètes, matérielles, mais aussi dans nos vies psychiques ? On peut proposer de penser au contraire, à propos de la domestication des animaux, que l’aventure humaine aurait pu tourner court sans cette extraordinaire bifurcation de l’évolution des espèces opérée il y a dix millénaires, l’association entre des individus de l’espèce humaine et ceux d’autres espèces animales, intéressés à mettre en jeu ensemble les conditions de leur survie respective [1].

Au cours de cette association et depuis dix millénaires, nous avons échangé bien des choses et, bien sûr, également des micro-organismes et virus. Qu’est-ce qui a changé ces dernières décennies pour que ces zoonoses se multiplient et soient rendues plus dangereuses et plus mondialisées ?

Ce qui a changé : les conditions d’élevage des animaux, notamment en Chine

Ce qui a fondamentalement changé et dont on entend fort peu parler à l’heure du Covid-19, ce sont les conditions d’« élevage » des animaux en Chine. En quelques décennies, ce pays est devenu un leader mondial des productions animales, et notamment de la production de porcs. La Chine est le premier producteur de porcs au monde et elle est également le premier pays consommateur. Cela, « grâce » à des structures industrielles de très grande taille – d’ailleurs développées en partie avec le concours d’entreprises françaises (génétique, aliments du bétail, équipements…), qui ont remplacé les élevages paysans.

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Lutte contre une ferme-usine dans la Vienne, en 2018.

Wuhan est la capitale de la province du Hubei, forte productrice de porcs (production, sélection, reproduction, abattoirs…). On trouve dans cette province de très grandes structures de production de porcs (de 10.000 à 50.000 animaux). Le dernier salon du China international animal husbandry exhibition (CAHE) [2], consacré aux productions animales (porcs et volailles notamment), s’est tenu à Wuhan en 2019.

Si la Chine détient sans doute aujourd’hui le triste record de la densité de porcs par mètre carré et fait preuve d’inventivité en entassant les porcs dans des bâtiments de plusieurs étages, elle ne fait que reproduire et étendre un modèle que les zootechniciens et vétérinaires français ont largement participé à développer. Quand, en 1970, a été conçu le « plan de rationalisation de la production porcine », il s’agissait bien de sortir les porcs des fermes où ils étaient dispersés et de mettre en place un « élevage » rationnel, moderne et productif.

Depuis les débuts de l’élevage industriel, les pathologies dévastatrices se sont multipliées

Ce modèle industriel de production porcine, celui qui existe actuellement en Bretagne comme en Chine, même s’ils sont à des niveaux de taille différents, n’a pas été mis en place si facilement et il n’a pu s’imposer comme « modèle dominant » que dans les années 1980. Pendant dix ans, il a fallu batailler contre les virus et microbes qui assaillaient les animaux enfermés et sans défense contre les pathologies générées par l’enfermement, la promiscuité et le volume des déjections [3].

Il n’était pas rare que le producteur entrant dans sa porcherie trouve une partie de ses animaux agonisants ou morts : « En post-sevrage, on a perdu jusqu’à 30% de porcelets mais économiquement on n’a jamais souffert. […] J’ai eu énormément de cochons à crever, on était tous des apprentis sorciers dans l’élevage en fait, il y en avait un qui voulait trouver son virus, l’autre qui voulait ceci, l’autre qui voulait cela », explique un producteur installé en 1968 [4].

Cette bataille contre les virus n’a en fait jamais cessé. Régulièrement, une pathologie dévastatrice – [SRDP|Syndrome dysgénésique et respiratoire du porc], diarrhée épidémique, rhinite atrophique, grippe porcine, [MAP|Maladie de l’amaigrissement du porcelet.], mais aussi les zoonoses comme l’hépatite E, etc. – apparaît dans les exploitations et est refoulée par l’abattage massif des animaux.

Les ravages que fait actuellement la peste porcine africaine (PPA) en sont un rappel. En Chine, depuis 2018, des millions de porcs ont été abattus à la hâte pour cause de PPA. Selon les sources, entre 30 % et 50 % du cheptel de truies aurait disparu. Il faut noter que, dans le cas d’abattages massifs, la gestion des cadavres est un véritable problème qui peut être résolu localement par des solutions expéditives, comme jeter les porcs (morts ou vifs éventuellement) dans des fosses sauvages ou dans des cours d’eau [5].

Les élevages industriels empêchent la pérennité des systèmes paysans

Mais, dans le monde des productions animales mondialisées, le malheur des uns fait le bonheur des autres. Ainsi la faillite de la production porcine chinoise a-t-elle donné de grandes satisfactions à la filière industrielle française, ravie d’exporter ses porcs à très bon prix. En décembre 2019, le prix du porc atteignait des sommets (prix de base à 1,7 euro le kilo). Comme le souligne un analyste de l’Institut du porc : « Les perspectives sont prometteuses pour les grands exportateurs mondiaux en 2020 dans le contexte actuel.» Elles le sont nettement moins pour les éleveurs-paysans qui sont sommés, pour limiter la propagation de la PPA et dans le cadre de mesures de biosécurité, de mener leur élevage plein air en appliquant des procédures industrielles. Ce qui est un contresens du point de vue du travail et ruine ce qui fait la valeur du plein air et du parcours, l’autonomie des animaux et leur proximité avec leurs éleveurs.

Non seulement, donc, les systèmes industriels participent de la destruction des équilibres naturels et de notre capacité à vivre avec les virus mais ils empêchent l’émergence et la pérennité des systèmes paysans, qui sont précisément ceux qui conviennent aux animaux et qu’attendent nos concitoyens.

Entre industrie porcine et Covid-19, il y aurait sans doute bien des choses à voir, et tout un système de production à revoir, radicalement. Non pas en misant sur l’agriculture cellulaire et la viande in vitro, comme semblent y penser très fortement aussi les Chinois, mais en revenant sur cinquante ans d’industrialisation de l’élevage. Les animaux ne sont pas des choses et, à travers ces virus (qu’ils les tuent ou qu’ils nous tuent), c’est la vie qui résiste en eux. C’est pourquoi nous devons de toute urgence renoncer à la violence industrielle et à ses conséquences mortifères, et mettre en place des modes d’élevage et de consommation respectueux des animaux. Non pas sans eux ni contre eux, mais avec eux.

L’article de Reporterre est ici.

[1] Pour en savoir plus, lire Vivre avec les animaux, une utopie pour le XXIe siècle, de Jocelyne Porcher, aux éditions La Découverte, 2011.

[2] L’équivalent XXL du Space breton.

[3] Sur les conditions de vie et de travail dans les porcheries industrielles dans les années 1970-1980, voir le film Cochon qui s’en dédit, de Jean-Louis Le Tacon (1979) en ligne ici et complété par des interviews et des commentaires.


[4] Le producteur était rémunéré quelle que soit sa production, comme expliqué dans Cochons d’or. L’industrie porcine en questions de Jocelyne Porcher, 2010, Quæ.

[5] Rappelons aussi que des abattages massifs similaires avaient déjà eu lieu en Corée du Sud il y a une dizaine d’années pour cause de fièvre aphteuse. Cette maladie n’est pas mortelle pour l’animal, elle n’est pas contagieuse pour l’humain, mais elle entrave les exportations.

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Faut-il interdire l’abattage massif dans les forêts ?

Un article du Parisien, par , le 05/06/2020.

Ce vendredi, des dizaines d’affiches seront collées dans le Morvan pour dénoncer les coupes rases. Un enjeu écologique majeur selon les associations.

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L’objectif de la campagne des associations de défense de l’environnement est d’interpeller les députés et le gouvernement pour obtenir une loi interdisant les coupes rases de plus de 2 ha, sauf en cas de motif sanitaire. (Illustration) LP/Olivier Arandel

Une parcelle de forêt abattue où quelques souches d’arbres éparses gisent encore au sol comme autant de cadavres. Des troncs transportés par un engin de chantier sur un vallon ratiboisé par les tronçonneuses. Et en légende de ces photos géantes de 3 m de haut, le même message : « Amazonie? Non, France. Stop aux coupes rases ».

Ce vendredi matin, des dizaines d’affiches de ce type seront collées dans trois villages du Morvan pour dénoncer les « coupes rases » opérées au cœur de ce massif forestier de basse montagne situé en Bourgogne Franche-Comté. Cette opération a été organisée à l’occasion de la journée mondiale de l’environnement par les associations Canopée et le collectif SOS Forêt France. Elle est le point de départ d’une mobilisation nationale contre la « déforestation industrielle » en France.

« Le phénomène des coupes à blanc se développe partout sur le territoire, dans le Morvan mais aussi en Auvergne, dans les Landes, en Alsace ou dans le Périgord », dénonce le coordinateur des campagnes de Canopée Sylvain Angerand. D’après les associations, le gouvernement « prévoit d’augmenter la récolte de bois de plus de 70 % entre aujourd’hui et 2050 ». L’objectif de la campagne est d’interpeller les députés et le gouvernement pour obtenir une loi interdisant les coupes rases de plus de 2 ha, sauf en cas de motif sanitaire. Un projet de loi, élaboré dans le cadre de la commission d’enquête parlementaire et citoyenne sur les forêts, sera déposé en ce sens le 10 juin par la députée insoumise Mathilde Panot.

« Chaque hectare récolté doit être intégralement reboisé » « La Suisse a interdit les coupes rases depuis 1976 tandis que l’Allemagne et l’Autriche ont adopté des réglementations très restrictives », affirme l’élue LFI du Val-de-Marne. « Il existe actuellement 136 espèces d’arbres dans les forêts françaises mais on s’oriente de plus en plus vers un modèle d’industrialisation de la gestion forestière avec une volonté de faire au maximum de la monoculture de résineux ». Le choix du Morvan pour lancer cette campagne nationale n’est pas le fruit du hasard. Le 17 novembre déjà, les associations avaient réuni plus de 500 personnes pour matérialiser au sol un Stop géant sur une parcelle récemment défrichée.

«En décalage avec les enjeux écologiques actuels»

Contactée alors par nos soins lors de cette première opération médiatique, l’Union de la coopération forestière française (UCFF) qui représente 110 000 sylviculteurs forestiers privés, s’était vertement défendue. « Nous n’avons aucun intérêt à saccager les forêts que nous gérons et si nous effectuons des coupes rases, nous le faisons de manière professionnelle et maîtrisée, nous expliquait le secrétaire général de l’UCFF, Julien Bluteau. Par ailleurs, il faut bien comprendre qu’il n’y a pas de déforestation puisque chaque hectare de forêt récolté doit être intégralement reboisé ». Sauf que les partisans de la diversité en forêt dénoncent les conséquences de ces forêts « artificielles » qui remplacent parfois des massifs de chênes centenaires.

« Ces forêts plantées sont moins résistantes aux maladies et au réchauffement, attirent moins d’oiseaux, d’insectes et on y voit moins de champignons, énumère Mathilde Panot. Et puis quel effet terrible sur le paysage quand la coupe rase a été effectuée ». « Ces pratiques ne sont plus acceptées par la société et en décalage avec les enjeux écologiques actuels, estime Sylvain Angerand. Avec cette campagne, nous voulons plus largement ouvrir le débat sur l’avenir des forêts en France ».

Plusieurs associations nationales de protection de l’environnement (notamment le WWF et France Nature Environnement) se sont emparées du sujet et ont rendu ce jeudi un rapport enrichi de 21 propositions pour « mieux préserver les forêts françaises en crise ». Parmi ces propositions figure l’encadrement strict du « développement des plantations industrielles ». D’ici la fin du mois, la députée LREM Anne-Laure Cattelot compte de son côté remettre au gouvernement un rapport et des suggestions d’action sur la « politique forestière française ». Elle aborde elle aussi la question controversée des coupes rases et de la politique sylvicole à l’heure du réchauffement. « C’est un sujet de discorde entre les intérêts économiques, écologiques et sociétaux mais je crois que c’est au pied du mur climatique que chacun pourra faire un pas vers l’autre ».

L’article du Parisien est ici.

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Le changement climatique menace la capacité de stockage du carbone des forêts tropicales

Un article de Reporterre, le 25/05/2020

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Photo d’illustration (Falco/Pixabay)

S’il avait déjà été montré que les forêts tropicales absorbent aujourd’hui un tiers de carbone en moins que dans les années 1990, une nouvelle étude, publiée le 21 mai dans la revue Science, montre que l’augmentation de la température terrestre réduit la durée durant laquelle le carbone absorbé par les forêts tropicales peut rester stocké dans le sol.

Cette diminution de la capacité de stockage des arbres des forêts tropicales est due à leur « sensibilité thermique », selon l’équipe de chercheurs. Lorsqu’ils sont exposés à un climat trop sec et chaud, ils grandissent plus lentement, voire meurent. Ils relâchent ainsi prématurément dans l’atmosphère le carbone qu’ils ont absorbé au cours de leur vie. « Le stock de carbone contenu dans ces forêts reste stable jusqu’à une température diurne seuil de 32 °C. Au-delà de ce seuil, ce stock diminue très fortement », précise Bruno Hérault, coauteur de l’étude et spécialiste des forêts tropicales dans l’unité Forêts & Sociétés au Cirad (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement).

Les chercheurs ayant participé à cette étude craignent que le changement climatique ne réduise considérablement la capacité de stockage du carbone des forêts tropicales. Selon eux, les objectifs formulés dans l’Accord de Paris sont insuffisants. « Si nous limitons les températures moyennes mondiales à une augmentation de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels, cela pousse près des trois-quarts des forêts tropicales au-dessus du seuil de température que nous avons identifié, explique Martin Sullivan, l’auteur principal de la publication, chercheur à l’Université de Leeds et à l’Université métropolitaine de Manchester. Toute nouvelle augmentation de la température entraînera des pertes rapides de carbone forestier en zone tropicale. »

L’article de Reporterre est ici.

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Développer les énergies renouvelables est favorable à la relance économique

Un article de Novethic, par Concepcion Alvarez, le 04/06/2020.

Le développement des énergies renouvelables pourrait tout à la fois relancer l’économie et prévenir le monde d’une nouvelle crise, climatique cette fois. C’est ce que croit l’Agence internationale des énergies renouvelables. Dans un nouveau rapport, elle développe plusieurs scénarios de transition. Parmi les plus ambitieux, les externalités positives sur la santé et l’environnement seraient jusqu’à huit fois plus importantes que le surcoût engendré, tout en créant massivement de l’emploi et du PIB. Cela vaut le coup d’essayer !

Hand holding light bulb in front of global show the world's consumption with icons energy sources for renewable, sustainable development. Ecology concept

Avec des scénarios de transition ambitieux, les externalités positives pourraient être jusqu’à huit fois plus importantes que les surcoûts engendrés. iStock

La crise du Covid-19 peut être l’occasion de sortir des énergies fossiles et développer massivement les énergies renouvelables pour atteindre les objectifs climatiques internationaux tout en relançant la croissance économique, estime l’Agence internationale des énergies renouvelables (Irena), dans la première édition de son Panorama mondial des énergies renouvelables, publié en avril (1). L’Irena y développe plusieurs scénarios de réduction des émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2050, en comparant les surcoûts aux bénéfices sur la santé et l’environnement.

Le scénario énergétique dit « planifié », qui s’appuie sur les contributions nationales climatiques des pays, suppose un investissement de 95 000 milliards de dollars. Le scénario de transformation, qui permettrait de limiter le réchauffement global à 2°C d’ici la fin du siècle en réduisant les émissions de 70 % entre aujourd’hui et 2050, induit un investissement supplémentaire de 19 000 milliards de dollars. Mais les externalités positives engendrées sont estimées entre 50 000 et 142 000 milliards de dollars, soit de 3 à 8 fois le surcoût.

Encore plus ambitieux, le scénario de décarbonation profonde de l’énergie (zéro émission entre 2050 et 2060) suppose un surcoût de 35 000 à 45 000 milliards de dollars pour des bénéfices évalués entre 62 000 et 169 000 milliards de dollars, soit entre 1,5 et 5 fois l’investissement supplémentaire consenti. Ce scénario permettrait en outre de viser 1,5°C de réchauffement d’ici la fin du siècle.

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Au niveau mondial, ce sont 42 millions d’emplois supplémentaires qui pourraient être créés d’ici 2050, principalement en Asie. La croissance mondiale serait en hausse de 2,4 % par rapport au scénario planifié. Là encore, l’Asie mais aussi l’Union européenne, seraient les grandes régions gagnantes, tandis que le Moyen-Orient, l’Afrique du Nord ou l’Océanie verraient leur PIB reculer.

Pour réussir la transition énergétique, l’Irena préconise l’électrification, une meilleure flexibilité du système, le maintien des énergies renouvelables conventionnelles comme l’hydraulique, la géothermie et le solaire thermique et le développement de l’hydrogène vert.

Une autre étude (2), réalisée par plusieurs universités anglaises, montre également que « que les projets verts plus d’emplois, génèrent des rendements à court terme plus élevés et conduisent à des économies de coûts à long terme accrues par rapport aux mesures de relance traditionnelles ». Ils ont passé en revue plus de 700 politiques de relance économique lancées pendant ou depuis la crise financière de 2008.

« La réduction des émissions initiée par COVID-19 pourrait être de courte durée », a déclaré Cameron Hepburn, auteur principal et directeur de la Smith School of Enterprise and Environment de l’Université d’Oxford. « Mais ce rapport montre que nous pouvons choisir de reconstruire mieux, en conservant bon nombre des améliorations récentes que nous avons vues en matière d’air plus pur, de retour de la nature et de réduction des émissions de gaz à effet de serre. »

L’article de Novethic et son infographie sont ici.

(1)  Voir le rapport de l’Irena

(2)  Voir l’étude de plusieurs universités anglaises sur les plans de relance post-2008

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Total se rêve en vert ? Les associations détruisent son écoblanchiment

Un article de Reporterre, par Justine Guitton-Boussion, le 29/05/2020.

Le groupe pétrolier et gazier Total tient son assemblée générale des actionnaires ce vendredi 29 mai. L’entreprise a récemment publié de nouveaux engagements climatiques, vertement critiqués par les associations de protection de l’environnement. Elles dénoncent une stratégie de communication trompeuse depuis plusieurs années.

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Siège social de Total, à Paris-la Défense.

La question climatique devrait s’inviter au débat de la traditionnelle assemblée générale des actionnaires de Total, ce vendredi 29 mai. Depuis quelques années, la stratégie de communication environnementale de l’entreprise pétrolière et gazière a bien évolué. « Total a découvert le climat en 2016, avec la première publication de son rapport climat », rappelle Lucie Pinson, directrice de l’association Reclaim finance. Avant cette date, le groupe français se contentait de mentionner rapidement les risques environnementaux de ses activités dans des bilans non dédiés à la question.

Mais l’Accord de Paris de 2015, qui vise à limiter le réchauffement de la planète à 2 °C voire 1,5 °C [1], a changé la donne. La société civile et les actionnaires de l’entreprise ont pris conscience des enjeux environnementaux et ont demandé des changements aux multinationales. La stratégie de communication de Total s’est alors mise en marche. « Le groupe a annoncé des engagements climatiques, qui sont depuis régulièrement mis à jour, poursuit Lucie Pinson. Cependant, on y trouve toujours les mêmes problèmes. »

Depuis 2016, l’entreprise affirme avoir l’ambition de devenir « la major de l’énergie responsable » (elle fait partie des six plus grosses entreprises du secteur à l’échelle mondiale) et répète qu’elle « s’applique à réduire les émissions de gaz à effet de serre issues de ses activités ». Pourtant, la firme continue d’investir massivement dans les énergies fossiles, cause principale des émissions de CO2. « En 2018, plus de 90 % des investissements de Total allaient dans des hydrocarbures (pétrole et gaz), indique Cécile Marchand, chargée de campagne climat des Amis de la Terre. La majeure partie de leur business est de continuer à explorer de nouvelles réserves de pétrole et gaz, de les transporter, de les raffiner et de les vendre. Et ils ne comptent pas du tout changer cette stratégie. »

Des « fausses solutions » pour faire oublier les investissements dans les énergies fossiles

Récemment, le groupe a lancé de nouveaux projets d’exploitation de réserves pétrolières en Ouganda, et de gaz naturel liquéfié (GNL) au Mozambique. Il est d’ailleurs accusé de violer les droits humains des communautés vivant à proximité de ces installations. Mais Total légitime une partie de ces investissements en clamant que le gaz naturel — pourtant une énergie fossile — est une énergie de transition. « Il représente une excellente alternative au charbon dans la génération électrique et un complément flexible bon marché pour les énergies renouvelables intermittentes et saisonnières », écrit la multinationale dans son Rapport climat 2019 [2]. Une aberration pour les associations environnementales.

« Aujourd’hui, on a beaucoup de mal à mesurer les fuites de méthane liées à l’exploration du gaz, à son transport, etc., dit Cécile Marchand à Reporterre. Or le méthane est un gaz à effet de serre qui est beaucoup plus émetteur que le CO2 à courte échéance, alors que ce sont les vingt prochaines années qui vont être importantes pour agir contre le dérèglement climatique. » D’après le rapport Carbon Majors de 2017 [3], Total fait partie des entreprises contribuant le plus au réchauffement de la planète dans le monde.

FILE PHOTO: Demonstrators wearing yellow vests, a symbol of a French drivers' protest against higher fuel prices,  block the access to the Total biodiesel refinery at La Mede near Fos-sur-Mer

Raffinerie Total de La Mède (Bouches-du-Rhône), le 22 novembre 2018. Jean-Paul Pelissier / REUTERS

Pour détourner l’attention de ces investissements dans les énergies fossiles, le groupe affiche une écologie de façade et propose des « fausses solutions », selon les associations de protection de l’environnement. « Nous devrons investir dans les puits de carbone naturels [la reforestation] et dans les technologies de capture de CO2 », a par exemple affirmé Patrick Pouyanné, PDG de Total, dans un entretien accordé au Figaro le 5 mai. « Les techniques de [capture et de séquestration de carbone] sont encore au stade de recherche et développement, note le collectif Notre affaire à tous dans un rapport [4] dédié à firme française. Leur prise en compte, aujourd’hui, relève donc plus de la spéculation voire de l’incantation que d’une stratégie sérieuse d’atténuation du changement climatique. »

Enfin, depuis plusieurs années, Total a axé sa stratégie de communication sur les énergies renouvelables. « Jusqu’à présent, le groupe s’est plutôt illustré en rachetant des entreprises d’énergies renouvelables déjà existantes, observe Lucie Pinson. On pourrait se dire que c’est bien, qu’il va avoir la possibilité de les faire grossir, mais jusqu’ici, ça a surtout permis à Total de faire diminuer la part relative du fossile dans son mix énergétique, sans la réduire de manière absolue. »

Les investisseurs veulent que le groupe contribue plus fortement à l’atteinte de l’Accord de Paris

En outre, la multinationale de Patrick Pouyanné entretient la confusion sur certains de ses chiffres. Le collectif Notre affaire à tous relève que dans ses annexes aux comptes consolidés, Total indique que le New Policies Scenario (NPS) établi par l’Agence internationale de l’énergie (AIE) est « le scénario principal retenu par le groupe » [5]. Or ce scénario mène à un réchauffement global compris entre 2,7 °C et 3,3 °C, bien loin de l’objectif de 1,5 °C à 2 °C de l’Accord de Paris.

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En janvier 2020, Notre affaire à tous a assigné Total devant la justice. Le collectif demandait au tribunal judiciaire de Nanterre d’obliger la multinationale française à reconnaître les risques générés par ses activités et de s’aligner sur une trajectoire compatible avec une limitation du réchauffement climatique à 1,5 °C. En outre, Notre affaire à tous a déposé deux signalements auprès de l’Autorité des marchés financiers, le 15 mars puis le 28 mai : ils estiment que Total ne rend pas suffisamment compte des risques financiers liés à la dépendance de son modèle économique (axé sur les hydrocarbures), ni des risques d’une possible dépréciation très forte de ses actifs, mettant ainsi en péril les actionnaires.

Ces derniers commencent à mesurer l’incompatibilité des projets de Total avec la lutte contre le dérèglement climatique. Pour la toute première fois, un groupement de onze investisseurs européens a déposé un projet de résolution portant sur le climat, en vue de le proposer à l’assemblée générale de ce 29 mai. Ils demandent à Total de modifier ses statuts « afin de renforcer la contribution de son modèle économique à l’atteinte de l’Accord de Paris ». Ils souhaitent aussi que l’entreprise pétrolière précise un plan d’action avec des étapes intermédiaires pour fixer des objectifs de réduction en valeur absolue, à moyen et long terme, de ses émissions directes ou indirectes de gaz à effet de serre.

Sous leur pression, Total a publié le 5 mai de nouvelles ambitions climatiques… largement insuffisantes, selon les associations environnementales. Le groupe a annoncé un objectif de neutralité carbone (zéro émissions nettes) pour ses opérations mondiales en 2050 ou avant. Mais cet objectif ne concerne que les « scopes 1 et 2 » (émissions directes et indirectes, comme le montre le schéma ci-dessus). « En ce qui concerne Total, le scope 3 représente 90 % des émissions de gaz à effet de serre de l’entreprise, dénonce Greenpeace France. Ce sont les émissions de carbone liées à la vente de carburant. […] Cet objectif est un leurre, cela ne permettra pas à Total de s’aligner sur l’Accord de Paris. »

Des annonces climatiques loin d’être ambitieuses

Total s’engage également à atteindre en Europe une neutralité carbone en 2050 ou avant, cette fois sur les trois scopes — mais uniquement en Europe. « L’Europe est déjà engagée à atteindre une neutralité carbone en 2050, donc de toute façon ils sont obligés de le faire ! » s’exclame Edina Ifticene, chargée de campagne pétrole à Greenpeace France. Total répond : « L’Europe pèse pour 60 % des émissions (scope 3) de Total. Cela inclut notre réseau de stations, les raffineries européennes, etc. C’est un effort considérable et ce n’est ni une aberration, ni négligeable. »

Enfin, le groupe pétrolier affirme son « ambition » de réduire de 60 % ou plus de l’intensité carbone des produits énergétiques de Total utilisés dans le monde par ses clients d’ici 2050. « L’intensité carbone, ce sont les émissions de carbone émises par rapport à un baril de pétrole, précise Edina Ifticene. Pour que ce soit ambitieux, il faudrait qu’ils s’engagent en se référant au volume de valeur absolue, c’est-à-dire la quantité concrète de carbone émise dans l’atmosphère. »

Les annonces de Total — qui ne les engagent en rien puisqu’elles ne sont pas encore inscrites dans leur plan de vigilance — sont donc largement moins ambitieuses que le projet de résolution déposé par les investisseurs, qui plaide pour une neutralité carbone mondiale, trois scopes compris. Le conseil d’administration de Total a accepté de présenter la résolution au vote lors de l’assemblée générale, mais a annoncé qu’il n’y donnera pas son agrément. C’est bien le scope 3 qui pose problème. « Rendre le groupe responsable des émissions de CO2 de ses clients, sur lesquelles il n’a pas de levier ni de moyen d’action, créerait un risque juridique inacceptable qui pourrait nourrir des contentieux et limiterait la capacité de Total à se développer », a affirmé le PDG Patrick Pouyanné dans un entretien accordé au Revenu. Citant un investisseur anonyme, le site Climatico révèle que la multinationale a fait « une pression monstre » ces derniers jours pour décourager les actionnaires de voter en faveur du projet de résolution. La branche BNP Paribas AM a d’ores et déjà fait savoir qu’elle s’abstiendra lors du vote. Pour Reclaim Finance il s’agit d’une « manière polie de signaler au pétrolier que ses dernières mesures climat sont très insuffisantes face aux enjeux ».

Tous les regards vont donc se tourner vers l’assemblée générale, ce 29 mai. « La résolution ne sera jamais votée, prévoit Lucie Pinson de Reclaim Finance. Mais ce sera intéressant de voir à quel niveau elle sera soutenue. Si elle obtient 10 % des votes, ce sera déjà énorme. » Il s’agirait d’un désaveu de la part d’une partie des investisseurs. Un désaveu qui pourrait, qui sait, mener au désinvestissement des actionnaires sur le long terme.

L’article de Reporterre est ici.

[1] Par rapport aux niveaux préindustriels d’ici la fin du 21e siècle.

[2] Voir page 28 du rapport.

[3] Voir page 8 du rapport.

[4] Voir page 3 du rapport.

[5] Voir page 1 du rapport.

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Nord et Pas-de-Calais face au spectre d’une nouvelle sécheresse

Un article de La Voix du Nord, par Christian Canivez, le 27/05/2020.

Ensoleillement record, températures en hausse, déficit de pluie… les voyants commencent à se mettre à l’orange dans le Nord et le Pas-de-Calais, figurant d’ores et déjà parmi les 53 départements français où l’on craint une nouvelle sécheresse cette année.

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Le déficit en eau commence sérieusement à inquiéter. Photo Baziz Chibane – VDNPQR

Ils se sont mis à tournoyer au-dessus de la parcelle de maïs. Ailes noires dans un ciel d’un bleu immaculé. Une escadrille de corbeaux. Oiseaux à la réputation d’être de mauvais augure. Déjà dévastateurs en tout cas : « Les terres sont tellement sèches que les corvidés viennent manger les semis sans difficulté. Ça pose un vrai problème », témoigne Sébastien Delahaye, agriculteur et éleveur à Templeuve, dans la Pévèle.

Un problème qui n’est en vérité qu’un effet collatéral d’un déficit en eau qui commence sérieusement à inquiéter notre homme. Lui et toute la profession. Lui et tous ceux qui ont déjà constaté, dans leur jardin ou leur terrain, une pelouse déjà jaunie.

« L’an dernier, on avait déjà subi la sécheresse, vers le mois de juillet. Mais là ça vient très tôt. On n’est que fin mai. C’est très préoccupant. » relève Sébastien, qui fait vivre avec son père l’exploitation familiale, plus de 200 bovins et 90 hectares de polyculture (blé, betterave, maïs fourrager). « On a fait -20 % dans notre première coupe de fourrages. Si ce temps sec et chaud, accompagné d’un vent qui dessèche, continue, cette année sera très difficile. Il va falloir acheter des fourrages supplémentaires pour nourrir nos bêtes, consommer davantage d’eau. » Et l’éleveur de s’inquiéter pour les rendements, et au-delà pour la fertilité de ses animaux. « L’an dernier, pour nos cultures, il nous a déjà manqué 200 litres d’eau au mètre carré en pluviométrie. Si le scénario se répète, ça va être très dur ».

Les prévisionnistes de MétéoFrance et les analystes du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) ne rassureront personne en la matière. L’hiver a été exceptionnellement doux, le printemps hors norme non seulement en matière d’ensoleillement (le record d’avril 2007 est égalé dans la région), mais encore de températures : en avril ces dernières étaient supérieures de 3º aux normales dans la région, avec par exemple 26º enregistrés à Roubaix le 8 avril, 26,1º à Watten le 12… Il n’a jamais fait aussi chaud aussi tôt dans l’année, relève MétéoFrance. Chaud et sec (lire ci-dessous). Et c’est justement ce que l’on attend aussi pour juin et juillet selon les prévisions saisonnières.

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Courons-nous droit vers une nouvelle sécheresse et de nouvelles restrictions à la clé, comme l’an dernier ? Sébastien Delahaye en est convaincu. Le ministère de la Transition écologique a déjà placé 53 départements en risque sécheresse, le Pas-de-Calais à un niveau de risque « probable » et celui du Nord à un niveau « possible ». La prise d’arrêtés sécheresse par les préfets ne semble être qu’une question de jours…

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Déficit de pluie, débit des cours d’eau en baisse, nappes en vidange, ces signaux qui alertent…

Dans son bulletin hydrologique mensuel, la Direction régionale de l’environnement de l’aménagement et du logement (DREAL) pointe des signes avant-coureurs d’un épisode de sécheresse.

Déficit de pluie. Les cumuls de précipitations en avril sont d’environ 40 % déficitaires par rapport à la normale, malgré des épisodes orageux avec de violentes averses les 17 et 18 avril. On relève ainsi un cumul de 16mm de pluie à Cambrai-Epinoy (67 % de déficit) ; 27,8 mm à Desvres (contre 66,3 mm par rapport à la normale en avril) ; 25,9 mm à Fourmies (contre 61,2) ; 41,1 mm à Lille (contre 50,7).

Débits des cours d’eau en baisse. En avril, le débit moyen des cours d’eau est en baisse dans les 24 stations de mesure des Hauts-de-France. Baisse vertigineuse dans l’Avesnois, à Etrœungt (Helpe-Mineure) qui passe de 4,94 m3 d’eau par seconde en mars à 0,47 m3/s en avril ; idem en Flandre, à Bambecque, sur l’Yser (5,25 m3/s en mars, 0,23 m3/s en avril).

Nappes déjà entamées. La recharge en eau est bel et bien terminée dès le mois d’avril et la vidange des nappes a débuté pour huit des quinze stations de mesures. Si les niveaux demeurent globalement proches de la moyenne, voire au dessus (Audrehem dans l’Audomarois, Preures et Buire-le-Sec dans le Ternois, Tincques dans l’Artois), la tendance est majoritairement à la baisse dans le Nord et le Pas-de-Calais.

L’article et la vidéo de La Voix du Nord sont ici.

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450 ans pour disparaître, non-recyclable… Avec les incivilités, l’utilisation des masques vire au désastre écologique

Un article de Novethic, par Marina Fabre, le 27/05/2020.

Ce sont les nouveaux mégots. Partout en France, les éboueurs retrouvent des masques chirurgicaux qui jonchent les trottoirs. Une association vient même d’en retrouver au fond de la Méditerranée. Cette situation est un vrai désastre écologique : les masques mettent 400 à 450 ans à se dégrader et ne se recyclent pas. Pour limiter les dégâts un député LR veut que l’amende encourue pour ce type de délit passe de 68 à 300 euros.

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Un masque prend 450 ans à se dégrader dans la nature. Marina Fabre

C’est un autre fléau de la crise du Covid-19. Alors que les livraisons de masques jetables arrivent enfin à bon port, depuis des semaines, les villes et éboueurs constatent que de plus en plus de masques et gants jonchent les rues de l’Hexagone. « Quand certains sortent des transports en commun où le masque est obligatoire, ils s’en débarrassent aussitôt », explique Dominique Lemesle, directeur général délégué chargé des services urbains à Lyon. Et du trottoir à la mer, il n’y a qu’un pas.

L’association Opération mer propre vient en effet d’en retrouver au fond de la Méditerranée. « On les attendait, ils sont arrivés, mais pas au bon endroit », ironise l’association sur son compte Facebook. « Si rien ne change, ça va devenir un vrai désastre écologique et peut être même sanitaire », explique le plongeur Laurent Lombard. Il faut dire que ces « nouveaux mégots » sont des déchets très polluants qui prennent de 400 à 450 ans à se dégrader selon plusieurs associations.

Un risque de contamination

« Un masque par terre, en plus de générer une pollution, c’est une rupture dans notre chaîne commune de protection face au virus, car c’est potentiellement un déchet infecté que l’on met dans l’espace public », explique le cabinet de la secrétaire d’État auprès de la ministre de la Transition écologique et solidaire, Brune Poirson, dans L’Obs. « Il y a quelque chose d’assez paradoxal à chercher à se protéger soi-même du virus tout en participant potentiellement par ailleurs à sa propagation ». 

Face à cette situation, le ministère a lancé une campagne de sensibilisation concernant la gestion des masques usagés. L’affiche indique une démarche en trois étapes pour éviter la pollution et la contamination : il faut d’abord placer son masque dans un sac poubelle dédié, le conserver 24 heures puis le jeter dans un sac pour ordures ménagères.

Organiser d’urgence une filière de recyclage

De plus, les masques chirurgicaux, en matière thermoplastique, ne se recyclent pas. « Il y a eu pas mal d’incompréhension, certains pensant que c’était recyclable », explique à l’AFP Marc-Antoine Belthé, directeur du développement chez Veolia Recyclage. « En termes de volume, ça pèse peu, mais on a vu arriver d’un seul coup et très régulièrement ces déchets « porteurs de risques pathogènes ». D’où la demande début mai de 27 députés LREM demandant à la ministre Brune Poirson, dans une lettre, d’organiser une filière de récupération et de recyclage des masques « dans les meilleurs délais » afin d’assurer « un réemploi des masques qui permettrait d’éviter un énorme gâchis de matières ». 

En attendant, pour que chaque citoyen prenne ses responsabilités, le député LR des Alpes-Maritimes Eric Paugret a déposé une proposition le 18 mai pour lutter contre les incivilités liées aux masques et gants jetés sur la voie publique. Il demande ainsi que l’amende passe de 68 à 300 euros. « La France vient de commander un milliard de masques », explique-t-il à France Info. « Cela veut dire que dans les semaines qui arrivent, ils vont devenir un objet qui va se populariser de manière très forte. Il y a un enjeu sanitaire, car les masques sont potentiellement contaminants. Et il y a surtout un enjeu environnemental en termes de pollution », résume-t-il.

L’article de Novethic est ici.

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La Chine fait main basse sur le bois du Limousin

Un article de France 3 Nouvelle Aquitaine, par Gwenola Beriou, le 30/03/2020.

Ces dernières années, les exportations de chêne et de châtaignier français vers la Chine ont bondi de 35%. Résultat : les scieries limousines ne fonctionnent plus au maximum de leurs capacités, faute de matière première.

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© F3 – Maxence Régnault

La filière bois en France tire la sonnette d’alarme. Lentement, mais sûrement, la concurrence chinoise est en train d’étouffer nos petites scieries et de menacer la filière française de fabrication de parquets et de meubles.

A La Chapelle-Montbrandeix, en Haute-Vienne, la scierie Mazières emploie une quarantaine de salariés et génère une vingtaine d’emplois indirects. Mais aujourd’hui, elle ne tourne qu’à 80% de ses capacités et doit limiter le recours aux emplois intérimaires.
En cause : la diminution de la ressource en bois qui ne cesse de diminuer pour les scieries françaises : de 2,5 millions de tonnes en 2007 à 1,3 million aujourd’hui.

En dix ans, les exportations de feuillus vers la Chine ont explosé : de 50 000 tonnes en 2007 à 500 000 tonnes aujourd’hui. Depuis quelques années, le géant asiatique a jeté son dévolu sur cette essence noble, afin de répondre à la forte demande de la nouvelle classe moyenne chinoise. Parallèlement, le pays a décidé de stopper la surexploitation de ses forêts et cherche désormais à s’approvisionner sur les marchés extérieurs.
Conséquence directe de cette concurrence pour la filière française : 26 000 emplois seraient menacés, et le prix du chêne flambe (+60% en dix ans).

L’article et la vidéo de France 3 sont ici.

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Ouverture précipitée de la chasse : plus de 78.000 personnes s’y opposent

Reporterre  Un article de Reporterre, le 22/05/2020.

Vendredi 22 mai 2020 – Des associations opposées à la chasse et de protection des animaux ont lancé une pétition qui demande au gouvernement de ne pas rouvrir la chasse trop rapidement. Dans cette pétition, déjà signée au 22 mai par plus de 56.000 personnes sur internet, les signataires s’inquiète de voir la précipitation avec laquelle le gouvernement veut ré-ouvrir la chasse dès le 1e juin prochain, alors que la pandémie du Sars-Cov-2 n’est pas achevée.

« Le gouvernement cherche à profiter de l’état d’urgence sanitaire », explique la pétition, pour assouplir les procédures de fixation des périodes de chasse. Or, l’autorisation précipitée de la chasse « n’a aucune justification sanitaire et qui ne participe donc pas à la lutte contre la pandémie de Covid-19 ».


Actualisation – Samedi 23 mai, 10h00 – Le nombre de signataires dépasse maintenant 59.000.

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Cette pétition a suscité une réaction étonnante de la Garderie fédérale de France, qui regroupe les agents de développement assermentés des Fédérations départementales des chasseurs en France. Sur son compte twitter, cet organisme a diffusé vendredi 22 mai au soir une image affirmant que la chasse n’est pas « un vrai problème touchant le pays » et qu’il ne faut pas « toucher à [la] passion » des chasseurs.


Actualisation – Lundi 25 mai, 09h00 – Le nombre de signataires dépasse maintenant 64.000.


Actualisation – Samedi 30 mai, 12h00 – Le nombre de signataires dépasse maintenant 78.000.


Actualisation – Lundi 01 juin, 11h00 – Le nombre de signataires dépasse maintenant 87.000.

Au final, le nombre de signataires est de 155.433



L’article de Reporterre est ici.

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La baisse des émissions de CO2 due au Covid-19 devrait se répéter chaque année pour atteindre nos objectifs climatiques

Un article de Novethic, par Concepcion Alvarez, le 26/05/2020.

Selon deux études publiées récemment, la baisse des émissions de CO2 depuis le début de l’année atteint 8,5 % par rapport à 2019. Sur l’ensemble de l’année 2020, leur diminution pourrait atteindre 7,5 %. C’est ce qu’il faudrait réaliser chaque année, d’ici 2030, pour espérer contenir le réchauffement global sous la barre des 1,5°C, conformément aux objectifs de l’Accord de Paris.

Achieve zero co2 emission

Sur l’ensemble de l’année, la baisse pourrait être comprise entre 4,2 % et 7,5 % par rapport à 2019, en fonction des mesures de déconfinement. (iStock)

Sur les quatre premiers mois de l’année, les émissions de CO2 mondiales ont baissé de 8,5 %, selon une étude publiée par la Cornell University (1). Une chute historique ! Sur l’ensemble de l’année, la baisse pourrait être comprise entre 4,2 % et 7,5 % par rapport à 2019, en fonction des mesures de déconfinement et du degré de retour à la vie normale. À titre de comparaison, l’ONU environnement estime que pour limiter le réchauffement global à 1,5°C, il faudrait réduire nos émissions de CO2 de 7,6 % par an, d’ici 2030.

Cela laisse entrevoir l’immensité des efforts qu’il faudrait réaliser pour atteindre les objectifs de l’Accord de Paris. En somme, il faudrait une baisse de ce type chaque année. C’est pourquoi les experts rappellent qu’il ne faut pas se réjouir trop vite de cette chute inédite des émissions et recommandent des investissements massifs dans la transition bas-carbone, la rénovation énergétique et la mobilité propre.

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Une goutte d’eau

« Le confinement de la population a entraîné des changements profonds dans l’utilisation de l’énergie et les émissions de CO2 », a déclaré Corinne Le Quéré, auteure principale d’une autre étude sur la chute des émissions de CO2 liée au Coronavirus et publiée dans la revue Nature Climate Change (2). « Mais ces chutes seront probablement temporaires, car elles ne reflètent pas des changements structurels dans les systèmes économiques, de transports ou énergétiques », ajoute celle qui préside le Haut Conseil pour le Climat français.

Le site Carbon Brief rappelle ainsi que sans le confinement « la quantité totale de CO2 dans l’atmosphère aurait augmenté de 0,68 % en 2020, par rapport à la moyenne mondiale de 2019 ». Avec la pandémie, l’augmentation sera de 0,60 %… Une goutte d’eau ! « C’est comme réduire le débit du robinet sur une baignoire. L’eau monte toujours, mais juste moins vite », souligne Richard Betts, directeur des études sur les impacts climatiques à l’Office national de météorologie britannique.

« Une légère réduction des émissions de CO2 ne réduit pas immédiatement les concentrations atmosphériques, elle ne fait que ralentir le taux d’augmentation. Pour que le CO2 cesse de s’accumuler dans l’atmosphère, les émissions d’origine humaine devraient baisser d’environ 50 % à court terme (les puits naturels compensant déjà environ 50% des émissions). Les réductions d’émissions devraient être encore plus importantes à long terme, car les puits s’affaibliront si le CO2 commence à se stabiliser » prévient Carbon Brief dans une note (3).

L’article de Novethic et l’infographie sont ici.

(1) Voir l’étude de Cornell University (les résultats sont régulièrement mis à jour)

(2) Voir l’étude publiée dans la revue Nature Climate Change

(3) Voir la note de Carbon Brief

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À la télé – Pesticides, la tension monte

Un article de Reporterre, le 20/05/2020.

Tous les ans, 65.000 tonnes de pesticides sont utilisées en France, l’un des plus hauts niveaux mondiaux de consommation de produits phytosanitaires. Alors que la tension monte entre agriculteurs et riverains, maires et pouvoirs publics, pro et anti-pesticides, le magazine « Réseau d’enquêtes » diffuse « Pesticides, le débat empoisonné », mercredi 20 mai 2020 à 23 h 15 sur France 3. (visible en replay)

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Photo d’illustration. Sébastien Jarry / MAXPPP

  • Présentation du film par son producteur :

Des rapports accablants ont dénoncé l’effet extrêmement nocif des pesticides sur notre santé et notre environnement. Les politiques ne sont pas avares de déclarations choc en la matière, mais leurs propositions d’action, souvent controversées, restent également bien timides.

Avant d’arriver dans nos assiettes, certains produits reçoivent jusqu’à 35 traitements phytosanitaires ! Manger sain est devenu un vrai défi quotidien. Il y a ceux qui se ruent sur les produits bio, ceux qui consomment les fruits et légumes traditionnels, ceux qui privilégient l’agriculture locale… Alors ? Que choisir ?

Charles-Henry Boudet est parti à la rencontre de plusieurs agriculteurs français. Parmi eux, certains défendent une agriculture raisonnée. « On utilise une grande partie de produits bioconformes et une infime partie à base de synthèse. » Ici, vous l’aurez compris, le mot « pesticide » est banni. Mieux vaut éviter les polémiques, surtout avec un lotissement implanté à moins de huit mètres sur un terrain voisin jusqu’alors agricole. « Je ne vois pas pourquoi le monde agricole devrait reculer alors que c’est la ville qui s’approche. Il faut discuter. » Discuter. Et trouver des solutions… vite.

Du côté de cet agriculteur bio, Gérard Daumas, « c’est une détresse profonde qu’ils ressentent car ces agriculteurs ne savent pas les conséquences de ces produits qu’ils épandent. Et ne savent comment faire pour revenir en arrière ». Ignorance ? Détresse ? Un peu des deux ? Un viticulteur se justifie — « on est obligé, la vigne, si on ne la soigne pas, on ne produit pas ! » —, avant d’implorer aux consommateurs de lui faire confiance…

À Langouët, une petite commune près de Rennes, Daniel Cueff, son maire, a choisi de rompre le silence. Il a défié l’État avec un nouvel arrêté imposant une distance de 150 mètres entre les champs et les maisons du village. Son initiative a été imitée par d’autres maires et saluée par des lettres de soutien reçues en masse : « On a osé poser la question publiquement d’un modèle agricole qui empoisonne la planète, les citoyens, les agriculteurs. »

Nicole Duperron, une habitante du village, vit à côté d’un champ en limite de sa propriété. Des analyses ont révélé chez elle un taux de glyphosate dix fois supérieur à la moyenne. Son voisin agriculteur lui demande de lui laisser du temps… Il y a pourtant urgence. Et Paul François, céréalier en Nouvelle-Aquitaine, peut en témoigner. Il est le premier agriculteur à avoir porté plainte contre Monsanto en 2007, après voir inhalé un pesticide maintenant interdit. Aujourd’hui, après un coma, des séquelles neurologiques et un long combat judiciaire, l’agriculteur a choisi de changer son modèle agricole pour se tourner vers le bio. « Je me sens bien. J’ai retrouvé plaisir à être agriculteur. On retrouve une liberté et un bien-être au milieu de ses champs. »

Un véritable cri d’espoir. Reste à convaincre les exploitants d’aujourd’hui de suivre ce chemin. Et, surtout, de leur en donner les moyens. Devant le lycée agricole d’Angers où sont formés les agriculteurs de demain, Matthieu Orphelin, député du Maine-et-Loire, revient sur ce métier de vocation et de passion, en proie à l’agribashing. « Je trouve que les agriculteurs ne sont pas aidés dans cette sortie de pesticides. Il faut mettre des moyens humains et financiers pour accompagner tous ces agriculteurs, il faut investir massivement. » Alors que l’interdiction du glyphosate ne cesse de tendre le débat, elle incarne aujourd’hui, et plus que jamais, le symbole d’une agriculture plus raisonnée.

  • Magazine produit avec les rédactions régionales de France 3 – Présentation Charles-Henry Boudet – Rédaction en chef Claire Combe – Production exécutive Grand Angle Productions – Réalisation Laetitia Vans et Jean Louis Perez

  • Pesticides, le débat empoisonné, Réseau d’enquêtes, mercredi 20 mai 2020 à 23 h 15 sur France 3

L’article de Reporterre est ici.

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L’UE veut diviser par 2 l’usage des pesticides et amplifier l’agriculture bio

Un article de Boursorama, le 20/05/2020.

BRUXELLES (Reuters) – L’Union européenne doit diviser par deux l’usage des pesticides dans l’agriculture tout en augmentant les cultures biologiques, a déclaré mercredi le commissaire européen au climat, Frans Timmermans, un volonté saluée par les groupes de défense de l’environnement mais accueillie avec scepticisme par les lobbies agricoles.

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Frans Timmermans, commissaire européen au climat.

L’agriculture contribue au changement climatique, en rejetant 10% des émissions européennes de gaz à effet de serre, tout en étant l’une des principales victimes de ses conséquences, qu’il s’agisse des épisodes de sécheresse ou des inondations.

La Commission européenne dit souhaiter restaurer les écosystèmes naturels tout en accompagnant le secteur agricole vers son objectif de zéro émission nette de CO2 d’ici 2050. « Si la crise du coronavirus nous apprend quelque chose, c’est qu’il faut revoir nos relations avec l’environnement naturel (…) », a dit Frans Timmermans.

L’exécutif européen souhaite que l’usage de pesticide soit réduit de moitié, que celui des engrais diminue de 20% et de faire baisser de 50% les ventes d’antimicrobiens d’ici 2030. Il suggère aussi de revoir la gestion des sols de manière à ce que l’agriculture biologique représente 25% du secteur en 2030 tout en transformant 10% des terres agricoles en paysages de « haute diversité » en favorisant les haies et les zones humides.

Ces objectifs n’ont pour l’heure aucune valeur contraignante pas plus qu’ils ne seront soumis à des études d’impact, a prévenu la Commission. Les lobbies agricoles rappellent de leur côté que les cultures biologiques ont des rendements moindres que l’agriculture conventionnelle et que le retour des clôtures risque de les empêcher de s’adapter aux évolutions de la demande.

(Kate Abnett et Marine Strauss; version française Nicolas Delame)

L’article de Boursorama est ici.

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2020, « l’année de tous les dangers » pour le secteur associatif

Un article de Reporterre, par Hortense Chauvin, le 19/05/2020.

Les mesures de confinement ont aussi pénalisé le secteur associatif, qui a dû mettre à l’arrêt la plupart de ses activités rémunératrices. De nombreuses associations, notamment environnementales, craignent désormais que les dons ne se raréfient avec la crise économique, ce qui mettrait en péril la poursuite de leurs actions.

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« 2020, c’est l’année de tous les dangers. » À l’évocation de la situation économique de la Ligue de protection des oiseaux (LPO), son directeur général, Yves Verilhac, ne cache pas son inquiétude. Comme un grand nombre d’associations, la LPO a été fortement affectée par la crise sanitaire et les mesures de restriction mises en place par le gouvernement. « C’est une année qui va être très, très compliquée pour nous », confie-t-il.

Une récente enquête du Mouvement associatif, l’organe représentatif des associations françaises, montre que la LPO n’est pas la seule à craindre pour son avenir : 40 % des associations employeuses se déclarent inquiètes quant à leurs difficultés de trésorerie. Près d’un quart des répondants affirment disposer d’à peine trois mois de budget devant eux. Les associations sociales et environnementales sont les plus touchées.

« Les bénévoles qui comptaient pour nous les outardes n’ont pas eu le droit de sortir » 

Cette situation s’explique avant tout par la mise à l’arrêt de la plupart de leurs activités rémunératrices. Depuis la mise en place du confinement, seulement 22 % des associations ont réussi à maintenir une activité minimale. À la LPO, l’ensemble des animations à destination du grand public ont été annulées. La boutique en ligne, dont le chiffre d’affaires varie entre 2 et 3 millions d’euros, a été fermée. Les collectes de rues, qui constituent une part importante de ses revenus, ont également été interrompues. Eau et Rivières de Bretagne a elle aussi dû brutalement mettre un terme aux activités d’éducation à l’environnement qu’elle organise en milieu scolaire, qui constituent près de 40 % de ses recettes. « Ça a été un choc », raconte Arnaud Clugery, son directeur opérationnel.

Très présentes auprès des plus démunis pendant la crise, notamment à travers la distribution de plusieurs dizaines de milliers de repas, les associations gestionnaires du tiers-lieu parisien des Grands Voisins ont également vu leurs recettes fondre. « Nous avons dû fermer le bar et le restaurant, explique Axel Henry, membre de l’association Yes We Camp et habitant des Grands Voisins. Nous tirons également des revenus de la location d’espaces à des petites entreprises et des artistes, dont beaucoup sont précaires. À cause de la crise, certains ne peuvent plus payer le loyer, ce qui nous met en difficulté. » Leurs pertes s’élèvent aujourd’hui à 150.000 euros. « À l’échelle de ce projet, c’est énorme », déplore Clémence Dumanoir, membre de l’association Aurore et coordonnatrice de projets aux Grands Voisins.

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La cantine solidaire des Grands Voisins.

La situation est particulièrement difficile pour les associations naturalistes, qui ont l’habitude de réaliser au printemps leurs inventaires d’espèces. Ces derniers sont généralement rétribués par l’État ou les collectivités territoriales. En temps normal, explique Bénédicte Hermelin, directrice générale de France Nature Environnement (FNE), la plupart sont réalisés grâce au travail de bénévoles. Cette année, confinement oblige, ils n’ont pas pu se rendre sur le terrain. « Certains de nos programmes, comme celui de Suivi temporel des oiseaux communs (Stoc), risquent de pâtir de la situation, confesse Yves Verilhac. Par exemple, les bénévoles qui comptaient pour nous les outardes n’ont pas eu le droit de sortir. Nous risquons donc d’avoir quelques trous dans nos banques de données. »

« Certaines entreprises qui nous soutenaient risquent d’avoir d’autres priorités dans les mois qui viennent » 

Le directeur général de la LPO se veut néanmoins rassurant sur les conséquences de cette interruption des inventaires de la biodiversité : « Nous avons pu collecter d’autres types de données. Nous allons par exemple avoir une connaissance extraordinaire de l’avifaune des jardins grâce à l’opération “Confinés mais aux aguets”, qui nous a permis de récolter des dizaines de milliers de données que nous n’aurions pas pu avoir en temps normal », se rassure-t-il. L’association s’est également « battue » pour obtenir des dérogations gouvernementales afin de poursuivre des activités essentielles à la protection de certaines espèces menacées, comme les busards [des rapaces diurnes]. « Nous avons pu intervenir pour éviter que leurs nids ne se fassent détruire par les moissonneuses-batteuses en respectant les consignes de sécurité et les gestes sanitaires », souligne-t-il.

Parmi les associations environnementales, seules celles qui se concentrent sur le plaidoyer semblent relativement épargnées par la crise. « L’effet de la pandémie de Covid-19 n’a pas été très fort pour nous, assure Anne Bringault, responsable de la coordination des activités sur la transition énergétique au Réseau Action Climat (RAC). Nous nous sommes adaptés en organisant des points presse et des réunions avec des cabinets, des ministères et des parlementaires en ligne. » Arnaud Clugery, d’Eau et Rivières de Bretagne, confirme : « Toute la partie plaidoyer de l’association a pu rester très active pendant le confinement. » « Nous sommes plus inquiets pour les associations qui sont en lien avec le public et font de l’animation dans les écoles ou les parcs naturels », confie Anne Bringault.

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La Ressourcerie créative, aux Grands Voisins.

De nombreuses incertitudes demeurent en effet quant à l’avenir de ces dernières : si les associations employeuses ont pu bénéficier du chômage partiel et du report de leurs charges, beaucoup n’ont pas été en mesure d’obtenir de prêts garantis par l’État, selon Bénédicte Hermelin. La question du mécénat d’entreprise génère également beaucoup d’inquiétudes. « Certaines entreprises qui nous soutenaient risquent d’avoir d’autres priorités dans les mois qui viennent, explique Yves Verilhac. Nous avions déjà subi cela lors de la crise de 2008. Cette fois, ça risque d’être pire. » Bénédicte Hermelin craint également que la crise ne modifie le comportement des donateurs individuels : « Vont-ils continuer à donner pour des causes environnementales dans ces conditions ? C’est un gros point d’interrogation. »

« Il faut que le gouvernement prenne davantage en compte la question des associations dans l’après-crise » 

Selon Florian Martinez, militant à l’Union syndicale Solidaires, les employés sous contrats atypiques risquent d’être les premières victimes de cette baisse de revenus. « Le secteur associatif compte beaucoup de personnes précaires, dont la grande majorité sont des femmes, rappelle-t-il. Le taux de CDI ne dépasse pas 60 %. Avec la crise sanitaire, beaucoup de CDD, de vacations et de stages n’ont pas été renouvelés. Cette crise ne fait qu’aggraver des conditions de travail qui étaient déjà très mauvaises », regrette-t-il.

Afin de soulager les associations, certaines collectivités territoriales, comme l’Occitanie, la Nouvelle-Aquitaine et la Bretagne ont mis en place des fonds d’urgence. Le gouvernement a également publié, jeudi 7 mai, une circulaire stipulant qu’aucune sanction ne pourra être prononcée contre les associations qui, en raison de la crise, ne seront pas en mesure de réaliser des projets subventionnés. Elle recommande aux autorités administratives de décaler ces projets, voire de transformer les subventions accordées sur projet (un inventaire, par exemple) en subventions de fonctionnement. Un dispositif vital, selon Bénédicte Hermelin, mais insuffisant : « Il faut que le gouvernement prenne davantage en compte la question des associations dans l’après-crise », insiste-t-elle. Cela pourrait être fait, selon elle, en mettant en place des aides similaires à celles prévues pour le secteur du tourisme. « L’associatif permet de combler les vides laissés par les politiques publiques. Il faut absolument aider les associations à passer ce cap difficile. Sinon, cela va devenir très compliqué pour certaines d’entre elles. » 

L’article de Reporterre est ici.

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La Commission européenne mise sous pression pour allier relance économique et Green Deal

Un article de Novethic, par Concepcion Alvarez, le 18/05/2020.

Plus d’un million de citoyens, une centaine d’ONG environnementales, des dirigeants d’entreprises et 18 États membres réclament un grand plan de relance vert, au cœur duquel le Green Deal (Pacte vert) doit jouer un rôle central. Le think tank Jacques Delors propose quant à lui un plan d’investissement de 800 milliards d’euros, sur cinq ans, dans des secteurs phares, permettant à la fois la relance économique et la lutte contre le changement climatique.

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La Commission européenne doit présenter son plan de relance de l’économie ce mercredi 20 mai. @CE

Alors que la présentation du grand plan de relance européen est attendue fin mai, la pression se fait de plus en plus forte pour que celui-ci intègre en son cœur le Green Deal, le Pacte vert européen présenté en décembre dernier. La semaine dernière, le Forum économique mondial a annoncé la création d’un groupe d’action de PDG pour un pacte vert européen, présidé par le patron d’Axa, Thomas Buberl. Parmi ses membres, on trouve les dirigeants d’Ikea, de Suez, de Sanofi, de Natixis ou encore de Schneider Electric.

« Les plans de relance européens façonneront les économies et les sociétés européennes pour les décennies à venir – nous devons nous assurer qu’ils conduisent à un avenir plus vert, plus résilient et inclusif », écrivent-ils dans un communiqué. La plateforme doit permettre de soutenir des plans et des idées concrètes pour accélérer l’action climatique et stimuler les investissements du secteur privé pour la transition verte.

18 États membres engagés

Outre ces grands PDG, plus d’un million de citoyens européens et 100 ONG environnementales appellent aussi à un grand plan de relance vert. Ils demandent que le soutien aux entreprises soit conditionné, l’établissement d’un fond de redressement vert de grande ampleur, que l’investissement public et privé soit guidé par la taxonomie verte et enfin que tous les plans de redressement mettent le bien-être des personnes au centre de la réponse à la crise du coronavirus.

Par ailleurs, ce sont désormais 18 États-membres qui souhaitent que le Green Deal joue un rôle central dans le plan de relance. Signée au départ par onze ministres européens en avril, la tribune vient de convaincre la Roumanie. Neuf États ne l’ont pas signée, parmi lesquels la Pologne, la Hongrie ou encore la République tchèque. Ce qui laisse deviner les rapports de force qui vont s’affronter à Bruxelles ces prochaines semaines.

Cinq secteurs d’avenir

De son côté, le think tank Jacques Delors est allé plus loin en proposant un plan d’investissement chiffré (1). Il a identifié cinq secteurs phares pour stimuler l’économie – les bâtiments, la mobilité, l’innovation verte, l’économie circulaire et le tourisme côtier – dans lesquels l’Union européenne pourrait investir 800 milliards d’euros au cours des cinq prochaines années, « sans prendre de risque ».

500 milliards d’euros pourraient être fléchés rien que dans le secteur du bâtiment en commençant par la rénovation des écoles et des foyers en précarité énergétique, 150 milliards dans le traitement des eaux usées, 80 milliards pour soutenir le tourisme vert et créer de nouvelles aires marines protégées, ou encore 70 milliards dans les usines de batteries électriques.

« L’objectif pour l’Union européenne est de mettre sur pied le premier plan de relance aligné avec l’Accord de Paris sur le climat » a commenté l’eurodéputé Pascal Canfin. Il avait lui-même lancé une vaste coalition de parlementaires, de dirigeants et d’investisseurs pour une relance verte. Devant le Parlement européen, la semaine dernière, Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, a affirmé qu’il fallait « saisir l’occasion de bâtir une économie moderne, propre et saine qui garantisse les moyens de subsistance de la prochaine génération. »

L’article de Novethic est ici.

(1) Voir la proposition de l’institut Jacques Delors

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Des organisations écolos et paysannes dénoncent le lobbying de l’agro-industrie

Un article de Reporterre, le 14 mai 2020.

Jeudi 14 mai, des organisations — dont Greenpeace, les Amis de la Terre, la Confédération paysanne ou Générations futures — ont dénoncé dans un communiqué commun « les manœuvres menées par les partisans de l’agriculture industrielle ».

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Photo d’illustration.

« Loin de vouloir aider l’ensemble de la profession, le syndicat majoritaire [la FNSEA] et d’autres acteurs tels que les distributeurs instrumentalisent la crise pour imposer en sous-main leur vision d’une agriculture « à la française ». À coup de communication mensongère, de pression sur les agriculteurs et de tentatives de détricotage de la réglementation sanitaire et environnementale, ils conduisent l’alimentation vers une impasse et les paysans vers la précarité économique, tout ceci dans un contexte d’émergence d’une crise alimentaire majeure partout dans le monde. « 

Les organisations ont cité plusieurs exemples de manœuvres de lobbying :

  • « Des syndicats agricoles ont déposé, en pleine crise et sans concertations réelles, des chartes leur permettant de réduire de moitié les distances nationales minimales entre les zones d’épandage de pesticides et les habitations. »
  • Le 6 mai, les coopératives agricoles françaises demandaient le report d’une mesure importante sur les pesticides, à savoir la séparation de la vente et du conseil.
  • La grande distribution, en pleine crise sanitaire, a augmenté une partie de ses marges, par exemple sur la viande bovine : « Si les prix aux consommateurs sont restés stables, les prix d’achat payés aux producteurs [ont diminué] encore plus drastiquement depuis le début du confinement. »

« Cette conjonction de faits inacceptables montre à l’envi que les tenants de l’agriculture industrielle ne reculent devant rien, même devant l’instrumentalisation d’une crise sanitaire majeure pour défendre un système périmé. Pourtant cette épreuve collective devrait nous apprendre au contraire que le temps est venu pour une paysannerie fondée sur l’agroécologie. « 

Les organisations sont : CCFD-Terre Solidaire, Confédération paysanne, Fédération nationale d’agriculture biologique, Générations futures, Greenpeace, Les Amis de la Terre, Réseau Action Climat, Réseau Civam.

L’article de Reporterre est ici.

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Glyphosate : craignant une crise économique, Bayer durcit le bras de fer avec les plaignants

Un article de Novethic, par Marina Fabre, le 15/05/2020.

Malgré de bons résultats financiers liés à crise du Covid-19, Bayer ne compte pas relâcher la pression concernant le glyphosate. Au contraire, lors de l’Assemblée générale, le DG du groupe a annoncé durcir les négociations en cours avec les 52 000 personnes qui ont porté plainte concernant les effets cancérigènes du Roundup. Le risque financier est énorme pour le géant qui ne trouve pas d’issue à la crise provoquée par le rachat de Monsanto.

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Entre les plaignants du Roundup et Bayer, le combat continue. @Bayer

Les affaires sont revenues à la normale pour Bayer. C’est en tout cas ce qu’on pouvait penser en assistant à l’Assemblée générale virtuelle du géant le 28 avril dernier. Les actionnaires du groupe allemand ont voté à plus de 92 % pour la stratégie de la direction. L’année dernière, les investisseurs avaient rejeté à 55,5 % les « actions du directoire », du jamais vu. Un vote qui avait poussé le président de l’entreprise, Werner Wenning à la démission alors qu’il avait porté avec le directeur-général Werner Baumann  le rachat de Monsanto. Cette fois, le ton a changé. Il faut dire que les résultats sont particulièrement bons. Le groupe allemand enregistre une hausse de 6 % de son chiffre d’affaires pour le premier trimestre. Le Covid-19 a en effet poussé les citoyens a réalisé des stocks de médicaments.

Mais les « effets bénéfiques du Covid-19 » sur le groupe ne reflètent pas une tendance de fond. Werner Baumann a averti qu’il n’était pas capable d’évaluer l’impact de la pandémie sur ses résultats annuels. Surtout, à long terme, c’est l’ombre du glyphosate qui noircit le tableau. En l’espace de trois mois, de février à avril, le nombre de personnes ayant déposé une plainte contre Bayer concernant l’utilisation du Roundup, un herbicide à base de glyphosate, a encore augmenté, passant de 48 600 à 52 500 plaignants.

Bayer serre la vis face aux plaignants

Une hausse de plaintes qui a poussé Bayer à durcir le ton. Depuis quelques mois déjà, le géant avait entamé des pourparlers afin de régler les affaires. Mais en raison du « contexte d’une récession imminente et compte tenu, en partie, des défis considérables en matière de liquidités », le groupe a finalement changé de braquet. « L’entreprise n’envisagera un accord que s’il est financièrement raisonnable et met en place un mécanisme permettant de résoudre efficacement les éventuelles réclamations futures », a prévenu Werner Baumann.

Une annonce qui marque une rupture avec les dernières positions du groupe. Car, si Bayer avait toujours défendu le glyphosate depuis son rachat de Monsanto, il commençait quelque peu à plier sous la pression judiciaires. Selon le journal allemand Handelsblatt, il envisageait même d’arrêter, aux États-Unis, les ventes au détail du glyphosate tout en continuant de servir les agriculteurs. L’enjeu est de taille car le risque financier lié à ses plaintes est énorme pour Bayer, il est évalué entre 10 et 15 milliards d’euros.

Monsanto, un gouffre financier

« La tentative de rendre Bayer plus résilient et plus fort en achetant Monsanto a jusqu’à présent échoué », a déclaré à Reuters Ingo Speich, responsable de la gouvernance d’entreprise pour Deka Investment, l’un des principaux actionnaires de Bayer. Alors que Deka a voté en faveur de Baumann et du conseil de surveillance, il a déclaré : « Tant que Bayer ne pourra pas se libérer de ces poursuites, nous ne verrons probablement pas de reprise du cours de l’action ».

Depuis le rachat du géant des OGM pour 56 milliards d’euros, le cours de l’action de Bayer n’a cessé de chuter, tout comme sa capitalisation boursière. En avril 2019, le groupe allemand avait perdu plus de 30 milliards d’euros en Bourse ainsi que trois procès emblématiques dont les amendes cumulées représentent des centaines de millions d’euros.

L’article de Novethic est ici.

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Dans le Nord, un accident industriel a tué toute vie dans le fleuve l’Escaut

Un article de Reporterre, par Simon Henry, le 12/05/2020.

Mi-avril, près de Cambrai dans le Nord, environ 100.000 mètres cubes d’eaux de lavage de betteraves se sont déversées accidentellement dans le fleuve l’Escaut, entraînant la mort de milliers de poissons. Un désastre écologique qui ruine vingt ans d’efforts en faveur de la biodiversité.

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Le fleuve court de la Picardie jusqu’en Belgique en passant par Gand, Tournai ou Anvers, avant de se jeter dans les eaux néerlandaises de la mer du Nord.

Confinement oblige, le fleuve l’Escaut respirait enfin : la cadence des bateaux sur son lit est au ralenti, tout comme l’activité des usines qui le bordent. L’Escaut (de Schelde en néerlandais) n’était alors qu’un long fleuve tranquille de 355 kilomètres, s’écoulant de Gouy en Picardie jusqu’en Belgique en passant par Gand, Tournai ou Anvers, avant de se jeter dans les eaux néerlandaises de la mer du Nord. Un cours d’eau international méconnu il y a encore quelques semaines, jusqu’à ce qu’un accident de pollution majeur le place sous les feux des projecteurs.

Dans la nuit du 9 au 10 avril, à Escaudœuvres, près de Cambrai dans le Nord, la digue d’un bassin de décantation de la sucrerie Tereos a cédé. Près de 100.000 m3 d’eaux organiques, contenant les sédiments issus du lavage de betteraves, se sont échappées et une dizaine d’habitations aux alentours ont été inondées. Une grande quantité de l’eau a ruisselé jusque dans l’Escaut, à quelques centaines de mètres en aval de l’usine. Dès le lendemain, des poissons morts flottaient à la surface du fleuve, asphyxiés. Car si les matières organiques sont habituellement inoffensives, « en surabondance, leur dégradation provoque une consommation excessive d’oxygène dans l’eau et ainsi asphyxie tous les organismes vivant à proximité », explique sur son site l’Office français de la biodiversité.

La préfecture du Nord, l’autorité compétente en matière de pollution aérienne, terrestre ou maritime, n’a pas semblé maîtriser la situation. « Bien qu’une diminution d’oxygène avec l’apparition d’une mortalité piscicole ait pu être constatée dans les jours suivant l’accident, un retour progressif à un taux d’oxygène plus normal a été mesuré », indique-t-elle dans un communiqué publié deux semaines après les faits, le 24 avril. « Il n’y a donc pas eu d’alerte aux régions situées en aval, en particulier côté belge. »

La partie flamande a été plutôt épargnée grâce à l’alerte lancée par les autorités wallonnes

Audrey Lieval est cheffe de projet au syndicat mixte de l’Escaut (Symea), une structure coordonnant toutes les actions relatives à la ressource en eau du territoire de l’Escaut. Confinée et dans l’incapacité de se rendre sur place, elle se désole de n’avoir pas pu réagir à temps. «Je recevais au début des bribes d’informations, mais rien d’alarmant,jure-t-elle. Jusqu’au jour où mon homologue wallon m’a appelé pour m’annoncer que toute la faune avait péri de leur côté. J’étais catastrophée.» En aval du bassin et jusqu’en Wallonie, l’eau polluée et au taux d’oxygène proche de zéro a causé la mort de la quasi-totalité des espèces vivantes du fleuve, parmi lesquelles près de cent tonnes de poissons. Selon le biologiste Patrick Meire, qui a œuvré à l’opération de sauvetage express, « même si la pollution s’estompera naturellement, il faudra des années pour que la biodiversité se reforme dans les zones touchées ».

La partie flamande a en revanche été plutôt épargnée grâce à l’alerte lancée par les autorités wallonnes. « De Gand à Anvers, nous avons réussi à préserver environ 95 % des poissons », estime Patrick Meire. « Grâce à des pompes disséminées en divers endroits du fleuve, on a ajouté de l’oxygène dans l’eau, ça a été efficace. »

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L’accident provoqué par la sucrerie industrielle a asphyxié tous les organismes vivant à proximité.

Plusieurs plaintes ont été déposées dans ce dossier, notamment par les autorités wallonnes et diverses associations environnementales des deux côtés de la frontière. Soit contre X, soit contre Tereos directement. « Cet incident est loin d’être banal et il doit être considéré comme le plus gros incident écologique depuis vingt ans », fulmine Europe Écologie Les Verts (EELV) Hauts-de-France dans un communiqué publié le 25 avril. Le parti met en cause Tereos « dans un incident du même type [qui] s’est produit en février », soit deux mois plus tôt, et appelle les autorités à prendre de nouvelles mesures pour prévenir à l’avenir les risques d’accident de cette ampleur.

En attendant les résultats des enquêtes judiciaires lancées par le parquet de Cambrai et celui de Charleroi (Wallonie), Tereos considère dans un communiqué qu’« à ce stade, il est encore trop tôt pour établir de quelconques liens de causalité ». Tout en ajoutant « qu’en tant qu’entreprise citoyenne, elle assumera sa responsabilité si elle venait à être établie ».

Plus qu’un désastre écologique, cet accident de pollution donne surtout le sentiment d’un retour en arrière. Car l’Escaut ne s’est jamais distingué par la clarté de son eau. « Il est même plutôt d’une couleur marron chocolat assez repoussante », décrit Audrey Lieval, témoignant ainsi d’une pollution endémique. Laëtitia Deudon, géohistorienne de l’environnement, planche depuis cinq ans sur une thèse sur les aménagements et le paysage fluvial de l’Escaut du XIIe siècle à aujourd’hui. « D’une ressource énergétique et piscicole à la base, il est devenu un cloaque, surtout à partir du XIXe siècle, une période à partir de laquelle l’Escaut a été canalisé à plusieurs reprises jusqu’à son état de grand gabarit actuel », explique-t-elle. Le fleuve est alors devenu « un corridor industriel entraînant la polarisation des usines le long du cours d’eau ». Le récent épisode de pollution a un précédent : « En 1883, des rejets de matières organiques provenant de la sucrerie de Curgies et de la distillerie de Saultain ont été observés dans l’eau. » Ces pollutions avaient entraîné, là aussi, la mort des poissons malgré les mesures prises à l’époque par les autorités municipales, les commissions d’hygiène, de salubrité et la préfecture du Nord.

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La forte pollution s’explique aussi par la typologie du territoire et les aménagements qui en ont découlé. « C’est un fleuve de plaine à cours lent, assez marécageux, qui a une tendance naturelle à l’envasement et à l’encombrement du fait de la faible circulation de l’eau qui rend difficile le renouvellement des eaux sur la partie amont du fleuve », poursuit Laëtitia Deudon. « D’autre part, l’Escaut circule à travers un environnement qui s’est fortement anthropisé et urbanisé. » Il longe ou traverse de grandes villes comme Cambrai et Valenciennes en France, ou Tournai, Gand ou Anvers en Belgique. En plus des eaux usées des villes et des dépôts sauvages, le fleuve subit aussi « les résidus de pesticides du fait de l’agriculture très présente sur ses rives ». Par ailleurs, toutes les eaux (fossés, étangs, rivières, canaux) se jettent ensuite dans l’Escaut, « qui est l’exutoire final, ce qui tend à empirer la situation en cas de pollution ».

« Cette catastrophe a ruiné tous les efforts fournis depuis près de vingt ans »

« Il y a encore trente ans, l’Escaut était l’un des fleuves les plus pollués d’Europe. À tel point qu’il a été cité dans un livre japonais comme l’exemple à ne pas suivre », se souvient Arnould Lefébure. Il a participé en 1994 à la mise en place d’une commission internationale de l’Escaut, dont il était le secrétaire général jusqu’en août 2019. Une instance destinée en cas de problème à faciliter la gestion et la coordination des États par lesquels le fleuve circule. « En 1998, la commission a créé un système d’alerte en cas de pollution accidentelle pour faciliter la communication, précise M. Lefébure. Dans le département du Nord par exemple, la préfecture dispose d’un centre de crise disposé à nous alerter en cas de problème. Les protocoles sont nombreux et très stricts. »

Dès lors, comment expliquer pour le dernier accident en date, le raté des autorités françaises que les Belges accusent aujourd’hui de « négligence » ? « Il peut y avoir parfois des trous dans la raquette, la chaîne de diffusion des informations n’est pas toujours optimale », concède l’homme, sans toutefois dédouaner la préfecture du Nord qui n’a communiqué officiellement que deux semaines après les faits, le 24 avril.

« C’est triste parce que cette catastrophe a ruiné tous les efforts fournis depuis près de vingt ans », se désole Audrey Liéval, assurant que tout était mis en œuvre à travers de nombreuses initiatives locales pour permettre à l’Escaut de prétendre à la mention « bon potentiel 2027 », selon l’objectif écologique fixé par la directive cadre sur l’Eau (DCE) adoptée en 2000. Ces dernières années, le Conservatoire d’espaces naturels du Nord Pas-de Calais a par exemple mené en partenariat avec Valenciennes Métropole des actions de dépollution et de requalification des berges et friches industrielles de l’Escaut. Un renforcement des mesures de contrôle de la qualité des eaux a été pris à tous les échelons. 27.622 hectares de milieux humides (étangs, tourbières, canaux, marais, prairies et forêts humides, etc.) dans les vallées de la Scarpe et de l’Escaut ont aussi été labellisés Ramsar [1] en janvier 2020 pour endiguer leur dégradation ou leur disparition et préserver au mieux l’écosystème. Des initiatives qui ont, semble-t-il, porté leurs fruits, à en juger la richesse de la biodiversité décimée par le récent épisode de pollution. « Quand on observait l’Escaut, on ne se doutait pas qu’il y avait autant de vie, s’étonne encore Audrey Liéval. C’est finalement en repêchant ses poissons morts qu’on s’en est vraiment rendu compte. »

L’article de Reporterre est ici.

[1] La Convention relative aux zones humides d’importance internationale particulièrement comme habitats des oiseaux d’eau, appelée Convention de Ramsar, a été adoptée en 1971 à Ramsar, en Iran.

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Épandage des pesticides : le Conseil d’État fait reculer le ministère de l’Agriculture

Un article de Reporterre, le 12/05/2020.

Ce mardi 12 mai, le ministère de l’Agriculture s’est engagé à retirer de son site internet les textes qui incitaient à réduire les distances d’épandage au minimum. Cette décision a été annoncée lors d’une audience devant le Conseil d’État, qui examinait un recours de neuf associations contre le ministère déposé le 23 avril dernier.

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Photo d’illustration. Sébastien Jarry / MAXPPP

Elles contestaient le choix du ministère, en pleine crise du Covid-19 et en plein confinement, de permettre une réduction des distances de sécurité entre les épandages de pesticides et les habitations au minimum. Cette réduction ne devait être au départ autorisée, dans chaque département, qu’après une consultation du public permettant l’adoption d’une sorte de charte de bon voisinage. Mais les consultations pouvant être difficilement menées en temps de confinement, le ministère avait fait le choix d’en dispenser les agriculteurs jusqu’à fin juin. Ce contre quoi les associations ont protesté, en déposant deux recours devant le Conseil d’État, l’un dans l’urgence et l’autre sur le fond.

L’audience de ce mardi a donc permis aux associations d’obtenir le retrait des textes d’information du gouvernement sur le sujet, mais toute l’affaire n’est pas encore jugée : les associations demandaient également le retrait d’une instruction officielle permettant ces réductions de distance à peu de frais. « Nous saurons d’ici la fin de la semaine si le Conseil d’État accède ou non à nos attentes sur ce point », ont-elles indiqué.

L’article de Reporterre est ici.

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L’élevage intensif nous mène droit vers la prochaine pandémie

Un article de Courrier International, par Jonathan Safran Foer et Aaron S Gross (The Guardian – Londres), le 01/05/2020.

Continuer à élever des animaux comme on le fait aujourd’hui équivaut à un suicide collectif, s’insurge dans cette tribune l’écrivain Jonathan Safran Foer. C’est maintenant qu’il faut agir, au risque de voir éclater une crise infiniment plus grave que celle du Covid-19.

Poulailler géant

Il peut paraître malvenu, ou simplement impossible, de se concentrer sur autre chose que l’épreuve que nous traversons actuellement. Et puisque tirer les leçons de cette crise ne changera rien à nos souffrances actuelles, il est tentant de les reporter à plus tard. Mais c’est justement parce que nous sommes dans une situation de vulnérabilité douloureuse que certaines discussions ne peuvent pas attendre.

Imaginez : alors que votre pays pratique la distanciation sociale, le pays voisin réagit au Covid-19 en entassant ses citoyens dans des gymnases par dizaines de milliers. Imaginez que le gouvernement voisin les bourre de médicaments et pratique des modifications génétiques pour permettre à ses citoyens de maintenir leur productivité malgré ces conditions déplorables, même si cela a pour effet secondaire de bousiller leur système immunitaire. Et pour compléter cette vision dystopique, vos voisins divisent par dix le nombre de leurs médecins. De telles mesures feraient radicalement augmenter le taux de mortalité non seulement dans leur pays, mais aussi dans le vôtre. Les agents pathogènes ne respectent pas les frontières nationales. Ils ne sont ni espagnols ni chinois.

Circulation entre espèces

Les agents pathogènes ne respectent pas non plus la barrière des espèces. Le virus de la grippe et les coronavirus se déplacent sans problème entre les populations humaines et animales, tout comme ils passent facilement d’un pays à un autre. En matière de pandémies, il n’y a pas différence entre la santé animale et la santé humaine – pas plus qu’il n’y en a entre la santé coréenne et française. La distanciation sociale ne fonctionne que si tout le monde la pratique, et ce “tout le monde” inclut les animaux.

La viande que nous mangeons aujourd’hui provient en grande majorité d’animaux au patrimoine génétique uniforme, qui sont immunodéprimés et régulièrement placés sous traitement médicamenteux. Ils s’entassent par dizaines de milliers dans des bâtiments ou empilés dans des cages – même si l’étiquette de la viande prétend le contraire.

Nids à virus

Nous ne savons pas encore tout de l’histoire de l’apparition du Sars-CoV-2, cette souche particulière de coronavirus qui nous menace aujourd’hui. Mais si l’on considère les récentes menaces de pandémie de grippe à virus tels que le H1N1 (grippe porcine) ou le H5N1 (grippe aviaire), il n’y a aucune ambiguïté : ces virus se sont développés dans des élevages industriels de poulets et de porcs. Les analyses génétiques ont montré que des constituants essentiels du H1N1 sont issus d’un virus circulant dans les élevages de porcs d’Amérique du Nord. Mais ce sont les exploitations avicoles qui sont apparemment les meilleurs laboratoires de création de virus.

C’est dans les élevages industriels de poulets que nous avons le plus souvent trouvé des virus ayant muté et étant passé des animaux aux humains (ce que les scientifiques appellent une “cassure antigénique”). […]

La suite de l’article, réservée aux abonnés, est ici.

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L’agroforesterie pour restaurer un écosystème vertueux dans les champs… avec le retour des arbres et des haies

Un article de France Info, le 02/05/2020.

« L’agroforesterie désigne les pratiques, nouvelles ou historiques, associant arbres, cultures et/ou animaux sur une même parcelle agricole, en bordure ou en plein champ », selon l’Association française d’agroforesterie. Bonne nouvelle, les arbres et les haies reviennent dans les champs.

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Le mouvement est encore timide, mais devant l’urgence, quelques paysans s’y sont convertis. Comme Anne-Catherine et Nicolas Petit, dont la ferme dans le Gers est aujourd’hui devenue une référence dans le domaine. Le couple a quitté la ville en 2001 pour s’installer sur une parcelle qui était un désert végétal : « C’est comme ça qu’on a trouvé notre ferme au départ, c’est-à-dire sans arbres, ni haies, avec un travail dans le sens de la pente, plus de végétation… explique ce néo-rural diplômé d’une école de commerce au magazine « 13h15 le samedi » (replay). Nous, on voulait travailler en bio et être éleveurs, redonner de la vie et de la biodiversité. On a planté 8 000 arbres en dix-huit ans. Le résultat montre les signes d’une amélioration et d’un bien-être. »

« L’arbre est un hébergeur de biodiversité »

Les arbres sont plantés en ligne dans les champs cultivés pour laisser passer les tracteurs et autres machines agricoles. Quand il prépare ses sols pour l’hiver, le paysan n’emploie pas de pesticides et ne laboure pas. Juste un grattage en surface pour couper les mauvaises herbes qui vont sécher au soleil d’automne et ensuite nourrir la terre. « L’arbre est un hébergeur de biodiversité. Au cœur de la parcelle, on va ainsi planter un support qui va permettre aux insectes et à une certaine faune de venir se nourrir, s’abriter et se reproduire », développe-t-il.

« Au lieu d’avoir l’arbre sur le bord du champ, on l’a au cœur de la parcelle car il est aussi un fertilisateur, poursuit Nicolas Petit. A l’automne, les feuilles tombent pour venir fertiliser les sols. Au niveau de leur perméabilité, le système racinaire va créer une porosité. La pluie va pénétrer dans  le sol. Dans les systèmes avec des tracteurs un peu lourds, les sols sont tassés et glissants. Donc, la matière organique de la partie supérieure, la plus riche et la plus importante, a tendance à être lessivée en hiver. Avec les arbres agroforestiers, les couverts végétaux et l’absence de produits intrants, je suis sûr que je soigne mon sol. J’en suis certain. »

L’article et la vidéo de France Info sont ici.

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Le Coronavirus a des effets très positifs sur la pollution de l’air due au trafic routier

Un article de Novethic, par Concepcion Alvarez, le 28/04/2020.

Jamais l’air n’aura été aussi pur. En tout cas pour ce qui est de la pollution atmosphérique liée au trafic routier et aux centrales thermiques. Plusieurs études révèlent des baisses de concentration d’oxydes d’azote pouvant aller jusqu’à 70 % à Paris. En revanche, la pollution aux particules fines n’est pas impactée par le confinement car elle est davantage liée aux épandages agricoles, au chauffage et à des températures particulièrement douces.

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La pollution de l’air due au trafic routier a considérablement diminué dans les grandes villes en raison du confinement.

Les concentrations d’azote (NO2 et NOx), produit principalement par les véhicules et les centrales thermiques, ont chuté dans les grandes villes françaises et européennes en raison du confinement imposé par la crise du Coronavirus. A Paris, les émissions de dioxyde d’azote (NO2) ont ainsi baissé de 54 % en un mois, comparé à la même période l’année dernière. Si on prend en compte l’ensemble des oxydes d’azote (NOx), émis aux deux tiers par le trafic routier, la chute atteint même 70 % dans la capitale. Cette baisse est également constatée à Nantes, Strasbourg ou encore dans l’agglomération grenobloise.

« L’indicateur NOx est plus stable que le simple NO2 en période de variation importante de température », explique Atmo France dans son étude (1). Mais que l’on prenne l’un ou l’autre des indicateurs, la baisse est quoiqu’il en soit « remarquable », relève Simonetta Cheli, experte de l’Agence spatiale européenne. « Du jamais vu en 40 ans de mesure pour Airparif, avec une telle ampleur et autant de stations », confirme l’association de surveillance de la qualité de l’air en Ile-de-France.

Pas d’impact sur les particules fines

En revanche, « l’impact du confinement est resté moins visible sur les particules (PM10 et PM2,5), avec des niveaux toujours soutenus certains jours », relève Airparif. Le seuil d’alerte a ainsi été franchi le 28 mars dernier pour les PM2,5, principalement à cause de l’agriculture. La diminution du trafic routier ne permet donc pas toujours de compenser ces émissions qui sont liées aux épandages agricoles, au chauffage résidentiel et à des température plus douces.

« Une météo printanière (…) a favorisé les réactions chimiques et la formation de particules », explique Airparif. Mais « avec des conditions de trafic normales, les niveaux auraient été plus conséquents et plus problématiques du fait du rôle aggravant joué par la pollution de l’air dans l’épidémie de Covid-19″, souligne l’organisme.  

Selon une récente étude parue dans la revue de la Société européenne de cardiologie, la pollution de l’air est responsable de 8,8 millions de décès prématurés par an dans le monde, dont 68 000 dans l’Union européenne. A titre de comparaison, la crise du Coronavirus a tué plus de 200 000 personnes dans le monde dont la moitié sur le territoire européen.

« Nos résultats montrent qu’il existe une « pandémie de pollution de l’air’ », commente Thomas Münzel, responsable de cette recherche. Or, « les deux tiers environ des décès prématurés sont imputables à la pollution d’origine humaine, principalement due à l’utilisation de combustibles fossiles (…) et sont potentiellement évitables », conclut-il.

L’article de Novethic est ici.

(1) Voir l’étude d’Atmo France

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L’éducation à la nature est primordiale, finançons-la

Un article de Reporterre, par Dimitri de Boissieu, le 27/04/2020.

Le confinement nous rappelle à quel point nous avons besoin des sensations que nous offre le monde naturel. Pourquoi ne pas en profiter pour impulser une vaste politique d’éducation à la nature ? C’est ce que propose l’auteur de cette tribune, en suggérant notamment l’instauration d’une taxe spécifique. Pour notre plus grand bien, et celui de la transition écologique.

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La crise sanitaire que nous vivons aujourd’hui prouve que toutes les activités d’intérêt général, comme la culture, l’éducation, l’action sociale et l’environnement sont totalement indispensables à notre bien-vivre. Néanmoins, un des axes totalement négligés depuis plusieurs décennies par les pouvoirs publics est l’éducation à la nature et à l’environnement pour tous et toutes, à tous les âges de la vie.

De nombreux travaux de pédagogues, de scientifiques et de journalistes ont pourtant déjà montré qu’une fréquentation régulière de la nature est indispensable au bien-être des humains. En témoignent les écrits de Louis Espinassous, du réseau École et nature, de Sarah Wauquiez, de Matthieu Chéreau et Moïna Fauchier-Delavigne, de Richard Louv ou d’Anne-Caroline Prévot.

Le contact avec le dehors permet aux enfants et adultes de se sentir bien, d’avoir confiance en eux, de gagner en autonomie et en créativité, d’être en meilleure santé et moins stressés. Il développe le goût de la coopération avec les autres et une certaine empathie envers la biodiversité et la planète Terre. L’éducation à la nature permet aussi l’acquisition de connaissances sur le monde vivant et l’établissement d’un lien affectif fort entre les personnes et leur environnement. Elle transforme ainsi notre rapport au monde et construit une société plus respectueuse des écosystèmes et des cycles naturels.

Les enfants reçoivent des enseignements sur le développement durable assis devant des écrans

Malgré ces précieuses potentialités de l’éducation à la nature, depuis une vingtaine d’années, le nombre et la durée des classes de découverte et des séjours de vacances nature ne cessent de diminuer, comme le prouvent les travaux de la « Dynamique sortir » du réseau École et Nature [1]. La peur du risque, les contraintes réglementaires et administratives, la prégnance des écrans dans la vie quotidienne, la société consumériste et le manque de budgets alloués aux sorties et séjours nature éloignent de plus en plus les enfants et adolescents du dehors.

Alors que, dans de nombreux pays d’Europe, les jardins d’enfants de plein air, les écoles en forêt et le réensauvagement des cours d’école sont monnaie courante, ils restent en France le plus souvent à l’initiative militante de quelques enseignants et animateurs isolés. Un inquiétant « syndrome du manque de nature » se développe donc dans la population, aujourd’hui très certainement amplifié par le confinement.

Le plan biodiversité du ministère de la Transition écologique et solidaire annonçait en 2018 l’objectif de « promouvoir le développement de séjours nature au collège ». Mais, dans les faits, rien ne bouge. La circulaire « transition écologique » de 2019 de l’Éducation nationale n’abordait, quant à elle, même pas la notion de besoin de nature. Alors que, dans les médias, on vante les bienfaits de la reconnexion à la nature, des bains de forêt ou de la sylvothérapie, les enfants de nos villes et campagnes restent du matin au soir cloîtrés entre quatre murs. Ils sont assignés à recevoir des enseignements sur le développement durable assis sur des chaises et devant des écrans. Pour éviter de créer une société atrophiée et afin de réussir la transition écologique, il devient donc urgent de développer massivement une politique d’éducation à la nature sur tout le territoire.

Pourtant, bien que la crise sanitaire ait permis une certaine prise de conscience sur la nécessité de construire rapidement une société de justice sociale et environnementale, l’actualité nous montre que les tenants du pouvoir utilisent plutôt le prétexte de la relance économique pour asseoir l’ordre néolibéral, en prenant précipitamment des décisions anti-environnementales [2].

Le changement ne sera donc envisageable que si un solide rapport de force social s’établit dans le pays. En cette période inédite, les forces progressistes se doivent d’être tenaces et créatives. Comme nous y invite Bruno Latour, il est utile de lister les activités que nous souhaitons diminuer ou développer. L’an 01 est de retour : soyons réalistes, demandons l’impossible !

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Le nombre et la durée des classes de découverte et des séjours de vacances nature ne cessent de diminuer.

Une taxe de la publicité pourrait financer l’éducation à la nature

En 1976 a été intelligemment créée la taxe départementale des espaces naturels sensibles (TDENS). Renommée aujourd’hui taxe d’aménagement, elle permet aux collectivités locales de taxer à hauteur de 1 à 5 % toutes les opérations soumises à autorisation d’urbanisme — notamment les nouvelles constructions. Ces fonds publics sont affectés à l’acquisition foncière d’espaces naturels, dans le but de les protéger, de les gérer et de les ouvrir au public. Il s’agit en quelque sorte d’appliquer le principe pollueur-payeur au processus d’urbanisation. En construisant une maison, on artificialise durablement les sols, au détriment de la nature ordinaire. On paye donc pour compenser cette dégradation. Entre 2001 et 2010, la TDENS a permis de générer à l’échelle du pays un budget moyen annuel de 167 millions d’euros [3].

Cette logique pourrait tout à fait s’appliquer au financement de l’éducation à la nature en « prenant l’argent où il se trouve », comme le propose la réalisatrice Coline Serreau dans son message « Le monde qui marchait sur la tête est en train de remettre ses idées à l’endroit ». Certains « pollueurs de l’enfance » sont facilement identifiables : les publicitaires dégradent en toute impunité les cerveaux de nos jeunes générations. En les bombardant de publicités dès le plus jeune âge, les marchands manipulent les enfants pour les transformer en « prescripteurs d’achats », notamment d’aliments trop gras et trop sucrés. La publicité développe par ailleurs chez eux un sentiment de frustration. Surtout, elle leur assigne durablement un rôle de consommateur et ancre en eux les stéréotypes de genre.

Une loi interdisant la publicité commerciale dans les programmes jeunesse de la télévision publique a été promulguée fin 2016. C’est une avancée importante [4]. Mais qu’en est-il de la publicité diffusée sur les chaînes de télévision privées, sur les panneaux publicitaires, dans la presse jeunesse et sur Internet ? Il faut continuer à militer pour l’interdire ou la limiter. De manière plus pragmatique, une taxe pourrait aussi tenter de compenser, a minima, l’influence néfaste de la publicité sur l’éducation des enfants.

En France, les recettes publicitaires augmentent constamment depuis une décennie, atteignant, selon le Baromètre unifié du marché publicitaire la valeur de quinze milliards d’euros en 2019. En imaginant qu’un quart des publicités soit à destination des 0-18 ans et en appliquant aux marques une taxe de seulement 1 % sur leurs investissements publicitaires, la collectivité pourrait ainsi bénéficier d’un budget annuel de 37,5 millions d’euros.

Enfin de quoi envisager le développement d’une ambitieuse politique d’éducation à la nature… Afin que les enfants puissent à nouveau courir dans les prés, et que s’accélère la transformation écosociale de notre monde.

L’article de Reporterre est ici.

[1] Animée par le réseau École et nature, la Dynamique sortir rassemble des acteurs de l’éducation à l’environnement, de l’Éducation nationale, de l’Éducation populaire, des sports de nature et du plein air souhaitant promouvoir l’éducation dans la nature.

[2] Voir notamment l’adoption du projet de loi de finances rectificative, qui permet à l’État, par le plan de relance, de financer des multinationales polluantes sans aucune conditionnalité environnementale, et le décret autorisant les préfets à déroger à certaines normes environnementales.

[3] Selon le ministère de l’Écologie, du développement durable, des transports et du logement (2011), tel que présenté dans le bilan des recettes et des emplois de la taxe départementale des espaces naturels sensibles (TDENS), années 2001-2010, situation au 31 décembre 2010, 19 p..

[4] Acquise grâce à la mobilisation du MAN (Mouvement pour une alternative non-violente), du RAP (Résistance à l’agression publicitaire) et de plusieurs sénateurs.

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Nicolas Hulot livre ses propositions pour un « monde d’après » plus solidaire

Un article de Novethic, par Marina Fabre, le 07/05/2020.

Le temps du changement est venu. Dans une tribune, Nicolas Hulot, ancien ministre de la Transition écologique, appelle à se délester du « monde d’avant » mis à l’arrêt par le Covid-19 pour construire un après « radicalement différent ». Il donne le cap à travers cinq propositions qui sont les « cinq premières marches vers un nouveau monde ». Et l’ancien ministre n’est pas isolé, tant les appels se multiplient en ce sens.

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L’ancien ministre aspire à guider la France vers « une troisième voie entre l’autarcie et le néolibéralisme ». Photo François Mori – AFP

La démission de l’ancien ministre de la Transition écologique avait provoqué, il y a deux ans, un véritable sursaut écologique chez bon nombre de citoyens, via notamment, l’Affaire du siècle, pétition la plus signée de l’histoire, et les marches pour le climat. À l’heure où la France doit engager sa sortie de crise du Covid-19, Nicolas Hulot tente de nouveau de proposer un cap. « Le monde d’après sera radicalement différent de celui d’aujourd’hui, et il le sera de gré ou de force. On ne pourra plus prendre l’avion comme avant, plus avoir un produit par Amazon du bout du monde en 24 heures », prévient-il dans un entretien au Monde.

L’ancien ministre a ainsi publié cinq mesures politiques concrètes, les « cinq premières marches vers un nouveau monde », écrit la Fondation qui porte son nom. Il appelle à une Europe des solidarités via la création d’un fonds européen de relance et de transformation écologique de « plusieurs milliers de milliards d’euros ». Nicolas Hulot demande également de financer la transition dans les collectivités territoriales et juge que « le temps est venu de passer du libre-échange au juste échange en mettant fin aux accords de libre-échange par l’Union européenne ».

Enfin, Nicolas Hulot appelle à la relocalisation en France et en Europe de certaines activités. Surtout, il demande un engagement écologique explicite des acteurs économiques qui bénéficieraient d’aides financières. L’ancien ministre aspire ainsi à guider la France vers « une troisième voie entre l’autarcie et le néolibéralisme » et espère que la crise sanitaire va « éveiller les esprits, y compris d’Emmanuel Macron ».

Une mobilisation massive 

Et dans cette démarche, il n’est pas isolé. Dans une tribune publiée le 6 mai dans Le Monde, 200 artistes et scientifiques, de Madonna à Cate Blanchett en passant par Juliette Binoche ou Marion Cotillard, disent « non à un retour à la normale ». « La transformation radicale qui s’impose – à tous les niveaux – exige audace et courage. Elle n’aura pas lieu sans un engagement massif et déterminé. À quand les actes ? C’est une question de survie, autant que de dignité et de cohérence », écrivent-ils.

Et justement, pour pousser les décideurs politiques aux actes, ce ne sont pas moins de 70 organisations qui ont lancé ce 7 mai un appel à une « reconstruction écologique, sociale et sanitaire ». Une coalition éclectique et large, rassemblant à la fois Emmaüs, WWF, The Shift Project ou encore Entrepreneurs d’Avenir, qui a pour ambition de créer une mobilisation telle que l’Affaire du siècle avait engendré. Le but est de rassembler un maximum de citoyens pour interpeller les élus.

L’occasion ou jamais de changer de cap

« On est à un carrefour historique en termes de prises de décisions », avance Véronique Andrieu, directrice générale du WWF. « Il est vraiment temps de peser et d’influencer ces décisions », croit-elle. Cette démarche est issue, à l’origine, de mouvements de jeunes, dont le collectif des étudiants de grandes écoles « Pour un réveil écologique », qui ont appelé les autres organisations à les rejoindre. Ils ont réussi à rallier plusieurs associations qui défendent l’écologie, la biodiversité, la démocratie, le partage des richesses mais aussi le service hospitalier. En temps de crise du Covid-19, leur présence était cruciale.

« Aujourd’hui les effets du changement climatique impactent directement la santé environnementale et la population. Nous observons de nouvelles pathologies émergentes liées au changement climatique. Ce qui nous semble important c’est de garantir la pérennité des activités essentielles du service public, de l’éducation au système de santé », appelle Félix Ledoux, président de la Fédération Nationale des Étudiants en soins infirmiers. Tous espèrent qu’au-delà de leurs mots, repris par les élus, parfois même par les grandes organisations patronales, déboucheront des actes à la hauteur de l’urgence actuelle.

L’article de Novethic est ici.

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Pays-de-la-Loire : destruction illégale de bocages pendant le confinement

Un article de La Relève et La Peste, par Laurie Debove, le 22/04/2020.

FNE et la LPO Pays de la Loire dénoncent des « pratiques illégales et irresponsables » qui risquent de causer des dégâts énormes sur la biodiversité, alors que le printemps est la période de l’année où se passent nidification, pontes, couvées et croissance des petits.

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Au Pays-de-la-Loire, France Nature Environnement et la Ligue de Protection des Oiseaux dénoncent les destructions de haies qui sont commises en période d’interdiction printanière et de confinement. Pour les deux ONG, cette destruction est à contre-courant de ce que nous confirme la crise sanitaire actuelle : l’importance de préserver et régénérer la biodiversité.

Destruction illégale de haies bocagères

Avec la plateforme de vigilance citoyenne « Sentinelles de la Nature », France Nature Environnement Pays-de-la-Loire a reçu de nombreux signalements de destruction de haies et de brûlage du bois vert issu de ces coupes. En cause, les conditions hivernales qui n’ont pas permis de réaliser un grand nombre de chantiers, et leur relance avec l’arrivée du printemps.

Problème : cette destruction se fait en illégalité au regard de la législation en cours. En effet, les tailles de haies en milieu agricole sont interdites du 1er avril au 31 juillet, pour respecter la nidification et l’essor de la biodiversité, tandis que le brûlage des déchets verts est interdit pour ne pas aggraver la pollution de l’air.

« La haie joue pourtant plusieurs rôles importants pour l’environnement : filtre naturel des eaux polluées par les activités de l’homme, rôle d’éponge permettant de stocker l’eau dans les terres agricoles, rôle de brise vent et créateur de micro-climats favorables à l’agriculture de polyculture élevage ; rôles pour la biodiversité : espace refuge et d’alimentation pour la faune, lieu de nidification pour les oiseaux et de gîte pour les chauve-souris et composante importante du puits de carbone face au changement climatique. » rappelle François Halligon, président de la LPO Pays de la Loire

FNE et la LPO Pays de la Loire dénoncent des « pratiques illégales et irresponsables » qui risquent de causer des dégâts énormes sur la biodiversité, alors que le printemps est la période de l’année où se passent nidification, pontes, couvées et croissance des petits.

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La Ferme Ursule, en Vendée, a choisi de conserver et entretenir les bocages – Crédit : Laurie Debove

Le bocage, une espèce en voie de disparition

Lors de l’industrialisation de l’agriculture, à la fin de la deuxième guerre mondiale, le «remembrement» a détruit plus de 600 000 km de haies bocagères qui délimitaient les parcelles paysannes. Pour créer de grands champs accessibles aux tracteurs, les bocages ont été systématiquement éradiqués des campagnes françaises, arrachant des arbres par milliers, souvent contre l’avis de la population.

Au Pays-de-la-Loire mais aussi dans d’autres régions françaises, de nombreuses initiatives émergent pour redonner leur place aux haies dans le paysage agricole. Les agriculteurs sont souvent partagés entre les bénéfices des bocages dans les champs, et le travail d’entretien qu’ils réclament. Alain Quéro, éleveur laitier, a choisi de replanter plus de 1500m de haies épaisses sur sa ferme.

« Avant il n’y avait plus d’arbres, j’entendais pas un moineau, aujourd’hui j’ai un concert de gazouillement tous les jours. Ça coupe le vent, les rendements ne sont pas moins bons, les insectes qui mangent les pucerons ont un abri et je commence même à avoir du bois pour me chauffer. » énumère-t-il pour l’AFP.

Les bocages sont ainsi adaptés pour limiter l’érosion des sols causée par le vent. Cependant, les politiques agricoles menées en faveur d’une agriculture industrielle mécanisée vont à l’encontre des petites exploitations agroécologiques dans lesquelles les bocages ont toute leur place.

Une question reste en suspens : les bocages vont-ils retrouver leur juste place dans nos campagnes ou périr sous les assauts de l’agrandissement des exploitations agricoles industrielles ?

L’article de La Relève et La Peste est ici.

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Belgique : l’AFSCA a saisi 778 tonnes de pesticides importés depuis le port d’Anvers

Un article de L’avenir, le 28/04/2020.

L’Unité Nationale d’Enquête (UNE) de l’AFSCA (Agence Fédérale pour la Sécurité de la Chaîne Alimentaire) a saisi différents lots de pesticides non conformes ou suspects importés via le port d’Anvers, indique l’Agence dans un communiqué.

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BELGA

La saisie a été réalisée aux mois de mars et avril dans le cadre d’une enquête menée en coopération avec le parquet d’Anvers. Les produits concernés, en provenance d’Inde ou de Chine, étaient destinés au marché professionnel européen. La quantité totale des produits saisis aujourd’hui est de 778 tonnes.

Les analyses d’échantillons et de risques réalisées au cours de l’enquête sur la présence de substances non conformes ou suspectes dans des produits phytopharmaceutiques, herbicides et fongicides, destinés à des usages professionnels, ont démontré que ces produits ne présentaient aucun risque pour le consommateur. Il reste cependant «inacceptable que des produits illégaux ou non conformes soient mis sur le marché», souligne l’Afsca dans son communiqué.

Pesticides

Précédemment, l’enquête menée par l’UNE avait déjà abouti au retrait et au rappel de produits ainsi qu’à la suspension d’autorisation de mise sur le marché d’herbicides à base de bentazone (substance active) et de fongicides à base de captan tech (substance active), destinés à un usage professionnel. Bien que ces produits phytopharmaceutiques soient autorisés, leur teneur (et/ou la présence d’impuretés pertinentes) dans certains produits à usage professionnel n’était pas conforme à la législation européenne. Le SPF Santé publique, Sécurité de la chaîne alimentaire et Environnement a donc immédiatement procédé à la suspension de l’autorisation de mise sur le marché de ces produits.

L’enquête a par ailleurs démontré que des substances actives importées par la même société, via le port d’Anvers, étaient également non conformes. De plus, certains documents fournis n’étaient pas fiables.

Des perquisitions ont été réalisées le 13 mars 2020 sur l’ordre du juge d’instruction sur trois sites par la police fédérale judiciaire d’Anvers – Team Environnement, en collaboration avec l’UNE. Un blocage complet de tous les produits de la société concernée a été imposé par l’Afsca lors de ces opérations. La quantité totale des produits saisis aujourd’hui est de 778 tonnes.

L’enquête est toujours en cours et il est possible qu’un certain nombre de lots actuellement sous saisie puissent être débloqués s’il est démontré qu’ils répondent à l’ensemble des normes en vigueur.

L’article de L’avenir est ici.

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Onze des douze années les plus chaudes ont eu lieu après 2000

Un article de Reporterre, le 22/04/2020.

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Mercredi 22 avril, le service climatologique européen Copernicus a publié un rapport annuel complet sur le climat. En Europe, 11 des 12 années les plus chaudes ont eu lieu depuis 2000. L’année la plus chaude enregistrée pour l’Europe, en 2019, a été suivie de près par 2014, 2015 et 2018.

Voici en outre les principales conclusions pour l’année 2019 :

  • Trois périodes exceptionnellement chaudes sont survenues en février, juin et juillet, entraînant des températures record en France et en Allemagne notamment ;
  • Le nombre d’heures d’ensoleillement en Europe a atteint son plus haut niveau depuis au moins 1983, bien qu’il y ait eu quelques variations régionales ;
  • L’un des mois de novembre les plus humides jamais enregistrés a apporté des précipitations jusqu’à quatre fois supérieures à la normale en Europe occidentale et du sud ;
  • L’Arctique européen est resté relativement plus froid que ces dernières années, mais la canicule estivale a provoqué une fonte record de la glace de surface au Groenland.

L’article de Reporterre est ici.

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Le Covid-19, un prétexte pour épandre au plus près des riverains : nous saisissons la justice

Un communiqué de FNE, le 23/04/2020.

Sous le prétexte que le Covid-19 empêcherait les consultations du public, le Gouvernement recule de nouveau en accordant des réductions supplémentaires pour épandre les pesticides à des distances encore plus faibles des habitations que celles pourtant insuffisamment protectrices imposées en décembre. Afin de protéger les riverains, nous déposons, avec 8 ONG, deux recours devant le Conseil d’État contre cette décision inadmissible.

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Contexte : des distances d’épandage à proximité des habitations déjà très faibles

Le Gouvernement avait organisé durant l’automne 2019 une parodie de consultation nationale aboutissant à des distances d’épandage de pesticides à proximité des habitations, ridiculement faibles. Avec plusieurs organisations, nous avions alors  dénoncé et attaqué ces mesures devant le Conseil d’État. Mais voilà que profitant du Covid-19, le Gouvernement a adopté une instruction et communiqué sur la possibilité de réductions supplémentaires. Ces dérogations permettent de passer outre le processus de concertation à l’initiative des utilisateurs de pesticides, et l’obligation faite dans la Loi de respecter des zones sans traitement en l’absence de chartes. Chartes dont la démarche de concertation et le contenu doivent être approuvés par les préfets.

En clair, pas besoin de concertations autour de chartes, ni d’approbations préfectorales : il suffit d’un simple projet de charte pour pouvoir pulvériser des produits toxiques à des distances encore plus faibles des habitations et des riverains qui y sont confinés, et ce jusque fin juin, période durant laquelle les épandages sont nombreux.

Cette situation est d’autant plus inquiétante qu’une exposition chronique à la pollution de l’air est considérée par ATMO-France comme un facteur aggravant les conséquences d’une infection par le Covid-19. Il serait justifié, dans de telles circonstances sanitaires, d’éloigner les pulvérisations de pesticides des domiciles des riverains des zones cultivées. Malgré la forte mobilisation de collectifs, d’associations et de citoyens qui ont interpellé largement les préfets sur ce sujet depuis plusieurs jours, aucune annonce de mesures visant à éloigner les épandages n’a été faite. Au contraire, dans de nombreux cas, les distances sont fortement réduites. En témoignent les chartes proposées actuellement en Bretagne ou dans le Nord, ou encore dans les Pays de Loire dans 5 départements : Loire-Atlantique, Maine et Loire, Mayenne, Sarthe et Vendée. Des chartes ont été déposées par les syndicats agricoles, divisant les distances nationales par quasiment 2 voire 3 selon les cultures, sans concertation réelle.

Des actions juridiques indispensables

Parce que le Gouvernement refuse toujours de répondre à nos organisations sur ce sujet, que les conditions de dialogue et de participation de nos organisations ne sont pas réunies pour réellement atteindre le “mieux-vivre ensemble”, et que les Préfets font également la sourde oreille, nous avons décidé d’engager deux recours, l’un sur le fond devant le Conseil d’État et l’autre en référé suspension, contre :

  • L’instruction technique DGAL/SDQSPV/2020-87 du 3 février 2020 (N° NOR AGRG2003727C),
  • Le communiqué de presse « Distances de sécurité pour les traitements phytopharmaceutiques à proximité des habitations », publié le 30 mars 2020 sur le site internet du Ministère de l’agriculture,
  • La note « Éléments de mise en œuvre », dans sa 4e version du 30 mars 2020, mise en ligne sur le site internet du Ministère de l’agriculture.

Lire le dossier de presse complet

Afin de protéger la santé et les conditions de vie des citoyen.es confiné.es en milieu rural, la période actuelle commanderait que les questions de santé publique deviennent de réelles priorités. Nous entendons tout mettre en œuvre pour que soit mis fin aux mesures dérogatoires permettant aux utilisateurs de pesticides d’épandre leurs produits dangereux aux pieds des habitations avant que de réelles concertations aient lieu dans les territoires. Rappelons que les populations confinées dans ces zones sont considérées par la réglementation européenne comme des groupes vulnérables, car exposées sur le long terme à petites doses aux produits, et que les études scientifiques démontrent un risque accru de développer des pathologies lourdes du fait de ces expositions. A la justice d’entendre nos arguments ainsi que nos attentes et celles de populations fragiles concernées.

Les ONG impliquées : AMLP / Collectif de Soutien aux victimes des pesticides de l’Ouest / Eau et Rivières de Bretagne / France Nature Environnement / Générations Futures / LPO / UFC-Que choisir / Union syndicale Solidaires : sont requérantes. Le Collectif Victimes des Pesticides des Hauts de France est en soutien car organisation non constituée.

Le communiqué de FNE est ici.

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